[47] ἐκτὸς εἶ τοῦ μέλλειν ἀποθνῄσκειν (47a) αὔριον, καὶ οὐκ ἂν σὲ
παρακρούοι ἡ παροῦσα συμφορά· σκόπει δή - οὐχ ἱκανῶς δοκεῖ σοι λέγεσθαι ὅτι οὐ
πάσας χρὴ τὰς δόξας τῶν ἀνθρώπων τιμᾶν ἀλλὰ τὰς μέν, τὰς δ᾽ οὔ, οὐδὲ πάντων ἀλλὰ
τῶν μέν, τῶν δ᾽ οὔ; Τί φῄς; Ταῦτα οὐχὶ καλῶς λέγεται;
(Κρίτων) Καλῶς.
(Σωκράτης) Οὐκοῦν τὰς μὲν χρηστὰς τιμᾶν, τὰς δὲ πονηρὰς μή;
(Κρίτων) Ναί.
(Σωκράτης) Χρησταὶ δὲ οὐχ αἱ τῶν φρονίμων, πονηραὶ δὲ αἱ τῶν ἀφρόνων;
(Κρίτων) Πῶς δ᾽ οὔ;
(Σωκράτης)
Φέρε δή, πῶς αὖ τὰ τοιαῦτα ἐλέγετο; Γυμναζόμενος (47b) ἀνὴρ καὶ τοῦτο πράττων
πότερον παντὸς ἀνδρὸς ἐπαίνῳ καὶ ψόγῳ καὶ δόξῃ τὸν νοῦν προσέχει, ἢ ἑνὸς μόνου
ἐκείνου ὃς ἂν τυγχάνῃ ἰατρὸς ἢ παιδοτρίβης ὤν;
(Κρίτων) Ἑνὸς μόνου.
(Σωκράτης)
Οὐκοῦν φοβεῖσθαι χρὴ τοὺς ψόγους καὶ ἀσπάζεσθαι τοὺς ἐπαίνους τοὺς τοῦ ἑνὸς
ἐκείνου ἀλλὰ μὴ τοὺς τῶν πολλῶν.
(Κρίτων) Δῆλα δή.
(Σωκράτης)
Ταύτῃ ἄρα αὐτῷ πρακτέον καὶ γυμναστέον καὶ ἐδεστέον γε καὶ ποτέον, ᾗ ἂν τῷ ἑνὶ
δοκῇ, τῷ ἐπιστάτῃ καὶ ἐπαΐοντι, μᾶλλον ἢ ᾗ σύμπασι τοῖς ἄλλοις.
(Κρίτων) Ἔστι ταῦτα.
(Σωκράτης)
(47c) Εἶεν. Ἀπειθήσας δὲ τῷ ἑνὶ καὶ ἀτιμάσας αὐτοῦ τὴν δόξαν καὶ τοὺς ἐπαίνους,
τιμήσας δὲ τοὺς τῶν πολλῶν (λόγους) καὶ μηδὲν ἐπαϊόντων, ἆρα οὐδὲν κακὸν
πείσεται;
(Κρίτων) Πῶς γὰρ οὔ;
(Σωκράτης)
Τί δ᾽ ἔστι τὸ κακὸν τοῦτο, καὶ ποῖ τείνει, καὶ εἰς τί τῶν τοῦ ἀπειθοῦντος;
(Κρίτων) Δῆλον ὅτι εἰς τὸ σῶμα· τοῦτο γὰρ διόλλυσι.
(Σωκράτης)
Καλῶς λέγεις. Οὐκοῦν καὶ τἆλλα, ὦ Κρίτων, οὕτως, ἵνα μὴ πάντα διΐωμεν, καὶ δὴ
καὶ περὶ τῶν δικαίων καὶ ἀδίκων καὶ αἰσχρῶν καὶ καλῶν καὶ ἀγαθῶν καὶ κακῶν, περὶ
ὧν νῦν ἡ βουλὴ ἡμῖν ἐστιν, πότερον τῇ τῶν πολλῶν δόξῃ (47d) δεῖ ἡμᾶς ἕπεσθαι καὶ
φοβεῖσθαι αὐτὴν ἢ τῇ τοῦ ἑνός, εἴ τίς ἐστιν ἐπαΐων, ὃν δεῖ καὶ αἰσχύνεσθαι καὶ
φοβεῖσθαι μᾶλλον ἢ σύμπαντας τοὺς ἄλλους; ᾯ εἰ μὴ ἀκολουθήσομεν, διαφθεροῦμεν
ἐκεῖνο καὶ λωβησόμεθα, ὃ τῷ μὲν δικαίῳ βέλτιον ἐγίγνετο τῷ δὲ ἀδίκῳ ἀπώλλυτο. ἢ
οὐδέν ἐστι τοῦτο;
(Κρίτων) Οἶμαι ἔγωγε, ὦ Σώκρατες.
(Σωκράτης)
Φέρε δή, ἐὰν τὸ ὑπὸ τοῦ ὑγιεινοῦ μὲν βέλτιον γιγνόμενον, ὑπὸ τοῦ νοσώδους δὲ
διαφθειρόμενον διολέσωμεν πειθόμενοι μὴ τῇ τῶν ἐπαϊόντων δόξῃ, ἆρα βιωτὸν ἡμῖν
ἐστιν (47e) διεφθαρμένου αὐτοῦ; Ἔστι δέ που τοῦτο σῶμα· ἢ οὐχί;
(Κρίτων) Ναί.
(Σωκράτης)
Ἆρ᾽ οὖν βιωτὸν ἡμῖν ἐστιν μετὰ μοχθηροῦ καὶ διεφθαρμένου σώματος;
(Κρίτων) Οὐδαμῶς.
(Σωκράτης)
Ἀλλὰ μετ᾽ ἐκείνου ἄρ᾽ ἡμῖν βιωτὸν διεφθαρμένου, ᾧ τὸ ἄδικον μὲν λωβᾶται, τὸ δὲ
δίκαιον ὀνίνησιν; Ἢ φαυλότερον ἡγούμεθα εἶναι τοῦ σώματος ἐκεῖνο,
| [47] tu n'es pas en danger de mourir demain; et la crainte d'un péril présent ne te fera
pas prendre le change: penses-y donc bien. Ne trouves-tu pas que nous avons
justement établi qu’il ne faut pas estimer toutes les opinions des hommes, mais,
quelques-unes seulement; et non pas même de tous les hommes indifféremment, mais
seulement de quelques-uns? Qu'en dis-tu? Cela ne te semble-t-il pas vrai?
CRITON Fort vrai.
SOCRATE.
A ce compte, ne faut-il pas estimer les bonnes opinions, et mépriser les
mauvaises?
CRITON. Certainement.
SOCRATE.
Les bonnes opinions ne sont-ce pas celles des sages, et les mauvaises celles des
fous?
CRITON. Qui en doute?
SOCRATE.
Voyons, comment établissons-nous ce principe ? Un homme qui s'applique
sérieusement à la gymnastique, est-il touché de l'éloge et du blâme du premier
venu, ou seulement de celui qui est médecin ou maître des exercices?
CRITON. De celui-là seulement.
SOCRATE.
C'est donc de celui-là seul qu'il doit redouter le blâme, et désirer l'éloge,
sans s’inquiéter de ce qui vient des autres?
CRITON. Assurément.
SOCRATE.
Ainsi il faut qu'il fasse ses exercices, règle son régime, mange et bore sur
l'avis de celui-là seul qui préside à la gymnastique et qui s'y connaît, plutôt
que d'après l'opinion de tous les autres ensemble
CRITON. Cela est incontestable.
SOCRATE.
Voilà donc qui est établi. Mais s'il désobéit au maître et dédaigne son avis et
ses éloges, pour écouter la foule des gens qui n'y entendent rien, ne lui en
arrivera-t-il pas de mal?
CRITON. Comment ne lui, en arriverait-il point?
SOCRATE.
Mais ce mal de quelle nature est-il.? Quels seront ses effets? Et sur quelle
partie de notre imprudent tombera-t-il?
CRITON.
Sur son corps évidemment; il le ruinera.
SOCRATE.
Fort bien; et convenons, pour ne pas entrer dans les détails sans fin, qu'il en
est ainsi de tout. Et bien! sur le juste et l'injuste, sur l'honnête et le
déshonnête, sur le bien et le mal, qui font présentement la matière de notre
entretien, nous en rapporterons-nous à l'opinion du peuple ou à celle d'un seul
homme, si nous en trouvions un qui fût habile en ces matières, et ne
devrions-nous pas avoir plus de respect et plus de déférence pour lui, que pour
tout le reste du monde ensemble? Et si nous refusons de nous conformer à ses
avis, ne ruinerons-nous, pas cette partie de nous-mêmes que la justice fortifie,
et que l'injustice dégrade? Ou tout cela n'a-t-il pas d'importance?
CRITON. Beaucoup, au contraire.
SOCRATE.
Voyons encore. Si nous ruinons en nous ce qu'un bon régime fortifie, ce qu'un
régime malsain dégrade pour suivre l’avis de gens qui ne s'y connaissent pas,
dis-moi, pourrions-nous vivre, cette partie de nous-mêmes ainsi ruinée. Et ici,
c'est le corps, n'est-ce pas?
CRITON. Sans doute.
SOCRATE. Peut-on vivre avec un corps flétri et ruiné?
CRITON. Non, assurément.
SOCRATE.
Et pourrons-nous donc vivre, quand sera dégradé cette autre partie, de
nous-mêmes dont la vertu est la force, et le vice la ruine? Ou croyons-nous
moins précieuse que le corps,
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