Texte grec :
[22] - Ἀλλὰ μέντοι, ἦ δ' ὅς, οὐ ῥᾳδίως εὑρήσεις ἄλλο τι τέλος τοῦ εὖ πράττειν, ἐὰν τὸ ἐπιστημόνως ἀτιμάσῃς.
- Σμικρὸν τοίνυν με, ἦν δ' ἐγώ, ἔτι προσδίδαξον. Τίνος ἐπιστημόνως λέγεις; Ἦ σκυτῶν τομῆς;
(173e) - Μὰ Δί' οὐκ ἔγωγε.
- Ἀλλὰ χαλκοῦ ἐργασίας;
- Οὐδαμῶς.
- Ἀλλὰ ἐρίων ἢ ξύλων ἢ ἄλλου του τῶν τοιούτων;
- Οὐ δῆτα.
- Οὐκ ἄρα, ἦν δ' ἐγώ, ἔτι ἐμμένομεν τῷ λόγῳ τῷ εὐδαίμονα εἶναι τὸν ἐπιστημόνως ζῶντα. Οὗτοι γὰρ ἐπιστημόνως ζῶντες οὐχ ὁμολογοῦνται παρὰ σοῦ εὐδαίμονες εἶναι, ἀλλὰ περί τινων ἐπιστημόνως ζῶντα σὺ δοκεῖς μοι ἀφορίζεσθαι τὸν εὐδαίμονα. Καὶ ἴσως λέγεις ὃν νυνδὴ ἐγὼ ἔλεγον, τὸν (174a) εἰδότα τὰ μέλλοντα ἔσεσθαι πάντα, τὸν μάντιν. Τοῦτον ἢ ἄλλον τινὰ λέγεις;
- Καὶ τοῦτον ἔγωγε, ἔφη, καὶ ἄλλον.
- Τίνα; ἦν δ' ἐγώ. Ἆρα μὴ τὸν τοιόνδε, εἴ τις πρὸς τοῖς μέλλουσιν καὶ τὰ γεγονότα πάντα εἰδείη καὶ τὰ νῦν ὄντα, καὶ μηδὲν ἀγνοοῖ; Θῶμεν γάρ τινα εἶναι αὐτόν. οὐ γὰρ οἶμαι τούτου γε ἔτι ἂν εἴποις οὐδένα ἐπιστημονέστερον ζῶντα εἶναι.
- Οὐ δῆτα.
- Τόδε δὴ ἔτι προσποθῶ, τίς αὐτὸν τῶν ἐπιστημῶν ποιεῖ εὐδαίμονα; ἢ ἅπασαι ὁμοίως;
- Οὐδαμῶς ὁμοίως, ἔφη.
(174b) - Ἀλλὰ ποία μάλιστα; ᾟ τί οἶδεν καὶ τῶν ὄντων καὶ τῶν γεγονότων καὶ τῶν μελλόντων ἔσεσθαι; Ἆρά γε ᾗ τὸ πεττευτικόν;
- Ποῖον, ἦ δ' ὅς, πεττευτικόν;
- Ἀλλ' ᾗ τὸ λογιστικόν;
- Οὐδαμῶς.
- Ἀλλ' ᾗ τὸ ὑγιεινόν;
- Μᾶλλον, ἔφη.
- Ἐκείνη δ' ἣν λέγω μάλιστα, ἦν δ' ἐγώ, ᾗ τί;
- Ἧι τὸ ἀγαθόν, ἔφη, καὶ τὸ κακόν.
- Ὦ μιαρέ, ἔφην ἐγώ, πάλαι με περιέλκεις κύκλῳ, ἀποκρυπτόμενος ὅτι οὐ τὸ ἐπιστημόνως ἦν ζῆν τὸ εὖ πράττειν (174c) τε καὶ εὐδαιμονεῖν ποιοῦν, οὐδὲ συμπασῶν τῶν ἄλλων ἐπιστημῶν, ἀλλὰ μιᾶς οὔσης ταύτης μόνον τῆς περὶ τὸ ἀγαθόν τε καὶ κακόν. Ἐπεί, ὦ Κριτία, εἰ 'θέλεις ἐξελεῖν ταύτην τὴν ἐπιστήμην ἐκ τῶν ἄλλων ἐπιστημῶν, ἧττόν τι ἡ μὲν ἰατρικὴ ὑγιαίνειν ποιήσει, ἡ δὲ σκυτικὴ ὑποδεδέσθαι, ἡ δὲ ὑφαντικὴ ἠμφιέσθαι, ἡ δὲ κυβερνητικὴ κωλύσει ἐν τῇ θαλάττῃ ἀποθνῄσκειν καὶ ἡ στρατηγικὴ ἐν πολέμῳ;
- Οὐδὲν ἧττον, ἔφη.
- Ἀλλ', ὦ φίλε Κριτία, τὸ εὖ γε τούτων ἕκαστα γίγνεσθαι (174d) καὶ ὠφελίμως ἀπολελοιπὸς ἡμᾶς ἔσται ταύτης ἀπούσης.
- Ἀληθῆ λέγεις.
- Οὐχ αὕτη δέ γε, ὡς ἔοικεν, ἐστὶν ἡ σωφροσύνη, ἀλλ' ἧς ἔργον ἐστὶν τὸ ὠφελεῖν ἡμᾶς. Οὐ γὰρ ἐπιστημῶν γε καὶ ἀνεπιστημοσυνῶν ἡ ἐπιστήμη ἐστίν, ἀλλὰ ἀγαθοῦ τε καὶ κακοῦ· ὥστε εἰ αὕτη ἐστὶν ὠφέλιμος, ἡ σωφροσύνη ἄλλο τι ἂν εἴη (ἡ ὠφελίμη) ἡμῖν.
- Τί δ', ἦ δ' ὅς, οὐκ ἂν αὕτη ὠφελοῖ; Εἰ γὰρ ὅτι μάλιστα τῶν ἐπιστημῶν ἐπιστήμη ἐστὶν ἡ σωφροσύνη, ἐπιστατεῖ (174e) δὲ καὶ ταῖς ἄλλαις ἐπιστήμαις, καὶ ταύτης δήπου ἂν ἄρχουσα τῆς περὶ τἀγαθὸν ἐπιστήμης ὠφελοῖ ἂν ἡμᾶς.
- Ἦ κἂν ὑγιαίνειν ποιοῖ, ἦν δ' ἐγώ, αὕτη, ἀλλ' οὐχ ἡ ἰατρική; Καὶ τἆλλα τὰ τῶν τεχνῶν αὕτη ἂν ποιοῖ, καὶ οὐχ αἱ ἄλλαι τὸ αὑτῆς ἔργον ἑκάστη; Ἢ οὐ πάλαι διεμαρτυρόμεθα ὅτι ἐπιστήμης μόνον ἐστὶν καὶ ἀνεπιστημοσύνης ἐπιστήμη, ἄλλου δὲ οὐδενός· οὐχ οὕτω;
- Φαίνεταί γε.
- Οὐκ ἄρα ὑγιείας ἔσται δημιουργός;
- Οὐ δῆτα.
(175a) - Ἄλλης γὰρ ἦν τέχνης ὑγίεια· ἢ οὔ;
- Ἄλλης.
- Οὐδ' ἄρα ὠφελίας, ὦ ἑταῖρε· ἄλλῃ γὰρ αὖ ἀπέδομεν τοῦτο τὸ ἔργον τέχνῃ νυνδή· ἦ γάρ;
- Πάνυ γε.
- Πῶς οὖν ὠφέλιμος ἔσται ἡ σωφροσύνη, οὐδεμιᾶς ὠφελίας οὖσα δημιουργός;
- Οὐδαμῶς, ὦ Σώκρατες, ἔοικέν γε.
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Traduction française :
[22] XXII. - Cependant, reprit-il, tu auras de la peine à trouver un autre moyen
datteindre le bonheur, si tu rejettes la science.
- Encore un mot dexplication, repris-je. Quel est lobjet de cette science ?
Est-ce le découpage du cuir ?
- Non, par Zeus.
- Est-ce le travail de lairain ?
- Pas du tout.
- Est-ce le travail de la laine, du bois ou de quelque autre matière du même genre ?
- Non, certes.
- Alors, nous nous écartons de notre principe quêtre heureux cest vivre selon
la science, puisque tu ne veux pas convenir que ces artisans qui vivent selon la
science soient heureux, et que tu ne reconnais pour tel que celui qui vit selon
certaines sciences. Peut-être as-tu en vue celui dont je parlais tout à lheure,
celui qui sait tout ce qui doit arriver, le devin. Est-ce de lui ou dun autre
que tu veux parler ?
- De celui-là et dun autre, dit-il.
- Lequel ? demandai-je. Ne serait-ce pas dun homme qui, outre lavenir,
connaîtrait tout le passé et le présent et à qui rien néchapperait ? Supposons
quun tel homme existe. Je ne crois pas que tu puisses en citer un autre qui
vive plus conformément à la science.
- Non, assurément.
- Il y a une chose que je voudrais savoir encore : quelle est, parmi les
sciences, celle qui le rend heureux ? ou bien y contribuent-elles toutes
également ?
- Non, pas également, dit-il.
- Alors quelle est celle qui y contribue le plus ? et que sait-elle, parmi les
choses présentes, passées et futures ? Est-ce la science du trictrac ?
- Que parles-tu de trictrac ?
- Ou le calcul ?
- Pas du tout.
- Ou la science de la santé ?
- Plutôt, dit-il.
- Mais cette science que je cherche, qui contribue le plus au bonheur, quelle
est-elle ?
- Cest celle du bien et du mal, répliqua-t-il.
- Malheureux ! mécriai-je, voilà longtemps que tu me fais tourner dans un
cercle, sans vouloir me dire que ce nest pas de vivre selon la science qui fait
quon agit bien et quon est heureux, ni selon toutes les sciences ensemble,
mais selon celle-là seule qui a pour objet le bien et le mal. Et en effet,
Critias, si tu veux retirer cette science du nombre des autres, la médecine
réussira-t-elle moins à nous donner la santé, lart du cordonnier, des
chaussures, le tissage, des habits, le pilotage, à nous empêcher de mourir en
mer et la science du général, de mourir à la guerre ?
- Ces sciences ny réussiront pas moins bien, dit-il.
- Mais, mon cher Critias, il nous faut renoncer à voir exécuter chacune de ces
choses dune manière convenable et utile, si cette science du bien et du mal
nous fait défaut.
- Cest vrai.
- Or cette science-là, qui a pour tâche de nous être utile, nest pas, ce
semble, la sagesse ; car ce nest pas la science des sciences et de lignorance,
mais la science du bien et du mal, en sorte que, si cest cette dernière qui
nous est utile, la sagesse est pour nous autre chose.
- Comment ? sécria-t-il ; la sagesse ne nous serait pas utile ! Si la sagesse
est la science des sciences et si elle préside à toutes les autres, il est
certain quelle commande aussi à la science du bien, et par là, nous est utile.
- Est-ce donc elle, repris-je, qui nous procure la santé, et non pas la médecine ?
Est-ce elle qui peut exécuter les travaux des différents arts et ceux-ci
nont-ils pas tous leur besogne propre ? Navons-nous pas depuis longtemps
attesté quelle est simplement la science de la science et de lignorance et
rien de plus ? Nest-ce pas vrai ?
- Il semble bien.
- Elle ne saurait donc nous procurer la santé ?
- Non, assurément.
- Car la santé relève dun autre art, nest-ce pas ?
- Oui.
- Elle est donc incapable aussi de nous être utile, camarade, puisque cest à un
autre art que nous venons dattribuer cet office. Est-ce vrai ?
- Sans doute.
- Comment donc la sagesse nous serait-elle utile, si elle ne nous procure aucune
utilité ?
- Elle ne saurait lêtre, Socrate, à ce quil me semble.
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