Texte grec :
[11] (163d) - Ὦ Κριτία, ἦν δ' ἐγώ, καὶ εὐθὺς ἀρχομένου σου σχεδὸν ἐμάνθανον τὸν λόγον, ὅτι τὰ οἰκεῖά τε καὶ τὰ αὑτοῦ ἀγαθὰ καλοίης, καὶ τὰς τῶν ἀγαθῶν ποιήσεις πράξεις· καὶ γὰρ Προδίκου μυρία τινὰ ἀκήκοα περὶ ὀνομάτων διαιροῦντος. Ἀλλ' ἐγώ σοι τίθεσθαι μὲν τῶν ὀνομάτων δίδωμι ὅπῃ ἂν βούλῃ ἕκαστον· δήλου δὲ μόνον ἐφ' ὅτι ἂν φέρῃς τοὔνομα ὅτι ἂν λέγῃς. Νῦν οὖν πάλιν ἐξ ἀρχῆς σαφέστερον ὅρισαι· (163e) ἆρα τὴν τῶν ἀγαθῶν πρᾶξιν ἢ ποίησιν ἢ ὅπως σὺ βούλει ὀνομάζειν, ταύτην λέγεις σὺ σωφροσύνην εἶναι;
- Ἔγωγε, ἔφη.
- Οὐκ ἄρα σωφρονεῖ ὁ τὰ κακὰ πράττων, ἀλλ' ὁ τἀγαθά;
- Σοὶ δέ, ἦ δ' ὅς, ὦ βέλτιστε, οὐχ οὕτω δοκεῖ;
- Ἔα, ἦν δ' ἐγώ· μὴ γάρ πω τὸ ἐμοὶ δοκοῦν σκοπῶμεν, ἀλλ' ὃ σὺ λέγεις νῦν.
- Ἀλλὰ μέντοι ἔγωγε, ἔφη, τὸν μὴ ἀγαθὰ ἀλλὰ κακὰ ποιοῦντα οὔ φημι σωφρονεῖν, τὸν δὲ ἀγαθὰ ἀλλὰ μὴ κακὰ σωφρονεῖν· τὴν γὰρ τῶν ἀγαθῶν πρᾶξιν σωφροσύνην εἶναι σαφῶς σοι διορίζομαι.
(164a) - Καὶ οὐδέν γέ σε ἴσως κωλύει ἀληθῆ λέγειν· τόδε γε μέντοι, ἦν δ' ἐγώ, θαυμάζω, εἰ σωφρονοῦντας ἀνθρώπους ἡγῇ σὺ ἀγνοεῖν ὅτι σωφρονοῦσιν.
- Ἀλλ' οὐχ ἡγοῦμαι, ἔφη.
- Οὐκ ὀλίγον πρότερον, ἔφην ἐγώ, ἐλέγετο ὑπὸ σοῦ ὅτι τοὺς δημιουργοὺς οὐδὲν κωλύει καὶ αὖ τὰ τῶν ἄλλων ποιοῦντας σωφρονεῖν;
- Ἐλέγετο γάρ, ἔφη· ἀλλὰ τί τοῦτο;
- Οὐδέν· ἀλλὰ λέγε εἰ δοκεῖ τίς σοι ἰατρός, ὑγιᾶ τινα (164b) ποιῶν, ὠφέλιμα καὶ ἑαυτῷ ποιεῖν καὶ ἐκείνῳ ὃν ἰῷτο;
- Ἔμοιγε.
- Οὐκοῦν τὰ δέοντα πράττει ὅ γε ταῦτα πράττων;
- Ναί.
- Ὁ τὰ δέοντα πράττων οὐ σωφρονεῖ;
- Σωφρονεῖ μὲν οὖν.
- Ἦ οὖν καὶ γιγνώσκειν ἀνάγκη τῷ ἰατρῷ ὅταν τε ὠφελίμως ἰᾶται καὶ ὅταν μή; καὶ ἑκάστῳ τῶν δημιουργῶν ὅταν τε μέλλῃ ὀνήσεσθαι ἀπὸ τοῦ ἔργου οὗ ἂν πράττῃ καὶ ὅταν μή;
- Ἴσως οὔ.
- Ἐνίοτε ἄρα, ἦν δ' ἐγώ, ὠφελίμως πράξας ἢ βλαβερῶς ὁ (164c) ἰατρὸς οὐ γιγνώσκει ἑαυτὸν ὡς ἔπραξεν· καίτοι ὠφελίμως πράξας, ὡς ὁ σὸς λόγος, σωφρόνως ἔπραξεν. Ἢ οὐχ οὕτως ἔλεγες;
- Ἔγωγε.
- Οὐκοῦν, ὡς ἔοικεν, ἐνίοτε ὠφελίμως πράξας πράττει μὲν σωφρόνως καὶ σωφρονεῖ, ἀγνοεῖ δ' ἑαυτὸν ὅτι σωφρονεῖ;
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Traduction française :
[11] XI. - Ah ! Critias, dis-je, dès tes premiers mots je crois avoir saisi ta pensée
et que tu appelais bonnes les choses qui nous sont propres et qui nous regardent
et que par action tu entendais la création des choses bonnes ; car jai entendu
Prodicos faire mille distinctions entre les mots. Quant à moi, je te laisse
libre de prendre les mots au sens que tu voudras ; montre-moi seulement à quoi
tu appliques ceux que tu emploies. Maintenant reviens en arrière et donne-moi
une définition plus nette ; est-ce de faire les choses bonnes ou de les
fabriquer, ou quel que soit le terme qui te plaira, est-ce cela que tu appelles
la sagesse ?
- Oui, dit-il.
- Donc celui qui fait le mal nest pas sage, mais celui qui fait le bien.
- Et toi, mon excellent ami, dit Critias, nes-tu pas de cet avis ?
- Ne tinquiète pas de cela, dis-je ; nous navons pas à examiner ce que je
pense, mais ce que tu dis, toi, à présent.
- Eh bien, moi, dit-il, je soutiens que celui qui ne fait pas le bien, mais le
mal, nest pas sage et que celui qui fait le bien, et non le mal, est sage, et
pour définir nettement la sagesse, je dis quelle consiste à faire le bien.
- Il est bien possible que tu aies raison ; mais il y a, dis-je, une chose qui
métonne, cest que tu crois que des gens sages puissent ne pas savoir quils
sont sages.
- Mais je ne le crois pas du tout, dit-il.
- Tout à lheure, repris-je, ne disais-tu pas que rien nempêchait les artisans
dêtre sages, même en faisant les affaires des autres ?
- Je lai dit en effet ; mais quelle conclusion en tires-tu ?
- Aucune. Mais dis-moi : crois-tu quun médecin qui rend la santé à quelquun
fasse une chose utile à lui-même et à celui quil soigne ?
- Oui.
- Et celui qui fait cela ne fait-il pas son devoir ?
- Si.
- Et celui qui fait son devoir nest-il pas sage ?
- Il lest au contraire.
- Or le médecin est-il forcé de savoir quand ses remèdes sont utiles et quand
ils ne le sont pas ? et de même chaque artisan, sil tirera ou non profit du
travail quil exécute ?
- Il est possible que non.
- Il arrive donc, repris-je, que le médecin qui a opéré une cure, soit utile,
soit nuisible, ne sache pas ce quil a fait. Cependant, selon toi, sil agit
utilement, il agit avec sagesse. Nest-ce pas ce que tu disais ?
- Si.
- Il arrive donc, comme tu vois, quagissant utilement, il agisse avec sagesse
et quil soit sage, mais quil ne sache pas quil est sage.
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