Texte grec :
[32,9] Ἀλλὰ καὶ τὸν Διογένην ἐκεῖνον εἰς τὸν πίθον
ἡδονὴ εἰσάγει· εἰ δὲ καὶ ἡ ἀρετὴ αὐτῷ συνεισέβαλλεν.
τί τὴν ἡδονὴν ἐξοικίζεις τῷ λόγῳ; Ἥδετο ὁ Διογένης
τῷ πίθῳ, ὡς Βαβυλῶνι Ξέρξης· ἥδετο τῇ μάζῃ ὁ Διογένης,
ὡς ὁ Σμινδυρίδης τῇ καρύκκῃ· ἥδετο ταῖς
κρήναις ταῖς πανταχοῦ, ὡς ὁ Καμβύσης Χοάσπῃ μόνῳ·
ἥδετο τῷ ἡλίῳ, ὡς Σαρδανάπαλλος ταῖς πορφυρίσιν·
ἥδετο τῇ βακτηρίᾳ, ὡς Ἀλέξανδρος τῷ δόρατι· ἥδετο
τῷ θυλάκῳ, ὡς ὁ Κροῖσος τοῖς θησαυροῖς. Κἂν παραβάλῃς
ἡδονὰς ἡδοναῖς, τὰ Διογένους κρατεῖ· τὰ γὰρ
ἐκείνων μεστὰ μὲν ἡδονῆς, ἀλλὰ ἀναμέμικται λύπῃ
πανταχοῦ· ὀδύρεται Ξέρξης ἡττώμενος, στένει Καμβύσης
τιτρωσκόμενος, οἰμώζει Σαρδανάπαλλος ἐμπιμπράμενος,
ἀνιᾶται Σμινδυρίδης ἀπελαυνόμενος, δακρύει
Κροῖσος λαμβανόμενος, λυπεῖται Ἀλέξανδρος μὴ μαχόμενος·
αἱ δὲ Διογένους ἡδοναὶ οἰμωγῆς ἄπειροι, ἄστονοι,
ἀδάκρυτοι, ἄλυποι. Σὺ δὲ τὰς ἡδονὰς αὐτοῦ πόνους καλεῖς·
μετρεῖς γὰρ τὰ Διογένους τῇ σαυτοῦ
φύσει, πονηρῷ μέτρῳ· σὺ μὲν γὰρ ἀλγήσεις ταῦτα
δρῶν, Διογένης δὲ ἥδετο. Ἐπιτολμήσαιμι δ´ ἂν ἔγωγε
εἰπεῖν, ὡς οὐδεὶς ἡδονῆς Διογένους ἦν ἐραστὴς ἀκριβέστερος.
Οὐχ ἑστίαν ἔνεμεν, ἐπίλυπον γὰρ οἰκονομία·
οὐ πολιτείας ἐφήψατο, ἀνιαρὸν γὰρ τὸ χρῆμα· οὐκ
ἐπειράθη γάμου, ἤκουεν γὰρ τὴν Ξανθίππην· οὐκ
ἐπειράθη παιδοτροφίας, ἑώρα γὰρ τὰ δεινά·
ἀλλὰ ἄφετος παντὸς τοῦ δεινοῦ, ἐλεύθερος, ἄφροντις, ἀδεής,
ἄλυπος ἐνέμετο τὴν πᾶσαν γῆν, ὡς οἶκον ἕνα, μόνος ἀνθρώπων
ἡδοναῖς συνὼν ἀφρουρήτοις καὶ ἀταμιεύτοις καὶ ἀφθόνοις.
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Traduction française :
[32,9] IX. Ce fut aussi la volupté qui conduisit Diogène dans un tonneau. Que la vertu ait
également contribué à l'y conduire, à la bonne heure. Mais pourquoi regarderait-on la
volupté comme inconciliable avec la sagesse ? Diogène se trouvait aussi bien dans
son tonneau, que Xerxès à Babylone. Il était aussi content de son pain sec, que
Smindyride de la chère la plus raffinée. Il avait autant de plaisir à boire l'eau de la
première fontaine qui lui tombait sons la main, que Cambyse en pouvait avoir en
buvant exclusivement de l'eau du Choaspe. Il se délectait de l'aspect du soleil,
autant que Sardanapale du spectacle de sa magnificence. Il aimait autant son bâton,
qu'Alexandre pouvait aimer sa lance. II se complaisait dans sa besace, autant que
Crésus dans ses trésors. Et si l'on compare voluptés à voluptés, celles de Diogène
l'emportent sur celles des autres. Car la vie des personnages que je viens de nommer
paraît bien n'être qu'un tissu de voluptés. Mais les filaments de la douleur y sont
partout enlacés. Xerxès vaincu s'abandonne au désespoir : Cambyse blessé pousse
des gémissements : Sardanapale pleure au milieu de son palais en flamme :
Smindyride est inconsolable d'avoir été éconduit : Crésus prisonnier ne fait plus
que verser des larmes : Alexandre tombe dans la langueur lorsqu'il ne voit plus de
nations à combattre : tandis que les voluptés de Diogène sont inaccessibles à la
désolation, aux gémissements, aux larmes, à la douleur. Mais ces voluptés de
Diogène on les appelle des privations. On juge donc de Diogène par soi-même.
Jugement insensé ! A vivre comme il vivait, on se croirait très à plaindre. Diogène, au
contraire, y trouvait sa volupté. J'oserai même dire davantage, que nul n'a mieux
entendu que Diogène l'amour de la volupté. Il ne fut point chargé d'un ménage.
L'économie domestique a ses peines. Il ne s'immisça point dans les fonctions
publiques. C'est une chose fertile en désagréments. II ne s'engagea point dans les
liens du mariage. Il savait des nouvelles de Xantippe. Il ne s'exposa point à avoir
des enfants à élever. Il connaissait l'histoire de Clinias. Mais exempt
d'inconvénients de tout genre, d'asservissement, de sollicitude, de crainte, de douleur,
il était dans tous les lieux de la terre, comme dans une maison identique. Seul entre
les hommes, il sut s'assurer des voluptés autour desquelles il n'eut pas besoin d'élever
des remparts pour les défendre contre les atteintes des vicissitudes humaines.
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