Texte grec :
[32,2] Δοκεῖ μοι δὴ χρήσασθαι, ἂν ᾖ, ὁ Ἐπίκουρος τῷ
Φρυγίῳ τούτῳ αἰνίγματι πρὸς τὸν τῆς ἡδονῆς κατήγορον,
τῇ μὲν φωνῇ ἀνδριζόμενον, τῇ δὲ γνώμῃ, καθάπερ
τῇ χειρί, ἐκτεινόμενον ἐφ´ ἡδονῇ. Τίς γὰρ
οὕτω πολεμήσαιτο ἑαυτῷ, ὥστε τὸ μόνον δὴ πραγμάτων
τῇ αὑτοῦ φύσει ἐπαγωγότατον ἀποσείσασθαι ἑκών;
Τὰ μὲν γὰρ ἄλλα, ἃ ὑπ´ ἀνθρώπων διώκεται, ἢ πείρᾳ
γνωρισθέντα παρεδέχθη, ἢ τέχνῃ δοκιμασθέντα ἐτιμήθη,
ἢ λόγῳ ἐξετασθέντα ἐπιστεύθη, ἢ χρόνῳ βασανισθέντα
ἠγαπήθη· ἡδονὴ δὲ καὶ λόγου ἀδεής, καὶ
τέχνης πρεσβυτέρα, καὶ τὴν πεῖραν φθάνει, καὶ οὐκ
ἀναμένει χρόνον, ἀλλὰ ὑπερφυὴς ἡ πρὸς αὐτὴν φιλία
καὶ ἡλικιῶτις τῶν σωμάτων, ὥσπερ κρηπίς, τῇ σωτηρίᾳ
τοῦ ζῴου ὑποβέβληται· ἣν εἴ τις ἀφέλοι, τὸ γενόμενον
εὐθὺς οἴχεσθαι δεῖ. Ἐπιστήμην μὲν γάρ, καὶ λόγον,
καὶ τοῦτο δὴ τὸ θρυλούμενον, τὸν νοῦν αὐτόν, προϊὼν
τῷ χρόνῳ ὁ ἄνθρωπος, τῇ κατὰ βραχὺ ἐντεύξει
τῶν αἰσθήσεων διὰ τῆς πείρας ξυνενεικάμενος, ἤθροισεν
ἐφ´ ἑαυτῷ· ἡδονὴν δὲ αὐτοδίδακτος παρὰ τῆς
φύσεως λαβὼν ἔχει ἐξ ἀρχῆς εὐθύς· καὶ ταύτην μὲν
ἀγαπᾷ, πολεμεῖ δὲ τῷ ἀλγεινῷ· καὶ ὑπὸ μὲν τῆς σώζεται,
ὑπὸ δὲ τοῦ ἀλγεῖν φθείρεται.
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Traduction française :
[32,2] II. Il me paraît qu'Épicure pourrait faire usage de cet apologue Phrygien contre le
détracteur de la volupté, qui dans ses discours parle en homme, mais dans ses
affections indique la volupté comme de la main. Où est l'homme assez ennemi de
lui-même pour écarter spontanément la seule des choses humaines, qui a pour lui de si
puissants attraits ? Car toutes les autres choses auxquelles l'homme s'attache, ou il
les recherche lorsqu'il en a fait l'expérience, ou il les estime, lorsqu'il les a mises à
l'épreuve, ou il croit à leur mérite, lorsque la raison lui en a fait connaître le prix, ou il
en fait l'objet de son affection, lorsqu'elles ont soutenu la pierre de touche du temps.
Tandis que la volupté n'entre point dans le creuset de la raison. Elle est plus ancienne
que tous les arts. Elle anticipe sur l'expérience. Elle n'attend pas l'épreuve du temps.
Le goût qu'elle inspire, est l'ouvrage même de la nature. Ce goût naît et commence
avec la vie. Il est comme une sentinelle placée autour de l'être vivant pour le conserver.
Ôtez la volupté, vous ôtez l'existence à l'être qui vient de la recevoir. Car ce n'est
qu'à la longue que l'homme, à l'aide du jeu insensible et réciproque des sensations et
de l'expérience, développe eu lui-même la science, la raison et l'intelligence (cette
faculté à laquelle on attache tant d'intérêt) et qu'il augmente leur intensité. Tandis que
du moment où il vient au monde, il apprend de la nature et de lui-même tout ce qu'il
doit savoir de la volupté. Autant il est l'ami de la volupté, autant il est l'ennemi de
la douleur. La volupté tend à le conserver ; et la douleur tend à le détruire.
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