[32,10] Τὸν Διογένην ἐῶμεν, καὶ μετίωμεν τοὺς νομοθέτας,
καὶ πολιτείας σκεψώμεθα. Μή με οἰηθῇς ἐπὶ Σύβαριν
ἥξειν, μηδὲ Συρακοσίων μνησθήσεσθαι τῶν ἁβροτάτων,
μηδὲ Κορινθίων τῶν φιληδόνων, μηδὲ Χίων τῶν
πλουσίων, μηδὲ Λεσβίων τῶν εὐοινοτάτων, μηδὲ Μιλησίων
τῶν εὐειμονωτάτων· ἀλλ´ ἐπὶ τοὺς ἡγεμόνας
ἔρχομαι, ἐπὶ Ἀθηναίους ἔρχομαι, καὶ τὰ Λακεδαιμονίων
ἐξετάζω. Μάστιγες αὗται καὶ πληγαὶ Λακωνικαί, καὶ
θῆραι, καὶ δρόμοι, καὶ δεῖπνα λιτά, καὶ στιβάδες εὐτελεῖς·
ἀλλ´ ὁρῶ καὶ τούτων τὰ τερπνά. Εὖ γε, ὦ
Λυκοῦργε, σμικρῶν πόνων μεγάλας ἡδονὰς ἀντεισάγεις·
ὀλίγα δούς, μεγάλα ἔλαβες· ἐφημέρους δοὺς πόνους,
ἡδονὰς διηνεκεῖς ἀντέλαβες. Τίνες, λέξει, Σπαρτιατικαὶ
ἡδοναί; Πόλις ἀτείχιστος, ἄφοβος, ἄπειρος πυρός,
ἀθέατος πολεμίων, ἀθέατος ξενικῶν ἀσπίδων, ἀνήκοος
στόνων, ἀνήκοος ἀπειλῆς. Τί δ´ ἂν εἴη φόβου
λυπηρότερον; τί δὲ δουλείας ἀνιαρότερον; τί δὲ ἀνάγκης
ἐπιπονώτερον; ὅταν δὲ ταῦτα ἀπαλλάξῃς πόλεως,
πολλὰς αὐτοῖς ἡδονὰς ἀντεισάγεις. Ἐκείνης τῆς
ἡδονῆς θρέμμα ἦν ὁ Λεωνίδας, ἐκείνης ὁ Ὀθρυάδας,
ἐκείνης ὁ Καλλικρατίδας. ’Ἀλλ´ ἀπέθνησκον οὗτοι.‘
Ἀπέθνησκον καλῶς· ’Ὑπὲρ ποίων ἡδονῶν;‘ Καὶ γὰρ
τῶν σωμάτων ἐκκόπτεται μέρη ὑπὲρ ῥᾳστώνης τοῦ
ὅλου. Μέρος ἦν ὁ Λεωνίδας καὶ τῆς Σπάρτης, ἀλλὰ
ἀπέθνησκεν ὑπὲρ τῆς Σπάρτης· μέρος ὁ Ὀθρυάδας,
Καλλικρατίδας μέρος· τοιγαροῦν ἀφαιρουμένων σμικρῶν
μερῶν, ἐσώζοντο αἱ οἴκοι ἡδοναί. Τὰ δὲ Ἀθηναίων
τί χρὴ λέγειν; πάντα μεστὰ ἑορτῆς τὰ Ἀττικά,
πάντα θυμηδίας· καὶ διέλαχον αὐτοῖς ὧραι τὰς ἡδονάς,
ἦρος Διονύσια, μετοπώρου μυστήρια· καὶ ἄλλην
ὥραν ἔχει ἄλλος θεός, Παναθήναια, Σκειροφόρια,
Ἅλωα, Ἀπατούρια. Ναυμαχοῦσιν ἐν θαλάττῃ, οἱ δὲ
οἴκοι ἑορτάζουσιν· πολεμοῦσιν ἐν γῇ, οἱ δὲ ἐν Διονύσου
γελῶσιν. Ἀλλ´ οὐδὲ οἱ πόλεμοι, τὸ σκυθρωπότατον,
ἡδονῶν ἔρημοι· ἀλλὰ συντάττεται τούτοις ἢ
Τυρρηνὴ σάλπιγξ, ἢ αὐλὸς τριηρικός, ἢ ᾠδὴ ἐμβατήριος.
Ὁρᾷς τὴν ἀφθονίαν τῶν ἡδονῶν.
| [32,10] X. Quittons Diogène ; passons aux Législateurs, et considérons les corps
politiques. Ne pensez pas d'ailleurs que je me dirige vers Sybaris, que je rappelle ni
les Syracusains, que leur mollesse a rendus célèbres, ni les Corinthiens adonnés à
toutes les voluptés, ni les habitants de Chio, renommés pour leur opulence, ni ceux de
Lesbos, qu'on vante comme les premiers buveurs, ni ceux de Milet, fameux pour la
richesse de leurs vêtements. Je ne m'occupe que des peuples qui ont tenu le premier
rang sous le rapport politique, des Athéniens et des Spartiates. Chez ces derniers, je
vois des flagellations, des blessures, les pénibles exercices de la chasse, de la course,
la frugalité dans les repas, la mise la plus grossière. Mais je vois la volupté attachée à
toutes ces choses. A merveille Lycurgue, tu compenses de médiocres peines par de
grandes voluptés. Tu donnes peu, et tu recueilles beaucoup. Tu imposes des travaux
éphémères, et tu en fais résulter des voluptés continues. Mais, dira-t-on, en quoi
consistaient donc les voluptés des Spartiates ? Elles consistaient à n'avoir point de
murailles autour de leur ville, voir la sécurité régner autour d'elle, à ne pas craindre
qu'une flamme ennemie vint dévorer ses maisons, à la défendre de l'aspect d'hostiles
phalanges, et de boucliers étrangers, à la maintenir inaccessible aux cris de douleur et
aux violences que produit la guerre. Or, qu'y a-t-il de plus cruel que la crainte, de plus
accablant que la servitude, de plus révoltant que la nécessité ? En éloignant toutes
ces choses de ta Cité, tu as mis à la place des voluptés en grand nombre. Les
nourrissons de ces voluptés furent Léonidas, Othryade, Callicratidas. Mais ces
Spartiates sont morts; - ouï, mais ils sont morts avec gloire ; - et pour quels motifs ? -
pour ces voluptés. On mutile le corps dans ses membres pour la conservation du tout.
Or, Léonidas était à Sparte, ce qu'un membre est au corps ; et il mourut pour elle. Il en
fut de même d'Othryade et de Callicratidas. Ainsi, du sacrifice de quelques membres
d'une médiocre importance résultait le salut des voluptés de tous les citoyens. Que
dirons-nous des Athéniens ? Dans l'Attique on ne voyait que fêtes, qu'expansion de
joie, d'allégresse. Chaque saison de l'année avait chez eux son apanage de voluptés.
An printemps, c'étaient les fêtes de Bacchus; en automne, celles des Déesses
Eleusines. Les autres Dieux avaient distribué dans les autres saisons, les
Panathénées, les Skirophories, les Aloes, les Apatouries. Tandis qu'une partie
des citoyens d'Athènes livre des batailles navales, le reste célèbre des fêtes dans les
Cités de l'Attique. Tandis que les uns sont en campagne sur le continent, les autres
prennent leurs ébats au milieu des bacchanales. Mais la guerre elle-même, la chose
du monde la moins agréable, n'est pas sans avoir ses voluptés. On y entend la
trompette tyrrhénienne qui donne le signal de se ranger en bataille, la flûte qui bat la
cadence pour les rameurs, les hymnes guerrières qui sonnent la charge. Vous voyez
combien sont nombreux les divers genres de volupté.
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