Texte grec :
[19,2] Φράσω δὲ αὐτὴν κατὰ τοὺς τοῦ Φρυγὸς λόγους
μῦθον πλάττων. Ποιμὴν ἀνὴρ καὶ μάγειρος ἐβάδιζον
ἄμφω κοινὴν ὁδόν· ἰδόντες δὲ ἐκ ποίμνης ἄρνα εὐτραφῆ
πλανώμενον, ἀπολειφθέντα τῶν συννόμων,
ὤσαντο ἐπ´ αὐτὸν ἄμφω· ἦν ἄρα τότε ὁμόφωνα καὶ
τὰ θηρία τοῖς ἀνθρώποις· ἐρωτᾷ ὁ ἀμνός, τίς ὡς ἑκάτερος
ἐθέλει αὐτὸν μεταχειρίσασθαι καὶ ἄγειν. Ὡς
δὲ ἐπύθετο τἀληθῆ αὐτά, τὴν ἀμφοῖν τέχνην, φέρων
ἑαυτὸν ἐπιτρέπει τῷ ποιμένι· ’σὺ μὲν γὰρ δήμιός τις
εἶ καὶ μιαιφόνος τῆς ἀρνῶν ποίμνης, τούτῳ δὲ ἐξαρκέσει,
ἂν καλῶς τὰ ἡμέτερα ἔλθῃ.‘ Εἴκαζε, εἰ βούλει,
κατὰ τὸν μῦθον, τοὺς μὲν ἐραστὰς ἐκείνους μαγείροις
πολλοῖς, τὸν δὲ Σωκράτην ποιμένι ἑνί, τὰ δὲ μειράκια
τὰ Ἀττικὰ θρέμμασιν πλανωμένοις, ὁμοφώνοις ἀληθῶς,
οὐ κατὰ τὴν ἐν τοῖς μύθοις ἐξουσίαν. Τί ἂν
οὖν δράσαι ὁ ποιμὴν οὗτος ὁρῶν τοὺς δημίους τῆς
τῶν μειρακίων ὥρας ἐφιεμένους καὶ δρόμῳ ἐπ´ αὐτὴν
ὠθουμένους; ἆρα ἀνέξεται καὶ τὴν ἡσυχίαν ἄγων στήσεται;
οὕτω μὲν εἴη ἂν μιαιφονώτερος αὐτῶν τῶν
δημίων. Οὐκοῦν θεύσεται, καὶ κοινωνήσει τοῦ δρόμου,
καὶ διώξεται σὺν αὐτοῖς, οὐκ ἐπὶ τῇ ἴσῃ. Καί
τις ἰδὼν τῶν ἀπείρων τῆς τέχνης καὶ τῆς αἰτίας τοῦ
δρόμου, αὐτὸ ἐκεῖνο οἰήσεται, ἐπ´ ὀλέθρῳ καὶ τοῦτον
θεῖν· ἐὰν δὲ ἀναμείνῃ τὸ τέλος, ἐπαινέσεται τὸν δρόμον,
καὶ μιμήσεται τὴν σπουδήν, καὶ θαυμάσει τὸν
θηρευτήν, καὶ μακαρίσει τὴν ἄγραν. Διὰ τοῦτο καὶ
ὁ Σωκράτης ἐρᾶν ἔλεγεν, καὶ πάντων ἐρᾶν· καὶ ἐκοινώνει
τοῦ δρόμου, καὶ ἐδίωκεν τοὺς καλούς, καὶ τοὺς
συνεραστὰς ἔφθανεν, καὶ τοὺς δημίους ὑπετέμνετο.
Καὶ γὰρ ἦν αὐτῶν καὶ πονεῖν ἱκανώτερος, καὶ ἐρᾶν
δεινότερος, καὶ λαμβάνειν εὐστοχώτερος· καὶ πάνυ εἰκότως.
Τοῖς μὲν γὰρ ἄλλοις ὁ ἔρως ἦν ὄνομα ἐπιθυμίας
ἐν ἡδοναῖς πλανώμενον· ἀρχὴ δὲ αὐτοῦ ἄνθος
σώματος ἐρχόμενον εἰς ὀφθαλμούς, καὶ δι´ αὐτῶν ἐπὶ
τὴν ψυχὴν ῥέον· ὁδοὶ γὰρ κάλλους οἱ ὀφθαλμοί. Τῷ δὲ
Σωκράτει ὁ ἔρως ἦν κατὰ μὲν τὴν σπουδὴν τοῖς ἄλλοις
ὅμοιος, κατὰ δὲ τὴν ἐπιθυμίαν διαφέρων, κατὰ δὲ τὴν
ἡδονὴν σωφρονέστερος, κατὰ δὲ τὴν ἀρετὴν εὐστοχώτερος·
ἀρχὴ δὲ αὐτοῦ ψυχῆς ἄνθος ἐν σώματι διαφαινόμενον·
οἷον εἰ ξυνείης καὶ ποταμοῦ κάλλος λειμῶνι
ἐπιρρέον, καλὰ μὲν τὰ ὑπ´ αὐτῷ ἄνθη, λαμπρυνόμενα
δὲ ὑπὸ τοῦ ὕδατος πρὸς τὴν ὄψιν· τοῦτο
δύναται καὶ ψυχῆς ἄνθος ἐμπεφυτευμένον σώματι καλῷ,
ἐκλαμπρύνεται ὑπ´ αὐτοῦ, καὶ ἐκλάμπει, καὶ διαφαίνεται.
Καὶ ἔστιν σωμάτων ὥρα οὐδὲν ἄλλο, ἢ μελλούσης
ἀρετῆς ἄνθος, καὶ οἱονεὶ προοίμιον κάλλους
ὡραιοτέρου. Ὥσπερ γὰρ τοῦ ἡλίου προανίσχει τὶς
αὐγὴ ὑπὲρ ἄκρων ὀρῶν, ἀγαπητὸν ὀφθαλμοῖς θέαμα
διὰ τὴν προσδοκίαν τοῦ μέλλοντος, οὕτως καὶ τῆς
λαμπρᾶς ψυχῆς προανίσχει τὶς ὥρα ὑπὲρ ἄκρων τῶν
σωμάτων, ἀγαπητὸν φιλοσόφοις θέαμα διὰ τὴν προσδοκίαν
τοῦ μέλλοντος.
|
|
Traduction française :
[19,2] II. Pour, me faire entendre, je prendrai, à l'exemple d'Ésope, le langage
de l'allégorie. Un berger et un boucher voyageaient ensemble. Ils
virent un agneau bien nourri, qui errait, séparé du reste de son troupeau.
Tous les deux se ruent dessus. Dans ce temps-là, les bêtes parlaient le
même langage que les hommes. L'agneau leur demande qui ils sont, et quel
est celui d'entre eux qui veut s'emparer de lui et l'emmener. Lorsqu'il
eut, en effet, appris le métier qu'ils faisaient l'un et l'autre, il donna
la préférence au berger, et dit au boucher : « Toi, tu es un bourreau, »
tu égorges mes semblables ; au lieu que celui-ci se contente d'en retirer
ce que la Nature les a destinés à faire pour lui ». Comparez, si vous
voulez, d'après cette fable, tous les Pédérastes à des bouchers, Socrate à
un berger, et les beaux garçons de l'Attique à des agneaux égarés, qui
parlent, à la vérité, le même langage, mais sur un autre ton, que dans
l'apologue. Que fera donc ce berger, en voyant ces bourreaux avides de la
beauté de ces adolescents, et s'empressant autour d'eux? Souffrira-t-il
cela? Restera-t-il dans l'inaction? Sans doute, si l'on le suppose plus
sanguinaire que les bourreaux eux-mêmes. Il se mettra donc en mouvement :
il courra comme les bouchers. Il tendra au même but, mais avec une
intention différente. Qui est-ce qui, sans connaître la profession de ce
concurrent, et le sujet qui le fait courir, pensera qu'il conspire aussi
la perte de ce qu'il poursuit? Mais si l'on attend la fin, on louera le
motif, on prendra ce zèle pour exemple, on admirera et le chasseur, et le
bonheur de sa proie. C'est dans ce sens que Socrate disait qu'il aimait
tous les jeunes gens. Cest dans ce sens qu'il courait autant que les
autres, qu'il poursuivait les beaux adolescents, qu'il gagnait ses
concurrents de vitesse, et qu'il rendait vains tous les efforts des
bourreaux. Il était plus propre qu'eux à ce genre d'exercice, plus habile
à aimer, plus adroit à parvenir à son but. Cela devait être ainsi. Chez
les autres, l'amour n'était que l'appétit du désir qui se perd en vagabond
dans les jouissances, qui a sa source dans les agréments corporels, qui
attire et séduit les yeux, et par eux s'insinue dans l'âme. Car les yeux
sont le chemin de la beauté. Chez Socrate, l'amour ne le cédait point
en intensité à celui des autres : il était différent sous le rapport du
désir, plus modéré sous le rapport de la jouissance, plus ingénieux sous
le l'apport de la vertu. Il avait son principe dans la beauté de l'âme qui
se dessine sur le corps. Imaginez dans une prairie le beau crystal
d'un ruisseau. Les fleurs déjà belles qu'il humectera en deviendront plus
éclatantes encore. Tel est l'effet de la beauté de l'âme dans un beau
corps. Elle en reçoit du lustre, de la splendeur, de l'éclat. La beauté du
corps n'est elle-même que la beauté de la vertu qui doit l'embellir, et,
en quelque façon, que le prélude d'une beauté plus accomplie. De même que
la lueur crépusculaire qui annonce le lever du soleil, du haut des
montagnes, réjouit les yeux dans l'attente du grand astre de la lumière ;
de même la beauté de l'âme, se montrant dans les charmes répandus
extérieurement sur le corps, offre au philosophe un spectacle qui le ravit
par la perspective des résultats.
|
|