Texte grec :
[18,9] Ἡσιόδῳ δὲ ἀείδουσιν αἱ μοῦσαι τί ἄλλο ἢ γυναικῶν
ἔρωτας, καὶ ἀνδρῶν; καὶ ποταμῶν ἔρωτας καὶ
βασιλέων καὶ φυτῶν; Τὸν δὲ Ἀρχιλόχου ἔρωτα, ὑβριστὴς
γάρ, χαίρειν ἐῶ. Ὁ δὲ τῆς Λεσβίας (εἴτοι χρὴ
πρεσβύτερα τοῖς νέοις εἰκάσαι) τί ἂν εἴη ἄλλο, ἢ αὐτό,
ἡ Σωκράτους τέχνη ἐρωτική; Δοκοῦσιν γάρ μοι τὴν
καθ´ αὑτὸν ἑκάτερος φιλίαν, ἡ μὲν γυναικῶν, ὁ δὲ
ἀρρένων, ἐπιτηδεῦσαι. Καὶ γὰρ πολλῶν ἐρᾶν ἔλεγον,
καὶ ὑπὸ πάντων ἁλίσκεσθαι τῶν καλῶν· ὅ, τι γὰρ
ἐκείνῳ Ἀλκιβιάδης καὶ Χαρμίδης καὶ Φαῖδρος, τοῦτο
τῇ Λεσβίᾳ Γύριννα καὶ Ἀτθὶς Ἀνακτορία· καὶ ὅ,τιπερ
Σωκράτει οἱ ἀντίτεχνοι, Πρόδικος καὶ Γοργίας καὶ
Θρασύμαχος καὶ Πρωταγόρας, τοῦτο τῇ Σαπφοῖ Γοργὼ
καὶ Ἀνδρομέδα· νῦν μὲν ἐπιτιμᾷ ταύταις, νῦν δὲ
ἐλέγχει, καὶ εἰρωνεύεται αὐτὰ ἐκεῖνα τὰ Σωκράτους·
τὸν Ἴωνα χαίρειν
φησὶν ὁ Σωκράτης·
πολλά μοι τὰν
Πολυανακτίθαο παῖδα χαίρειν,
Σαπφὼ λέγει· οὐ προσιέναι φησὶν ὁ Σωκράτης Ἀλκιβιάδῃ,
ἐκ πολλοῦ ἐρῶν, πρὶν ἡγήσατο ἱκανὸν εἶναι
πρὸς λόγους·
σμικρά μοι παῖς ἔτι φαίνεο κἄχαρις ἔσσα ...
Σαπφὼ λέγει· κωμῳδεῖ σχῆμά που καὶ κατάκλισιν
σοφιστοῦ, καὶ αὕτη
τίς δὲ ἀγροιῶτιν ἐπεμμένα στολήν - - -·
τὸν ἔρωτα φησὶν ἡ Διοτίμα τῷ Σωκράτει οὐ παῖδα,
ἀλλὰ ἀκόλουθον τῆς Ἀφροδίτης καὶ θεράποντα εἶναι·
λέγει που καὶ Σαπφοῖ ἡ Ἀφροδίτη ἐν ᾄσματι,
σύ τε καλὸς θεράπων Ἔρως.
Ἡ Διοτίμα λέγει, ὅτι θάλλει μὲν ἔρως εὐπορῶν, ἀποθνήσκει
δὲ ἀπορῶν· τοῦτο ἐκείνη ξυλλαβοῦσα εἶπεν
’γλυκύπικρον‘ καὶ ’ἀλγεσίδωρον.‘ Τὸν ἔρωτα Σωκράτης
σοφιστὴν λέγει, Σαπφὼ μυθοπλόκον. Ἐκβακχεύεται
ἐπὶ Φαίδρῳ ὑπὸ τοῦ ἔρωτος, τῇ δὲ ὁ ἔρως
ἐτίναξεν τὰς φρένας,
ὡς ἄνεμος κατ´ ὄρος δρυσὶν ἐμπεσών·
ἀναίθεται τῇ Ξανθίππῃ ὀδυρομένῃ ὅτι ἀπέθνησκεν,
ἡ δὲ τῇ θυγατρί·
οὐ γὰρ θέμις ἐν μουσοπόλων οἰκίᾳ θρῆνον εἶναι
οὐκ ἄμμι πρέποι τάδε.
Ἡ δὲ τοῦ Τηΐου σοφιστοῦ τέχνη τοῦ αὐτοῦ ἤθους
καὶ τρόπου· καὶ γὰρ πάντων ἐρᾷ τῶν καλῶν, καὶ
ἐπαινεῖ πάντας· μεστὰ δὲ αὐτοῦ τὰ ᾄσματα τῆς Σμέρδιος
κόμης, καὶ τῶν Κλεοβούλου ὀφθαλμῶν, καὶ τῆς
Βαθύλλου ὥρας· ἀλλὰ καὶ τούτοις τὴν σωφροσύνην ὁρᾷς·
ἔραμαί τοι συνηβᾶν, φησίν,
χαρίεν γὰρ ἔχεις ἦθος·
καὶ αὖθις ’καλὸν εἶναι τῷ ἔρωτι τὰ δίκαια‘ φησίν. Ἤδη
δέ που καὶ τὴν τέχνην ἀπεκαλύψατο·
ἐμὲ γὰρ λόγων εἵνεκα παῖδες ἂν φιλοῖεν·
χαρίεντα μὲν γὰρ ᾄδω, χαρίεντα δ´ οἶδα λέξαι.
Τοῦτο καὶ περὶ Σωκράτους Ἀλκιβιάδης ἔλεγεν, εἰκάζων
αὐτοῦ τὴν χάριν τοῖς Ὀλύμπου καὶ Μαρσύου αὐλήμασιν.
Τίς ἄν, ὦ θεοί, μέμψαιτο ἐραστὴν τοιοῦτον, πλὴν Τιμάρχου;
|
|
Traduction française :
[18,9] IX. Chez Hésiode, les Muses chantent-elles autre chose que les amours des
femmes et des hommes, celles des fleuves, des vents, des plantes ? Je
passerai sous silence les poésies obscènes d'Archilochus. Les
ouvrages de Sappho (s'il est permis de comparer les modernes aux anciens)
ne renferment-ils pas tous les principes de Socrate sur le sujet de
l'amour ? Socrate et Sappho me paraissent avoir dit la même chose,
l'un de l'amour des hommes, et l'autre de l'amour des femmes. Ils
annoncent qu'ils ont de nombreuses amours, et que la beauté est toujours
sûre de les enflammer. Ce qu'Alcibiade, Charmide, et Phaedre, sont pour
Socrate, Gyrinne, Athis et Anactorie, le sont pour Sappho ; et, si Socrate
a pour rivaux, sous certain rapport, Prodicus, Gorgias, Thrasymaque et
Protagoras; Sappho a pour rivales, Gorgo, et Andromède ; tantôt elle leur
fait des reproches : Tantôt elle les querelle. Tantôt elle le prend avec
elles sur le même ton d'ironie qui était si familier à Socrate. Salut à
Ion, dit Socrate. Mille choses à la jeune Polyanacte, dit Sappho.
Socrate dit qu'il n'avait voulu s'attacher à Alcibiade, qu'il aimait
depuis longtemps, qu'après l'avoir jugé propre à l'éloquence : et
Sappho dit : Tu me parais encore un enfant, tu n'es pas formée encore.
Socrate tourne en ridicule le costume et les attitudes des sophistes.
Sappho parle d'une femme en habit de paysanne. Diotime dit à Socrate que
l'amour n'est pas le fils de Vénus, mais son laquais et son domestique.
Sappho fait dire à Vénus, dans une de ses odes, Et, toi, le plus beau des
palets, Amour ! Diotime dit encore que l'amour est rayonnant de santé,
dans l'aisance, et qu'il a la pâleur de la mort, dans la pauvreté. Sappho
marie ces idées en comparant l'amour à de la douce-amère, à de
l'aigre-doux. Socrate traite l'amour de sophiste; Sappho le traite de
conteur. Les transports d'amour de Socrate pour Phaedre sont des transports
de Bacchante ; l'amour agite l'âme de Sappho, comme les vents agitent
les chênes des montagnes. Socrate gourmande Xantippe, qui pleure, parce
qu'il va mourir. Sappho en fait autant, envers sa fille ; car le
deuil ne doit point entrer dans la maison des nourrissons des Muses ; ce
serait contre les convenances. Le sophiste de Téos, Anacréon, ne
professait-il pas le même art, la même doctrine? Il est épris de tous les
beaux garçons, il leur donne à tous des éloges. Toutes ses hymnes sont
pleines de la chevelure de Smerdis, des yeux de Cléobule, et de la fleur
de jeunesse de Bathylle. Toutefois il montre de la décence dans ces
passages : J'aurais désiré passer ma jeunesse avec toi, car tu es d'un
naturel agréable ; et ailleurs, c'est une belle chose que l'amour, quand
il est légitime. Bien plus, il a mis son art à découvert : Les jeunes
gens sattachent à moi, par le charme de mes discours ; car je présente de
jolis tableaux ; je sais dire d'aimables choses. Alcibiade en disait
autant de Socrate. Il assimilait la grâce, l'élégance de ses discours, au
jeu de la flûte d'Olympus et de Marsyas. Qui osera, grands Dieux !
condamner de pareils sentiments, si ce n'est Timarque?
|
|