Texte grec :
[19] Ἐκεῖνο δέ γέ φημι, τοιαύτας ἡμῖν τὰς ἀφορμὰς
τῶν ἐπαινετικῶν τούτων λόγων εἶναι, ὡς χρὴ τὸν
ἐπαινοῦντα καὶ εἰκόσι καὶ ὁμοιώσεσι προσχρῆσθαι,
καὶ σχεδὸν ἐν τούτῳ τὸ μέγιστόν ἐστιν εὖ
εἰκάσαι· τὸ δὲ εὖ ὧδε μάλιστ´ ἂν κρίνοιτο, οὐκ
ἤν τις τοῖς ὁμοίοις παραβάλλῃ οὐδ´ ἢν πρὸς τὸ
ὑποδεέστερον ποιῆται τὴν παράθεσιν, ἀλλ´ ἢν
πρὸς τὸ ὑπερέχον ὡς οἷόν τε προσβιβάζῃ τὸ
ἐπαινούμενον.
Οἷον εἴ τις κύνα ἐπαινῶν εἴποι ἀλώπεκος εἶναι
μείζω αὐτὸν ἢ αἰλούρου, ἆρά σοι δοκεῖ ὁ τοιοῦτος
ἐπαινεῖν εἰδέναι; οὐκ ἂν εἴποις. ἀλλὰ μὴν οὐδ´
εἰ λύκῳ φαίη ἴσον αὐτὸν ὑπάρχειν, οὐδὲ οὕτως
μεγαλωστὶ ἐπῄνεσεν. ἀλλὰ ποῦ τὸ ἴδιον τοῦ
ἐπαίνου ἀποτελεῖται; ἢν ὁ κύων τῷ λέοντι ἐοικέναι
λέγηται καὶ μέγεθος καὶ ἀλκήν. ὡς ὁ τὸν
Ὠρίωνος κύνα ἐπαινῶν ἔφη ποιητὴς λεοντοδάμαν
αὐτόν· οὗτος γὰρ δὴ κυνὸς ἐντελὴς ἔπαινος.
Καὶ πάλιν εἴ τις Μίλωνα τὸν ἐκ Κρότωνος ἢ
Γλαῦκον τὸν ἐκ Καρύστου ἢ Πολυδάμαντα ἐπαινέσαι
θέλων ἔπειτα λέγοι ἰσχυρότερον ἕκαστον
αὐτῶν γυναικὸς γενέσθαι, οὐκ ἂν οἴει γελασθῆναι
αὐτὸν ἐπὶ τῇ ἀνοίᾳ τοῦ ἐπαίνου; ὅπου γε καὶ εἰ
ἑνὸς ἀνδρὸς ἔλεγεν ἀμείνω εἶναι αὐτόν, οὐδὲ τοῦτο
ἀπέχρησεν ἂν εἰς ἔπαινον. ἀλλὰ πῶς ἐπῄνεσε
ποιητὴς εὐδόκιμος τὸν Γλαῦκον, ‘οὐδὲ Πολυδεύκεος
βίαν’ φήσας ἀνατείνασθαι ἂν αὐτῷ ἐναντίας
τὰς χεῖρας ‘οὐδὲ σιδάρεον Ἀλκμάνας τέκος’;
ὁρᾷς ὁποίοις αὐτὸν θεοῖς εἴκασε· μᾶλλον δὲ καὶ
αὐτῶν ἐκείνων ἀμείνω ἀπέφαινεν. καὶ οὔτε αὐτὸς
ὁ Γλαῦκος ἠγανάκτησεν τοῖς ἐφόροις τῶν ἀθλητῶν
θεοῖς ἀντεπαινούμενος, οὔτε ἐκεῖνοι ἠμύναντο ἢ
τὸν Γλαῦκον ἢ τὸν ποιητὴν ὡς ἀσεβοῦντα περὶ
τὸν ἔπαινον, ἀλλὰ εὐδοκίμουν ἄμφω καὶ ἐτιμῶντο
ὑπὸ τῶν Ἑλλήνων, ὁ μὲν ἐπὶ τῇ ἀλκῇ, ὁ Γλαῦκος,
ὁ δὲ ποιητὴς ἐπί τε τοῖς ἄλλοις καὶ ἐπ´ αὐτῷ
τούτῳ μάλιστα τῷ ᾄσματι.
Μὴ δὴ θαυμάσῃς εἰ καὶ αὐτὸς εἰκάσαι βουλόμενος,
ὅπερ ἦν τῷ ἐπαινοῦντι ἀναγκαῖον,
ὑψηλοτέρῳ ἐχρησάμην τῷ παραδείγματι, τοῦτο
ὑποβαλόντος τοῦ λόγου.
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Traduction française :
[19] Je vous dirai plutôt que notre manière de composer
un éloge consiste à nous servir de comparaisons et
d'images, dont le principal mérite est la justesse. Pour y
atteindre, ce n'est pas assez que l'objet de la comparaison
soit parfaitement égal à celui de la louange ou ne lui soit
inférieur en aucun point; mais il faut, autant que
possible, élever l'être qu'on loue jusqu'à un objet qui
l'emporte de beaucoup sur lui. Par exemple, si, pour
faire l'éloge d'un chien, un disait qu'il est plus gros qu'un
renard ou qu'un chat, serait-ce, à votre avis, le louer
d'une manière convenable ? "Non", diriez-vous ; et,
quand on comparerait ce chien à un loup, l'éloge ne
serait pas encore fort grand. Comment donc l'amener à
sa perfection naturelle ? En disant : "Ce chien, par la
taille et la force, ressemble à un lion." Ainsi un poète,
pour faire l'éloge du chien d'Orion, l'appelle dompteur
de lions. Voilà l'éloge parfait d'un chien. De même, si
l'on veut louer un fameux athlète Milon de Crotone,
Glaucus de Caryste ou Polydamas, et qu'on dise de
lui qu'il est plus robuste qu'une femme, ne croirez-vous
pas que l'auteur d'un si sot éloge a voulu tourner son
héros en ridicule ? Eût-il exalté sa force au-dessus de
celle d'un homme, il serait encore loin d'avoir fait un
éloge véritable. Écoutez comme un poète célèbre fait
l'éloge de Glaucus :
"Ni le frère bouillant d'Hélène,
Ni le robuste fils d'Alcmène",
N'eût tendu contre lui ses bras musclés de fer.
Vous voyez comme il compare son héros à des dieux, ou
plutôt comme il l'élève au-dessus des immortels.
Cependant Glaucus ne sest pas fâché d'avoir été mis en
parallèle avec les dieux qui président à la lutte, et jamais
ceux-ci n'ont songé à tirer vengeance de Glaucus ou de
son poète, à cause de l'impiété de cet éloge. L'un et
l'autre, au contraire, ont joui de l'estime et de
l'admiration de toute la Grèce : Glaucus, à cause de sa
force ; le poète, pour ses autres chants et notamment à
cause de celui-ci. Ne soyez donc pas étonnée si, voulant
faire une comparaison nécessaire à tout éloge, je me suis
servi d'un exemple outré en apparence : le bon sens me
l'indiquait.
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