Texte grec :
[9] ΜΕΝΙΠΠΟΥ ΚΑΙ ΤΕΙΡΕΣΙΟΥ
<1> ΜΕΝΙΠΠΟΣ
Ὦ Τειρεσία͵ εἰ μὲν καὶ τυφλὸς εἶ͵ οὐκέτι διαγνῶναι ῥᾴδιον. ἅπασι γὰρ
ἡμῖν ὁμοῖα τὰ ὄμματα͵ κενά͵ μόνον δὲ αἱ χῶραι αὐτῶν· τὰ δ΄ ἄλλα οὐκέτ΄
ἂν εἰπεῖν ἔχοις͵ τίς ὁ Φινεὺς ἦν ἢ τίς ὁ Λυγκεύς. ὅτι μέντοι μάντις ἦσθα καὶ
ὅτι ἀμφότερα ἐγένου μόνος καὶ ἄρρην καὶ γυνή͵ τῶν ποιητῶν ἀκούσας
οἶδα. πρὸς τῶν θεῶν τοιγαροῦν εἰπέ μοι͵ ὁποτέρου ἡδίονος ἐπειράθης τῶν
βίων͵ ὁπότε ἀνὴρ ἦσθα͵ ἢ ὁ γυναικεῖος ἀμείνων ἦν;
ΤΕΙΡΕΣΙΑΣ
Παρὰ πολύ͵ ὦ Μένιππε͵ ὁ γυναικεῖος· ἀπραγμονέστερος γάρ. καὶ
δεσπόζουσι τῶν ἀνδρῶν αἱ γυναῖκες͵ καὶ οὔτε πολεμεῖν ἀνάγκη αὐταῖς
οὔτε παρ΄ ἔπαλξιν ἑστάναι οὔτ΄ ἐν ἐκκλησίᾳ διαφέρεσθαι οὔτ΄ ἐν
δικαστηρίοις ἐξετάζεσθαι.
ΜΕΝΙΠΠΟΣ
<2> Οὐ γὰρ ἀκήκοας͵ ὦ Τειρεσία͵ τῆς Εὐριπίδου Μηδείας͵ οἷα εἶπεν
οἰκτείρουσα τὸ γυναικεῖον͵ ὡς ἀθλίας οὔσας καὶ ἀφόρητόν τινα τὸν ἐκ
τῶν ὠδίνων πόνον ὑφισταμένας; ἀτὰρ εἰπέ μοι͵ ὑπέμνησε γάρ με τὰ τῆς
Μηδείας ἰαμβεῖακαὶ ἔτεκές ποτε͵ ὁπότε γυνὴ ἦσθα͵ ἢ στεῖρα καὶ ἄγονος
διετέλεσας ἐν ἐκείνῳ τῷ βίῳ;
ΤΕΙΡΕΣΙΑΣ
Τί τοῦτο͵ Μένιππε͵ ἐρωτᾷς;
ΜΕΝΙΠΠΟΣ
Οὐδὲν χαλεπόν͵ ὦ Τειρεσία· πλὴν ἀπόκριναι͵ εἴ σοι ῥᾴδιον.
ΤΕΙΡΕΣΙΑΣ
Οὐ στεῖρα μὲν ἤμην͵ οὐκ ἔτεκον δ΄ ὅλως.
ΜΕΝΙΠΠΟΣ
Ἱκανὸν τοῦτο· εἰ γὰρ καὶ μήτραν εἶχες͵ ἐβουλόμην εἰδέναι.
ΤΕΙΡΕΣΙΑΣ
Εἶχον δηλαδή.
ΜΕΝΙΠΠΟΣ
Χρόνῳ δέ σοι ἡ μήτρα ἠφανίσθη καὶ τὸ χωρίον τὸ γυναικεῖον
ἀπεφράγη καὶ οἱ μαστοὶ ἀπεστάθησαν καὶ τὸ ἀνδρεῖον ἀνέφυ καὶ
πώγωνα ἐξήνεγκας͵ ἢ αὐτίκα ἐκ γυναικὸς ἀνὴρ ἀνεφάνης;
ΤΕΙΡΕΣΙΑΣ
Οὐχ ὁρῶ τί σοι βούλεται τὸ ἐρώτημα· δοκεῖς δ΄ οὖν μοι ἀπιστεῖν͵ εἰ
τοῦθ΄ οὕτως ἐγένετο.
ΜΕΝΙΠΠΟΣ
Οὐ χρὴ γὰρ ἀπιστεῖν͵ ὦ Τειρεσία͵ τοῖς τοιούτοις͵ ἀλλὰ καθάπερ τινὰ
βλᾶκα μὴ ἐξετάζοντα͵ εἴτε δυνατά ἐστιν εἴτε καὶ μή͵ παραδέχεσθαι;
ΤΕΙΡΕΣΙΑΣ
<3> Σὺ οὖν οὐδὲ τὰ ἄλλα πιστεύεις οὕτω γενέσθαι͵ ὁπόταν ἀκούσῃς
ὅτι ὄρνεα ἐκ γυναικῶν ἐγένοντό τινες ἢ δένδρα ἢ θηρία͵ τὴν Ἀηδόνα ἢ τὴν
Δάφνην ἢ τὴν τοῦ Λυκάονος θυγατέρα;
ΜΕΝΙΠΠΟΣ
῎Ην που κἀκείναις ἐντύχω͵ εἴσομαι ὅ τι καὶ λέγουσι. σὺ δέ͵ ὦ
βέλτιστε͵ ὁπότε γυνὴ ἦσθα͵ καὶ ἐμαντεύου τότε ὥσπερ καὶ ὕστερον͵ ἢ ἅμα
ἀνὴρ καὶ μάντις ἔμαθες εἶναι;
ΤΕΙΡΕΣΙΑΣ
Ὁρᾷς; ἀγνοεῖς τὰ περὶ ἐμοῦ ἅπαντα͵ ὡς καὶ διέλυσά τινα ἔριν τῶν
θεῶν͵ καὶ ἡ μὲν ῞Ηρα ἐπήρωσέν με͵ ὁ δὲ Ζεὺς παρεμυθήσατο τῇ μαντικῇ
τὴν συμφοράν.
ΜΕΝΙΠΠΟΣ
Ἔτι ἔχῃ͵ ὦ Τειρεσία͵ τῶν ψευσμάτων; ἀλλὰ κατὰ τοὺς μάντεις τοῦτο
ποιεῖς· ἔθος γὰρ ὑμῖν μηδὲν ὑγιὲς λέγειν.
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Traduction française :
[9] MÉNIPPE ET TIRÉSIAS.
1. MÉNIPPE. Tirésias, es-tu bien aveugle ? Cela n'est pas
chose facile à reconnaître : nous avons tous également les
yeux vides ; et il ne nous en reste que la cavité, si bien qu'on ne
peut distinguer au juste qui fut autrefois Phinée ou Lyncée.
Quant à toi, je sais, pour l'avoir lu dans les poètes, que tu
étais devin, et que seul parmi tous, tu fus tour à tour
homme et femme. Dis-moi donc, je te prie, laquelle de ces
deux conditions t'a paru la plus agréable : aimais-tu mieux
être du sexe masculin ou du féminin ?
TIRÉSIAS. Je préférais être du féminin, Ménippe ! on y a
moins d'embarras : les femmes sont les souveraines des
hommes ; elles ne sont pas contraintes d'aller à la guerre,
de faire sentinelle sur les remparts, de disputer dans les
assemblées, de juger dans les tribunaux.
2. MÉNIPPE. Tu n'as donc pas entendu, Tirésias, la Médée
d'Euripide, plaignant la malheureuse condition des
femmes, condamnées aux douleurs insupportables de
l'enfantement ? Mais dis-moi, car les jambes de Médée m'y
font penser, lorsque tu étais femme, as-tu fait des enfants,
ou bien es-tu demeurée bréhaigne et stérile ?
TIRÉSIAS. Pourquoi cette question, Ménippe ?
MÉNIPPE. Je n'y vois rien d'embarrassant, Tirésias.
Réponds donc, si tu veux bien.
TIRÉSIAS. Je n'étais pas stérile, et pourtant je n'ai pas fait
d'enfant.
MÉNIPPE. Fort bien ; mais avais-tu ce qu'il faut pour en
faire ? Je suis curieux de le savoir.
TIRÉSIAS. J'avais ce qu'il faut.
MÉNIPPE. Est-ce insensiblement que tout cela s'est défait,
que les canaux sexuels se sont obstrués, que ta gorge a
disparu, que ta virilité s'est produite, que ton menton s'est
garni de barbe, ou bien as-tu passé tout à coup d'un sexe à l'autre ?
TIRÉSIAS. Je ne vois pas où tu veux en venir avec tes
questions ; mais tu ne me sembles pas bien convaincu que
cela se soit passé de la sorte.
MÉNIPPE. Pourquoi donc, Tirésias ? On n'en doit pas
douter, et il faut, comme un niais, accepter ces faits,
possibles ou non.
3. TIRÉSIAS. Tu ne crois pas non plus aux autres
métamorphoses, quand tu entends dire que des femmes
sont devenues oiseaux, arbres, bêtes sauvages, par
exemple, une Aédon, une Daphné et la fille de Lycaon?
MÉNIPPE. Si jamais je les rencontre, je saurai ce qu'elles en
disent. Pour toi, mon cher, quand tu étais femme,
connaissais-tu toujours l'avenir comme auparavant, on bien
n'étais-tu devin que quand tu étais homme ?
TIRÉSIAS. Tu le vois, tu ne sais pas toute mon histoire,
comment je décidai le différend qui s'était élevé entre les
dieux, comment Junon me rendit aveugle et Jupiter devin,
pour me consoler de ce malheur.
MÉNIPPE. Vraiment, Tirésias, tu tiens encore à ces
mensonges ! Au surplus, tu suis en cela l'usage des devins
vous avez l'habitude de ne rien dire de sensé.
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