[16] Ταῦτα μὲν οὖν ὡς φασὶ ταύτῃ, ἐπανάξω δὲ ὅθεν ἐξέβην.
Ἐπειδὴ γὰρ τοὺς μύθους προσήκει πρὸς παῖδας
ἤτοι τῷ φρονεῖν, κἂν ἄνδρες ὦσιν, ἢ καὶ τοῖς καθ´ ἡλικίαν
παιδαρίοις ἀπαγγέλλειν, ἐξεταστέον ὅπως μήτε εἰς θεοὺς
μήτε εἰς ἀνθρώπους τι πλημμελὲς ἤ, καθάπερ ἔναγχος,
δυσσεβές τι ῥηθείη· καὶ προσέτι τοῦτο ἐν ἅπασιν ἀκριβῶς
βασανιστέον, εἰ πιθανός, εἰ τοῖς πράγμασι προσφυής, εἰ
μῦθός ἐστιν ἀληθῶς ὁ πλαττόμενος. Ἐπεὶ τό γε νῦν ὑπὸ
σοῦ πεποιημένον οὐ μῦθός ἐστι σός, ὡς ἔφης, καίτοι
τοῦτό γε ἐνεανιεύσω· ἀλλ´ ὁ μὲν μῦθος, μῦθός ἐστι
παλαιός, ἐφήρμοσας δὲ αὐτὸν σὺ πράγμασιν ἑτέροις,
ὅπερ οἶμαι ποιεῖν εἰώθασιν οἱ τῇ τροπικῇ χρώμενοι τῶν
νοημάτων κατασκευῇ· πολὺς δὲ ἐν τούτοις ὁ Πάριός ἐστι
ποιητής. Ἔοικας οὖν οὐδὲ πεποιηκὼς μῦθον, ὦ ξυνετώτατε,
μάτην νεανιεύεσθαι· καίτοι τοῦτο τίτθης ἔργον
ἐστὶν εὐτραπέλου. Πλουτάρχου δὲ εἰ τὰ μυθικὰ διηγήματα
τῶν σῶν εἴσω χειρῶν ἀφῖκτο, οὔποτ´ ἂν ἐλελήθει σε τίνι
διαφέρει πλάσαι τε ἐξ ἀρχῆς μῦθον καὶ τὸν κείμενον
ἐφαρμόσαι πράγμασιν οἰκείοις. Ἀλλ´, ἵνα μή σε «τὴν
σύντομον ὁδεύοντα» βίβλοις ἐμβαλὼν μακραῖς καὶ δυσελίκτοις
ἐπίσχω, μικρὰ καὶ πεδήσω· σὺ δὲ οὐδὲ τὸν Δημοσθένους
ἀκήκοας μῦθον, ὃν ἐποίησεν ὁ Παιανιεὺς πρὸς
τοὺς Ἀθηναίους ἡνίκα ὁ Μακεδὼν ἐξῄτει τοὺς Ἀθηναίους
ῥήτορας; Ἐχρῆν οὖν τι τοιοῦτο πλάσαι· ἢ πρὸς τῶν θεῶν
ἔργον ἦν εἰπεῖν μυθάριόν τι τοιοῦτον; Ἀναγκάσεις δέ με
καὶ μυθοποιὸν γενέσθαι.
| [16] Mais revenons au point dont je me suis écarté. La fable
étant destinée à l'instruction des hommes faits ou à celle des
enfants d'un âge tendre, on doit veiller à ce qu'elle ne contienne
rien qui puisse blesser les dieux ou les hommes, rien qui
soit impie comme celle que tu nous as débitée récemment. On
doit encore, avant tout, examiner scrupuleusement si elle est
croyable, appropriée aux choses et vraie dans sa fiction. Mais
la fable que tu as composée n'est point une vraie fable comme
tu l'as dit, quoique tu lui aies donné un air de jeunesse. Ta
fable est une vieille fable que tu as ajustée à d'autres circonstances :
c'est ce que pratiquent, ce me semble, les auteurs qui
habillent leurs pensées d'un style figuré. Il y en a de nombreux
exemples dans le poète de Paros {Archiloque}. Tu m'as donc l'air,
homme avisé, en faisant ta fable, d'en être pour tes frais de jeunesse :
tu n'as écrit qu'un conte de nourrice bien élevée. Si les récits
mythiques de Plutarque te fussent tombés entre les mains, tu
n'ignorerais pas la différence entre inventer une fable originale
et en ajuster une toute faite aux circonstances du moment.
Mais je ne veux point te lancer dans des volumes longs et difficiles
à dérouler, toi qui aimes le chemin le plus court ; je ne
veux pas te faire perdre un instant ni entraver ta marche.
N'as-tu pas entendu parler de la fable de Démosthène, de celle
que l'orateur de Péania raconta aux Athéniens, lorsque le roi
de Macédoine demanda qu'on lui livrât les orateurs attiques '?
Tu aurais dû nous donner quelque fiction du même genre, ou
bien, j'en atteste les dieux, à quoi bon nous débiter ce fabliau?
Tu veux donc me forcer à me faire fabuliste?
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