Texte grec :
[2,7] ζʹ. Καὶ ὅτι οὐ ψόφος ταῦτα τὰ ῥήματα, καὶ ταύτης τῆς
μεγάλης δυνάμεως ἑτέραν πάλιν μείζονα μεταξὺ ζητοῦντες
εὑρήκαμεν. Οὐ γὰρ δὴ μόνον οὐ δυναμένους, ἀλλ´
οὐδὲ βουλομένους ἐκείνων βλάψαι τινὰς ὄψεταί τις· ὥστε
διπλᾶ τὰ τῆς ἀσφαλείας αὐτῷ. Τί οὖν θειότερον γένοιτ´
ἂν ταύτης τῆς ζωῆς, ἐν ᾗ μηδεὶς μήτε ἐθελήσῃ, μήτε,
ἂν ἐθέλῃ, δυνήσεται ποιῆσαι κακῶς; καὶ μάλιστα, ὅταν
τὸ μὴ θέλειν οὐκ ἐκ τοῦ μὴ δύνασθαι γίνηται, καθάπερ ἐπὶ
πολλῶν, ἀλλ´ ἐκ τοῦ μηδεμίαν αἰτίαν εὑρεῖν. Ἐπεὶ, εἴ γε
τοῦτο ἦν καθ´ ἑαυτὸ, τὸ μὴ δύνασθαι λέγω, οὐδὲν τοσοῦτον ἦν·
μῖσος γὰρ ἂν ἐτέχθη πολὺ τοῖς θέλουσι μὲν,
οὐ δυναμένοις δὲ ἀδικεῖν· οὐ μικρὸς δὲ καὶ οὗτος μακαριότητος
τρόπος. Αὐτὸ δὴ οὖν τοῦτο ἐξετάσωμεν, εἰ δοκεῖ,
πρῶτον. Τίς οὖν, εἰπέ μοι, τὸν οὐδὲν κοινὸν ἔχοντα πρὸς
ἀνθρώπους, οὐ συμβολαίων ἕνεκεν, οὐ γῆς, οὐ χρημάτων,
οὐ πραγμάτων, οὐκ ἄλλου οὐδενὸς, ἐθελήσει βλάψαι
ποτέ; ὑπὲρ ποίας χώρας φιλονεικήσει πρὸς αὐτόν; ὑπὲρ
τίνων ἀνδραπόδων; ὑπὲρ ποίας δόξης; τί δεδοικώς; ὑπὸ
τίνος δακνόμενος; Ἢ γὰρ φθόνῳ, ἢ δέει, ἢ ὀργῇ κινούμεθα
πρὸς τὸ βλάπτειν ἑτέρους. Ἀλλ´ οὗτος ὁ βασιλικώτατος πάντων
ἐστὶν ἀνώτερος. Τίς γὰρ φθονήσει τῷ (p. 342) πάντων καταγελῶντι
τούτων, περὶ ἃ κόπτονται ἕτεροι
καὶ σπουδάζουσι; τίς δὲ ὀργιεῖται μηδὲν ἠδικημένος; τίς
δὲ φοβηθήσεται, μηδὲν ὑποπτεύων; Οὐκοῦν, ὅτι μὲν οὐ
βουλήσονταί τινες ἀδικεῖν, ἐκ τούτου δῆλον· ὅτι δὲ οὐδ´
ἂν ἐθέλωσι δυνήσονται, καὶ τοῦτο ὁμοίως ἐκείνῳ δῆλον.
Οὐ γὰρ ἔχει τὰς ἀφορμὰς, οὐδὲ τὰς λαβὰς, ὅθεν ἄν τις
αὐτὸν κατάσχοι· ἀλλ´ ὥσπερ ἀετὸς ὑψηλὰ πετόμενος
παγίδι στρουθῶν οὐκ ἂν ἁλῴη ποτὲ, οὕτω καὶ οὗτος.
Πόθεν γὰρ αὐτόν τις βλάψαι δυνήσεται; Χρήματα οὐκ
ἔστι παρ´ αὐτῷ, ἵνα ἀπειλήσῃ ζημίαν· πατρίδα οὐκ
ἔχει, ἵνα τὴν ὑπερορίαν ἐπανατείνηται· δόξης οὐκ ἐφίεται,
ἵνα εἰς ἀτιμίαν ἀγάγῃ· ἕν ἐστι τὸ λειπόμενον, θάνατος·
ἀλλ´ ἐνταῦθα μάλιστα οὐ δυνήσεται αὐτὸν λυπῆσαί ποτε, ἀλλὰ καὶ
ὠφελήσει τὰ μέγιστα. Πρὸς γὰρ
ἑτέραν αὐτὸν πέμπει ζωὴν, τὴν ποθουμένην αὐτῷ, καὶ
δι´ ἣν ἅπαντα πράττει καὶ πραγματεύεται· ὥστε τοῦτο
ἀπαλλαγὴ πόνων ἐστὶ, καὶ οὐ τιμωρία, ἀλλ´ ἱδρώτων
λύσις καὶ ἀνάπαυλα. Βούλει καὶ ἕτερον τρόπον τῆς δυνάμεως
αὐτοῦ μαθεῖν, πολλῷ τούτου φιλοσοφώτερον;
Κἂν γὰρ μυρία τις αὐτὸν ἐργάσηται δεινὰ, κἂν μαστίξῃ,
κἂν δήσῃ, τὸ μὲν σῶμα πλήττεται διὰ τὴν φύσιν, ἡ
δὲ ψυχὴ ἄπληκτος διὰ τὴν φιλοσοφίαν μένει. Οὐδὲ γὰρ
ἁλίσκεται θυμῷ, οὐ χειροῦται μίσει, οὐκ ἀπεχθείᾳ καταγωνίζεται.
Καὶ οὔπω τοῦτο μέγα, ἀλλὰ τὸ πολλῷ τούτου θαυμαστότερον·
καθάπερ γὰρ εὐεργέτας καὶ προστάτας, οὕτω φιλεῖ τοὺς τὰ
τοιαῦτα ἐργασαμένους, οὕτως εὔχεται πάντα αὐτοῖς γενέσθαι
τὰ ἀγαθά. Καίτοι τί τοσοῦτον ἔδωκας ἂν αὐτῷ, εἰ μυριάκις αὐτὸν
βασιλέα τῆς οἰκουμένης ἐποίησας, καὶ ἐπὶ μυρίοις ἔτεσι τὴν
βασιλείαν ἐξέτεινας; πόσης ἁλουργίδος τοῦτο τὸ κτῆμα,
πόσης ἀρχῆς, πόσης δόξης οὐ τιμιώτερον; τί οὐκ ἂν
προήκατο, ὥστε ψυχὴν τοιαύτην λαβεῖν; Ἐμοὶ δοκεῖ καὶ
τοὺς σφόδρα φιλοσωμάτους ἑλεῖν ἂν ταύτης τῆς ζωῆς
τὴν ἐπιθυμίαν. Βούλει καὶ ἑτέρωθεν τὴν δύναμιν ἰδεῖν
τοῦ ἀνδρὸς θαυμαστοτέραν καὶ ἡδίστην, ἀπὸ μέρους
ταπεινοτέρου μὲν, σοὶ δὲ μάλιστα ἡδίστου; Τὰ μὲν γὰρ
εἰρημένα δείκνυσιν αὐτὸν ἀχείρωτον ὄντα καὶ ἀνάλωτον·
ὅτι δὲ καὶ ἑτέρων προστήσεται, καὶ ἐν ἀσφαλείᾳ καταστήσει
πολλῇ, τοῦτο ἴσως ζητεῖς μαθεῖν. Τοῦτο μὲν οὖν
πρώτη ἐστὶ προστασία, τὸ καὶ ἑτέρους εἰς τὸν αὐτὸν
ζῆλον ἀγαγεῖν, καὶ οὕτω ποιῆσαι ἰσχυρούς· εἰ δὲ μὴ
θέλοιεν, ἀλλὰ τὴν ἀνθρωπινωτέραν ταύτην καὶ γηΐνην
μετέρχοιντο ζωὴν, καὶ ἐν ταύτῃ πάλιν ὄψει δύναμιν
αὐτὸν ἔχοντα τοῦ πλουτοῦντος σοῦ μείζονα τὸν μηδὲν
ἔχοντα δι´ αὐτὸ τοῦτο μάλιστα τὸ μηδὲν ἔχειν. Τίς γὰρ
μετὰ πλείονος ἐξουσίας διαλέξεται βασιλεῖ καὶ ἐπιτιμήσει;
σὺ ὁ τοσαῦτα κεκτημένος, καὶ ὑπεύθυνος ὢν διὰ
ταῦτα καὶ τοῖς ἐκείνου δούλοις, καὶ ὑπὲρ ἁπάντων τρέμων,
καὶ μυρίας αὐτῷ παρέχων λαβὰς, εἰ βούλοιτό σε
ἀδικεῖν ὀργισθεὶς, ἢ οὗτος ὁ τῶν ἐκείνου χειρῶν ἀνώτερος ὤν;
Βασιλεῦσι μὲν γὰρ οὗτοι μάλιστα διελέχθησαν
μετ´ ἐξουσίας πολλῆς, ὅσοι πάντων ἐγένοντο τῶν βιωτικῶν ἐκτός.
Τίνι δὲ μᾶλλον εἴξει καὶ ἐπακούσεται ὁ ἐν
δυνάμει ὢν, καὶ ἐν τοῖς βασιλείοις στρεφόμενος, τῷ
πλουτοῦντί σοι, καὶ ὃν ὑποπτεύει ἕνεκα χρημάτων
πολλὰ πολλάκις ποιεῖν, ἢ τῷ μίαν ἔχοντι τῶν ἐπιταγμάτων
ὑπόθεσιν, τὴν εἰς τοὺς ἄλλους φιλανθρωπίαν; Τίνα
τιμήσει καὶ θαυμάσεται, περὶ οὗ μηδὲν ταπεινὸν ὑποπτεῦσαι
δύναιτ´ ἂν, ἢ τὸν καὶ τῶν οἰκετῶν ταπεινότερον
(p. 343) εἶναι νομιζόμενον τῶν αὐτοῦ; Καθάπερ γὰρ ἐν χρήμασιν,
ὅταν ἀναλίσκειν δέοι, ἐκείνοις ὑπακούουσι
μᾶλλον, οὕτω καὶ προστῆναι κελεύουσιν.
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Traduction française :
[2,7] Pour vous démontrer que ces paroles ne sont point un vain bruit, voici que la réflexion
nous a fait découvrir une autre puissance plus grande encore : le solitaire est plus
quinvulnérable, personne na même la volonté de le blesser; de là, double sûreté pour votre
fils. Or, quoi de plus divin quune vie dans laquelle personne ne voudra lui faire du tort, dans
laquelle personne ne le pourra, à supposer quil le veuille? surtout quand un si rare avantage
prend sa source, non pas dans limpuissance de nuire, comme il arrive souvent, mais dans
limpossibilité de trouver aucun prétexte. Sil ny avait que cette raison, je veux dire
limpuissance, ce ne serait pas si grande merveille; car une grande haine naîtrait dans le coeur
de ceux qui voudraient faire du mal, sans pouvoir atteindre leur but. Cest donc là, vous
lavouerez, un genre de bonheur qui nest point à dédaigner.
Examinons dabord attentivement cette situation privilégiée du moine, si vous le
voulez bien. Qui donc, dites-moi, voudrait attaquer celui qui na rien de commun avec les
hommes, ni pactes, ni terres, ni argent, ni affaires, ni quoi que ce soit? Pour quel héritage,
pour quels esclaves, pour quel point dhonneur, pour quelle charge, pourrait-on lui faire une
injuste querelle? Quelle crainte, quel ressentiment inspire-t-il, pour quon veuille lui nuire? La
haine, la crainte, la colère, telles sont les raisons qui nous portent à faire du mal aux autres.
Mais votre fils, le plus royal des hommes, est élevé bien au-dessus de toutes ces passions.
Comment porter envie à celui qui se rit de tous les biens pour lesquels tant dautres se peinent
et sempressent? Comment se fâcher sans avoir reçu aucune injure? Que craindre dun homme
dont la vie est si sainte quelle exclut même les soupçons? Il est donc certain que personne ne
voudra lui nuire, et il nest pas moins évident que, quand même on le voudrait, on ne le
pourrait faire. Il noffre ni prétexte ni prise aux attaques; il est comme laigle qui, planant
dans les hauteurs, ne saurait être pris au piège destiné au passereau. De quel côté pourrait-on
lattaquer, par quel endroit latteindre? par la perte de sa fortune? il ne possède rien. Par le
bannissement? il na point de patrie. Par le déshonneur et linfamie? il ne cherche point la
gloire du siècle. Il ne reste plus quune chose, la mort; encore, loin de pouvoir lui nuire par là,
on lui rendra le plus grand service. On lenverra à une autre vie après laquelle il soupire, et
pour laquelle il fait tout et met tout en oeuvre; la mort est pour lui, non un châtiment, mais la
cessation des travaux, le relâche et le repos après les fatigues.
Voulez-vous connaître un autre genre de puissance quil possède, et qui est bien plus
spécialement lapanage de la sagesse? Quand on lui ferait subir tous les maux imaginables,
quand on le frapperait, quand on lenchaînerait, son corps en souffrirait, étant passible par sa
nature, mais son âme resterait invulnérable, grâce à la sagesse. Il ne se laisse point saisir à la
colère, ni dominer à lenvie, ni posséder à la haine. Chose plus admirable encore, il chérit
comme des bienfaiteurs et des protecteurs ceux qui lui font ces injures, et il souhaite que tous
les événements de leur vie tournent à leur bonheur. Lui auriez-vous procuré un tel privilége si
vous laviez établi roi de toute la terre, et si vous aviez étendu son règne à des millions
dannées? Quelle pompe, quel empire, quelle gloire pourrait approcher de ce bien? Un pareil
état de lâme ne mériterait-il pas dêtre acheté au prix des plus grands sacrifices? Les hommes
les plus attachés à la matière désireraient une pareille vie. Voulez-vous que nous vous fassions
voir encore une autre puissance du solitaire, puissance plus merveilleuse et très agréable,
prise, il est vrai, du côté le plus humble de lhomme, du côté du corps, mais qui ne laissera pas
de vous charmer extrêmement?
Nous venons de voir quil ne peut être blessé ni même attaqué par personne. Est-il vrai
quil peut en outre protéger les autres et les faire participer à la sécurité dont il jouit? Ce quil
pourrait faire de mieux pour cela, ce serait évidemment de leur communiquer ses sentiments,
ses goûts et sa force, en les initiant à son genre de vie. Je suppose quil ait affaire à quelquun
qui ne veuille pas entrer dans cette voie parfaite; je vous montrerai, même dans ce cas, qu'un
homme qui ne possède rien est, par cela même quil ne possède rien, plus puissant que vous,
avec toutes vos richesses. Sil sagit, par exemple, de faire des représentations à lempereur,
qui de vous deux lui parlera avec plus de liberté? Est-ce vous qui possédez de si grands biens,
par lesquels vous dépendez même des esclaves du prince, qui tremblez pour toutes vos
richesses, qui seriez vulnérable par tant dendroits, si dans un mouvement de colère il voulait
vous frapper injustement, ou bien ce pauvre, qui est établi dans une région trop haute pour
que la main dun roi puisse y atteindre? Les hommes qui parlent aux rois avec la plus grande
liberté sont ceux qui se sont placés en dehors de toutes les choses de la terre. A qui lhomme
qui est au pouvoir, lhôte des demeures royales cédera-t-il, obéira-t-il plutôt: est-ce à vous, qui
êtes riche, et quil soupçonne de travailler à vous enrichir encore, ou bien à celui quil sait
navoir quun seul mobile de toutes ses actions, sa charité pour ses frères? A qui accordera-t-il
des égards et du respect? Nest-ce pas à lhomme en qui il ne peut soupçonner aucun
sentiment bas, plutôt quà celui quil estime moins que ses serviteurs? Je dis ses serviteurs,
parce quil leur demande conseil au moins pour les dépenses à faire, pour les secours à
donner, faveur quil ne daignerait pas vous accorder à vous.
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