Texte grec :
[19,150] νύκτας δ᾽ ἀλλύεσκον, ἐπεὶ δαΐδας παραθείμην.
ὣς τρίετες μὲν ἔληθον ἐγὼ καὶ ἔπειθον Ἀχαιούς·
ἀλλ᾽ ὅτε τέτρατον ἦλθεν ἔτος καὶ ἐπήλυθον ὧραι,
μηνῶν φθινόντων, περὶ δ᾽ ἤματα πόλλ᾽ ἐτελέσθη,
καὶ τότε δή με διὰ δμῳάς, κύνας οὐκ ἀλεγούσας,
155 εἷλον ἐπελθόντες καὶ ὁμόκλησαν ἐπέεσσιν.
ὣς τὸ μὲν ἐξετέλεσσα, καὶ οὐκ ἐθέλουσ᾽, ὑπ᾽ ἀνάγκης·
νῦν δ᾽ οὔτ᾽ ἐκφυγέειν δύναμαι γάμον οὔτε τιν᾽ ἄλλην
μῆτιν ἔθ᾽ εὑρίσκω· μάλα δ᾽ ὀτρύνουσι τοκῆες
γήμασθ᾽, ἀσχαλάᾳ δὲ πάϊς βίοτον κατεδόντων,
160 γιγνώσκων· ἤδη γὰρ ἀνὴρ οἶός τε μάλιστα
οἴκου κήδεσθαι, τῷ τε Ζεὺς κῦδος ὀπάζει.
ἀλλὰ καὶ ὥς μοι εἰπὲ τεὸν γένος, ὁππόθεν ἐσσί.
οὐ γὰρ ἀπὸ δρυός ἐσσι παλαιφάτου οὐδ᾽ ἀπὸ πέτρης."
τὴν δ᾽ ἀπαμειβόμενος προσέφη πολύμητις Ὀδυσσεύς·
165 "ὦ γύναι αἰδοίη Λαερτιάδεω Ὀδυσῆος,
οὐκέτ᾽ ἀπολλήξεις τὸν ἐμὸν γόνον ἐξερέουσα;
ἀλλ᾽ ἔκ τοι ἐρέω· ἦ μέν μ᾽ ἀχέεσσί γε δώσεις
πλείοσιν ἢ ἔχομαι· ἡ γὰρ δίκη, ὁππότε πάτρης
ἧς ἀπέῃσιν ἀνὴρ τόσσον χρόνον ὅσσον ἐγὼ νῦν,
170 πολλὰ βροτῶν ἐπὶ ἄστε᾽ ἀλώμενος, ἄλγεα πάσχων·
ἀλλὰ καὶ ὣς ἐρέω ὅ μ᾽ ἀνείρεαι ἠδὲ μεταλλᾷς.
Κρήτη τις γαῖ᾽ ἔστι, μέσῳ ἐνὶ οἴνοπι πόντῳ,
καλὴ καὶ πίειρα, περίρρυτος· ἐν δ᾽ ἄνθρωποι
πολλοί, ἀπειρέσιοι, καὶ ἐννήκοντα πόληες.
175 ἄλλη δ᾽ ἄλλων γλῶσσα μεμιγμένη· ἐν μὲν Ἀχαιοί,
ἐν δ᾽ Ἐτεόκρητες μεγαλήτορες, ἐν δὲ Κύδωνες,
Δωριέες τε τριχάϊκες δῖοί τε Πελασγοί.
τῇσι δ᾽ ἐνὶ Κνωσός, μεγάλη πόλις, ἔνθα τε Μίνως
ἐννέωρος βασίλευε Διὸς μεγάλου ὀαριστής,
180 πατρὸς ἐμοῖο πατήρ, μεγαθύμου Δευκαλίωνος
Δευκαλίων δ᾽ ἐμὲ τίκτε καὶ Ἰδομενῆα ἄνακτα·
ἀλλ᾽ ὁ μὲν ἐν νήεσσι κορωνίσιν Ἴλιον ἴσω
ᾤχεθ᾽ ἅμ᾽ Ἀτρείδῃσιν, ἐμοὶ δ᾽ ὄνομα κλυτὸν Αἴθων,
ὁπλότερος γενεῇ· ὁ δ᾽ ἄρα πρότερος καὶ ἀρείων.
185 ἔνθ᾽ Ὀδυσῆα ἐγὼν ἰδόμην καὶ ξείνια δῶκα.
καὶ γὰρ τὸν Κρήτηνδε κατήγαγεν ἲς ἀνέμοιο,
ἱέμενον Τροίηνδε παραπλάγξασα Μαλειῶν·
στῆσε δ᾽ ἐν Ἀμνισῷ, ὅθι τε σπέος Εἰλειθυίης,
ἐν λιμέσιν χαλεποῖσι, μόγις δ᾽ ὑπάλυξεν ἀέλλας.
190 αὐτίκα δ᾽ Ἰδομενῆα μετάλλα ἄστυδ᾽ ἀνελθών·
ξεῖνον γάρ οἱ ἔφασκε φίλον τ᾽ ἔμεν αἰδοῖόν τε.
τῷ δ᾽ ἤδη δεκάτη ἢ ἑνδεκάτη πέλεν ἠὼς
οἰχομένῳ σὺν νηυσὶ κορωνίσιν Ἴλιον εἴσω.
τὸν μὲν ἐγὼ πρὸς δώματ᾽ ἄγων ἐῢ ἐξείνισσα,
195 ἐνδυκέως φιλέων, πολλῶν κατὰ οἶκον ἐόντων·
καί οἱ τοῖς ἄλλοις ἑτάροις, οἳ ἅμ᾽ αὐτῷ ἕποντο,
δημόθεν ἄλφιτα δῶκα καὶ αἴθοπα οἶνον ἀγείρας
καὶ βοῦς ἱρεύσασθαι, ἵνα πλησαίατο θυμόν.
ἔνθα δυώδεκα μὲν μένον ἤματα δῖοι Ἀχαιοί·
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Traduction française :
[19,150] et la nuit je défaisais mon ouvrage,
à la lueur des flambeaux. C'est ainsi que trois ans durant,
je sus cacher ma ruse et tromper les Achéens. Mais quand
vint la quatrième année, que les mois s'écoulant eurent
ramené les saisons, que les jours se furent succédé en
grand nombre, par la trahison des servantes, chiennes
sans coeur, ils survinrent, me surprirent et m'accablèrent
de leurs reproches. Alors je dus achever ce voile,
oh malgré moi : mais il le fallait bien. Maintenant je ne
puis me dérober à cette union, je ne vois plus qu'inventer :
mes parents me pressent de me marier, mon fils s'impatiente,
à voir ces gens manger son avoir. Il s'en aperçoit;
car c'est maintenant un homme, capable de gouverner
son bien, et Zeus lui donne le noble sentiment de sa
dignité. Malgré tout, dis-moi ton origine; d'où es-tu? Car tu
n'es pas né, je pense, d'un chêne légendaire ou d'une roche.
Ulysse l'avisé lui répondit : « Digne femme d'Ulysse,
le fils de Laerte, tu ne veux donc pas renoncer à m'interroger
sur cette origine. Eh bien, je vais te la dire : assurément
tu me feras éprouver des chagrins plus nombreux
que ceux dont je suis déjà la proie. Car c'est fatalement
le sort de l'homme qui aussi longtemps que moi est
absent de sa patrie : il va errant en de nombreuses cités
de mortels, et la souffrance le tient. Cependant, cela ne
m'empêchera pas de répondre à tes questions et de satisfaire
ton désir. Il est une terre, la Crète, située dans la
mer vineuse : elle est belle, grasse, entourée d'eau : nombreux
sont ses habitants; on ne saurait les compter; elle
a quatre-vingt-dix villes. Toutes les langues s'y rencontrent;
car on trouve des Achéens et des Étéocrétois
au grand coeur, et des Doriens formant trois tribus, et de
nobles Pélasges. Au nombre de ces villes est Cnossos,
une grande cité, où dès l'âge de neuf ans régna Minos,
confident du grand Zeus. C'est le père de mon père, le
généreux Deucalion. Deucalion m'engendra, ainsi que le
puissant prince Idoménée. Or celui-ci partit pour Ilios
avec les Atrides sur des vaisseaux recourbés. J'étais le
plus jeune : j'avais un nom glorieux, Éthon. Idoménée
était l'aîné et le plus brave. C'est en Crète que je vis
Ulysse et lui donnai des présents d'hospitalité. En
effet, il fut, quand il se dirigeait vers Troie, rejeté, par
la force du vent, du Malée sur le rivage de Crète : il tint ses
vaisseaux à l'ancre à Amnisos, où est la grotte d'Ilithye
dans un port difficile, et il n'échappa qu'avec peine à la
tempête. Aussitôt, étant monté à la ville, il demanda
Idoménée qui était, disait-il, son hôte aimé et respecté.
Mais Aurore avait paru dix ou onze fois déjà depuis que
celui-ci était parti vers Ilios, sur ses vaisseaux recourbés.
Ce fut donc moi qui, conduisant Ulysse vers notre
demeure, lui donnai l'hospitalité; je le traitai amicalement
avec grandes prévenances. Nous avions riche maison;
à lui et aux compagnons qu'il avait amenés, je
donnai, produit d'une collecte faite parmi le peuple,
farine, vin aux reflets de feu, boeufs destinés au sacrifice,
de quoi enfin contenter pleinement leurs désirs. Chez
nous, les nobles Achéens restèrent douze jours :
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