Texte grec :
[8,500] ἔνθεν ἑλὼν ὡς οἱ μὲν ἐυσσέλμων ἐπὶ νηῶν
βάντες ἀπέπλειον, πῦρ ἐν κλισίῃσι βαλόντες,
Ἀργεῖοι, τοὶ δ᾽ ἤδη ἀγακλυτὸν ἀμφ᾽ Ὀδυσῆα
ἥατ᾽ ἐνὶ Τρώων ἀγορῇ κεκαλυμμένοι ἵππῳ·
αὐτοὶ γάρ μιν Τρῶες ἐς ἀκρόπολιν ἐρύσαντο.
505 ὣς ὁ μὲν ἑστήκει, τοὶ δ᾽ ἄκριτα πόλλ᾽ ἀγόρευον
ἥμενοι ἀμφ᾽ αὐτόν· τρίχα δέ σφισιν ἥνδανε βουλή,
ἠὲ διαπλῆξαι κοῖλον δόρυ νηλέι χαλκῷ,
ἢ κατὰ πετράων βαλέειν ἐρύσαντας ἐπ᾽ ἄκρης,
ἢ ἐάαν μέγ᾽ ἄγαλμα θεῶν θελκτήριον εἶναι,
510 τῇ περ δὴ καὶ ἔπειτα τελευτήσεσθαι ἔμελλεν·
αἶσα γὰρ ἦν ἀπολέσθαι, ἐπὴν πόλις ἀμφικαλύψῃ
δουράτεον μέγαν ἵππον, ὅθ᾽ ἥατο πάντες ἄριστοι
Ἀργείων Τρώεσσι φόνον καὶ κῆρα φέροντες.
ἤειδεν δ᾽ ὡς ἄστυ διέπραθον υἷες Ἀχαιῶν
515 ἱππόθεν ἐκχύμενοι, κοῖλον λόχον ἐκπρολιπόντες.
ἄλλον δ᾽ ἄλλῃ ἄειδε πόλιν κεραϊζέμεν αἰπήν,
αὐτὰρ Ὀδυσσῆα προτὶ δώματα Δηιφόβοιο
βήμεναι, ἠύτ᾽ Ἄρηα σὺν ἀντιθέῳ Μενελάῳ.
κεῖθι δὴ αἰνότατον πόλεμον φάτο τολμήσαντα
520 νικῆσαι καὶ ἔπειτα διὰ μεγάθυμον Ἀθήνην.
ταῦτ᾽ ἄρ᾽ ἀοιδὸς ἄειδε περικλυτός· αὐτὰρ Ὀδυσσεὺς
τήκετο, δάκρυ δ᾽ ἔδευεν ὑπὸ βλεφάροισι παρειάς.
ὡς δὲ γυνὴ κλαίῃσι φίλον πόσιν ἀμφιπεσοῦσα,
ὅς τε ἑῆς πρόσθεν πόλιος λαῶν τε πέσῃσιν,
525 ἄστεϊ καὶ τεκέεσσιν ἀμύνων νηλεὲς ἦμαρ·
ἡ μὲν τὸν θνήσκοντα καὶ ἀσπαίροντα ἰδοῦσα
ἀμφ᾽ αὐτῷ χυμένη λίγα κωκύει· οἱ δέ τ᾽ ὄπισθε
κόπτοντες δούρεσσι μετάφρενον ἠδὲ καὶ ὤμους
εἴρερον εἰσανάγουσι, πόνον τ᾽ ἐχέμεν καὶ ὀιζύν·
530 τῆς δ᾽ ἐλεεινοτάτῳ ἄχεϊ φθινύθουσι παρειαί·
ὣς Ὀδυσεὺς ἐλεεινὸν ὑπ᾽ ὀφρύσι δάκρυον εἶβεν.
ἔνθ᾽ ἄλλους μὲν πάντας ἐλάνθανε δάκρυα λείβων,
Ἀλκίνοος δέ μιν οἶος ἐπεφράσατ᾽ ἠδ᾽ ἐνόησεν,
ἥμενος ἄγχ᾽ αὐτοῦ, βαρὺ δὲ στενάχοντος ἄκουσεν.
535 αἶψα δὲ Φαιήκεσσι φιληρέτμοισι μετηύδα·
"κέκλυτε, Φαιήκων ἡγήτορες ἠδὲ μέδοντες,
Δημόδοκος δ᾽ ἤδη σχεθέτω φόρμιγγα λίγειαν·
οὐ γάρ πως πάντεσσι χαριζόμενος τάδ᾽ ἀείδει.
ἐξ οὗ δορπέομέν τε καὶ ὤρορε θεῖος ἀοιδός,
540 ἐκ τοῦ δ᾽ οὔ πω παύσατ᾽ ὀιζυροῖο γόοιο
ὁ ξεῖνος· μάλα πού μιν ἄχος φρένας ἀμφιβέβηκεν.
ἀλλ᾽ ἄγ᾽ ὁ μὲν σχεθέτω, ἵν᾽ ὁμῶς τερπώμεθα πάντες,
ξεινοδόκοι καὶ ξεῖνος, ἐπεὶ πολὺ κάλλιον οὕτως·
εἵνεκα γὰρ ξείνοιο τάδ᾽ αἰδοίοιο τέτυκται,
545 πομπὴ καὶ φίλα δῶρα, τά οἱ δίδομεν φιλέοντες.
ἀντὶ κασιγνήτου ξεῖνός θ᾽ ἱκέτης τε τέτυκται
ἀνέρι, ὅς τ᾽ ὀλίγον περ ἐπιψαύῃ πραπίδεσσι.
τῷ νῦν μηδὲ σὺ κεῦθε νοήμασι κερδαλέοισιν
ὅττι κέ σ᾽ εἴρωμαι· φάσθαι δέ σε κάλλιόν ἐστιν.
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Traduction française :
[8,500] il avait pris au moment où, montés sur leurs vaisseaux aux
solides bordages, les Argiens s'en allaient, après avoir mis le feu à
leurs tentes; déjà les autres, enfermés dans le cheval auprès du très
fameux Ulysse, étaient sur l'agora des Troyens, car les
Troyens eux-mêmes l'avaient tiré dans leur acropole. Le
cheval se dressait là, et les Troyens tenaient d'infinis
discours, sans rien résoudre, arrêtés autour de lui. Trois
partis se partageaient leur faveur : ou bien percer le bois
creux avec le bronze impitoyable, ou le précipiter des
rochers en le tirant au sommet, ou le respecter comme
une offrande propitiatoire aux dieux; c'est ce dernier
conseil qui devait enfin prévaloir; la ruine était fatale
depuis que la cité enfermait dans ses murs le grand cheval
de bois, où étaient embusqués tous les Argiens les plus
vaillants, apportant le meurtre et la mort. L'aède chantait
aussi comment la ville fut mise à sac par les fils des
Achéens, répandus hors du cheval, après avoir quitté
leur embuscade creuse. Il chantait comment chaque
guerrier ravagea pour sa part la ville haute; puis comment
Ulysse était allé, tel Arès, droit à la demeure de
Déiphobe, avec Ménélas égal à un dieu. C'est là qu'il avait
soutenu le plus terrible combat et fini par vaincre, grâce
à la magnanime Athéné.
Tels étaient les exploits que chantait l'illustre aède.
Cependant le coeur d'Ulysse se fondait, et des larmes,
coulant de ses paupières, mouillaient ses joues. Comme
une femme pleure, prostrée sur le corps de son époux,
tombé devant la cité et son peuple, en combattant pour
écarter de sa ville et de ses enfants l'impitoyable jour :
le voyant mourant et palpitant encore, elle se jette sur
lui en poussant des gémissements aigus; et, derrière elle,
les ennemis, lui frappant de leurs lances le dos et les
épaules, l'emmènent en esclavage, pour souffrir peines
et misères : la plus pitoyable angoisse flétrit ses joues.
Ainsi Ulysse répandait sous ses sourcils des larmes
émouvantes. Nul ne s'apercevait alors qu'il en versait;
seul Alcinoos les surprit et les vit; il était assis près de
lui, et avait entendu ses profonds gémissements. Aussitôt
il dit parmi les Phéaciens amis de la rame : « Écoutez,
guides et conseillers des Phéaciens, que Démodocos
cesse maintenant de faire entendre sa lyre sonore; car il
s'en faut que tous prennent plaisir à son chant. Depuis
que nous festoyons et que s'est levé le divin aède, notre
hôte ne cesse pas de gémir tristement; une grande souffrance
a, je crois, rempli son coeur. Que l'aède s'arrête
donc, pour que nous goûtions tous égal plaisir, notre
hôte et nous qui le recevons; ce sera beaucoup mieux
ainsi. Tout a été préparé pour notre hôte respectable,
la suite qui doit l'accompagner, les cadeaux que lui offre
notre amitié. L'hôte et le suppliant valent un frère, pour
qui n'est pas né sans entrailles. Aussi, maintenant à ton
tour, ne cache rien par astucieuses pensées, de ce que je
vais te demander. Il est mieux pour toi de parler sans feinte.
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