[150] νῦν ἐμὲ μέμφονται τὸν ἀναίτιον· ἀλλ' ἄγε βουλὴν
ζητήσωμεν ὅπως δολίους μύας ἐξολέσωμεν.
τοιγὰρ ἐγὼν ἐρέω ὥς μοι δοκεῖ εἶναι ἄριστα·
σώματα κοσμήσαντες ἔνοπλοι στῶμεν ἅπαντες
ἅκροις πὰρ χείλεσσιν, ὅπου κατάκρημνος ὁ χώρος·
155 ἡνίκα δ' ὁρμηθέντες ἐφ' ἡμέας ἐξέλθωσι,
δραξάμενοι κορύθων, ὅς τις σχεδὸν ἀντίος ἔλθηι,
ἐς λίμνην αὐτοὺς σὺν ἐκείνωι' εὐθὺ βάλωμεν.
οὕτω γὰρ πνίξαντες ἐκείνους τοὺς ἀκολύμβους
στήσομεν εὐθύμος τὸ μυοκτόνον ὧδε τρόπαιον.»
160 ῝Ως εἰπὼν συνέπεισε καθοπλίζεσθαι ἅπαντας·
φύλλοις μὲν μαλαχῶν κνήμας ἑὰς ἀμφεκάλυψαν,
θώρηκας δ' εἶχον καλῶν χλοερῶν ἀπὸ σεύτλων,
φύλλα δὲ τῶν κραμβῶν εἰς ἀσπίδας εὖ ἤσκησαν,
ἔγχος δ' ὀξύσχοινος ἑκάστωι μακρὸς ἀρήρει,
165 καὶ ῥα κέρα κοχλιῶν λεπτῶν ἐκάλυπτε κάρηνα.
φραξάμενοι δ' ἔστησαν ἐπ' ὄχθαις ὑψηλαῖσι
σείοντες λόγχας, θυμοῦ δ' ἔμπλητο ἕκαστος.
Ζεὺς δὲ θεοὺς καλέσας εἰς οὐρανὸν ἀστερόεντα,
καὶ πολέμου πληθὺν δείξας κρατερούς τε μαχητάς,
170 πολλοὺς καὶ μεγάλους ἠδ' ἔγχεα μακρὰ φέροντας,
οἷος Κενταύρων στρατὸς ἔρχεται ἠὲ Γιγάντων,
ἡδὺ γελῶν ἐρέειυε· «Τίνες βατράχοισιν ἀρωγοὶ
ἢ μυσὶν τειρομένοις;» καὶ Ἀθηναίην προσέειπεν·
«Ὦ θύγατερ, μυσὶν ἦ ῥα βοηθήσουσα πορεύσηι;
175 καὶ γὰρ σοῦ κατὰ νηὸν ἀεὶ σκιρτῶσιν ἅπαντες
κνίσηι τερπόμενοι καὶ ἐδέσμασι παντοδαποῖσιν.»
Ὣς ἄρ' ἔφη Κρονίδης· τὸν δὲ προσέειπεν Ἀθήνη·
«Ὦ πάτερ, οὐκ ἂν πώ ποτ' ἐγὼ μυσὶ τειρομένοισιν
ἐλθοίμην ἐπαρωγός, ἐπεὶ κακὰ πολλὰ μ' ἔοργαν
180 στέμματα βλάπτοντες καὶ λύχνους εἵνεκ' ἐλαίου.
τοῦτο δέ μοι λίην ἔδακε φρένας οἷον ἔρεξαν -
πέπλον μου κατέτρωξαν ὃν ἐξύφηνα καμοῦσα
ἐκ ῥοδάνης λεπτῆς καὶ στήμονα μακρὸν ἔνησα·
καὶ τρώγλας ἐτέλεσσαν, ὁ δ' ἠπητής μοι ἐπέστη
185 καὶ πράσσει με τόκον· τὸ δὲ ῥίγιον ἀθανάτοισιν,
χρησαμένη γὰρ ἔνησα καὶ οὐκ ἔχω ἀνταποδοῦναι.
ἀλλ' οὐδ' ὣς βατράχοισιν ἀρηγέμεν οὐκ ἐθελήσω·
εἰσὶ γὰρ οὐδ' αὐτοὶ φρένας ἔμπεδοι, ἀλλά με πρώιην
ἐκ πολέμου ἀνιοῦσαν ἐπεὶ λίην ἐκοπώθην,
190 ὕπνου δευομένην οὐκ εἴασαν θορυβοῦντες
οὐδ' ὀλίγον καταμῦσαι· ἐγὼ δ' ἄϋπνος κατεκείμην
τὴν κεφαλὴν ἀλγοῦσα, ἕως ἐβόησεν ἀλέκτωρ.
ἀλλ' ἄγε παυσώμεσθα θεοὶ τούτοισιν ἀρήγειν,
μή κέ τις ὑμείων τρωθῆι βέλει ὀξυόεντι·
195 εἰσὶ γὰρ ἀγχέμαχοι, εἰ καὶ θεὸς ἀντίον ἔλθοι·
πάντες δ' οὐρανόθεν τερπώμεθα δῆριν ὁρῶντες.»
῝Ως ἄρ' ἔφη, καὶ τῆι γε θεοὶ ἐπεπείθοντ' ἄλλοι,
πάντες δ' αὖτ' εἰσῆλθον ἀολλέες εἰς ἕνα χῶρον.
καὶ τότε κώνωπες μεγάλας σάλπιγγος ἔχοντες
| [150] et ses compagnons m'accusent à tort d'un fait dont je suis très innocente. Hâtons-nous de délibérer par quel stratagème nous pourrons venir à bout de détruire ces perfides ennemis. Quant à moi , je pense que le meilleur parti que nous puissions prendre, c'est de nous mettre sous les armes le long des bords de cet étang, à l'endroit où le terrain est le plus escarpé : dès que nos adversaires s'élançant fondront sur nous, chaque grenouille saisira par le casque le guerrier le plus proche d'elle, et nous les précipiterons dans cet étang avec leurs armes. Comme ils ignorent l'art de nager, ils n'échapperont point au péril, et nous élèverons bientôt sur la rive un trophée de rats immolés.
(160) Elle dit, et toutes aussitôt se revêtent de leurs armes. Elles entourent leurs jambes avec des feuilles de mauves qui leur servent de bottines. Les cuirasses sont de larges feuilles de poirée verte, des feuilles de choux bien façonnées servent de bouclier ; de longues branches de jonc acéré font l'office de javelots ; enfin chaque guerrière se couvre la tête d'une petite coquille en guise de casque. La troupe ainsi armée se range sur les bords élevés de l'étang : une ardeur guerrière transporte tous ces combattants et leur fait brandir leurs lances.
(168) En ce moment, Jupiter ayant convoqué tous les dieux dans le ciel étoilé, leur montre cette multitude guerrière et la valeur des combattants, leur nombre, leur stature et la longueur de leurs javelots. Telle on voyait s'avancer la troupe des Centaures ou celle des Géants. Le maître des dieux demande alors, en souriant avec douceur, s'il y a quelqu'un parmi les Immortels qui veuille entrer dans le parti des grenouilles ou dans celui des rats, et s'adressant à Minerve :
(174) "Ma fille, lui dit-il, marcheriez-vous au secours des rats ? On les voit sans cesse trotter dans votre temple, attirés par la fumée et les bribes des sacrifices."
Ainsi parle le fils de Saturne. Minerve lui répond en ces mots :
(178) "O mon père ! à quelque extrémité que les rats puissent être réduits, on ne me verra jamais les secourir. Ils m'ont causé de trop grands dommages ; ils ont détruit les couronnes de fleurs qui me sont offertes ; et mes lampes ont cessé de brûler parce qu'ils ont enlevé l'huile. Mais ils m'ont fait une injure à laquelle j'ai été encore plus sensible. J'avais fait de mes mains un beau manteau dont la trame était très fine : les perfides me l'ont rongé, et y ont fait mille trous. J'ai appelé un ouvrier pour réparer le dégât ; mais il m'en coûtera cher, et voilà ce qui me met en colère. J'avais eu recours aux emprunts pour achever ce bel ouvrage, et je suis hors d'état de rendre. Je ne suis pas plus disposée à prendre parti pour les grenouilles : il n'y a pas davantage à compter sur elles. Je me souviens qu'une fois, étant accablée de lassitude au retour d'une expédition et ayant besoin de me refaire par le sommeil, elles firent un tel vacarme qu'il ne me fut pas possible de fermer l'œil un instant ; je passai la nuit sans dormir, ayant la tête rompue de leurs cris jusqu'au lendemain que le coq chanta. Gardons-nous donc, ô dieux ! de faire intervenir notre aide dans cette affaire. N'allons pas nous exposer à recevoir de dangereuses blessures, car les guerriers sont vaillants, ils ne respecteraient pas les dieux mêmes, si les dieux se présentaient à leurs coups. Qu'il nous suffise de contempler du haut des cieux l'événement de cette journée."
(197) Elle dit, et les dieux de l'Olympe applaudissent à son discours. Déjà les combattants sont assemblés. On voit avancer deux hérauts ;
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