Texte grec :
[8,109] ὡς δὲ ἔμαθε ὅτι οὐ πείσει τούς γε πολλοὺς πλέειν ἐς τὸν Ἑλλήσποντον ὁ Θεμιστοκλέης,
μεταβαλὼν πρὸς τοὺς Ἀθηναίους (οὗτοι γὰρ μάλιστα ἐκπεφευγότων περιημέκτεον, ὁρμέατό τε ἐς τὸν
Ἑλλήσποντον πλέειν καὶ ἐπὶ σφέων αὐτῶν βαλόμενοι, εἰ οἱ ἄλλοι μὴ βουλοίατο) ἔλεγέ σφι τάδε. (2)
“καὶ αὐτὸς ἤδη πολλοῖσι παρεγενόμην καὶ πολλῷ πλέω ἀκήκοα τοιάδε γενέσθαι, ἄνδρας ἐς ἀναγκαίην
ἀπειληθέντας νενικημένους ἀναμάχεσθαί τε καὶ ἀναλαμβάνειν τὴν προτέρην κακότητα. ἡμεῖς δέ,
εὕρημα γὰρ εὑρήκαμεν ἡμέας τε αὐτοὺς καὶ τὴν Ἑλλάδα, νέφος τοσοῦτο ἀνθρώπων ἀνωσάμενοι, μὴ
διώκωμεν ἄνδρας φεύγοντας. (3) τάδε γὰρ οὐκ ἡμεῖς κατεργασάμεθα, ἀλλὰ θεοί τε καὶ ἥρωες, οἳ
ἐφθόνησαν ἄνδρα ἕνα τῆς τε Ἀσίης καὶ τῆς Εὐρώπης βασιλεῦσαι ἐόντα ἀνόσιόν τε καὶ ἀτάσθαλον· ὃς
τά τε ἱρὰ καὶ τὰ ἴδια ἐν ὁμοίῳ ἐποιέετο, ἐμπιπράς τε καὶ καταβάλλων τῶν θεῶν τὰ ἀγάλματα· ὃς καὶ
τὴν θάλασσαν ἀπεμαστίγωσε πέδας τε κατῆκε. (4) ἀλλ᾽ εὖ γὰρ ἔχει ἐς τὸ παρεὸν ἡμῖν, νῦν μὲν ἐν τῇ
Ἑλλάδι καταμείναντας ἡμέων τε αὐτῶν ἐπιμεληθῆναι καὶ τῶν οἰκετέων, καὶ τις οἰκίην τε
ἀναπλασάσθω καὶ σπόρου ἀνακῶς ἐχέτω, παντελέως ἀπελάσας τὸν βάρβαρον· ἅμα δὲ τῷ ἔαρι
καταπλέωμεν ἐπὶ Ἑλλησπόντου καὶ Ἰωνίης”. (5) ταῦτα ἔλεγε ἀποθήκην μέλλων ποιήσασθαι ἐς τὸν
Πέρσην, ἵνα ἢν ἄρα τί μιν καταλαμβάνῃ πρὸς Ἀθηναίων πάθος ἔχῃ ἀποστροφήν· τά περ ὦν καὶ
ἐγένετο.
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Traduction française :
[8,109] CIX. Thémistocle, ayant reconnu qu'il ne persuaderait pas, du moins
à la plupart des alliés, de faire voile vers l'Hellespont, changea de
sentiment, et s'adressant aux Athéniens, qui, étant surtout indignés de
ce qu'on laissait échapper l'ennemi, voulaient, après en avoir délibéré
en leur particulier, aller dans l'Hellespont quand même les alliés
refuseraient de les suivre; s'adressant, dis-je, aux Athéniens, il leur
tint ce discours : « Je me suis déjà trouvé en de pareilles occasions, et
j'ai plus souvent encore ouï dire que des troupes vaincues et réduites
au désespoir avaient repris coeur, et que dans une nouvelle action elles
avaient rétabli leurs affaires. Ainsi, Athéniens, puisque nous avons,
nous et les Grecs, dissipé, contre notre attente, cette effroyable nuée
de Barbares, ne poursuivons point un ennemi qui fuit. Ce n'est point à
nos forces que nous devons cette victoire, mais aux dieux et aux
héros; ils ont été jaloux qu'un seul homme, qu'un impie, qu'un scélérat
qui, sans mettre de distinction entre le sacré et le profane, a brûlé les
temples des dieux et renversé leurs statues; qui a fait aussi fustiger la
mer, et lui a donné des fers ; ils ont, dis-je, été jaloux que cet homme
eût lui seul l'empire de l'Asie et de l'Europe: mais, puisque nous
sommes à présent dans une position heureuse, restons en Grèce, et
occupons-nous de nous-mêmes et de nos familles. Le Barbare est
entièrement chassé; que chacun rétablisse sa maison et s'applique
avec ardeur à ensemencer ses terres. Au retour du printemps, nous
irons dans l'Hellespont et en Ionie. » Thémistocle parlait ainsi dans la
vue de se ménager l'amitié du roi, et de se procurer un asile en cas
que les Athéniens lui suscitassent dans la suite quelque fâcheuse
affaire; ce qui ne manqua pas d'arriver.
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