Texte grec :
[2,5] τοιαύτης δὲ εὐμοιρίας καὶ εὐταξίας κατεχούσης τὸν
βίον μόνοι οἱ δορυφόροι, ἀσχάλλοντες μὲν ἐπὶ τοῖς παροῦσι, ποθοῦντες
δὲ τὰς ἐπὶ τῆς προγεγενημένης τυραννίδος ἁρπαγάς τε καὶ βίας ἔν τε
ἀσωτίαις καὶ κραιπάλαις
διαγωγάς, ἐβουλεύσαντο ἀποσκευάσασθαι τὸν Περτίνακα, ὡς ὄντα
αὐτοῖς βαρὺν καὶ ἐπαχθῆ, ζητῆσαι δέ τινα
τὸν πάλιν αὐτοῖς ἄνετον καὶ ἀκόλαστον παρέξοντα ἐξουσίαν.
αἰφνιδίως τοίνυν, οὐδενὸς προσδοκῶντος, ἀλλὰ
πάντων ἐν ἡσυχίᾳ διατριβόντων, θυμῷ καὶ ἀλόγῳ ὁρμῇ
ἐκ τοῦ στρατοπέδου δρόμῳ φερόμενοι αὐτοὶ ἡμέρας
ἀκμαζούσης ἐπεισῆλθον τοῖς βασιλείοις τά τε δόρατα
διατεινάμενοι καὶ τὰ ξίφη σπασάμενοι. τῷ δὲ παραδόξῳ
τοῦ ἔργου καὶ ἀνελπίστῳ οἱ ἐν τῇ βασιλείῳ ὑπηρεσίᾳ
ταραχθέντες, ὀλίγοι τε πρὸς πολλοὺς καὶ ἄνοπλοι πρὸς
ὡπλισμένους, οὐκ ἔμενον, ἀλλ´ ἕκαστος ἣν ἐγκεχείριστο
φρουρὰν λιπὼν ἢ ἐπὶ τῇ αὐλείῳ ἢ ἐπὶ ταῖς λοιπαῖς
εἰσόδοις ἔφευγον. ὀλίγοι δέ τινες τῶν εὐνοούντων διαγγείλαντες τῷ
Περτίνακι τὴν ἔφοδον συνεβούλευον φυγεῖν τῇ τε τοῦ δήμου
βοηθείᾳ ἑαυτὸν ἐπιδοῦναι, ὃ δὲ
{καὶ} τοῖς συμβουλεύουσιν αὐτῷ πρὸς τὸ παρὸν ὠφέλιμα
μὴ πεισθείς, ἀπρεπῆ δὲ καὶ ἀνελεύθερα βασιλείας τε
ἀνάξια καὶ τῶν προβεβιωμένων αὑτῷ καὶ προπεπραγμένων νομίσας,
φεύγειν μὲν ἢ λαθεῖν οὐκ ἠθέλησεν, ὁμόσε
δὲ χωρήσας τῷ πράγματι προῆλθεν ὡς διαλεξόμενος
αὐτοῖς ἐλπίσας πείσειν τε αὐτοὺς καὶ παύσειν τῆς ἀλόγου ὁρμῆς. καὶ
δὴ τοῦ δωματίου προελθών, ὑπαντώμενος αὐτοῖς πυνθάνεσθαι τε
ἐπειρᾶτο τὰς αἰτίας τῆς
ὁρμῆς πείθειν τε ἐπεχείρει μὴ ἐνθουσιᾶν, μένων καὶ
τότε ἐν σώφρονι καὶ σεμνῷ σχήματι καὶ τηρῶν τὸ τοῦ
βασιλέως ἀξίωμα, οὐδέν τι κατεπτηχότος οὐδὲ ἀποδειλιῶντος καὶ
ἱκετεύοντος σχῆμα ἐνδεικνύμενος.
„τὸ μὲν ἐμέ“ ἔφη „πρὸς ὑμῶν ἀναιρεθῆναι οὐδέν τι
μέγα ἢ βαρὺ πρεσβύτῃ ἐς μακρὸν γῆρας ἐνδόξως ἐλάσαντι.
παντὶ γὰρ ἀνθρώπων βίῳ ἀνάγκη τέλος ἐπιτεθῆναι· τὸ δὲ ὑμᾶς
φύλακας καὶ φρουροὺς δοκοῦντας
εἶναι τοῦ βασιλέως καὶ τοὺς ἔξωθεν κινδύνους ἀπείργοντας αὐτοὺς
γενέσθαι φονεῖς καὶ μὴ μόνον ἐμφυλίῳ
ἀλλὰ καὶ βασιλείῳ μιᾶναι τὰς δεξιὰς αἵματι, ὁρᾶτε, μὴ
πρὸς τὸ νῦν ἀνόσιον καὶ ὕστερον ὑμῖν ἐπικίνδυνον ᾖ.
οὐ γάρ τι ἐμαυτῷ σύνοιδα λυπήσαντι ὑμᾶς. εἰ δέ {καὶ}
ἐπὶ τῇ Κομόδου τελευτῇ δυσχεραίνετε, οὐδὲν παράδοξον,
ἄνθρωπον ὄντα εἰ τελευτὴ κατέλαβεν. εἰ δὲ τοῦτο ἐξ
ἐπιβουλῆς οἴεσθε γεγενῆσθαι, οὐκ ἐμὸν τὸ ἁμάρτημα·
ἴστε γὰρ ἔξω πάσης ὄντα με ὑποψίας καὶ οὐδὲν ἧττον ὑμῶν
ἀγνοοῦντα τὰ τότε πεπραγμένα, ὡς εἴ τι
ὑποπτεύετε, ἑτέροις ἐπιφέρειν τὸ ἔγκλημα. ἀλλ´ ὅμως
κἀκείνου τελευτήσαντος οὐδὲν ὑμῖν τῶν εὐπρεπῶς καὶ
κατ´ ἀξίαν καὶ ἄνευ τοῦ βιάζεσθαί με ἢ ἁρπάζειν δοθῆναι
δυναμένων ἐνδεήσει.“
τοιαῦτά τινα λέγειν αὐτοῖς πειρώμενος ἤδη τινὰς αὐτῶν
καὶ πείσειν ἔμελλε, καὶ οὐκ ὀλίγοι γε ἀποστραφέντες ἀνεχώρουν
σεμνοῦ βασιλέως γῆρας αἰδούμενοι· ἔτι δὲ λαλοῦντα τὸν πρεσβύτην οἱ
θρασύτεροι ἐπιπεσόντες φονεύουσι.
δράσαντες τε οὕτως ὠμὸν ἔργον, δέει τῶν τετολμημένων
φθάσαι θέλοντες τὴν τοῦ δήμου ἔφοδον ἐπισταμενοί τε,
ὅτι χαλεπῶς ὁ δῆμος διοίσει τὰ πεπραγμένα, ἐς τὸ στρατόπεδον δρόμῳ
ἀναχωρήσαντες πάσας πύλας τε καὶ εἰσόδους ἀποκλείσαντες ἐντὸς
τείχους ἔμενον φρουρὰς ἐπὶ
τῶν πύργων καταστήσαντες, ὡς ἀμύνοιντο, εἰ τῷ τείχει
προσβάλλοι ὁ δῆμος. τέλος μὲν δὴ τοιοῦτο κατέλαβε τὸν
Περτίνακα χρησάμενον βίῳ καὶ προαιρέσει ὡς προείρηται.
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Traduction française :
[2,5] XVII. Pendant que Pertinax déployait tant de modération et de vertu,
les prétoriens seuls s'indignaient de leur condition présente; ils
regrettaient le passé, leurs rapines, leurs violences. Au milieu du vin et
de la débauche, ils prennent la résolution subite de tuer Pertinax, dont
l'autorité était pour eux un si pesant fardeau, et de lui choisir pour
successeur un prince qui donnerait à leur licence une libre carrière. Leur
dessein s'exécute à l'instant même : au milieu du jour, lorsque tous les
citoyens, dans la plus entière sécurité, se reposaient dans l'intérieur de
leurs maisons, tout à coup ces soldats se dirigent rapidement, en désordre
et comme des furieux, vers le palais de l'empereur, la lance tendue et le
glaive hors du fourreau : surpris par cette émeute soudaine et imprévue,
les officiers du palais, se trouvant d'ailleurs en petit nombre et sans
armes, ne songent pas à résister à une pareille multitude armée; ils
abandonnent tous leur poste, se sauvent par les galeries et par toutes les
issues du palais; quelques-uns, plus attachés à Pertinax, courent le
presser de fuir, et de se placer sous la protection du peuple. Quoique ce
conseil fût sage pour la circonstance, le prince le rejette, comme un
parti honteux, indigne d'un homme libre, indigne d'un empereur et de sa
vie passée ; il ne veut ni fuir ni se cacher. Il résolut de s'offrir
lui-même au danger, et courut au-devant des soldats; il voulut se mêler
dans leurs rangs, il espérait les ramener par ses discours, et calmer ce
subit accès de fureur. Il s'élance de son appartement, se présente à eux
tout à coup; et, sans être troublé par le danger, leur demande les motifs
de leur révolte, et cherche à les apaiser. Il garda un maintien plein de
calme et de dignité; il ne perdit rien de la majesté d'un empereur; sa
contenance n'était point celle d'un homme humilié, d'un lâche, d'un
suppliant; et d'une voix ferme il leur adressa ce discours :
XVIII. « La mort que vous allez me donner, soldats, n'aura pour vous rien
d'honorable, et ne sera pas un mal pour moi, qui ai vieilli dans la
gloire. La vie humaine a un terme inévitable. Mais vous, soldats, à qui
est confiée la garde et la sûreté du prince, et qui devez préserver ses
jours de toute atteinte, que vous deveniez vous-mêmes ses assassins, que
vous trempiez vos mains dans le sang, non seulement d'un citoyen, mais de
votre empereur, songez-y : c'est un attentat qui ne peut vous offrir que
honte pour le présent et danger pour l'avenir. Est-ce la mort de Commode
qui vous afflige? Commode n'était qu'un homme, vous deviez vous attendre à
le perdre. Peut-être croyez-vous qu'il fut victime d'un assassinat? Ce
crime n'est pas le mien. Vous savez que j'ai été à l'abri de tout soupçon,
et que cet événement a toujours été pour moi aussi obscur que pour
vous-mêmes. Si vous soupçonnez un forfait, ce n'est pas moi qu'il faut en
accuser. Mais la mort de ce prince ne vous sera pas funeste; si je
m'oppose aux mesures violentes et aux rapines, je ne prétends vous refuser
rien de ce qui soit conforme à l'honneur et à notre mutuelle dignité. »
XIX. Ces paroles avaient déjà fait impression sur plusieurs prétoriens; un
assez grand nombre se retirait, plein de respect pour cet auguste
vieillard. Mais d'autres plus furieux se jettent sur lui et l'égorgent,
comme il achevait de parler. Quand ils eurent commis ce crime, effrayés de
leur propre audace, et voulant se soustraire à l'indignation du peuple, à
laquelle ils avaient lieu de s'attendre, ils gagnent leur camp en toute
bâte, se tiennent à l'abri de leur rempart et placent sur les tours des
sentinelles pour empêcher le peuple d'approcher des murs. Telle fut la fin
de Pertinax, dont nous avons loué avec justice la vie et les vertus.
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