Texte grec :
[1,13] ὄντος δὲ πολέμου ἐμφυλίου ἄλλος μὲν οὐδεὶς ἀγγεῖλαι
τὰ πραττόμενα τῷ Κομόδῳ ἐβούλετο δέει τῆς Κλεάνδρου
ἐξουσίας, ἡ δὲ πρεσβυτάτη τῶν Κομόδου ἀδελφῶν (Φαδίλλα ἦν ὄνομα αὐτῇ)
εἰσδραμοῦσα πρὸς τὸν βασιλέα
(ῥᾳδία δὲ ἡ εἴσοδος αὐτῇ καὶ ἀκώλυτος ἅτε ἀδελφῇ)
λυσαμένη τὰς τρίχας ῥίψασά τε ἐς τὴν γῆν ἑαυτήν,
οὐδὲν ἀλλ´ ἢ πένθους σχῆμα δείξασα „σὺ μὲν“ ἔφη „ὦ
βασιλεῦ, μένων ἐπὶ ἡσυχίᾳ τῶν πραττομένων ἀγνοίᾳ,
ἐν ἐσχάτῳ καθέστηκας κινδύνῳ· ἡμεῖς δέ, τὸ σὸν γένος, ὅσον οὐδέπω
ἀπολούμεθα. οἴχεται δέ σοι ὅ τε δῆμος Ῥωμαίων καὶ τὸ πλεῖστον τοῦ
στρατιωτικοῦ. ἃ δὲ πρὸς μηδενὸς βαρβάρων πείσεσθαι προσεδοκῶμεν,
ταῦτα δρῶσιν ἡμᾶς οἱ οἰκεῖοι, καὶ οὓς μάλιστα εὐηργέτησας,
τούτους ἐχθροὺς ἔχεις. Κλέανδρος ἐπὶ σὲ τόν τε δῆμον
καὶ τὸ στρατιωτικὸν ὥπλισεν· ἐκ δὲ διαφόρου καὶ ἐναντίας γνώμης οἳ μὲν
μισοῦντες αὐτόν, {ὁ δῆμος,} οἳ δὲ
στέργοντες, {πᾶν τὸ ἱππικὸν τάγμα,} ἐν ὅπλοις εἰσί, καὶ
φθείροντες ἀλλήλους ἐμφυλίου αἵματος τὴν πόλιν ἐπλήρωσαν. τὰ δ´ ἑκατέρου
τοῦ πλήθους δεινὰ ἡμᾶς προσλήψεται, εἰ μὴ τὴν ταχίστην πρὸς τὸν θάνατον
ἐκδώσεις τὸν πονηρὸν οἰκέτην, ὀλέθρου τοσούτου τοῖς μὲν
αἴτιον ἤδη γεγονότα, ἡμῖν δὲ ἐσόμενον ὅσον οὐδέπω.“
τοιαῦτά τινα εἰποῦσα ῥηξαμένη τε τὴν ἐσθῆτα, καὶ τῶν
παρόντων τινές (ἐθάρρησαν γὰρ τοῖς τῆς ἀδελφῆς τοῦ
βασιλέως λόγοις) τὸν Κόμοδον ἐτάραξαν. ἐκπλαγεὶς δὲ
ἐκεῖνος τόν τε ἐπικείμενον κίνδυνον οὐ μέλλοντα ἀλλὰ
παρόντα ἤδη φοβηθεὶς μεταπέμπεται τὸν Κλέανδρον,
οὐδὲν μέν τι εἰδότα τῶν ἀπηγγελμένων, οἰόμενον δέ.
ἐλθόντα οὖν αὐτὸν συλληφθῆναι κελεύει καὶ τὴν κεφαλὴν
ἀποτεμὼν δόρατί τε ἐπιμήκει ἐγκαταπήξας ἐκπέμπει
τερπνὸν καὶ ποθεινὸν τῷ δήμῳ θέαμα. ἔστη γὰρ οὕτως
τὸ δεινόν, καὶ ἑκάτεροι πολεμοῦντες ἐπαύσαντο, οἱ μὲν
στρατιῶται ἀνῃρημένον ἰδόντες ὑπὲρ οὗ ἐμάχοντο, δέει
τε τῆς τοῦ βασιλέως ὀργῆς (συνίεσαν γὰρ ἐξηπατῆσθαι
καὶ τὰ δρασθέντα παρὰ γνώμην αὐτοῦ τετολμηκέναι),
ὁ δὲ δῆμος κεκόρεστο τιμωρίαν παρὰ τοῦ τὰ δεινὰ δράσαντος
εἰληφώς. προσανεῖλον δὲ καὶ τοὺς παῖδας τοῦ
Κλεάνδρου (δύο δὲ ἦσαν ἄρρενες αὐτῷ), πάντας τε
ὅσους ᾔδεσαν ἐκείνῳ φίλους διεχρήσαντο· σύροντές τε
τὰ σώματα καὶ πᾶσαν ὕβριν ἐνυβρίσαντες, τέλος λελωβημένα
ἐς τοὺς ὀχετοὺς φέροντες ἔρριψαν. τοιούτῳ μὲν
δὴ τέλει Κλέανδρός τε καὶ οἱ περὶ αὐτὸν ἐχρήσαντο,
φιλοτιμουμένης, ὡς ἄν τις εἴποι, τῆς φύσεως ἐν ἑνὶ δεῖξαι, ὅτι ἐκ τῆς ἐσχάτης
εὐτελείας ἐς τὸ μέγιστον ὕψος
ἆραι καὶ πάλιν τὸν ἀρθέντα ῥῖψαι ὀλίγη καὶ ἀνέλπιστος
δύναται τύχης ῥοπή.
ὁ δὲ Κόμοδος δεδιὼς μὲν τὴν τοῦ δήμου κίνησιν, μή
τι καὶ περὶ αὐτὸν νεωτερίσειεν, ὅμως δὲ παρορμησάντων
αὐτὸν τῶν οἰκείων κατελθὼν ἐς τὸ ἄστυ μετὰ πάσης
εὐφημίας τε καὶ παραπομπῆς τοῦ δήμου ὑποδεχθεὶς ἐς
τὴν βασίλειον ἐπανῆλθεν αὐλήν. πειραθεὶς δὲ τοσούτων κινδύνων ἀπίστως
προσεφέρετο πᾶσιν ἀφειδῶς τε
φονεύων καὶ πάσαις διαβολαῖς ῥᾳδίως πιστεύων μηδέ
τινα προσιέμενος τῶν λόγου ἀξίων· ἀλλὰ τῆς μὲν περὶ
τὰ καλὰ σπουδῆς ἀπῆγεν ἑαυτόν, δεδούλωντο δὲ πᾶσαν
αὐτοῦ τὴν ψυχὴν νύκτωρ τε καὶ μεθ´ ἡμέραν ἐπάλληλοι
καὶ ἀκόλαστοι σώματος ἡδοναί. καὶ σώφρων μὲν πᾶς καὶ
παιδείας κἂν ἔτι μετρίως μεμνημένος τῆς αὐλῆς ὡς ἐπίβουλος ἐδιώκετο,
γελωτοποιοὶ δὲ καὶ τῶν αἰσχίστων ὑποκριταὶ εἶχον αὐτὸν ὑποχείριον.
ἁρμάτων τε ἡνιοχείας
καὶ θηρίων ἐξ ἀντιστάσεως μάχας ἐπαιδεύετο, τῶν μὲν
κολάκων ἐς ἀνδρείας δόξαν αὐτὰ ὑμνούντων, τοῦ δὲ
ἀπρεπέστερον μετιόντος ἢ βασιλεῖ σώφρονι ἥρμοζε.
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Traduction française :
[1,13] XXXIX. Pendant que Rome était livrée à cette guerre intestine, personne
n'osait apprendre à Commode ce qui se passait, tant le pouvoir de Cléandre
inspirait de craintes. Mais Fadilla, soeur aînée de Commode, à qui ce
titre donnait auprès du prince un libre accès, accourt vers lui tout
éperdue; ses cheveux flottent épars; elle se précipite à terre, son
maintien exprime une désolation profonde : « Ô mon frère, mon empereur,
s'écrie-t-elle, vous vous livrez au repos, vous ignorez tout ce qui se
passe autour de vous, vous vous endormez au milieu des plus grands
dangers. Nous mêmes, votre propre sang, nous sommes en péril de la vie.
Votre peuple, la plus grande partie de votre garde, en ce moment
s'égorgent. Ce sont vos esclaves qui nous font éprouver des maux que nous
n'avons jamais craints des barbares mêmes; ceux que vous avez comblés de
bienfaits se montrent vos plus grands ennemis. C'est Cléandre qui a armé
contre vous le peuple et les soldats. Le peuple qui l'abhorre, les
cavaliers qui le chérissent, se livrent des combats meurtriers, se
massacrent et inondent Rome du sang romain. Mais le sang des deux partis
retombera sur nous, si vous ne versez au plus tôt celui de l'insolent
esclave qui a causé la mort de tant d'hommes, et qui déjà sans doute
médite la nôtre. »
XL. En disant ces mots, elle déchire ses vêtements. Encouragés par ces
paroles, plusieurs de ceux qui se trouvent présents redoublent les
frayeurs de Commode. Le prince, épouvanté d'un danger qu'il reconnaît
imminent, mande Cléandre en sa présence. Celui-ci n'avait encore qu'un
simple soupçon qu'on eût instruit Commode des événements. Dès qu'il fut
venu, l'empereur le fit saisir, et ordonna qu'on lui coupât la tête, et
qu'on la portât dans Rome au bout d'une pique; spectacle bien doux à la
haine impatiente du peuple.
XLI. Les troubles s'apaisèrent aussitôt, et la lutte cessa de part et
d'autre. Les soldats voyant le supplice de celui pour qui ils
combattaient, craignaient le ressentiment de l'empereur ; ils reconnurent
qu'on les avait trompés et qu'ils avaient agi contre la volonté du prince.
Le peuple était satisfait, et se regardait comme vengé par la mort de
l'homme qui avait causé tous ces désordres ; cependant il eut la cruauté
de massacrer les deux fils et tous les amis de Cléandre. On traîna leurs
corps dans Rome, et après avoir fait subir à ces cadavres tous les
outrages imaginables, on les jeta dans des égouts : telle fut la fin de
Cléandre, de sa famille et de ses créatures. La nature humaine semble
avoir voulu montrer dans un seul homme qu'elle peut, au gré du plus faible
souffle de la fortune, s'élever des rangs les plus obscurs au plus haut point de
grandeur, pour retomber de nouveau par un caprice inattendu de la déesse.
XLII. Cependant Commode, malgré les craintes que lui inspirait le peuple,
dont il redoutait le soulèvement, céda aux conseils de ses courtisans, et
revint à Rome, où il fit une entrée solennelle au mi-lieu des acclamations
de la multitude, qui l'accompagna jusqu'à son palais. Mais les périls
auxquels il s'était vu exposé le rendirent défiant envers tout le monde.
Il prodigua les supplices, ouvrit l'oreille aux délations les plus
fausses, renonça à la société des gens de bien et répudia tout sentiment
d'honneur et de vertu. Son âme fut asservie tout entière à la débauche et
à des plaisirs déréglés, qui se disputaient sans interruption ses nuits et
ses jours. Pour peu qu'on eût de probité et d'instruction, on était banni
de la cour comme dangereux.
XLIII. Mais les histrions, les bouffons qui représentaient les scènes les
plus ignobles, étaient en grande faveur auprès du prince. Il s'exerçait
sans relâche à conduire des chars, à combattre corps à corps des bêtes
féroces; les courtisans ne cessaient de louer son courage et
l'entretenaient ainsi dans des goûts auxquels un prince sage ne se serait
pas livré avec tant d'excès.
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