Texte grec :
[1,8] χρόνου μὲν οὖν τινὸς ὀλίγων ἐτῶν τιμὴν πᾶσαν ἀπένεμε
τοῖς πατρῴοις φίλοις, πάντα τε ἔπραττεν ἐκείνοις
συμβούλοις χρώμενος. ἐπεὶ δὲ τὴν πρόνοιαν ἐνεχείρισε
τῆς ἀρχῆς ἑαυτῷ, ἐπιστήσας τοῖς στρατοπέδοις Περέννιον,
ἄνδρα τὸ μὲν γένος Ἰταλιώτην, στρατιωτικὸν δ´
εἶναι δοκοῦντα (διὸ καὶ μάλιστα αὐτὸν ἔπαρχον ἐποίησε
τῶν στρατοπέδων), τῇ τοῦ μειρακίου ἀποχρώμενος ἡλικίᾳ ἐκεῖνος {εἴασεν}
αὐτὸν τρυφαῖς σχολάζοντα καὶ κραιπάλαις, τῆς φροντίδος καὶ τῶν βασιλείων
καμάτων ἀπῆγεν {αὐτόν}, πᾶσαν δὲ τὴν διοίκησιν τῆς ἀρχῆς αὐτὸς
ἀνεδέξατο πλούτου τε ἀκρατήτῳ ἐπιθυμίᾳ καὶ τῶν μὲν
προσκτωμένων ἀεὶ καταφρονήσει, τῶν δ´ οὔπω παρόντων ἀπλήστῳ
ἀντιποιήσει. τούς τε πατρῴους φίλους
πρῶτος διαβάλλειν ἤρξατο, καὶ ὅσοι πλούσιοί τε ἦσαν
καὶ εὐγενεῖς, τούτους ἐς ὑποψίαν ἄγων τὸ μειράκιον
ἐφόβει, ὡς ἂν αὐτοὺς διαχρησάμενος ἀφορμὴν αὐτῷ
παράσχοι καὶ ἐξουσίαν ἁρπάζειν τὰ ἐκείνων κτήματα.
μέχρι μὲν οὖν τινὸς ἐπεῖχε τὸν νεανίσκον ἥ τε τοῦ
πατρὸς μνήμη καὶ ἡ πρὸς τοὺς φίλους αἰδώς. ἀλλὰ γάρ,
ὥσπερ τινὸς πονηρᾶς καὶ βασκάνου τύχης ἀνατρεπούσης
αὐτοῦ τὸ ἔτι σῶφρον καὶ κόσμιον, συνέβη τι τοιοῦτον.
Λουκίλλα ἦν τῷ Κομόδῳ πρεσβυτάτη πάντων ἀδελφή.
αὕτη πρότερον Λουκίῳ Βήρῳ αὐτοκράτορι συνῴκει, ὃν
κοινωνὸν τῆς βασιλείας Μᾶρκος ποιησάμενος, ἐκδούς {τε}
αὐτῷ τὴν θυγατέρα, δεσμὸν εὐνοίας ἐχυρώτατον τὴν
πρὸς αὐτὸν ἐπιγαμίαν ἐποιήσατο. ἀλλ´ ἐπεὶ συνέβη τὸν
Λούκιον τελευτῆσαι, μενόντων τῇ Λουκίλλῃ τῶν τῆς
βασιλείας συμβόλων Πομπηιανῷ ὁ πατὴρ ἐξέδοτο αὐτήν.
οὐδὲν ἧττον μέντοι καὶ ὁ Κόμοδος ἐφύλαττε τὰς τιμὰς
τῇ ἀδελφῇ· καὶ γὰρ ἐπὶ τοῦ βασιλείου θρόνου καθῆστο
ἐν τοῖς θεάτροις, καὶ τὸ πῦρ προεπόμπευεν αὐτῆς. ἐπεὶ
δὲ ὁ Κόμοδος γυναῖκα ἠγάγετο, Κρισπῖναν ὄνομα, ἀνάγκη
τε ἐγένετο τὴν προεδρίαν ἀπονέμεσθαι τῇ τοῦ
βασιλεύοντος γυναικί, δυσφόρως τοῦτο φέρουσα ἡ Λουκίλλα,
καὶ τὴν ἐκείνης τιμὴν ἑαυτῆς ὕβριν νομίζουσα,
τὸν μὲν ἑαυτῆς ἄνδρα Πομπηιανὸν εἰδυῖα ἀγαπῶντα τὸν
Κόμοδον, οὐδὲν αὐτῷ περὶ ἐπιθέσεως τῆς ἀρχῆς ἀνακοινοῦται, Κοδράτου δέ,
νεανίσκου εὐγενοῦς τινος καὶ
πλουσίου, ἐφ´ οὗ καὶ λανθανούσῃ συνουσίᾳ διεβάλλετο,
πεῖραν τῆς γνώμης λαμβάνουσα, περί τε τῆς προεδρίας
συνεχῶς ἀπωδύρετο, καὶ κατ´ ὀλίγον ἀνέπεισε τὸν νεανίσκον ὀλέθρια
βουλεύσασθαι αὑτῷ τε καὶ πάσῃ τῇ συγκλήτῳ. συνωμότας γὰρ ἐκεῖνος τῆς
βουλῆς λαβών τινας τῶν ἐξεχόντων ἀναπείθει νεανίσκον τινά, καὶ αὐτὸν
ὄντα τῆς βουλῆς, Κυιντιανὸν ὄνομα, προπετῆ δὲ καὶ
θρασύν, λαβόντα ἐγχειρίδιον ὑπὸ κόλπου, καιρὸν φυλάξαντα
καὶ τόπον ἐπιτήδειον, ἐπιπεσεῖν τε τῷ Κομόδῳ
καὶ φονεῦσαι, τὰ λοιπὰ φήσας αὐτὸς κατορθώσεσθαι
χρημάτων ἐπιδόσει. ὃ δ´ ὑποστὰς ἐν τῇ τοῦ ἀμφιθεάτρου
εἰσόδῳ (ζοφώδης δὲ αὕτη, διὸ καὶ λήσεσθαι ἤλπισε),
γυμνώσας τὸ ξιφίδιον, ἐπελθών τε αἰφνιδίως τῷ Κομόδῳ,
καὶ μεγάλῃ φωνῇ προειπὼν ὑπὸ τῆς συγκλήτου αὐτῷ
ἐπιπεπέμφθαι, τρῶσαι μὴ φθάσας, ἀλλ´ ἐν ᾧ περὶ τὴν
τῶν ῥημάτων προφορὰν ἠσχολεῖτο καὶ τὴν δεῖξιν τοῦ
ξίφους, συλληφθεὶς ὑπὸ τῶν σωματοφυλάκων τοῦ βασιλέως
δίκην ἀνοίας ὑπέσχεν, ὃς προεῖπε τὸ βεβουλευμένον
μᾶλλον ἢ ἔδρασε, παρέσχε τε αὑτῷ μὲν προγνωσθέντι
ἁλῶσαι, ἐκείνῳ δὲ προμαθόντι φυλάξασθαι.
αὕτη μὲν δὴ πρώτη καὶ μεγίστη αἰτία τῷ μειρακίῳ
μίσους ἐγένετο πρὸς τὴν σύγκλητον βουλήν· ἔτρωσέ τε
αὐτοῦ τὴν ψυχὴν τὰ λεχθέντα, καὶ κοινοὺς ἐχθροὺς
πάντας ἡγεῖτο, μεμνημένος ἀεὶ τῆς τοῦ ἐπιδραμόντος φωνῆς.
ὑπῆρξε δὲ καὶ τῷ Περεννίῳ πρόφασίς τε καὶ
ὑπόθεσις αὐτάρκης· ἐκκόπτειν γὰρ ἀεὶ καὶ κολούειν αὐτῷ συνεβούλευε τοὺς
ὑπερέχοντας, ὧν ἁρπάζων τὰς οὐσίας ῥᾷστα πλουσιώτατος ἐγένετο τῶν καθ´
αὑτὸν ἀνθρώπων. γενομένης δ´ ἐξετάσεως διὰ τοῦ Περεννίου
ἀκριβεστέρας τήν τε ἀδελφὴν ὁ Κόμοδος διεχρήσατο καὶ
πάντας ἀφειδῶς τούς τε ὄντας ἐν τῇ συνωμοσίᾳ καὶ
τοὺς ἐφ´ οἱαισδήποτε διαβληθέντας ὑποψίαις.
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Traduction française :
[1,8] Pendant un petit nombre d'années, il combla d'honneurs les amis
de son père, et ne fit rien sans demander conseil à
leurs lumières. Mais dans la suite, quand il se fut réservé à lui seul
tout le soin du gouvernement, il mit à la tête des gardes prétoriennes un
Italien nommé Pérennius, que ses talents militaires appelaient à ce poste
élevé. Mais ce personnage, abusant de l'extrême jeunesse de l'empereur,
livra son inexpérience aux plaisirs et à la débauche, se chargea lui-même
des soins et des travaux de l'empire et sut attirer à lui l'autorité tout
entière. Dévoré d'une insatiable avidité, dédaignant toujours ce qu'il
venait d'acquérir, pour désirer ce qu'il ne possédait pas encore, il
commença par poursuivre de ses calomnies les amis du père de Commode; et
bientôt par les soupçons qu'il sut répandre sur tous les citoyens riches
et nobles, il effraya le jeune prince, obtint leur supplice et s'ouvrit
ainsi un chemin à l'envahissement de leur fortune.
XX. Pendant quelque temps néanmoins Commode fut contenu et par le
souvenir de son père et par le respect qu'il portait aux anciens amis de ce
vertueux prince ; mais tout à coup une destinée cruelle et jalouse sembla
se plaire à pervertir entièrement sa modération et sa sagesse. Lucilla, sa
soeur aînée, avait eu d'abord pour époux Lucius Verus que Marc-Aurèle
avait associé à l'empire et qu'il s'attacha par les noeuds les plus
étroits en l'unissant à sa fille. Lucius Verus vint à mourir; Marc-Aurèle
en laissant à sa fille les honneurs de la dignité impériale, lui fit
épouser Pompéianus. Commode, parvenu à l'empire, ne la dépouilla point de
ces honneurs, et permit qu'elle s'assit au théâtre sur le siége impérial
et qu'on portât le feu devant elle. Mais quand il eut épousé Crispina,
Lucilla fut obligée de céder la première place à l'épouse du prince. Son
orgueil en fut blessé; et elle regarda comme un outrage fait à sa personne
les honneurs dont l'impératrice était l'objet. Connaissant l'affection de
Pompéianus pour Commode, elle se garda bien de lui confier le projet
qu'elle nourrissait de monter au trône. Mais elle tourna ses espérances
vers Quadratus, jeune citoyen noble et riche, avec qui, dit-on, elle
entretenait un commerce adultère. Elle sonda son esprit, se plaignit avec
aigreur auprès de lui du rang auquel la reléguait Commode, et peu à peu
l'entraîna à prendre une résolution funeste pour lui-même, comme pour le
sénat tout entier. Quadratus associa à son complot téméraire plusieurs
sénateurs, et sut décider un jeune homme entreprenant et hardi, nommé
Quintianus, qui faisait partie de la conspiration, à cacher un poignard
dans son sein, après avoir choisi le temps et le lieu, et à s'élancer tout
à coup sur Commode pour l'assassiner. Quant au reste du complot, lui-même
il se chargeait de l'accomplir avec de l'or.
XXI. Quintianus se place à l'entrée de l'amphithéâtre (il espérait, dans
ce lieu obscur, échapper plus facilement aux regards). Il tire son
poignard, à l'approche de Commode, et se précipite sur lui, en s'écriant
d'une voix forte : « Voici ce que t'envoie Ie sénat. » Il ne se hâte point
de frapper; pendant qu'il perd les instants en de vaines paroles, et qu'il
agite son poignard nu, il est arrêté par les gardes de l'empereur et paye
de la vie sa folle témérité. L'insensé s'était dénoncé et perdu lui-même;
il avait proclamé son dessein au lieu de l'exécuter.
XXII. Cet événement fut la première et la plus puissante cause de la haine
que Commode porta au sénat. Les paroles de Quintianus avaient profondément
blessé son âme; dès ce moment il regarda tous les sénateurs comme des
ennemis; il ne put oublier le mot du meurtrier.
XXIII. Pérennius profita d'une occasion aussi heureuse. Il persuada à
Commode de frapper tous les citoyens distingués, et de ne permettre à
aucun de s'élever. S'emparant comme d'une proie de la fortune des
victimes, il devint en peu de temps le plus riche de tous ses
contemporains. Il dirigea avec la plus grande ardeur une enquête sur le
complot, et fit traîner au supplice la soeur même de Commode, tous ceux
qui avaient pris part à la conspiration , tous ceux enfin sur qui
planaient les plus légers soupçons.
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