Texte grec :
[5,20] Ὁρῶν δὴ τὸν Φοίνικα μὴ ἀνιέντα ἀλλ´ εἰς
ὑπερβολήν τε πρὸς τὸ βούλημα θερμαινόμενον καὶ ἡμέραν
οὐδεμίαν τοῦ διοχλεῖν μοι περὶ τῶν αὐτῶν ἀπολειπόμενον,
ἔγνων τὸ παρὸν ὑπερθέσθαι χρησταῖς ἐπαγγελίαις μὴ καὶ
βίαιόν τι κατὰ τὴν νῆσον ὑποσταίημεν, καὶ ἅπαντα ποιήσειν
ἐλθὼν εἰς τὴν Αἴγυπτον ἐπηγγελλόμην. Οὔπω δέ μου
τοῦτον ἐπ´ ὀλίγον ἀποσκευασαμένου κῦμα φασὶν ἐπὶ κύματι
προσέβαλλεν ὁ δαίμων. Ὁ γὰρ Τυρρηνὸς οὐ πολλαῖς
ὕστερον ἡμέραις εἴς τινά με παρηγκωνισμένην ἀκτὴν παραλαβὼν
»Ὦ Καλάσιρι« ἔφη »τὸν Ποσειδῶ σοι τὸν πελάγιον
ἐπόμνυμι καὶ τοὺς ἄλλους ἐναλίους θεοὺς ἦ μὴν
αὐτόν τε σὲ ὡς ἀδελφὸν παῖδάς τε τοὺς σοὺς ἴσα καὶ παισὶν
ὁρᾶν τοῖς ἐμοῖς· ἥκω δή σοι φράσων ἐγειρόμενόν τι
πρᾶγμα ἀνιαρὸν μὲν ἀλλ´ ἐμοί τε σιωπῆσαι ἀθέμιτον
ἑστίας ὑμῖν τῆς αὐτῆς κεκοινωνηκότι σοί τε γνῶναι πάντως
ἀναγκαῖον. Ναυλοχεῖ τὴν ὁλκάδα τὴν Φοίνισσαν
πειρατικὸν ἐργαστήριον κατὰ τὴν περιπτύσσουσαν τῆσδε
τῆς ἄκρας πλευρὰν ὑποκαθήμενον, σκοποῖς ἀμοιβαδὸν τὸν
ἔκπλουν τῆς νεὼς ἐπιτηρούμενον. Ὅρα δὴ οὖν, φυλάττου
καὶ λογίζου τί ἂν ποιοίης, σοῦ γὰρ δὴ ἕνεκεν μᾶλλον
δὲ θυγατρὸς τῆς σῆς τὸ οὕτως ἀπηνὲς ἔργον ἐκείνοις
δὲ σύνηθες διανοοῦνται.« Κἀγὼ πρὸς αὐτὸν »Σὲ
μὲν« ἔφην »ἀντὶ τούτων οἱ θεοὶ κατ´ ἀξίαν ἀμείψαιντο·
πόθεν δέ, ὦ Τυρρηνέ, συνείληφας τὴν ἐπιβουλήν;« Καὶ
ὃς »Ἀπὸ τῆς τέχνης« ἔφη »τοῖς ἀνδράσι γνωρίζομαι
καὶ ὄψον αὐτοῖς προσκομίζων πλέον ἢ παρὰ τῶν ἄλλων
τὸ τίμημα κομίζομαι. Τῇ προτεραίᾳ δὴ κύρτους ἀναλεγομένῳ
μοι περὶ τοὺς κρημνοὺς ἐντυχὼν ὁ λῄσταρχος
«Πότε ἄρα οἱ Φοίνικες ἐξορμήσειν μέλλουσιν, εἴ γε πέπυσαι;»
διηρώτα, κἀγὼ συνιεὶς τὴν ἐνέδραν τοῦ ἐρωτήματος
«Τὸ μὲν ἀκριβὲς» ἔφην, «ὦ Τραχῖνε, οὐκ ἔχω
λέγειν, εἰς ἔαρ δὲ πρῶτον ἡγοῦμαι αὐτοὺς ἀφορμήσειν.»
«Ἆρ´ οὖν» ἔφη «καὶ ἡ κόρη αὐτοῖς ἡ παρὰ σοὶ
καταγομένη συμπλεύσεται;» «Ἄδηλον μέν» εἶπον, «ἀλλὰ
τί πολυπραγμονεῖς;» «Ὅτι αὐτῆς» ἔφη «ἐρῶ μανικῶς
ἅπαξ θεασάμενος· οὐ γὰρ οἶδα προστυχὼν τοιούτῳ κάλλει,
πολλὰς καὶ ταῦτα καὶ οὐκ ἐξώρους αἰχμαλώτους
ᾑρηκώς.» Ὑπαγόμενος οὖν αὐτὸν ὥστε πᾶν ἀναπτύξαι
τὸ βούλευμα «Τί οὖν» ἔφην «δεῖ σε συμπλέκεσθαι
τοῖς Φοίνιξιν ἀλλὰ μὴ ἀναιμωτὶ καὶ πρὸ τῆς θαλάττης
ἔχειν, ἐκ τῆς οἰκίας ἁρπάσαντα τῆς ἐμῆς;» «Σῴζεται
καὶ παρὰ λῃσταῖς» ἔφη «τι συνειδὸς καὶ πρὸς τοὺς
γνωρίμους φιλάνθρωπον. Σοῦ τε οὖν φείδομαι μὴ
πραγμάτων πειραθείης τοὺς ξένους ἐπιζητούμενος, ἐγώ
τε δι´ ἑνὸς ἔργου δύο τὰ μέγιστα κτήσασθαι βούλομαι,
τόν τε πλοῦτον τῆς νεὼς καὶ τὸν γάμον τῆς κόρης,
ὧν θατέρου πάντως ἐστὶν ἀποτυχεῖν κατὰ γῆν ἐγχειροῦντα
τὴν πρᾶξιν· καὶ ἄλλως οὐδὲ ἀκίνδυνον εἴ τι
τούτων γίνοιτο πλησίον τῆς πόλεως, ἐκ τοῦ παραχρῆμα
τῆς τε αἰσθήσεως καὶ τῆς ἐπιδιώξεως ἐσομένης.»
Πολλὰ δὴ τῆς συνέσεως αὐτὸν ἐπαινέσας ἐκείνου
μὲν ἀπηλλαττόμην, σοὶ δὲ καταμηνύων τὴν σκευωρουμένην
πρὸς τῶν ἀλαστόρων ἐπιβουλὴν ἱκετεύω φροντίδα
ποιεῖσθαι τοῦ σαυτόν τε καὶ τοὺς σαυτοῦ διασῴζειν.«
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Traduction française :
[5,20] Voyant que le Phénicien ne renonçait pas mais
redoublait d'ardeur dans l'accomplissement de son désir,
et ne laissait pas s'écouler un seul jour sans venir
m'importuner avec le même sujet, je décidai, pour le
moment, de l'amuser par de belles promesses, par crainte
de quelque violence de sa part, dans cette île, et je lui
promis de faire ce qu'il voulait une fois que nous serions
en Egypte. Je venais à peine de me débarrasser de lui
pour quelque temps lorsque, comme on dit, le destin
lança contre moi vague sur vague. Tyrrhénos, quelques
jours plus tard, m'emmena à part dans une anse du rivage
et me dit : « Calasiris, je te jure, par Poséidon et par la
mer et par tous les autres dieux marins, que je te
considère comme un frère et tes enfants exactement à
l'égal des miens. Je viens te parler d'une affaire qui se
prépare, une vilaine affaire, mais que je n'ai pas le droit
de te taire, puisque tu partages le même foyer que nous,
et il est absolument nécessaire que tu la connaisses. Le
cargo phénicien est guetté par une bande de pirates, en
observation dans un repli de la côte, sur le promontoire,
là-bas, et des sentinelles, à tour de rôle, épient le moment
où le navire appareillera. Ouvre l'oeil, prends garde,
réfléchis à ce que tu dois faire, car c'est à cause de toi,
et plus encore de ta fille que ces individus méditent ce
mauvais coup, dans le genre de ceux auxquels ils sont
accoutumés. » Je lui répondis alors : « Puissent les dieux
te donner, pour ce que tu viens de me dire, la récompense
que cela mérite. Mais comment, Tyrrhénos, as-tu pu
connaître leur complot? C'est mon métier, me dit-il,
qui me met en rapport avec eux, et, lorsque je leur fournis
du poisson, j'en tire un meilleur prix qu'en le vendant
à d'autres. Hier, donc, tandis que je levais mes nasses, le
long de la falaise, le chef des pirates m'a rencontré et
m'a demandé : « Opand les Phéniciens ont-ils l'intention
d'appareiller? Le sais-tu? » Je compris tout de suite ce
que cachait cette question et je répondis : « Pour le dire
au juste, Trachinos, je ne le saurais, mais je pense qu'ils
doivent appareiller au début du printemps. Est-ce
que la jeune fille qui loge chez toi, reprit-il, doit s'embarquer
avec eux? Je l'ignore, répondis-je, mais pourquoi
ces questions? Parce que, dit-il, je suis amoureux
d'elle, à la folie, pour l'avoir vue une fois; je ne sache pas
avoir jamais rencontré pareille beauté, bien que j'aie fait
un bon nombre de prisonnières, et qui n'avaient pas
toutes passé l'âge! » Alors, pour l'amener à me révéler
tout son dessein : « Pourquoi, lui dis-je, t'attaquer aux
Phéniciens, et ne pas la prendre sans coup férir, avant
qu'elle ne s'embarque, en l'enlevant de chez moi? Il
reste, même chez les pirates, me répondit-il, un peu de
conscience, et quelques bons sentiments à l'égard de
ceux qu'ils connaissent. Aussi je désire t'épargner les
ennuis que tu aurais quand on viendrait te demander
ou sont tes hôtes, et d'autre part, je veux, d'un seul
coup, réaliser deux prises magnifiques : m'emparer des
trésors que porte le bateau et épouser la jeune fille. Or,
je suis absolument sûr de manquer la première, si
j'agis à terre; de plus, cela ne serait pas sans présenter
quelque danger que de risquer un coup pareil près de la
ville; cela se saurait immédiatement, et l'on se mettrait
aussitôt à notre poursuite. » Je lui fis de grands compliments
de son bon sens et je m'en allai; et toi, maintenant
que tu es au courant du complot que méditent ces
crapules, avise, je t'en supplie, aux moyens de vous
sauver, toi-même et les tiens. »
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