Texte grec :
[5,1] «Ἡ μὲν δὴ πόλις ἡ Δελφῶν ἐν τούτοις ἦν καὶ
ἔδρασεν ὅ τι δὴ καὶ ἔδρασεν, οὐ γὰρ ἔχω γινώσκειν·
ἐμοὶ δὲ τὸν καιρὸν τῆς φυγῆς ἡ ἐκείνων ἐπιδίωξις
ὑπέβαλεν, ἀναλαβών τε τοὺς νέους ἦγον ὡς ἐπὶ θάλατταν
αὐτῆς ὡς εἶχον τῆς νυκτὸς ἐνεβίβαζόν τε εἰς
τὴν ναῦν τὴν Φοίνισσαν ἄρτι τὰ πρυμνήσια λύειν μέλλουσαν·
καὶ γάρ πως λοιπὸν καὶ ὄρθρου ὑποφαίνοντος
οὐδὲ ὑπερβαίνειν ᾤοντο τὸν πρός με ὅρκον οἱ Φοίνικες
ἡμέραν καὶ νύκτα μόνην ἀναμεῖναι συνθέμενοι. Λίαν
οὖν χαίροντες ἥκοντας ἡμᾶς ὑποδέχονται καὶ παραχρῆμα
λιμένων ἐκτὸς ὑπ´ εἰρεσίᾳ τὸ πρῶτον ἀνήγοντο· ὡς δὲ
λείου πνεύματος ἐκ γῆς προσπνεομένου κῦμα χθαμαλὸν
ὑπέτρεχέ τε καὶ οἷον προσεγέλα τῇ πρύμνῃ, τότε δὴ τὴν
ναῦν τοῖς ἱστίοις ὑποφέρειν ἐπέτρεπον. Κιρραῖοι μὲν δὴ
κόλποι καὶ Παρνασοῦ πρόποδες Αἰτωλοί τε καὶ Καλυδώνιοι
σκόπελοι μόνον οὐ διιπταμένην τὴν ὁλκάδα παρημείβοντο,
νῆσοι δὲ Ὀξεῖαι καὶ σχῆμα καὶ ὄνομα θάλαττά τε
Ζακύνθιος ἄρτι πρὸς δύσιν ἡλίου νεύοντος ἀνεφαίνοντο.
Ἀλλὰ τί ταῦτα ἀωρὶ μηκύνω; τί δὲ λανθάνω τὴν διήγησιν
εἰς πέλαγος ὄντως ἀφεὶς τῶν ἑξῆς; Ἐνταῦθά ποι
τὸν λόγον ἐπίσχωμεν ὀλίγον δὲ καὶ ὕπνου σπάσωμεν· εἰ γὰρ
καὶ λίαν ἄοκνος ὑπάρχεις τὴν ἀκοὴν καὶ ἐρρωμένως ἀπομάχῃ
πρὸς τὸν ὕπνον, ὦ Κνήμων, ἀλλ´ ἡγοῦμαί σε λοιπὸν
ὀκλάζειν ἐμοῦ τἀμαυτοῦ πάθη μέχρι πόρρω τῶν νυκτῶν
ἀποτείναντος· κἀμὲ δὲ λοιπόν, ὦ τέκνον, γῆράς τε βαρύνει
καὶ ἡ τῶν συμφορῶν ὑπόμνησις παραλύουσα τὴν διάνοιαν
εἰς ὕπνον καταφέρει.» «Ἐπίσχες» εἶπεν ὁ Κνήμων
«ὦ πάτερ, οὐχ ὡς ἐμοῦ τὴν διήγησιν ἀποσκευαζομένου,
δοκῶ γάρ μοι μηδ´ εἰ πολλὰς μὲν νύκτας πλείους δὲ ἡμέρας
ἐπισυνάπτοις τοῦτο ἄν ποτε παθεῖν, οὕτως ἀκόρεστόν
τι καὶ σειρήνειον τὸ κατ´ αὐτήν. Ἀλλά με πάλαι θροῦς
τις καὶ βόμβος ὄχλου κατὰ τὴν οἰκίαν περιηχεῖ, καὶ ἦν
μὲν οὐκ ἐκτὸς τοῦ θορυβεῖσθαι σιωπᾶν δὲ ἐβιαζόμην ἐπιθυμίᾳ
τῶν ἀεὶ πρὸς σοῦ λεχθησομένων ἑλκόμενος.»
«Ἐγὼ μὲν οὐκ ᾐσθόμην» ἔφη ὁ Καλάσιρις «τάχα μέν που καὶ
δι´ ἡλικίαν νωθρότερος ὢν τὴν ἀκοήν, νόσος γὰρ ἄλλων τε
καὶ ὤτων τὸ γῆρας, ἴσως δὲ καὶ πρὸς τὴν διήγησιν ἠσχολημένος·
ἔοικε δέ μοι Ναυσικλῆς ἥκειν ὁ τῆς οἰκίας δεσπότης,
ἀλλὰ τί ἄρα ποτὲ ὦ θεοὶ διαπεπραγμένος;»
«Ἅπαντα ὡς ἐβουλόμην» ἔφη ὁ Ναυσικλῆς ἀθρόον
αὐτοῖς ἐπιφανείς· «οὐ γάρ με ἔλαθες, ὦ ´γαθὲ Καλάσιρι,
φροντίζων τὰς ἐμὰς πράξεις καὶ ὥσπερ τῇ διανοίᾳ συνεκδημῶν,
ἀλλά σε ἐφώρασα τῷ τε ἄλλῳ σου περὶ ἐμὲ τρόπῳ
καὶ οἷς ἐνταῦθα εἰσιὼν κατείληφα διαλεγόμενον· ἀλλὰ τίς
ὅδε ὁ ξένος;» «Ἕλλην» ἔφη ὁ Καλάσιρις· «τὰ δ´ ἄλλα
εἰσαῦθις ἀκούσῃ· σὺ δὲ εἴ τί σοι κατώρθωται δεξιὸν ἀπάγγελλε
θᾶττον, ὡς ἂν τοῦ χαίρειν γ´ ἔχοις ἡμᾶς κοινωνοῦντας.»
«Ἀλλὰ καὶ ὑμεῖς» εἶπεν ὁ Ναυσικλῆς «εἰς
ἕω μαθήσεσθε, τὸ δὲ παρὸν ὑμῖν ὅτι βελτίονα Θίσβην ἐκτησάμην
ἀπόχρη μαθεῖν· ἐμοὶ γὰρ τήν τε ἐκ τῆς ὁδοιπορίας καὶ τῶν ἄλλων
φροντίδων κάκωσιν ὕπνῳ βραχεῖ γοῦν ἐστι παραμυθητέον.»
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Traduction française :
[5,1] « Donc, la ville de Delphes se trouvait dans
l'état que j'ai dit; quant aux résultats
obtenus, je n'en saurais rien dire; la poursuite dans
laquelle ils s'engagèrent me fournit, à moi, une bonne
occasion de partir; je pris donc les jeunes gens, les
conduisis, tels qu'ils étaient, jusqu'à la mer et, en pleine
nuit, je les embarquai sur le navire des Phéniciens, au
moment précis où ceux-ci allaient lever l'ancre. Il s'en
fallait en effet de peu que l'aube ne parût et les Phéniciens
ne croyaient pas manquer à leur serment envers
moi, car ils n'avaient promis de m'attendre qu'un jour
et une nuit. Ils nous accueillirent, à notre arrivée, avec
la plus grande joie, et, aussitôt, sortirent du port à la
rame; puis, lorsque une brise légère se mit à souffler de
la terre, des vagues courtes se levèrent dans notre sillage,
comme pour nous sourire; alors, ils s'en remirent
aux voiles pour entraîner le navire. Le golfe de Cirrha,
le pied du Parnasse, les récifs d'Etolie et de Calydon se
succédaient devant le bateau qui volait presquel. puis
apparurent les îles que l'on nomme Pointues, et qui le
sont en fait, enfin la mer de Zanthe, juste au moment où
se couchait le Soleil. Mais pourquoi raconter tout cela
en détail, alors que ce n'est point le moment? Pourquoi'
sans m'en apercevoir, lancer mon récit sur la mer des
événements qui vinrent ensuite? Il faut maintenant
interrompre ce discours et prendre quelque peu de
sommeil; même si tu m'écoutes très volontiers et si tu
luttes très courageusement contre le sommeil, Cnémon,
je crois pourtant que, maintenant, tu commences à être
accablé par ce récit de mes propres malheurs, que je
prolonge si tard dans la nuit; moi-même, d'ailleurs, mon
enfant, je suis alourdi par l'âge et le souvenir de ce que
j'ai souffert paralyse mon esprit et m'incite à dormir.
Arrête-toi, Père, répondit Cnémon, non que je ne sois
pas prêt à t'écouter davantage, car je crois bien que,
même si tu continuais à me raconter des histoires pendant
plusieurs nuits et encore plus de jours, je ne
m'en lasserais pas, tant il est impossible de se rassasier
d'un récit aussi séduisant que le tien. Mais, depuis
quelque temps déjà, la maison retentit d'un bruit confus,
comme d'une foule; cela ne laissait pas de m'inquiéter,
mais je me forçais à me taire, entraîné par l'envie que
j'avais, chaque fois, d'entendre la suite de ce que tu me
disais. Je n'ai rien entendu, dit Calasiris, probablement
parce que l'âge m'a rendu un peu dur d'oreille, car la
vieillesse atteint, entre autres, les oreilles, et peut-être
aussi parce que j'étais occupé par mon récit; à mon avis,
c'est que Nausiclès, le maître de cette maison, vient de
rentrer, mais, ô dieux, quel résultat a-t-il bien pu obtenir?
J'ai obtenu tout ce que je désirais », dit Nausicles,
se montrant brusquement; « je savais bien, mon
très cher Calasiris, que tu te préoccupais de mes affaires,
et que tu étais en pensée avec moi dans mon voyage;
je m'en suis souvent aperçu à ta façon de te comporter
envers moi, et, tout particulièrement aujourd'hui, aux
paroles que j'ai surprises en entrant ici; mais quel est
cet étranger? Un Grec, dit Calasiris; le reste, tu le
sauras une autre fois; mais toi même, si tu as remporte
quelque succès, annonce-le nous au plus vite, pour qui
nous puissions participer nous-mêmes à ta joie. Eh
bien, répondit Nausiclès, vous aussi vous apprendrez
tout demain; pour l'instant qu'il vous suffise de savoir
que j'ai trouvé une Thisbé encore plus belle; maintenant
il faut que je me remette de la fatigue du voyage et
de tous mes soucis en dormant un peu. »
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