[1,15] Εἰ δέ ποτε γένοιτο καθ´ ἑαυτήν, πολλὰ τὴν
Θίσβην ἐμέμφετο ὡς οὐ προσηκόντως ὑπηρετησαμένην,
»ἡ σπουδαία περὶ τὰ δεινὰ« λέγουσα, »ἡ πρὸς μὲν τὸν
ἔρωτα μὴ συμπράξασα, ἐπὶ δὲ τὸ στερηθῆναί με τοῦ φιλτάτου
καὶ λόγου ταχίων ἀποδειχθεῖσα καὶ μηδὲ μεταβουλεύσασθαί
μοι συγχωρήσασα.« Καὶ δήλη παντοίως
ἐγένετο κακόν τι διαθήσουσα τὴν Θίσβην. Ἡ δὲ
βαρυμηνιῶσαν ὁρῶσα καὶ πάντῃ λυπηθεῖσαν ἐπιβουλεῦσαι
πρόχειρον καὶ οὐχ ἥκιστα τῷ τε θυμῷ καὶ ἔρωτι περιμανῆ
τυγχάνουσαν ἔγνω προλαβεῖν, καὶ φθῆναι τῇ κατ´
ἐκείνης ἐπιβουλῇ σωτηρίαν ἑαυτῇ περιποιοῦσα. Καὶ προσελθοῦσα
»τί ταῦτα ὦ δέσποινα;« ἔλεγε »τί μάτην
ἔχεις ἐν αἰτίᾳ θεραπαινίδα τὴν σήν; Ἐγὼ μέν σοι πρὸς τὸ
βούλημα τὸ σὸν ἀεί τε καὶ νῦν ὑπηρετησάμην· εἰ δέ τι
τῶν μὴ κατὰ γνώμην ἐκβέβηκεν, ἐκεῖνα μὲν τῇ τύχῃ
λογιστέον· ἕτοιμος δέ, εἰ κελεύεις, ἐπινοεῖν τινὰ τῶν
παρόντων λύσιν.« Ἡ δὲ »καὶ τίς ἂν εὑρεθείη,
φιλτάτη« ἔφη, »τοῦ δυναμένου λῦσαι τὰ νῦν ἐκποδὼν
γεγονότος κἀμὲ τῆς παρ´ ἐλπίδας τῶν δικαζόντων φιλανθρωπίας
ἀνελούσης; Εἰ γὰρ ἐβέβλητο τοῖς λίθοις, εἰ
γὰρ ἀνῄρητο, πάντως ἂν κἀμοὶ συνετεθνήκει τὰ τοῦ πάθους·
τὸ γὰρ ἀπελπισθὲν ἅπαξ ἐξῄρηται τῆς ψυχῆς καὶ
τὸ μηδαμόθεν ἔτι προσδοκώμενον ἀπαλγεῖν παρασκευάζει
τοὺς κάμνοντας. Νῦν δὲ ὁρᾶν φαντάζομαι, παρόντος
ἀκούειν ἀπατῶμαι, ὀνειδίζοντα τὴν ἄδικον ἐπιβουλὴν
αἰσχύνομαι· συντεύξεσθαί ποτε ὑπελθόντι καὶ ἀπολαύσειν,
ἢ καὶ αὐτὴ παρ´ ἐκεῖνον φοιτήσειν ὅπου ποτ´ ἂν ᾖ
γῆς ὑποτίθεμαι. Ταῦτα ὑπεκκαίει, ταῦτα ἐκμαίνει.
Δίκαια μὲν ὦ θεοὶ πάσχω· τί γὰρ οὐ περιεῖπον ἀλλ´ ἐπεβούλευον;
Τί δὲ οὐχ ἱκέτευον ἀλλ´ ἐδίωκον; Ἠρνήσατο
τὴν πρώτην ἀλλὰ προσηκόντως· ἀλλοτρίαν μὲν ἀλλ´ οὖν
γε πατρῴαν εὐνὴν ᾐσχύνετο· τυχὸν ἂν μετεπείσθη χρόνῳ
πρὸς τὸ ἡμερώτερον καὶ πειθοῖ μεταπλαττόμενος. Ἀλλ´
ἡ θηριώδης ἐγὼ καὶ ἀνήμερος ὥσπερ οὐκ ἐρῶσά τινος
ἀλλ´ ἄρχουσα δεινὸν ὅτι μὴ ἐξ ἐπιτάγματος ὑπήκουσεν
ἐποιησάμην καὶ εἰ τῆς Δημαινέτης ὑπερεῖδε πολὺ τὴν
ὥραν αὐτῆς ὑπερβάλλων. Ἀλλ´ ὦ γλυκεῖα Θίσβη τίνα
λύσιν ὠνόμαζες;« »Ῥᾳδίαν ὦ δέσποινα« ἔφη· »τοῖς
πολλοῖς μὲν ὁ Κνήμων ὑπεξῆλθε τοῦ ἄστεος καὶ τῆς
Ἀττικῆς ἐξώρμησε τῇ κρίσει πειθόμενος, ἐμὲ δὲ ἅπαντα
διὰ σὲ πραγματευομένην οὐκ ἔλαθεν αὐτοῦ που πρὸ τοῦ
ἄστεος κρυπτόμενος. Ἀρσινόην ἀκούεις που πάντως τὴν
αὐλητρίδα· ταύτῃ ἐκέχρητο· μετὰ δὲ τὴν δυστυχίαν ὑποδέχεται
αὐτὸν ἡ μεῖραξ καὶ συναπαίρειν ἐπαγγελλομένη
παρ´ ἑαυτῇ κατέχει κρυπτόμενον τέως ἕως ἂν συσκευάσηται.«
Καὶ ἡ Δημαινέτη »μακαρία μὲν Ἀρσινόη« φησὶ
»τῆς τε πρότερον πρὸς Κνήμωνα συνηθείας
καὶ τῆς σὺν αὐτῷ νυνὶ προσδοκωμένης ἐκδημίας· ἀλλὰ
τί ταῦτα ἂν εἴη πρὸς ἡμᾶς;« »Μεγάλα« ἔφη »ὦ δέσποινα·
ἐρᾶν μὲν ἐγὼ προσποιήσομαι τοῦ Κνήμωνος, παρακαλέσω
δὲ τὴν Ἀρσινόην, οὖσαν μοι πάλαι γνωρίμην ἀπὸ
τῆς τέχνης, εἰσαγαγεῖν με ὡς αὐτὸν νύκτωρ ἀνθ´ ἑαυτῆς·
ἅπερ εἰ γένοιτο, σὸν ἂν εἴη τὸ ἐντεῦθεν Ἀρσινόην εἶναι
δοκεῖν καὶ φοιτᾶν παρ´ αὐτὸν ὡς ἐκείνην. Μελήσει
δέ μοι καὶ ὑποβεβρεγμένον αὐτὸν κατακλῖναι παρασκευάσαι.
Εἰ δὲ τύχοις ὧν βούλει, μάλιστα μὲν εἰκὸς σχολάσαι
τὸν ἔρωτα, πολλαῖς γὰρ κατὰ τὴν πρώτην πεῖραν
ἐναπεσβέσθη τὰ τῆς ἐπιθυμίας· κόρος γὰρ ἔρωτος τῶν
ἔργων τὸ τέλος· εἰ δὲ ἐναπομείνειεν (ὃ μὴ γένοιτο), δεύτερος
ἔσται, φασί, πλοῦς καὶ ἑτέρα βουλή. Τὸ παρὸν
τέως θεραπεύωμεν.«
| [1,15] Puis quand elle était seule retirée, elle se plaignait de Thisbé et la
maudissait, comme celle qui ne l'avait pas bien servie. Cette bourgeoise,
disait-elle, qui est si diligente à nuire et à mal faire, et ne m'a pas su aider à
jouir de mes amours, qui a bien su me priver de la personne que j'aimais le
plus en ce monde ; et ne m'a pas donné le loisir de changer d'avis et de me
repentir. Tellement qu'il était aisé à connaître qu'elle ferait quelque mauvais
tour à Thisbé, laquelle voyant sa maîtresse courroucée tout outre, et
déplaisante autant qu'elle le pourrait être, la connaissant téméraire et
prompte à faire quelque fausse trahison à ceux à qui elle en voulait
mêmement lorsqu'elle était forcenée de courroux et d'amour, elle se
délibéra de prévenir et d'assurer sa vie, en lui dressant première à elle-même
embûche. Et pourtant ainsi comme Démaenété faisait à par elle ses
plaintes et doléances, Thisbé entrant en sa chambre lui commença à dire :
Ma maîtresse, que dites-vous? pourquoi accusez-vous sans cause ni raison
votre humble servante? Ne vous ai-je pas toujours, tant au passé que
maintenant, servi et obéi à votre volonté? S'il est advenu quelque chose
contre votre vouloir, il s'en faut prendre à la fortune; et quant à moi, je suis
toute prête d'inventer quelque moyen pour vous tirer de l'ennui auquel
vous êtes. Lors dit Démaenété : Et quel moyen saurais-tu trouver, quand
celui qui seul m'en pouvait ôter n'est plus maintenant au pays, et que la
clémence et humanité de ceux qui l'ont jugé autrement que je n'avais espéré
m'a détruite et affolée; car s'il eût été lapidé, ou bien livré à mort par
quelque autre manière, ma passion s'en fût nécessairement éteinte, pour
autant que ce qui est une fois hors d'espérance, sort aussitôt du désir et de
l'entendement : et quand on est résolu de ne pouvoir plus attendre ni
espérer une chose, cela fait que ceux qui en étaient auparavant travaillés ne
s'en tourmentent plus. Là où maintenant il m'est toujours avis que je le vois,
je songe que je l'entends parler avec moi, me reprochant la méchante
trahison que je lui ai faite. J'ai, ce me semble, honte de me trouver avec lui.
Tantôt je suppose qu'il retournera, et que je jouirai de lui, ou bien que je
l'irai moi-même trouver en quelque quartier de la terre qu'il soit; et voilà
qui m'enflamme, voilà qui me met hors du sens. Mais, hélas ! je souffre ce
que j'ai bien mérité; car que ne l'ai-je gagné par douceur, et non pas chassé
par trahison ! Que ne l'ai-je humblement supplié, et non pas poursuivi par
voie de fait ? Il m'a refusée la première fois ; mais ça été avec bonne cause :
il a eu honte d'entrer au lit d'autrui; mais c'était le lit de son père. Et peut-être
qu'avec le temps il fût devenu plus doux et plus traitable, mêmement
en le maniant avec dextérité et douceur; et moi, sauvage et farouche,
comme si je n'eusse pas été amoureuse, mais dame et maîtresse de lui, ai
trouvé étrange qu'il n'a pas voulu tout du premier coup obéir à mon
commandement, et qu'il n'a fait compte de Démaenété, laquelle il surpasse
en fleur d'âge et de beauté. Mais, Thisbé, ma mie, quel moyen est-ce que tu
me disais ? Ma maîtresse, dit-elle, on pense que Cnémon, obéissant à la
sentence qui a été donnée par justice contre lui, soit sorti hors de la ville, et
qu'il ait abandonné le pays d'Attique ; mais moi, qui ai conduit toute
l'affaire pour l'amour de vous, sais bien le contraire ; car je sais qu'il est en
quelque lieu ici près hors la ville caché. Vous avez bien ouï parler d'une
Arsinoé, qui joue des flûtes; il l'entretenait. Et après sa fortune, cette garce
l'a reçu en sa maison, et lui a promis qu'elle s'en ira avec lui. Cependant elle
le tient caché en son logis, jusqu'à ce qu'elle ait troussé ses hardes pour s'en
aller quant et lui. Lors Démaenété ne put se tenir de dire : Ô Arsinoé !
combien tu es heureuse, tant pour le plaisir que tu as eu par le passé, que
pour l'espérance de t'en aller avec lui! Mais, après tout, dit-elle, de quoi me
sert cela? De beaucoup, répond Thisbé; car je ferai semblant d'être devenue
amoureuse de lui, et prierai Arsinoé, laquelle je connais de longtemps,
parce que nous sommes toutes deux d'un même métier, qu'elle me laisse
une nuit coucher avec lui au lieu d'elle, et donnerai ordre, avec cela, qu'à
certain jour que nous aviserons il sera bien pansé, et qu'il aura bu quand il
s'en viendra coucher. Si elle y consent, à l'heure ce sera à vous à jouer le
personnage d'Arsinoé. Et lors, si vous jouissez de ce que vous désirez, il est
grandement vraisemblable que votre amour en diminuera; car il y en a
beaucoup à qui le désir passe, et s'éteint en la première jouissance, pour ce
l'accomplissement de l'oeuvre est l'assouvissement de l'amour. Mais si,
d'aventure, l'amour vous demeure encore après la jouissance, nous aurons
recours aux rames quand nous ne nous pourrons aider de la voile, comme
l'on dit en commun proverbe, et prendrons autres avis : pour le présent,
tâchons à apaiser un peu le désir.
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