Texte grec :
[250] (ΑΔΜΗΤΟΣ) ἔπαιρε σαυτήν, ὦ τάλαινα, μὴ προδῶις·
251 λίσσου δὲ τοὺς κρατοῦντας οἰκτῖραι θεούς.
252 (ΑΛΚΗΣΤΙΣ) ὁρῶ δίκωπον ὁρῶ σκάφος ἐν
253 λίμναι· νεκύων δὲ πορθμεὺς
254 ἔχων χέρ´ ἐπὶ κοντῶι Χάρων
255 μ´ ἤδη καλεῖ· Τί μέλλεις;
256 ἐπείγου· σὺ κατείργεις. τάδε τοί με
256 σπερχόμενος ταχύνει.
257 (ΑΔΜΗΤΟΣ) οἴμοι· πικράν γε τήνδε μοι ναυκληρίαν
258 ἔλεξας. ὦ δύσδαιμον, οἷα πάσχομεν.
259 (ΑΛΚΗΣΤΙΣ) ἄγει μ´ ἄγει τις, ἄγει μέ τις (οὐχ
260 ὁρᾶις;) νεκύων ἐς αὐλάν,
261 ὑπ´ ὀφρύσι κυαναυγέσι
262 βλέπων πτερωτὸς Ἅιδας.
263 τί ῥέξεις; ἄφες. οἵαν ὁδὸν ἁ δειλαιοτάτα
263 προβαίνω.
264 (ΑΔΜΗΤΟΣ) οἰκτρὰν φίλοισιν, ἐκ δὲ τῶν μάλιστ´ ἐμοὶ
265 καὶ παισίν, οἷς δὴ πένθος ἐν κοινῶι τόδε.
266 (ΑΛΚΗΣΤΙΣ) μέθετε μέθετέ μ´ ἤδη·
267 κλίνατ´, οὐ σθένω ποσίν.
268 πλησίον Ἅιδας, σκοτία
269 δ´ ἐπ´ ὄσσοισι νὺξ ἐφέρπει.
270 τέκνα τέκν´, οὐκέτι δὴ
271 οὐκέτι μάτηρ σφῶιν ἔστιν.
272 χαίροντες, ὦ τέκνα, τόδε φάος ὁρῶιτον.
273 (ΑΔΜΗΤΟΣ) οἴμοι· τόδ´ ἔπος λυπρὸν ἀκούειν
274 καὶ παντὸς ἐμοὶ θανάτου μεῖζον.
275 μὴ πρός σε θεῶν τλῆις με προδοῦναι,
276 μὴ πρὸς παίδων οὓς ὀρφανιεῖς,
276 ἀλλ´ ἄνα, τόλμα.
277 σοῦ γὰρ φθιμένης οὐκέτ´ ἂν εἴην,
278 ἐν σοὶ δ´ ἐσμὲν καὶ ζῆν καὶ μή·
279 σὴν γὰρ φιλίαν σεβόμεσθα.
280 (ΑΛΚΗΣΤΙΣ) Ἄδμηθ´, ὁρᾶις γὰρ τἀμὰ πράγμαθ´ ὡς ἔχει,
281 λέξαι θέλω σοι πρὶν θανεῖν ἃ βούλομαι.
282 ἐγώ σε πρεσβεύουσα κἀντὶ τῆς ἐμῆς
283 ψυχῆς καταστήσασα φῶς τόδ´ εἰσορᾶν
284 θνήισκω, παρόν μοι μὴ θανεῖν, ὑπὲρ σέθεν,
285 ἀλλ´ ἄνδρα τε σχεῖν Θεσσαλῶν ὃν ἤθελον
286 καὶ δῶμα ναίειν ὄλβιον τυραννίδι.
287 οὐκ ἠθέλησα ζῆν ἀποσπασθεῖσα σοῦ
288 σὺν παισὶν ὀρφανοῖσιν, οὐδ´ ἐφεισάμην
289 ἥβης, ἔχους´ ἐν οἷς ἐτερπόμην ἐγώ.
290 καίτοι ς´ ὁ φύσας χἠ τεκοῦσα προύδοσαν,
291 καλῶς μὲν αὐτοῖς κατθανεῖν ἧκον βίου,
292 καλῶς δὲ σῶσαι παῖδα κεὐκλεῶς θανεῖν.
293 μόνος γὰρ αὐτοῖς ἦσθα, κοὔτις ἐλπὶς ἦν
294 σοῦ κατθανόντος ἄλλα φιτύσειν τέκνα.
295 κἀγώ τ´ ἂν ἔζων καὶ σὺ τὸν λοιπὸν χρόνον,
296 κοὐκ ἂν μονωθεὶς σῆς δάμαρτος ἔστενες
297 καὶ παῖδας ὠρφάνευες. ἀλλὰ ταῦτα μὲν
298 θεῶν τις ἐξέπραξεν ὥσθ´ οὕτως ἔχειν.
299 εἶἑν· σύ νύν μοι τῶνδ´ ἀπόμνησαι χάριν·
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Traduction française :
[250] ADMÈTE.
Ranime-toi, infortunée, ne m'abandonne pas ; prie les dieux tout-puissants d'avoir pitié de nous.
ALCESTE.
Je vois la double rame, je vois la barque fatale. Le nocher des morts, Caron, la main sur la rame, m'appelle déjà: «Qui t'arrête? hâte-toi : tu me retardes.» C'est ainsi qu'il me presse dans sa colère.
ADMÈTE.
Hélas ! tu parles là d'un funeste trajet. O cruelle souffrance !
ALCESTE.
On m'entraîne, ne le vois-tu pas? on m'entraîne à la cour des morts : c'est Pluton lui-même; il vole autour de moi, lançant de terribles regards de ses sombres sourcils. Que fais-tu? laisse-moi.
Ah ! malheureuse, quelle est cette route inconnue dans laquelle je m'avance?
ADMÈTE.
Route déplorable pour ceux qui t'aiment, mais surtout pour moi, et pour tes enfants, qui partagent ma désolation.
ALCESTE, aux femmes.
Vous, laissez-moi à présent, étendez-moi. Cher époux, les forces m'abandonnent; la mort est proche ; les ténèbres de la nuit se répandent sur mes yeux : mes enfants, mes chers enfants, c'en est fait, vous n'avez plus de mère. Soyez heureux, mes enfants, et jouissez de la lumière du jour !
ADMÈTE.
Hélas ! il me faut entendre ces paroles funestes, plus cruelles pour moi que la mort ! Ne m'abandonne pas, au nom des dieux, au nom de tes enfants, que tu vas rendre orphelins : allons, reprends tes esprits. Si tu meurs, je ne saurais plus vivre : de toi dépend ma vie ou ma mort ; car ta tendresse est pour moi l'objet d'un culte inviolable.
ALCESTE.
Admète, tu vois en quel état je suis réduite : je veux te dire, avant de mourir, mes dernières volontés. Animée d'un tendre respect, et sacrifiant ma vie pour que tu jouisses de la lumière, je meurs pour toi, quand je pouvais vivre, choisir un époux parmi les Thessaliens, et passer des jours heureux sur le trône. Je n'ai pas voulu vivre séparée de toi, avec des enfants orphelins ; je ne me suis point épargnée moi-même, malgré les dons brillants de la jeunesse dont je pouvais jouir. Cependant ton père et ta mère t'ont abandonné, quand la mort convenait à leur âge, quand il était beau pour eux de sauver leur fils, en mourant avec honneur. Car tu étais leur unique enfant, et toi mort, ils n'avaient pas l'espoir de donner le jour à d'autres. Je vivrais, ainsi que toi, pour longtemps, et tu n'aurais pas à pleurer la perte d'une épouse, et à élever des enfants orphelins. Mais un dieu a voulu qu'il en fût ainsi. Résignons-nous. Maintenant montre-toi reconnaissant de ce bienfait ;
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