Texte grec :
[900] δύο δ´ ἀντὶ μιᾶς Ἅιδης ψυχὰς
901 τὰς πιστοτάτας σὺν ἂν ἔσχεν, ὁμοῦ
902 χθονίαν λίμνην διαβάντε.
903 (ΧΟΡΟΣ) ἐμοί τις ἦν
904 ἐν γένει, ὧι κόρος ἀξιόθρηνος
905 ὤλετ´ ἐν δόμοισιν
906 μονόπαις· ἀλλ´ ἔμπας
907 ἔφερε κακὸν ἅλις, ἄτεκνος ὤν,
909 πολιὰς ἐπὶ χαίτας
910 ἤδη προπετὴς ὢν
911 βιότου τε πόρσω.
912 (ΑΔΜΗΤΟΣ) ὦ σχῆμα δόμων, πῶς εἰσέλθω,
913 πῶς δ´ οἰκήσω, μεταπίπτοντος
914 δαίμονος; οἴμοι. πολὺ γὰρ τὸ μέσον·
915 τότε μὲν πεύκαις σὺν Πηλιάσιν
916 σύν θ´ ὑμεναίοις ἔστειχον ἔσω
917 φιλίας ἀλόχου χέρα βαστάζων,
918 πολυάχητος δ´ εἵπετο κῶμος
919 τήν τε θανοῦσαν κἄμ´ ὀλβίζων
920 ὡς εὐπατρίδαι κἀπ´ ἀμφοτέρων
921 ὄντες ἀριστέων σύζυγες εἶμεν·
922 νῦν δ´ ὑμεναίων γόος ἀντίπαλος
923 λευκῶν τε πέπλων μέλανες στολμοὶ
924 πέμπουσί μ´ ἔσω
925 λέκτρων κοίτας ἐς ἐρήμους.
926 (ΧΟΡΟΣ) παρ´ εὐτυχῆ
927 σοι πότμον ἦλθεν ἀπειροκάκωι
928 τόδ´ ἄλγος· ἀλλ´ ἔσωσας
929 βίοτον καὶ ψυχάν.
930 ἔθανε δάμαρ, ἔλιπε φιλίαν·
932 τί νέον τόδε; πολλοὺς
933 ἤδη παρέλυσεν
934 θάνατος δάμαρτος.
935 (ΑΔΜΗΤΟΣ) φίλοι, γυναικὸς δαίμον´ εὐτυχέστερον
936 τοὐμοῦ νομίζω, καίπερ οὐ δοκοῦνθ´ ὅμως.
937 τῆς μὲν γὰρ οὐδὲν ἄλγος ἅψεταί ποτε,
938 πολλῶν δὲ μόχθων εὐκλεὴς ἐπαύσατο.
939 ἐγὼ δ´, ὃν οὐ χρῆν ζῆν, παρεὶς τὸ μόρσιμον
940 λυπρὸν διάξω βίοτον· ἄρτι μανθάνω.
941 πῶς γὰρ δόμων τῶνδ´ εἰσόδους ἀνέξομαι;
942 τίν´ ἂν προσειπών, τοῦ δὲ προσρηθεὶς ὕπο
943 τερπνῆς τύχοιμ´ ἂν εἰσόδου; ποῖ τρέψομαι;
944 ἡ μὲν γὰρ ἔνδον ἐξελᾶι μ´ ἐρημία,
945 γυναικὸς εὐνὰς εὖτ´ ἂν εἰσίδω κενὰς
946 θρόνους τ´ ἐν οἷσιν ἷζε καὶ κατὰ στέγας
947 αὐχμηρὸν οὖδας, τέκνα δ´ ἀμφὶ γούνασιν
948 πίπτοντα κλαίηι μητέρ´, οἱ δὲ δεσπότιν
949 στένωσιν οἵαν ἐκ δόμων ἀπώλεσαν.
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Traduction française :
[900] Pluton aurait reçu deux âmes fidèles, traversant ensemble le fleuve infernal.
LE CHOEUR.
J'avais dans ma famille un homme, dont le fils unique, bien digne de regrets, mourut. Cependant il supporta avec modération ce malheur, qui le laissait sans enfant, dans un âge avancé, et les cheveux blanchis.
ADMÈTE.
O palais, comment pourrai-je rentrer dans ton enceinte ? comment pourrai-je t'habiter, après ce changement de fortune ? Hélas! quelle différence ! Alors j'entrai dans ce palais, éclairé par des torches coupées sur le Pélion, au bruit des chants d'hymen, conduisant par la main mon épouse chérie. A notre suite marchait une troupe joyeuse d'amis, célébrant l'heureuse union qui alliait deux époux de noble naissance. Maintenant aux chants d'allégresse succèdent de tristes lamentations ; au lieu des voiles blancs, c'est le deuil avec ses habits lugubres, qui me ramène dans la demeure où s'élève la couche nuptiale, vide désormais.
926 LE CHOEUR.
A ton heureuse fortune tu vois succéder cette affliction, toi qui n'avais pas connu le malheur ; mais tu conserves la vie. Ton épouse est morte, et elle t'a laissé sa tendresse. Qu'y a-t-il là de nouveau? A bien d'autres avant toi la mort a ravi leur femme,
ADMÈTE.
Amis, le sort de mon épouse est, selon moi, plus heureux que le mien, quoiqu'on n'en juge pas ainsi. La douleur ne saurait plus l'atteindre, et elle s'est dérobée, pleine de gloire, à bien des épreuves : mais moi, qui devais ne plus vivre, j'ai franchi le terme fatal, et je traînerai une vie misérable ; je commence à le sentir. Comment aurai-je la force de rentrer dans ce palais ? A qui m'adresser? Quelle voix entendrai-je, qui me rende ce retour moins pénible? Où tourner mes pas? La solitude qui y règne me tuera, quand je verrai vide la couche d'Alceste et les sièges où elle prenait place, le désordre et l'état négligé du palais ; quand mes enfants, tombant à mes genoux, pleureront leur mère, et que les serviteurs gémiront sur la perte de leur maîtresse.
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