[9] LE ROSSIGNOL ET L'HIRONDELLE
L'hirondelle engageait le rossignol à loger sous le toit des hommes et à vivre
avec eux, comme elle-même. Le rossignol répondit : « Je ne veux point raviver le
souvenir de mes anciens malheurs : voilà pourquoi j'habite les lieux déserts. »
Cette fable montre que l'homme affligé par quelque coup de la fortune veut
éviter jusqu'au lieu où le chagrin l'a frappé.
(Version B - traduction DDC)
Une hirondelle approchait un rossignol pour lui proposer de nicher près d'elle. Mais tout en larmes il lui criait: Non! Comment pourrai-je, moi, faire cela ? Je revis les maux de mes aïeux, et c’est pour cela que je ne hanterai que des lieux solitaires.
Ainsi, celui qu’un malheur afflige, fuit même l’endroit où il a été affligé.
Commentaire DDC :
La fable fait référence à la légende des deux sœurs Philomèle et Procné (Ovide, Mét. 412-674) transformées la première en rossignol, et sa sœur en hirondelle, (à moins que ce ne soit le contraire, comme hésite la tradition !), après leur vengeance atroce et sanglante sur Térée, amant de l’une, époux de l’autre. Cette version omet τοῖς ἀνθρώποις complément de ὁμόροφος, ce qui rend au premier abord moins compréhensible le refus du rossignol. Au lecteur de se rappeler que l’hirondelle niche dans des lieux habités ! Par ailleurs la réaction du rossignol est nettement plus appuyée que dans la version A, par l’emploi notamment du présent et de l’imparfait et le choix du vocabulaire, et sa réponse plus véhémente dans sa longueur. À noter qu’en grec les dénominations des deux oiseaux - ἀηδών/χελιδών- non seulement trisyllabiques et homéotéleutes, sont toutes deux aussi féminines, ce qui rend plus plausible la réaction si émotionnelle du rossignol. Avant de recevoir une conclusion morale, la fable expliquait la différence d’habitat des deux oiseaux. La conclusion est un peu en porte-à-faux puisqu’il s’agit de maux affligeant les ascendants du rossignol et non pas directement lui-même.