Texte grec :
[58,10] κἀν τούτῳ ἡ ἐπιστολὴ ἀνεγνώσθη. ἦν δὲ μακρά, καὶ οὐδὲν ἀθρόον
κατὰ τοῦ Σεϊανοῦ εἶχεν, ἀλλὰ τὰ μὲν πρῶτα ἄλλο τι, εἶτα μέμψιν
κατ´ αὐτοῦ βραχεῖαν, καὶ μετ´ αὐτὴν ἕτερόν τι, καὶ κατ´ ἐκείνου
ἄλλο· καὶ ἐπὶ τελευτῆς δύο τε βουλευτὰς τῶν ᾠκειωμένων οἱ κολασθῆναι
καὶ αὐτὸν ἐν φρουρᾷ γενέσθαι δεῖν ἔλεγεν. ἄντικρυς
γὰρ ἀποθανεῖν αὐτὸν ὁ Τιβέριος οὐ προσέταξεν, οὐχ ὅτι οὐκ ἐβούλετο,
ἀλλ´ ὅτι ἐφοβήθη μὴ ταραχή τις ἐκ τούτου γένηται· ὡς γοῦν
οὐδὲ τὴν ὁδὸν ἀσφαλῶς ποιήσασθαι δυνάμενος, τὸν ἕτερον τῶν
ὑπάτων μετεπέμψατο. τοσαῦτα μὲν ἡ γραφὴ ἐδήλου, παρῆν δὲ
καὶ ἀκοῦσαι ἐπ´ αὐτῇ καὶ ἰδεῖν πολλὰ καὶ ποικίλα. πρότερον μὲν
γάρ, πρὶν ἀναγιγνώσκεσθαι αὐτήν, ἐπαίνους τε αὐτοῦ ὡς καὶ τὴν
δημαρχικὴν ἐξουσίαν ληψομένου ἐποιοῦντο καὶ ἐπιβοήμασιν ἐχρῶντο,
προλαμβάνοντες ὅσα ἤλπιζον, καὶ προσενδεικνύμενοί οἱ ὡς καὶ αὐτοὶ
αὐτὰ δώσοντες· ἐπεὶ δ´ οὐδὲν τοιοῦτον εὑρίσκετο, ἀλλὰ καὶ
πᾶν τοὐναντίον ἢ προσεδόκων ἤκουον, ἔν τε ἀπορίᾳ καὶ μετὰ τοῦτο
καὶ ἐν κατηφείᾳ πολλῇ ἐγίγνοντο. καί τινες καὶ ἐξανέστησαν τῶν
συγκαθημένων αὐτῷ· ὃν γὰρ πρόσθεν περὶ πολλοῦ φίλον ἔχειν ἐποιοῦντο,
τούτῳ τότε οὐδὲ τῆς αὐτῆς συνεδρείας κοινωνεῖν ἤθελον.
κἀκ τούτου καὶ στρατηγοὶ καὶ δήμαρχοι περιέσχον αὐτόν, ὅπως μὴ
συνταράξῃ τι ἐκπηδήσας· ὅπερ πάντως ἂν ἐπεποιήκει, εἰ κατ´ ἀρχὰς
ἀθρόῳ τινὶ ἀκούσματι ἐπέπληκτο. νῦν δὲ τό τε ἀεὶ ἀναγιγνωσκόμενον
ὡς καὶ κοῦφον καὶ μόνον ὂν παρορῶν, καὶ μάλιστα μὲν
μηδὲν ἄλλο, εἰ δὲ μή, μήτι γε καὶ ἀνήκεστόν τι ἐπεστάλθαι περὶ
αὑτοῦ ἐλπίζων, διετρίβη καὶ κατὰ χώραν ἔμεινε. κἀν τούτῳ προσκαλεσαμένου
αὐτὸν τοῦ Ῥηγούλου οὐχ ὑπήκουσεν, οὐχ ὅτι ὑπερεφρόνησεν
(ἤδη γὰρ ἐτεταπείνωτο) ἀλλ´ ὅτι ἀήθης τοῦ προστάττεσθαί
τι ἦν. ὡς δὲ καὶ δεύτερον καὶ τρίτον γε ἐκεῖνος ἐμβοήσας οἱ καὶ
τὴν χεῖρα ἅμα ἐκτείνας εἶπε "Σεϊανὲ δεῦρο ἐλθέ," ἐπηρώτησεν αὐτὸν
αὐτὸ τοῦτο, "ἐμὲ καλεῖς;" ὀψὲ δ´ οὖν ποτε ἀναστάντι αὐτῷ
καὶ ὁ Λάκων ἐπεσελθὼν προσέστη. καὶ τέλος διαναγνωσθείσης
τῆς ἐπιστολῆς πάντες ἀπὸ μιᾶς γλώσσης καὶ κατεβόων αὐτοῦ καὶ
δεινὰ ἐπέλεγον, οἱ μὲν ἠδικημένοι οἱ δὲ πεφοβημένοι, ἄλλοι τὴν
φιλίαν τὴν πρὸς αὐτὸν ἐπηλυγαζόμενοι, ἄλλοι τῇ μεταβολῇ αὐτοῦ
ἐπιχαίροντες. οὐ μὴν οὔτε πάντας αὐτοὺς οὔτε περὶ τοῦ θανάτου
τινὰ αὐτοῦ ὁ Ῥήγουλος ἐπεψήφισε, φοβηθεὶς μή τις ἐναντιωθῇ
κἀκ τούτου καὶ ταραχθῇ τι (συχνοὺς γὰρ δὴ καὶ συγγενεῖς καὶ
φίλους εἶχεν)· ἀλλ´ ἕνα τινὰ ἀνακρίνας καὶ σύμψηφον ὅπως δεθῇ
λαβών, ἐξήγαγέ τε αὐτὸν ἐκ τοῦ συνεδρίου καὶ ἐς τὸ δεσμωτήριον
μετά τε τῶν ἄλλων ἀρχόντων καὶ μετὰ τοῦ Λάκωνος κατήγαγεν.
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Traduction française :
[58,10] Pendant ce temps, on lut la lettre. Elle était longue,
et les griefs contre Séjan n'y étaient pas présentés réunis;
il y était d'abord question d'une chose étrangère;
venaient ensuite quelques mots de blâme contre le favori;
puis, autre chose encore; puis, une nouvelle attaque :
la lettre se terminait par l'ordre de châtier deux
sénateurs dévoués à Séjan et de mettre Séjan lui-même
en garde. S'il ne commanda pas ouvertement de le faire
mourir, ce ne fut pas manque de le vouloir, ce fut
crainte d'exciter par là des troubles; bien plus, comme
s'il ne pouvait faire la route en sûreté, il demanda que
l'un des deux consuls se rendît auprès de lui. Tel était
le contenu de la lettre : on put alors voir et entendre
mille choses diverses. Avant la lecture du message, on
prodiguait les éloges à Séjan prêt à recevoir la puissance
tribunitienne; c'étaient en sa faveur des acclamations
qui lui promettaient à l'avance les dignités dont on espérait
le voir revêtu, et lui témoignaient les dispositions
où chacun était de lui donner ce qu'il désirait : mais,
comme rien ne se trouvait conforme aux espérances
qu'on avait conçues ; que, loin de là, on entendait des
choses toutes contraires à celles sur lesquelles on comptait,
l'hésitation d'abord, puis l'abattement, s'emparèrent
des esprits. Quelques-uns des sénateurs assis près de lui
se levèrent : celui dont auparavant ils estimaient si haut
l'amitié, ils ne voulaient plus même siéger sur le même
banc que lui. Dès-lors les préteurs et les tribuns l'entourèrent,
de peur qu'il n'excitàt quelque émeute, en s'élanlançant
hors du sénat; ce qu'il n'eût pas manqué de faire
si, dans le principe, les griefs fussent venus réunis frapper
ses oreilles. Mais comme, à mesure qu'on en lisait
un, il y prêtait peu d'attention, vu que ce grief était peu
grave et isolé, et surtout qu'il se flattait de l'espérance
que le message ne contenait rien autre chose contre lui,
ou, tout au moins, rien d'irrémédiable, il laissa le temps
s'écouler et demeura en place. Sur ces entrefaites, Régulus
l'ayant appelé, il n'obéit pas : ce ne fut point par
mépris (son orgueil était déjà tombé), mais il n'était pas
habitué à recevoir des ordres. Régulus, en même temps
qu'il portait la main sur lui, ayant une seconde et une
troisième fois répété le commandement : "Séjan, viens
ici", Séjan se contenta de lui adresser cette seule question :
"C'est moi que tu appelles?" et lorsque, bien que
tardivement, il se fut enfin levé, Lacon, qui venait d'entrer,
se plaça à ses côtés. La lecture de la lettre terminée,
tous, d'une seule voix, firent retentir leurs clameurs
et leurs malédictions contre lui; les uns par esprit de
vengeance, les autres par crainte ; ceux-ci dissimulaient
leur ancienne amitié, ceux-là se réjouissaient de sa
disgrâce. Régulus s'abstint de prendre l'avis de tous les
sénateurs et même de les consulter sur la mort de Séjan,
de peur de rencontrer de l'opposition et d'exciter
des troubles, car Séjan avait là des parents et des amis;
mais, se contentant de poser à chacun la question de
mettre le coupable dans les fers, et ayant obtenu leur
assentiment, il l'emmena de l'assemblée, et, accompagné
des autres magistrats et de Lacon, il le conduisit dans la prison.
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