Texte grec :
[58,1] Ἀπεδήμησε δὲ κατὰ τὸν καιρὸν τοῦτον ἐκ τῆς Ῥώμης, καὶ οὐκέτι
τὸ παράπαν ἐς τὴν πόλιν ἀνεκομίσθη, καίτοι μέλλων τε ἀεὶ καὶ ἐπαγ γελλόμενος.
Λατιάριος δέ τις ἑταῖρος Σαβίνου ἀνδρὸς τῶν πρώτων ἐν Ῥώμῃ,
τῷ Σεϊανῷ χαριζόμενος, ἐς τὴν τοῦ οἰκήματος ἐν ᾧ διῃτᾶτο ὀροφὴν βουλευτὰς
κατακρύψας ὑπηγάγετο τὸν Σαβῖνον ἐς λόγους, καί τι εἰπὼν ὧν
εἰώθει, ἐπεσπάσατο καὶ ἐκεῖνον πάνθ´ ὅσα ἐφρόνει ἐκλαλῆσαι. τῶν γάρ
τοι συκοφαντεῖν ἐθελόντων ἔργον ἐστὶ λοιδορίας τέ τινος προκατάρχεσθαι
καὶ ἀπόρρητόν τι ἐκφαίνειν, ἵνα ἀκούσας τι αὐτὸς ἢ καὶ ὅμοιόν τι εἰπὼν
αἰτιαθῇ· τοῖς μὲν γάρ, ἅτε ἐκ παρασκευῆς τοῦτο δρῶσιν, ἀκίνδυνός ἐστιν
ἡ παρρησία (οὐ γὰρ ὡς καὶ φρονοῦντές τινα, ἀλλ´ ὡς ἑτέρους ἐλέγξαι
βουλόμενοι λέγειν αὐτὰ πιστεύονται), οἱ δ´ ὅ τι ἂν καὶ τὸ βραχύτατον
ἔξω τοῦ καθεστηκότος εἴπωσι, κολάζονται. ὅπερ καὶ τότε ἐγένετο· ἔς
τε γὰρ τὸ δεσμωτήριον αὐθημερὸν ὁ Σαβῖνος κατετέθη, καὶ μετὰ τοῦτο
ἄκριτος ἐφθάρη, τό τε σῶμα αὐτοῦ κατὰ τῶν ἀναβασμῶν ἐρρίφη καὶ
ἐς τὸν ποταμὸν ἐνεβλήθη. καὶ δεινὸν μὲν τοῦτο τὸ πάθος καὶ καθ´
ἑαυτὸ ἅπασιν ἦν, ἐδείνωσε δ´ αὐτὸ ἐπὶ πλέον κύων τις τοῦ Σαβίνου,
συνεσελθών τε αὐτῷ ἐς τὸ οἴκημα καὶ ἀποθανόντι παραμείνας καὶ τέλος
καὶ ἐς τὸν ποταμὸν συνεσπεσών. τοῦτο μὲν τοιοῦτον ἐγένετο.
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Traduction française :
[58,1] LIVRE CINQUANTE-HUITIÈME.
Vers cette époque, Tibère quitta Rome et n'y rentra plus,
bien qu'à chaque instant il fût sur le point de
revenir et qu'il promît de le faire. Un certain Latiaris,
ami de Sabinus, l'un des principaux citoyens de Rome,
ayant, pour gagner la faveur de Séjan, fait cacher des
sénateurs sous le toit de la maison qu'il habitait, l'amena
à un entretien avec lui, et, par quelques mots de leurs
conversations habituelles, provoqua l'expansion de tous
ses sentiments. C'est, en effet, l'usage des délateurs de
commencer par attaquer quelqu'un en paroles et par
révéler quelque secret, afin qu'en les écoutant ou en
laissant échapper une parole semblable, leurs victimes
donnent prise à une accusation; les uns ne courent aucun
danger à s'exprimer librement (on sait que ce ne
sont pas là leurs sentiments, et qu'ils ne parlent ainsi
que pour surprendre ceux à qui ils s'adressent) ; les
autres, au contraire, pour peu qu'ils laissent échapper
le moindre mot en dehors des convenances, sont livrés
au supplice. C'est ce qui arriva en cette circonstance.
Sabinus, en effet, fut ce jour-là même jeté en prison et
mis à mort, sans jugement ; son corps fut traîné aux
Gémonies et précipité dans le fleuve. Une circonstance
singulière vint encore augmenter l'horreur de ce supplice;
un chien de Sabinus suivit son maître dans la
prison, resta près de lui au moment de la mort, et
finit par s'élancer avec lui dans le fleuve. Voilà comment
les choses se passèrent.
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