Texte grec :
[52,18] ταῦτά τε οὖν ἰδὼν καὶ τἆλλα πάντα λογισάμενος, μὴ προῇ
καὶ σεαυτὸν καὶ τὴν πατρίδα, ἵνα μὴ δόξῃς τισὶν ἐθελούσιος τῆς
ἀρχῆς ἐφεῖσθαι. πρῶτον μὲν γάρ, ἂν καὶ τοῦτό τις ὑποπτεύσῃ,
οὔτ´ ἀπὸ τοῦ ἀνθρωπείου τρόπου τὸ ἐπιθύμημά ἐστι, καὶ καλὸς ὁ
κίνδυνος αὐτοῦ· ἔπειτα δὲ τίς οὐκ οἶδε τὴν ἀνάγκην ὑφ´ ἧς ἐς τὰ
πράγματα ταῦτα προήχθης; ὥστε εἴπερ τι αἰτίαμα αὐτῆς ἐστι,
τοῖς τοῦ πατρός σου σφαγεῦσι δικαιότατα ἄν τις αὐτὸ ἐγκαλέσειεν·
εἰ γὰρ ἐκεῖνοι μήτ´ ἀδίκως μήτ´ οἰκτρῶς οὕτως αὐτὸν ἀπεκτόνεσαν,
οὔτ´ ἂν τὰ ὅπλα ἀντήρω, οὔτ´ ἂν τὰ στρατεύματα συνελέξω, οὔτ´
ἂν Ἀντωνίῳ καὶ Λεπίδῳ συνέθου, οὔτ´ ἂν αὐτοὺς ἐκείνους ἠμύνω.
καὶ ὅτι μὲν ὀρθῶς καὶ δικαίως πάντα ταῦτ´ ἐποίησας, οὐδεὶς
ἀγνοεῖ· εἰ δ´ οὖν τι καὶ πεπλημμέληται, ἀλλ´ οὔτι καὶ μεταθέσθαι
ἔτ´ ἀσφαλῶς δυνάμεθα. ὥστε καὶ ἡμῶν αὐτῶν ἕνεκα καὶ τῆς πόλεως
πεισθῶμεν τῇ τύχῃ τῇ τὴν μοναρχίαν σοι διδούσῃ. καὶ χάριν
γε μεγάλην αὐτῇ ἔχωμεν, ὅτι μὴ μόνον τῶν κακῶν τῶν ἐμφυλίων
ἀπέλυσεν ἡμᾶς, ἀλλὰ καὶ τὴν κατάστασιν τῆς πολιτείας ἐπὶ σοὶ
πεποίηται, ἵν´ ἐπιμεληθεὶς αὐτῆς ὥσπερ προσήκει, δείξῃς ἅπασιν
ἀνθρώποις ὅτι ἐκεῖνα μὲν ἄλλοι καὶ ἐτάραξαν καὶ ἐκακούργησαν,
σὺ δὲ δὴ χρηστὸς εἶ.
καὶ μή μοι τὸ μέγεθος τῆς ἀρχῆς φοβηθῇς. ὅσῳ τε γὰρ
πλείων ὑπάρχει, τόσῳ πλείω καὶ τὰ σώζοντα ἔχει, καὶ μακρῷ τὸ
φυλάξαι τι τοῦ κτήσασθαι ῥᾷόν ἐστι· πρὸς μὲν γὰρ τὸ τἀλλότρια
προσποιήσασθαι καὶ πόνων καὶ κινδύνων δεῖ, πρὸς δὲ τὸ τὰ ὑπάρχοντα
σῶσαι βραχεῖα φροντὶς ἀρκεῖ. μὴ μέντοι μηδὲ δείσῃς ὅτι
οὐχὶ καὶ ἀσφαλέστατα ἐν αὐτῇ βιώσῃ καὶ πάντων τῶν ἐν ἀνθρώποις
ἀγαθῶν ἀπολαύσεις, ἄν γε ἐθελήσῃς αὐτὴν ὡς παραινέσω σοι
διοικῆσαι. καί με μὴ νομίσῃς ἀπαρτᾶν ἀπὸ τῆς παρούσης ὑποθέσεως
τὸν λόγον, ἂν ἐπὶ πλεῖόν σοι περὶ αὐτῆς διαλεχθῶ· οὐ γάρ
που καὶ ὑπ´ ἀδολεσχίας τινὸς ἄλλως τοῦτο ποιήσω, ἀλλ´ ἵνα ἀκριβῶς
καταμάθῃς ὅτι καὶ δυνατὸν καὶ ῥᾴδιον τῷ γε ἔμφρονι τὸ καὶ
καλῶς καὶ ἀκινδύνως ἄρξαι ἐστί.
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Traduction française :
[52,18] « Puisses-tu, en considérant ces choses et en calculant
toutes les autres circonstances, n'abandonner
ni toi-même ni la patrie, par crainte de passer aux
yeux de quelques-uns pour un ambitieux. D'abord, en
supposant que quelqu'un ait de toi ce soupçon, c'est
un désir qui ne sort pas des habitudes de l'homme,
et il est beau d'en courir la chance. Qui ignore,
d'ailleurs, la nécessité qui t'y a poussé ? Si donc il
y a matière à un blâme, il est juste d'en accuser les
meurtriers de ton père; s'ils ne l'avaient pas tué si
injustement et si déplorablement, tu n'aurais pas pris
les armes contre eux, tu n'aurais pas levé des légions,
tu ne te serais pas ligué avec Antoine et Lépidus,
et tu ne les aurais pas combattus à leur tour. Personne
n'ignore les raisons et la justice de ta conduite
dans toutes ces circonstances ; si donc il y a eu des
crimes commis, il ne nous est plus possible d'y porter
remède en sùreté. De telle sorte que nous devons,
dans notre propre intérêt et dans celui de
l'État, obéir à la fortune qui te donne la monarchie.
Nous devons même lui avoir une grande reconnaissance,
et de ce qu'elle nous a délivrés des malheurs
des guerres civiles, et de ce qu'elle a mis l'empire entre
tes mains, afin qu'en y apportant les soins convenables,
tu fasses voir à tous les hommes que les
troubles et les actions mauvaises sont le fait des autres,
mais que toi tu es bon. Ne va pas être effrayé de la
grandeur du pouvoir. Plus il est étendu, plus il offre
de moyens de conservation, et il est bien plus facile
de garder que de conquérir : pour s'approprier ce qui
n'est pas à soi, il faut des travaux et des dangers;
pour conserver ce qu'on possède, il suffit d'un peu
de soin. Ne crains pas, non plus, de ne pas vivre en
sûreté au sein de cette puissance, ou de ne pas jouir
de tous les biens dont jouissent les hommes, si tu
consens à gouverner suivant mes conseils. Ne t'imagine
pas, non plus, que mon discours s'écarte du sujet
de la présente délibération, si je te parle un peu longuement :
ce n'est point pour le plaisir de parler que
je le fais, c'est afin que tu comprennes clairement
que, pour un homme sensé, il est possible, il est facile
de commander avec honneur et sans danger. »
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