Texte grec :
[38,40] εἰ μὲν γάρ τις τῶν θεῶν ἐγγυητὴς ἡμῖν ἐγένετο
ὅτι, κἂν ταῦτα μὴ ποιῶμεν, οὔτε τις ἡμῖν ἐπιβουλεύσει καὶ πάνθ´
ὅσα κεκτήμεθα ἀσφαλῶς ἀεὶ καρπωσόμεθα, αἰσχρὸν μὲν ἂν ἦν
εἰπεῖν ὅτι τὴν ἡσυχίαν ἄγειν ἐχρῆν, ὅμως δ´ οὖν εἶχον ἄν τινα σκῆψιν
εὐπρεπῆ οἱ μηδὲν τῶν δεόντων πράττειν βουλόμενοι. εἰ δ´ ἀνάγκη
τε τοὺς κεκτημένους τινὰ ὑπὸ πολλῶν ἐπιβουλεύεσθαι, καὶ προσήκει
τὰς ἐπιθέσεις αὐτῶν προκαταλαμβάνεσθαι, καὶ οἱ μὲν ἐπὶ τοῖς
οἰκείοις ἡσυχάζοντες καὶ περὶ τούτοις κινδυνεύουσιν, οἱ δὲ ἐκ περιουσίας
τῷ πολέμῳ καὶ κατὰ τῶν ἀλλοτρίων χρώμενοι καὶ ἐκεῖνα
φυλάσσουσιν (οὐδεὶς γὰρ περὶ τοῖς ἑαυτοῦ δεδιὼς τῶν τοῦ πέλας
ἐφίεται· ὁ γὰρ περὶ τῶν ὑπαρχόντων οἱ φόβος ἰσχυρῶς τοῦ πολυπραγμονεῖν
τὰ μὴ προσήκοντα αὐτὸν ἀποτρέπει), τί τοῦτο λέγει
τις, ὡς οὐ χρὴ ἡμᾶς ἀεί τι προσκτᾶσθαι; οὐ μέμνησθε, τὰ μὲν
ἀκηκοότες τὰ δὲ ἑορακότες, ὅτι οὔτε τῶν ἐν τῇ Ἰταλίᾳ γενῶν οὐδὲν
πρότερον ἀπέσχετο τοῦ τῇ πατρίδι ἡμῶν ἐπιβουλεύειν πρὶν τοὺς
πολέμους ἐν τῇ ἐκείνων χώρᾳ τοὺς προγόνους ἡμῶν ποιήσασθαι,
οὔτε οἱ Ἠπειρῶται πρὶν ἐς τὴν Ἑλλάδα αὐτοὺς περαιωθῆναι; οὐ
Φίλιππος μελλήσας καὶ ἐπὶ τὴν Ἰταλίαν στρατεύσειν, πρὶν φθάσαντας
τὴν ἐκείνου κακῶς ποιῆσαι· οὐ Περσεύς, οὐκ Ἀντίοχος, οὐ
Μιθριδάτης, πρὶν τὰ αὐτὰ αὐτοὺς ἐργάσασθαι. καὶ τί τἆλλα λέγοι
τις ἄν; ἀλλ´ οἱ Καρχηδόνιοι ἕως μὲν οὐδὲν δεινὸν ἀφ´ ἡμῶν ἐν
τῇ Ἀφρικῇ εἶχον, ἔς τε τὴν Ἰταλίαν διέπλεον καὶ τὴν χώραν κατέτρεχον
τάς τε πόλεις ἐπόρθουν καὶ παρ´ ὀλίγον καὶ τὸ ἄστυ αὐτὸ
εἷλον, ἐπειδὴ δ´ ἀντιπολεμεῖσθαι ἤρξαντο, παντάπασιν ἐκ τῆς γῆς
ἡμῶν ἐξέδρασαν. τὰ δ´ αὐτὰ ταῦτα καὶ περὶ τῶν Γαλατῶν καὶ
Κελτῶν ἄν τις εἰπεῖν ἔχοι. καὶ γὰρ οὗτοι, μέχρι μὲν ἐντὸς τῶν
Ἄλπεων ἐμένομεν, πολλάκις αὐτὰς ὑπερέβησαν καὶ πολλὰ τῆς Ἰταλίας
ἐπόρθησαν· ἐπεὶ δὲ ἐτολμήσαμέν ποτε ἔξω τε τῶν ὅρων ἐκστρατεῦσαι
καὶ τὸν πόλεμόν σφισι περιστῆσαι, καί τινα καὶ τῆς
χώρας αὐτῶν ἀπετεμόμεθα, οὐκέτ´ οὐδένα πόλεμον ἀπ´ αὐτῶν ἐν τῇ
Ἰταλίᾳ, πλὴν ἅπαξ, εἴδομεν. ὅταν οὖν τούτων οὕτως ἐχόντων λέγῃ
τις ὅτι οὐ χρὴ πολεμεῖν ἡμᾶς, οὐδὲν ἄλλο φησὶν ἢ ὅτι οὐ χρὴ πλουτεῖν,
οὐ χρὴ ἑτέρων ἄρχειν, οὐκ ἐλευθέρους, οὐ Ῥωμαίους εἶναι.
ὥσπερ οὖν ἄν, εἴπερ τι τούτων εἶπέ τις, οὐκ ἂν ἠνέσχεσθε ἀλλὰ
κἂν ἐν χερσὶν αὐτὸν ἀπεκτείνατε, οὕτω καὶ νῦν, ὦ ἄνδρες ἑταῖροι,
πρὸς τοὺς ἐκεῖνα λέγοντας διατίθεσθε, μὴ τοῖς ῥήμασί σφων ἀλλὰ
τοῖς ἔργοις τὸν νοῦν τεκμαιρόμενοι.
οὐκοῦν ὅτι μὲν οὕτω χρὴ φρονεῖν, οὐδέν´ ἂν ἀντειπεῖν ὑμῶν νομίζω·
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Traduction française :
[38,40] Oui, si un dieu nous garantissait qu'alors même que
nous n'agirions pas ainsi, personne n'ourdirait des
trames contre nous et que nous jouirions toujours en
pleine sécurité de ce que nous possédons, il serait sans
doute honteux de dire que nous devons vivre dans
l'inaction ; mais du moins les hommes qui ne veulent
point faire leur devoir, auraient un spécieux prétexte.
Mais puisque ceux qui possèdent sont nécessairement
exposés aux embûches de nombreux ennemis, c'est un
devoir pour eux de prévenir leurs attaques ; car, si l'on
reste inactif, on s'expose à perdre ses propres
possessions. Au contraire, quand on a assez de
ressources pour porter la guerre dans les possessions
d'autrui, on conserve mieux les siennes. Et, en effet,
l'homme qui tremble pour ses biens ne convoite point
ceux d'autrui : les craintes qu'il éprouve pour ce qui lui
appartient le détournent de la pensée de s'emparer de ce
qui ne lui appartient pas. Pourquoi dire que nous ne
devons pas conquérir sans cesse ? Ne vous souvenez-vous
pas, et d'après la tradition et pour l'avoir vu vous-mêmes,
que parmi les peuples de l'Italie aucun ne
s'abstint d'attaquer notre patrie, avant que nos ancêtres
eussent porté la guerre dans leur pays ? Il en fut de
même des Epirotes, jusqu'au moment où les Romains
passèrent dans la Grèce ; de Philippe, qui avait projeté
une expédition en Italie et qui n'y renonça que lorsque
nos armées eurent pris les devants et dévasté son
royaume ; de Persée, d'Antiochus et de Mithridate,
jusqu'au jour où nos pères les eurent traités comme les
Épirotes et Philippe. A quoi bon citer d'autres peuples ?
Les Carthaginois, avant que nous leur eussions fait
aucun mal en Afrique, passèrent en Italie, ravagèrent
cette contrée, pillèrent les villes et furent sur le point de
s'emparer de Rome même ; mais lorsque leur territoire
commença à être le théâtre de la guerre, ils évacuèrent
complètement le nôtre. On pourrait en dire autant des
Gaulois et des Celtes : tant que les Romains se tinrent en
deçà des Alpes, les Gaulois les franchirent plusieurs fois
et ravagèrent plusieurs parties de l'Italie ; mais, lorsque
nous osâmes enfin porter nos armes au delà de cette
barrière et faire la guerre chez eux, nous leur enlevâmes
une portion de leur territoire et, depuis cette époque,
nous n'avons plus été témoins que d'une seule guerre
des Gaulois en Italie. Puisqu'il en est ainsi, soutenir que
nous ne devons point faire la guerre, c'est tout
simplement dire que nous ne devons pas être riches, que
nous ne devons pas régner sur les autres peuples, que
nous ne devons être ni libres, ni Romains. Certes, si un
homme vous parlait ainsi, vous ne le souffririez pas :
vous le mettriez même à mort sur-le-champ. Montrez-vous
aujourd'hui, mes compagnons d'armes, dans de
semblables dispositions envers ceux qui tiennent un
langage séditieux et dont vous pouvez apprécier l'esprit,
non par des paroles, mais par des actes. Tels doivent être
vos sentiments : personne, je l'espère, ne dira le contraire.
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