Texte grec :
[10,11] Ὅτι Κροτωνιάτης τις Κύλων ὄνομα, τῇ οὐσίᾳ καὶ δόξῃ πρῶτος τῶν
πολιτῶν, ἐπεθύμησε Πυθαγόρειος γενέσθαι. Ὢν δὲ χαλεπὸς καὶ βίαιος τὸν
τρόπον, ἔτι δὲ στασιαστὴς καὶ τυραννικός, ἀπεδοκιμάσθη. Παροξυνθεὶς
οὖν τῷ συστήματι τῶν Πυθαγορείων, ἑταιρείαν μεγάλην συνεστήσατο, καὶ
διετέλει πάντα καὶ λέγων καὶ πράττων κατ' αὐτῶν.
Ὅτι Λῦσις ὁ Πυθαγόρειος εἰς Θήβας τῆς Βοιωτίας γενόμενος
διδάσκαλος Ἐπαμινώνδου, τοῦτον μὲν τέλειον ἄνδρα πρὸς ἀρετὴν
κατέστησε, καὶ πατὴρ αὐτοῦ θετὸς ἐγένετο δι' εὔνοιαν. Ὁ δὲ Ἐπαμινώνδας
τῆς τε καρτερίας καὶ λιτότητος καὶ τῶν ἄλλων ἀρετῶν ἐκ τῆς Πυθαγορείου
φιλοσοφίας ἐναύσματα λαβών, οὐ μόνον Θηβαίων, ἀλλὰ καὶ πάντων τῶν
κατ' αὐτὸν ἐπρώτευεν.
Ὅτι δὲ τῶν προγεγονότων ἀνδρῶν ἡ τῶν βίων ἀναγραφὴ δυσκολίαν
μὲν παρέχεται τοῖς γράφουσιν, ὠφελεῖ δ' οὐ μετρίως τὸν κοινὸν βίον. Μετὰ
παρρησίας γὰρ δηλοῦσα τὰ καλῶς ς πραχθέντα τοὺς μὲν ἀγαθοὺς κοσμεῖ,
τοὺς δὲ πονηροὺς ταπεινοῖ, διὰ τῶν οἰκείων ἑκάστοις ἐγκωμίων τε καὶ
ψόγων. Ἔστι δ' ὁ μὲν ἔπαινος, ὡς ἄν τις εἴποι, ἔπαθλον ἀρετῆς ἀδάπανον,
ὁ δὲ ψόγος τιμωρία φαυλότητος ἄνευ πληγῆς. Καλὸν δὲ τοῖς
μεταγενεστέροις ὑποκεῖσθαι, διότι βίον οἷον ἄν τις ἕληται ζῶν, τοιαύτης
ἀξιωθήσεται μετὰ τὸν θάνατον μνήμης, ἵνα μὴ περὶ τὰς τῶν λιθίνων
μνημείων κατασκευὰς σπουδάζωσιν, ἃ καὶ τόπον ἕνα κατέχει καὶ φθορᾶς
ὀξείας τυγχάνει, ἀλλὰ περὶ λόγον καὶ τὰς ἄλλας ἀρετάς, αἳ πάντῃ φοιτῶσι
διὰ τῆς φήμης. Ὁ δὲ χρόνος ὁ πάντα μαραίνων τἄλλα ταύτας ἀθανάτους
φυλάττει, καὶ πρεσβύτερος γενόμενος αὐτὸς ταύτας ποιεῖ νεωτέρας. Δῆλον
δὲ ἐπὶ τῶν ἀνδρῶν ἐγένετο τὸ προειρημένον· πάλαι γὰρ γεγονότες ὥσπερ
νῦν ὄντες ὑπὸ πάντων μνημονεύονται.
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Traduction française :
[10,11] Excerpt. de Virt. et Vit., p. 556. — Un des habitants de Crotone,
nommé Cylon, homme le plus influent de la ville, tant par ses richesses
que par son crédit, demanda à être admis dans l'école de Pythagore.
Mais il essuya un refus à cause de la violence et de la dureté de son
caractère, qui l'avait porté à fomenter des troubles, et le rendait avide du
pouvoir. Ne pouvant supporter cet affront, il se déclara ennemi de toute la
secte, forma un parti contre elle et ne cessa, dès lors, de lui faire une
guerre à outrance, tant par ses discours que par ses actions.
Lysis le pythagoricien, étant venu à Thèbes en Béotie, fut le
précepteur d'Épaminondas ; il en fit un homme accompli dans toutes les
vertus, et s'attacha tellement à lui, qu'il le choisit pour son fils adoptif.
Ainsi Épaminondas, ayant puisé à l'école pythagoricienne les principes de
la fermeté d'âme, de la frugalité et de toutes les autres vertus, devint non
seulement le premier des Thébains, mais encore le premier de son siècle.
Ceux qui écrivent l'histoire de la vie des hommes célèbres qui ont
vécu avant nous, s'imposent une tâche bien pénible, il est vrai, mais ils
rendent en même temps un très grand service à la société. En effet,
l'histoire, en nous montrant les faits remarquables, honore les hommes
vertueux et rabaisse les méchants, distribuant également aux uns la
louange qu'ils ont méritée, aux autres le blâme qu'ils ont encouru. La
louange, si l'on peut s'exprimer ainsi, est un prix de lutte qui se donne à
peu de frais, et le blâme est un châtiment qui ne fait pas de blessure. Il
importe donc de savoir que la mémoire que l'on laisse après la mort est
conforme à la vie que l'on a menée, afin que l'on passe son temps, non
pas à élever des monuments de marbre, qui n'occupent qu'un point de
l'espace, et qui sont bientôt détruits par le temps, mais bien plutôt à se
livrer à l'étude de la science et à la pratique des autres vertus dont la
renommée s'étend partout. Le temps, qui absorbe tout, immortalise les
belles actions; il les rajeunit même. Un noble zèle s'empare des esprits
pour imiter ces beaux modèles. Le souvenir de ces grands hommes, qui
vivaient il y a des siècles, est aussi présent à notre intelligence que s'ils
vivaient de notre temps.
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