Texte grec :
[8,54] Ταῦτ´ εἰποῦσα ἔρριψεν ἑαυτὴν χαμαὶ καὶ
περιπλέξασα ταῖς χερσὶν ἀμφοτέραις τοὺς πόδας τοῦ
Μαρκίου κατεφίλησε. πεσούσης δ´ αὐτῆς αἱ μὲν γυναῖκες
ἀνεβόησαν ἅμα πᾶσαι κωκυτὸν ὀξὺν καὶ μακρόν,
οἱ δ´ ἐν τῷ συνεδρίῳ παρόντες Οὐολούσκων οὐκ ἠνέσχοντο τὴν
ἀήθειαν τῆς ὄψεως, ἀλλ´ ἀπεστράφησαν.
αὐτὸς δ´ ὁ Μάρκιος ἀναλόμενος ἐκ τοῦ δίφρου καὶ
περιπεσὼν τῇ μητρὶ ἀνίστησιν αὐτὴν ἀπὸ τῆς γῆς
ὀλίγον ἐμπνέουσαν, καὶ περιβαλὼν καὶ πολλὰ ἐκχέας
δάκρυα εἶπε· Νικᾷς, ὦ μῆτερ, οὐκ εὐτυχῆ νίκην οὔτε
σεαυτῇ οὔτ´ ἐμοί· τὴν μὲν γὰρ πατρίδα σέσωκας, ἐμὲ
δὲ τὸν εὐσεβῆ καὶ φιλόστοργον υἱὸν ἀπολώλεκας.
ταῦτ´ εἰπὼν ἐπὶ τὴν σκηνὴν ἀπῄει κελεύσας ἀκολουθεῖν τήν τε
μητέρα καὶ τὴν γυναῖκα καὶ τὰ παιδία,
ἔνθα τὸν λοιπὸν τῆς ἡμέρας χρόνον σκοπούμενος σὺν
αὐταῖς, ὅ τι χρὴ πράττειν, διετέλεσεν. ἦν δὲ τὰ δόξαντα αὐτοῖς
τοιάδε· περὶ μὲν τῆς καθόδου μήτε τὴν
βουλὴν τέλος μηθὲν ἐκφέρειν εἰς τὸν δῆμον μήτ´ ἐκεῖνον
ἐπιψηφίζειν, πρὶν ἂν τοῖς Οὐολούσκοις εὐτρεπῆ
γένηται τὰ περὶ φιλίας καὶ καταλύσεως τοῦ πολέμου·
αὐτὸν δὲ τὴν στρατιὰν ἀναστήσαντα ὡς διὰ φιλίας
γῆς ἀπάγειν· ὑποσχόντα δὲ τῆς ἀρχῆς λόγον καὶ τὰς
εὐεργεσίας ἀποδειξάμενον ἀξιοῦν τοὺς ἐπιτρέψαντας
αὐτῷ τὴν στρατιάν, μάλιστα μὲν φιλίᾳ δέχεσθαι τοὺς
πολεμίους καὶ συνθήκας ποιήσασθαι δικαίας, αὐτῷ τὴν
ἰσότητα καὶ τὸ μὴ σφαλῆναι περὶ τὰς ὁμολογίας ἐπιτρέψαντας. εἰ
δ´ ἐπὶ τοῖς κατωρθωμένοις σφίσιν αὐθαδείας ἀναπιμπλάμενοι μὴ
δέχοιντο τὰς διαλλαγάς,
ἀφίστασθαι τῆς ἀρχῆς αὐτοῖς. ἢ γὰρ οὐχ ὑπομενεῖν
αὐτοὺς ἄλλον τινὰ αἱρεῖσθαι στρατηγὸν δι´ ἀπορίαν
ἀγαθοῦ ἡγεμόνος, ἢ παρακινδυνεύσαντας ὁτῳδήτινι
παραδοῦναι τὰς δυνάμεις σὺν μεγάλῃ διδαχθήσεσθαι
βλάβῃ τὴν τοῦ συμφέροντος αἵρεσιν. τὰ μὲν δὴ βουλευθέντα
αὐτοῖς καὶ δόξαντα δίκαιά τε καὶ ὅσια εἶναι,
φήμης τ´ ἀγαθῆς ἐφ´ ᾗ μάλιστα ὁ ἀνὴρ ἐσπούδαζε
παρὰ πᾶσι τευξόμενα, τοιάδε ἦν. ἐτάραττε δέ τις αὐτοὺς ὑποψία
δέος ἔχουσα, μή ποτε ἀλόγιστος ὄχλος ἐν
ἐλπίδι τοῦ καταπεπολεμηκέναι τὸ ἀντίπαλον ἤδη ὢν
δι´ ὀργῆς ἀκράτου λάβῃ τὴν ἀποτυχίαν κἄπειτα ὡς
προδότην αὐτὸν οὐδὲ λόγου μεταδοὺς αὐτοχειρίᾳ φθάσῃ
διολέσας. ἐδόκει οὖν αὐτοῖς καὶ τοῦτο καὶ εἴ τι ἄλλο
δεινότερον εἴη κινδύνευμα σὺν ἀρετῇ σώζουσι τὴν
πίστιν ὑπομένειν. ἐπεὶ δὲ περὶ δύσιν ἡλίου ἦν ἤδη,
ἀσπασάμενοι ἀλλήλους ἐξῄεσαν ἐκ τῆς σκηνῆς· ἔπειθ´
αἱ μὲν γυναῖκες εἰς τὴν πόλιν ἀπῄεσαν, ὁ δὲ Μάρκιος
ἐν ἐκκλησίᾳ τὰς αἰτίας ἀποδοὺς τοῖς παροῦσι, δι´ ἃς
ἔμελλε λύειν τὸν πόλεμον, καὶ πολλὰ τῶν στρατιωτῶν δεηθεὶς
συγγνῶναί τ´ αὐτῷ καί, ἐπειδὰν οἴκαδε
ἀφίκωνται, μεμνημένους ὧν ἔπαθον εὖ τοῦ μηθὲν
ὑπὸ τῶν ἄλλων ἀνήκεστον παθεῖν συναγωνιστὰς γενέσθαι, καὶ
ἄλλα πολλὰ καὶ ἐπαγωγὰ διαλεχθεὶς παρασκευάζεσθαι
ἐκέλευσεν ὡς τῇ ἐπιούσῃ νυκτὶ ἀναστρατοπεδεύσοντας.
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Traduction française :
[8,54] XXVIII. En prononçant ces paroles, Véturie se jette à terre, elle
embrasse à deux mains les pieds de Marcius ; ce qui fut suivi des pleurs
et des gémissements de toutes les autres femmes. Les Volsques mêmes
qui étaient à l'audience, attendris par un spectacle si extraordinaire,
détournent les yeux. Marcius se lève de son siège, il prend sa mère entre
ses bras. il l'a relève à demi morte, il l'embrasse, et fondant en larmes :
« Ma mère, lui dit-il, vous avez vaincu. Tout ce que vous demandez
vous est accordé. Mais cette victoire ne vous sera pas avantageuse non
plus qu'à moi : si vous avez sauvé votre patrie, vous avez en même
temps perdu un fils qui vous aime avec tout le respect et toute la piété
dont il est capable. »
XXIX. Ayant ainsi parlé, il dit à sa mère, à sa femme, et à ses enfants
de le suivre : il va à sa tente, et y passe le reste du jour à examiner avec
elles ce qu'il doit faire. Le résultat de leurs délibérations fut, qu'à l'égard
de son retour dans la patrie, le sénat ne le proposerait point au peuple,
que le peuple ne décernerait rien là-dessus, avant que les Volsques
eussent terminé la guerre et qu'ils fussent convenus des conditions de la
paix ; que Marcius se retirerait au plutôt avec son armée, et qu'il passerait
par les terres des Romains comme par un pays d'alliés, sans y faire
aucun tort. Qu'après avoir rendu compte de son administration à la
république des Volsques, leur rappelant le souvenir des services qu'il leur
avait rendus, il prierait ceux qui lui avaient donné le commandement de
l'armée, de se réconcilier avec leurs ennemis, de conclure la paix à des
conditions raisonnables, et de lui donner la commission de régler toutes
choses dans une parfaite égalité, afin que le traité se fît et s'observât
sans aucune fraude : Que si trop enflés de leur bonne réussite, ils
refusaient de donner les mains à la négociation de la paix, il se démettrait
de sa dignité de commandant : Que par ce moyen, les Volsques, faute
d'un bon général, ne mettraient personne à sa place, ou que s'ils se
hasardaient à donner le commandement de leur armée au premier venu,
ils apprendraient par leur triste expérience à prendre une autre fois un
meilleur parti. Telle fut la conclusion de leurs délibérations ; voila le
parti qui leur parut le plus juste, le plus pieux et le plus capable de
soutenir dans l'esprit de tout le monde la bonne réputation dont Marcius
était plus jaloux que de sa propre vie. Mais il leur restait quelque soupçon
mêlé de crainte qui les troublait. Ils appréhendaient que le peuple insensé
qui avait conçu une espérance certaine de vaincre ses ennemis, ne se
laissât emporter à une colère effrénée si ses projets ne réussissaient point
; et que prenant ombrage du changement de Marcius, il ne se jetât sur lui
pour l'égorger comme un traitre, sans lui donner le temps de défendre sa
cause. Cependant ils résolurent de passer par-dessus ces considérations,
et de s'exposer même à de plus grands dangers, pourvu que la vertu et
la bonne-foi furent hors de toute atteinte.
XXX. Le soleil était déjà sur le point de se coucher, lorsqu'après les
plus tendres embrassements on sortit de la tente. Véturie avec toute sa
suite reprit le chemin de Rome, à la ville, Marcius exposa dans une
assemblée les raisons qui l'obligeaient à finir la guerre: il pria instamment
les soldats de lui pardonner cette condescendance qu'il n'avait pu refuser
à sa mère, les conjurant par le souvenir de ses bienfaits de se joindre à lui
quand ils seraient de retour dans leur pays, et de ne pas permettre que
les autres Volsques le maltraitassent. Il ajouta plusieurs autres choses
semblables qui ne tendaient qu'à gagner leur affection, et leur ordonna
de se tenir prêts pour décamper la nuit suivante.
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