Texte grec :
[8,50] Ἔστω δ´ οὖν ὅμως, καὶ δεδόσθω τοῖς τὰ δεινὰ
παθοῦσι μὴ διακρίνειν εἴτε φίλιον εἴη τὸ κακῶς δεδρακὸς εἴτ´
ἀλλότριον, ἀλλ´ ἴσην πρὸς ἅπαντας ὀργὴν
ἔχειν· ἔπειτ´ οὐχ ἱκανὰς εἰσπέπραξαι παρὰ τῶν ὑβρισάντων σε
δίκας γῆν τ´ αὐτῶν τὴν ἀρίστην πεποιηκὼς
μηλόβοτον καὶ πόλεις διαπεπορθηκὼς συμμαχίδας, ἃς
πολλοῖς πόνοις κτησαμένη κατέσχε, καὶ τρίτον ἤδη
ταῦτ´ ἔτος εἰς πολλὴν τῶν ἀναγκαίων κατακεκλεικὼς
αὐτοὺς ἀπορίαν; ἀλλὰ καὶ πόρρω ἀνδραποδισμοῦ τῆς
πόλεως αὐτῶν καὶ κατασκαφῆς τὴν ἀγριαίνουσαν καὶ
μαινομένην ὀργὴν προάγεις· καὶ οὐδὲ τοὺς πεμφθέντας
ὑπὸ τῆς βουλῆς πρέσβεις φέροντάς σοι τῶν τε ἐγκλημάτων
ἄφεσιν καὶ κάθοδον ἐπὶ τὰ οἰκεῖα φίλους καὶ
ἀγαθοὺς ἄνδρας ἐλθόντας ἐνετράπης, οὐδὲ τοὺς ἱερεῖς,
οὓς τὸ τελευταῖον ἔπεμψεν ἡ πόλις, ἱερὰ στέμματα
θεῶν ἔχοντας καὶ προτείνοντας {γηραιοὺς ἄνδρας}
ἀλλὰ καὶ τούτους ἀπήλασας, αὐθάδεις καὶ δεσποτικὰς
ὡς κεκρατημένοις ἀποκρίσεις δούς. ἐγὼ μὲν οὐκ ἔχω,
πῶς ἐπαινέσω ταῦτα τὰ σκληρὰ καὶ ὑπέραυχα καὶ τὴν
θνητὴν φύσιν ἐκβεβηκότα δικαιώματα ὁρῶσα καταφυγὰς
εὑρημένας ἅπασιν ἀνθρώποις καὶ παραιτήσεις, ὧν
ἂν ἐξαμαρτάνωσι περὶ ἀλλήλους, ἱκετηρίας καὶ λιτὰς
{καὶ τὸ καταφυγεῖν ἐπὶ τοὺς ἠδικημένους τὸ ἀδικοῦν
ταπεινόν, θεῶν ἡμῖν ταῦτα τὰ ἔθη καταστησαμένων·}
ὑφ´ ὧν μαραίνεται πᾶσα ὀργὴ καὶ ἀντὶ τοῦ μισεῖν τὸν
ἐχθρὸν ἐλεεῖ· τοὺς δ´ αὐθαδείᾳ χρησαμένους καὶ λιτὰς
ἱκετῶν ὑβρίσαντας, ἅπαντας νεμεσωμένους ὑπὸ θεῶν
καὶ εἰς συμφορὰς καταστρέφοντας οὐκ εὐτυχεῖς. αὐτοὶ
γὰρ δὴ πρῶτον οἱ ταῦτα καταστησάμενοι καὶ παραδόντες ἡμῖν
θεοὶ συγγνώμονες τοῖς ἀνθρωπίνοις εἰσὶν
ἁμαρτήμασι καὶ εὐδιάλλακτοι, καὶ πολλοὶ ἤδη μεγάλα
εἰς αὐτοὺς ἐξαμαρτόντες εὐχαῖς καὶ θυσίαις τὸν χόλον
ἐξιλάσαντο· εἰ μὴ σύ, ὦ Μάρκιε, ἀξιοῖς τὰς μὲν τῶν
θεῶν ὀργὰς θνητὰς εἶναι, τὰς δὲ τῶν ἀνθρώπων ἀθανάτους.
δίκαια μὲν οὖν ποιήσεις καὶ σεαυτῷ πρέποντα
καὶ τῇ πατρίδι αὐτῇ, ἀφεὶς τὰ ἐγκλήματα μετανοούσῃ
γε καὶ διαλλαττομένῃ καὶ ὅσα πρότερον ἀφείλετο σοὶ
νῦν ἀποδιδούσῃ.
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Traduction française :
[8,50] XXI. MAIS je suppose que celui qui a reçu quelque injure, puisse
avec justice s'en venger également sur tous les citoyens, sans examiner
si ce sont des étrangers ou ses amis et ses compatriotes qui la lui ont
faite : après tout n'avez vous pas déjà assez puni ceux qui {vous} ont
maltraité ? Vous avez réduit en friche leurs plus fertiles campagnes, qui
ne sont plus propres qu'à servir de pâturages aux troupeaux. Vous avez
pillé et saccagé leurs villes alliées, dont la conquête leur avait coûté tant
de travaux. Voila déjà la troisième année que vous les tenez eux-mêmes
assiégés dans leurs murailles, où ils ne peuvent avoir les provisions
nécessaires pour la vie. Cependant votre vengeance n'est pas encore
assouvie : une colère insensée, ou plutôt une espèce de rage, vous porte
jusqu'à vouloir les réduire en servitude et saccager leur ville. Vous avez
même refusé l'ambassade que le sénat vous a envoyée, quoiqu'elle ne fût
composée que de gens de bien et de vos amis, qui vous offraient et
l'absolution des crimes dont on vous a chargé, et un retour honorable
dans votre patrie. Les prêtres que la ville vous a députés en dernier lieu,
quoique respectables et par leur vieillesse et par les marques saintes de
leur dignité qu'ils portaient avec eux, n'ont pas été reçus plus
favorablement : vous les avez renvoyés avec une réponse dure et
hautaine, les regardant déjà comme vaincus et soumis à votre puissance.
« XXII. NON mon fils, je ne saurais louer cette dureté inexorable qui
passe les bornes prescrites à un homme mortel, ni cette rigueur excessive
avec laquelle vous prétendez tirer vengeance de l'injustice qu'on vous a
faite. Je vois en effet que tous les hommes trouvent des ressources pour
réparer les fautes qu'ils peuvent avoir commises les uns envers les autres
: ils en obtiennent le pardon, dès qu'ils ont recours aux prières, et qu'en
qualité de suppliants ils se jettent aux pieds de la personne lésée. Les
dieux mêmes nous ont prescrit cette règle de conduite. L'offensé met bas
toute colère et dès qu'on prend les moyens de l'apaiser, et au lieu de haïr
son ennemi, sa haine se tourne en compassion. D'un autre côté, je vois
que ceux qui agissent avec hauteur et qui rejettent avec insulte les
prières des suppliants, encourent l'indignation des dieux et le précipitent
dans des malheurs sans ressource. Les dieux mêmes les premiers
auteurs d'une si sainte loi, nous apprennent par leur exemple l'usage que
nous en devons faire : ils pardonnent volontiers les offensés les plus
graves, il est facile d'en obtenir miséricorde, et nous savons par
expérience que plusieurs personnes qui avaient commis contre leur
majesté divine un grand nombre de fautes énormes, ont apaisé leur
colère par des vœux et des sacrifices. Prétendez-vous donc, Marcius,
que la colère des hommes doive être éternelle, tandis que celle des dieux
n'est pas immortelle. Ainsi le meilleur parti que vous puissiez prendre, et
en même-temps le plus juste et le plus glorieux pour vous, est de suivre
l'exemple que les dieux mêmes vous donnent : c'est de pardonner a votre
patrie qui se repent de sa faute, qui n'a rien plus à cœur que de se
raccommoder avec vous, et qui veut vous rendre aujourd'hui tous les
biens dont elle vous a dépouillé.
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