Texte grec :
[8,32] Ἆρ´ οὐ φανερόν, ὅτι καλλιλογεῖτε καὶ
εἰρωνεύεσθε, ὦ Μηνύκιε, ὄνομα καλὸν ἔργῳ περιθέντες
ἀνοσίῳ; οὐ γὰρ δὴ κάθοδόν μοι δίδοτε, ἀλλὰ σφάγιόν
με τῷ δήμῳ κατάγετε, τάχα μὲν καὶ βεβουλευμένοι
τοῦτο πράττειν· οὐθὲν γὰρ ἔτι μοι χρηστὸν ὑπὲρ ὑμῶν
ἐπέρχεται φρονεῖν· εἰ δὲ βούλεσθε - τίθημι γάρ -
οὐδὲν ὧν πείσομαι προορώμενοι, τί οὖν ἔσται μοι τῆς
ὑμετέρας ἀγνοίας ἢ μωρίας ὄφελος, κωλύειν μὲν οὐδὲν
οὐδ´ ἂν οἷοι ἦτε δυνησομένων, χαρίζεσθαι δὲ καὶ
τοῦτο τῷ δήμῳ σὺν τοῖς ἄλλοις ἀναγκαζομένων; ἀλλὰ
γὰρ ὅτι μὲν οὐ συνοίσει μοι πρὸς ἀσφάλειαν ἥδε, ἣν
ὑμεῖς μὲν κάθοδον καλεῖτε, ἐγὼ δὲ ταχεῖαν ὁδὸν ἐπὶ
τὸν ὄλεθρον, οὐ πολλῶν οἴομαι δεῖν ἔτι λόγων· ὅτι
δ´ οὐδὲ πρὸς εὐδοξίαν ἢ τιμὴν ἢ πρὸς εὐσέβειαν,
ἐπειδὴ καὶ σὺ τούτων, ὦ Μηνύκιε, πρόνοιαν ἔχειν με
ἠξίους, εὖ ποιῶν, ἀλλ´ αἴσχιστά μοι καὶ ἀνοσιώτατα
πραχθήσεται πεισθέντι ὑμῖν, ἄκουσον ἐν τῷ μέρει. ἐγὼ
πολέμιος ἐγενόμην τούτοις {Οὐολούσκοις} καὶ πολλὰ
ἠδίκησα αὐτοὺς ἐν τῷ πολέμῳ, τῇ πατρίδι πράττων
ἡγεμονίαν καὶ ἰσχὺν καὶ κλέος. οὐκοῦν προσῆκέ μοι
τιμᾶσθαι μὲν ὑπὸ τῶν εὖ πεπονθότων, μισεῖσθαι δ´
ὑπὸ τῶν ἠδικημένων; εἰ γοῦν τι τῶν εἰκότων ἐγένετο.
ἀνέτρεψε δ´ ἀμφότερα ταῦθ´ ἡ τύχη, καὶ εἰς τἀναντία
μετέθηκε τὰς ἀξιώσεις. ὑμεῖς μὲν γάρ, ὑπὲρ ὧν τούτοις ἐχθρὸς
ἦν, ἀφείλεσθέ με πάντα τἀμὰ καὶ τὸ μηδὲν
ποιήσαντες ἐρρίψατε· οὗτοι δ´ οἱ τὰ δεινὰ ὑπ´ ἐμοῦ
παθόντες, τὸν ἄπορον καὶ ἀνέστιον καὶ ταπεινὸν καὶ
ἄπολιν ὑπεδέξαντό με ταῖς ἑαυτῶν πόλεσι. καὶ οὐκ
ἀπέχρη αὐτοῖς τοῦτο ποιήσασι μόνον οὕτω λαμπρὸν
καὶ μεγαλόψυχον ἔργον, ἀλλὰ καὶ πολιτείαν ἔδοσάν
μοι ἐν ἁπάσαις ταῖς ἑαυτῶν πόλεσι καὶ ἀρχὰς καὶ τιμάς,
αἳ μέγισται παρ´ αὐτοῖς εἰσιν. ἐῶ τἆλλα· ἀλλὰ νυνὶ
στρατηγὸν ἀποδεδείχασί με αὐτοκράτορα τῆς ὑπερορίου
στρατιᾶς καὶ πάντα τὰ κοινὰ ἐπ´ ἐμοὶ πεποιήκασι μόνῳ.
φέρε δή, τίνα λαβὼν καρδίαν προδοίην ἂν ἔτι τούτους, ὑφ´ ὧν
τηλικαύταις κεκόσμημαι τιμαῖς, οὐθὲν
οὔτε μεῖζον οὔτ´ ἔλαττον ἀδικηθείς; εἰ μὴ ἄρα αἱ
χάριτες αὐτῶν ἀδικοῦσί με, ὥσπερ ὑμᾶς αἱ ἐμαί· καλήν γε δόξαν
οἴσει μοι παρὰ πᾶσιν ἀνθρώποις γνωσθεῖσα ἡ παλιμπροδοσία. τίς
δ´ {οὐκ} ἂν ἐπαινέσειέ
με ἀκούσας, ὅτι τοὺς μὲν φίλους, ὑφ´ ὧν εὖ πάσχειν
μοι προσῆκε, πολεμίους εὑρών, τοὺς δ´ ἐχθρούς, ὑφ´
ὧν ἐχρῆν με ἀπολωλέναι, φίλους, ἀντὶ τοῦ μισεῖν μὲν
τὰ μισοῦντα, φιλεῖν δὲ τὰ φιλοῦντα, τὴν ἐναντίαν γνώμην ἔσχον;
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Traduction française :
[8,32] XXI. N'EST-IL donc pas évident, Minucius, que vous ne me donnez
que de belles paroles, et que vous cherchez à m'attraper en couvrant
d'un beau nom vos desseins impies? Car dans le fond vous ne
m'accordez pas mon rappel, mais vous voulez me faire retourner à Rome
où je serais infailliblement une victime de la vengeance du peuple. Vous
le faites peut-être exprès et à dessein; (car je n'attends plus rien de bon
de votre part) ou, si vous voulez que je le suppose ainsi, peut être ne
prévoyez-vous pas les malheurs où je serais exposé. Mais que m'importe
à moi, que vous ignoriez les pièges qu'on me tend ? Que m'importe qu'on
vous abuse ou non, puisque quand même je serais sûr de votre bonne
volonté, il ne vous serait pas possible de rien empêcher, et que vous
seriez contraint de laisser faire le peuple en cette occasion comme en
plusieurs autres
XXII. JE ne crois pas qu'il soit besoin d'en dire davantage, pour vous
faire sentir que ce prétendu rappel, que je pourrais appeler le chemin le
plus court pour aller à la mort, ne me procurerait aucune sûreté. J'ajoute
qu'il ne pourrait m'acquérir ni gloire, ni honneur, ni la réputation d'homme
pieux. Car vous m'avez fait plaisir, Minucius de m'exhorter à penser à
toutes ces choses. Mais apprenez à votre tour, que je ne puis déférer à
vos conseils sans me couvrir de honte et sans commettre la plus grande
de toutes les impiétés : écoutez, je vous prie, mes raisons.
XXIII. Autrefois j'ai été l'ennemi de {ces} Volsques : zélé défenseur
des intérêts de ma patrie, je leur ai fait beaucoup de mal, dans la seule
vue d'affermir l'empire de Rome, d'étendre sa puissance et d'avancer sa
gloire. N'était-il pas naturel que ceux à qui j'avais rendu des services si
importants, me comblassent d'honneurs, et qu'une nation à qui j'avais
causé tant de maux, me portât une haine mortelle ? Oui, sans doute : rien
n'était plus juste, et je devais attendre une pareille récompense de part
et d'autre si l'on en avait usé comme il convenait. Mais une fatale
destinée a tout changé , il est arrivé tout le contraire de ce qu'on devait
espérer. Vous mêmes, Romains, pour l'amour desquels je me suis
déclaré l'ennemi {des Volsques}, non contents de m'avoir dépouillé
de tout, vous m'avez honteusement banni de Rome après m'avoir réduit
aux plus fâcheuses extrémités. Les Volsques au contraire, malgré toutes
les pertes que je leur ai causées, m'ont reçu à bras ouverts, quand ils
m'ont vu dans l'affliction, errant à l'aventure, sans maison et sans ville ou
je pusse me retirer. Apres une action si généreuse, ils m'ont donné dans
tous leurs états le droit de bourgeoisie ; ils m'ont élevé aux dignités et
aux plus grands honneurs qui soient en usage dans toute l'étendue de
leur pays : et pour ne pas descendre dans un plus long détail, ils viennent
encore de me faire général de toutes les troupes qu'ils ont mises en
campagne ; en un mot ils m'ont confié le gouvernèrent de la république,
sans me donner de collègue, parce qu'ils se reposent de tout sur moi
seul. Comblé de leurs bienfaits, ne serais-je pas un mauvais cœur si je
trahissais ces peuples dont je n'ai aucun sujet de me plaindre, à moins
que je ne m'offense de leurs faveurs, comme vous vous êtes offensés des
services que je vous ai rendus ? Vraiment ! je me ferais une belle
réputation dans l'esprit de tous les hommes, si on savait que j'eusse payé
leurs bienfaits de la plus noire trahison ! Quel est l'homme qui pourrait
approuver ma conduite, si après avoir trouvé une inimitié mortelle dans
ceux dont je ne devais attendre que des amitiés, et après avoir reconnu
la plus sincère amitié dans ceux donc je méritais les plus vifs ressentiments,
je venais à haïr ceux que je dois aimer et à aimer ceux que je dois haïr ?
Ne serait-ce pas en effet renverser totalement l'ordre naturel ?
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