Texte grec :
[13,71] Οἵην μὲν φίλος υἱὸς ἀνήγαγεν Οἰάγροιο
᾿Αγριόπην Θρῇσσαν στειλάμενος κιθάρην
῾Αιδόθεν · ἔπλευσεν δὲ κακὸν καὶ ἀπειθέα χῶρον.
῎Ενθα Χάρων ἀκοὴν ἕλκεται εἰς ἄκατον
ψυχὰς οἰχομένων, λίμνης δ' ἐπὶ μακρὁν ἀυτεῖ
ῥεῦμα διὲκ μεγάλων ῥυομένης δονάκων.
Πόλλ' ἔτλη παρὰ κῦμα μονόζωστος κιθαρίζων
᾿Ορφεύς, παντοίους δ' ἐξανέπεισε θεούς ·
Κωκυτόν τ' ἀθέμιστον ἐπ' ὀφρύσι μηνίσαντα
ἠδὲ καὶ αἰνοτάτου βλέμμ' ὑπέμεινε κυνός,
ἐν πυρὶ μὲν φωνὴν τεθοωμένου, ἐν πυρὶ δ' ὄμμα,
σκληρὸν τριστοίχοις δεῖμα φέρων κεφαλαῖς.
῎Ενθεν ἀοιδιάων μεγάλους ἀνέπεισεν ἄνακτας
᾿Αγριόπην μαλακοῦ πνεῦμα λαβεῖν βιότου.
Οὐ μὴν οὐδ' υἱὸς Μήνης ἀγέραστον ἔθηκεν
Μουσαῖος Χαρίτων ἤρανος ᾿Αντιόπην ·
ἥ τε πολὺν μὺστῃσιν ᾿Ελευσῖνος παρὰ πέζαν
εὐασμὸν κρυφίων ἐξεφόρει λογίων,
᾿Ράριον ὀργειῶνι νόμῳ διαποιπνύουσα
Δήμητρα · γνωστὴ δ' ἐστὶ καὶ εἰν ᾿Αίδῃ.
Φημὶ δὲ καὶ Βοιωτὸν ἀποπρολιπόντα μέλαθρον
῾Ησίοδον πάσης ἤρανον ἱστορίης
᾿Ασκραίων ἐσικέσθαι ἐρῶνθ' ῾Ελικωνίδα κώμην ·
ἔνθεν ὅ γ' ᾿Ηοίην μνώμενος ᾿Ασκραικὴν
πόλλ' ἔπαθεν, πάσας δὲ λόγων ἀνεγράψατο βίβλους,
ὑμνῶν ἐκ πρώτης παιδὸς ἀνερχόμενος.
Αὐτὸς δ' οὗτος ἀοιδός, ὃν ἐκ Διὸς αἶσα φυλάσσει
ἥδιστον πάντων δαίμονα μουσοπόλον,
λεπτὴν {δ'} ῇσ' ᾿Ιθάκην ἐνετείνατο θεῖος ῞Ομηρος
ᾠδῇσιν πινυτῆς εἵνεκα Πηνελόπης ·
ἥν διὰ πολλὰ παθὼν ὀλίγην ἐσενάσσατο νῆσον,
πολλὸν ἀπ' εὐρείης λειπόμενος πατρίδος ·
῎Εκλεε δ' ᾿Ικαρίου τε γένος καὶ δῆμον ᾿Αμύκλου
καὶ Σπάρτην, ἰδίων ἁπτόμενος παθέων.
Μίμνερμος δὲ τὸν ἡδὺν ὃς εὕρετο πολλὸν ἀνατλὰς
ἦχον καὶ μαλακοῦ πνεῦμ' ἀπὸ πενταμέτρου.
Καίετο μὲν Ναννοῦς · πολιῷ δ' ἐπὶ πολλάκι λωτᾤ
κνημωσθεὶς κώμους εἶχε σὺν ῾Εξαμύῃ.
ἥ δ' ἠχθεεδ' ῾Ερμόβιον τὸν αἰεὶ βαρύν ἠδὲ Φερεκλῆν
ἐχθρὸν μισήσας οἷ' ἀνέπεμψεν ἔπη.
Λυδῆς δ' ᾿Αντίμαχος Λυδηίδος ἐκ μὲν ἔρωτος
πληγεὶς Πακτωλοῦ ῥεῦμ' ἐπέβη ποταμοῦ ·
δαρδάνη δὲ θανοῦσαν ὑπὸ ξηρὴν θέτο γαῖαν
κλαίων, αἰάζων δ' ἦλθεν ἀποπρολιπὼν
ἄκρην ἐς Κολοφῶνα · γόων δ' ἐνεπλήσατο βίβλους
ἱράς, ἐκ παντὸς παυσάμενος καμάτου.
Λέσβιος ᾿Αλκαῖος δὲ πόσους ἀνεδέξατο κώμους,
Σαπφοῦς φορμίζων ἱμερόεντα πόθον,
γινώσκεις. ῾Ο δ' ἀοιδὸς ἀηδόνος ἠράσαθ' ὕμνων
Τήιον ἀλγύνων ἄνδρα πολυφραδίῃ.
Καὶ γὰρ τὴν ὁ μελιχρὸς ἐφωμίλησεν ᾿Ανακρέων
στελλομένην πολλαῖς ἄμμιγα Λεσβιάσι ·
φοίτα δ' ἄλλοτε μὲν λείπων Σάμον, ἄλλοτε δ' αὐτὴν
οἰνηρῇ δείρῃ κεκλιμένην πατρίδα,
Λέσβον ἐς εὕοινον · τὸ δὲ Μύσιον εἴσιδε Λέκτον
πολλάκις Αἰολικοῦ κύματος ἀντιπέρας.
᾿Ατθὶς δ' οἷα μέλισσα πολυπρήωνα Κολώνην
λείπουσ' ἐν τραγικαῖς ᾖδε χοροστασίαις
Βάκχον καὶ τὸν ῎Ερωτα Θεωρίδος - - -
- - - Ζεὺς ἔπορεν Σοφοκλεῖ.
Φημὶ δὲ καὶ κεῖνον τὸν αἰεὶ πεφυλαγμένον ἄνδρα
καὶ πάντων μῖσος κτώμενον ἐκ συνοχῶν
πάσας ἀμφὶ γυναῖκας ὑπὸ σκολιοῖο τυπέντα
τόξου νυκτερινὰς οὐκ ἀποθέσθ' ὀδύνας ·
ἀλλὰ Μακηδονίης πάσας κατενίσατο λαύρας
Αἰγείων, μέθεπεν δ' ᾿Αρχέλεω ταμίην ·
εἰσόκε - - - δαίμων, Εὐριπίδη, εὕρετ' ὄλεθρον,
᾿Αμφιβίου στυγνῶν ἀντιάσαντι κυνῶν.
῎Ανδρα δὲ τὸν Κυθέρηθεν, ὃν ἐθρέψαντο τιθῆναι
Βάκχου καὶ λωτοῦ πιστότατον ταμίην
Μοῦσαι παίδευσάν τε Φιλόξενον, οἷα τιναχθεὶς
ὠρυγῇ ταύτης ἦλθε διὰ πτόλεως,
γινώσκεις, ἀίουσα μέγαν πόθον ὃν Γαλατείης
αὐτοῖς μηλείοις θήκαθ' ὑπὸ προγόνοις.
Οἶσθα δὲ καὶ τὸν ἀοιδόν, ὃν Εὐρυπόλου πολιῆται
Κῷοι χάλκειον θῆκαν ὑπὸ πλατάνῳ
Βιττίδα μολπάζοντα θοήν, περὶ πάντα Φιλητᾶν
ῥήματα καὶ πᾶσαν τρυόμενον λαλιήν.
Οὐδὲ μὲν οὐδ' ὁπόσοι σκληρὸν βίον ἐστήσαντο
ἀνθρώπων, σκολιὴν μαιόμενοι σοφίην,
οὓς αὐτὴ περὶ πικρὰ λόγοις ἐσφίγξαντο μῆτις
καὶ δεινὴ μύθων κῆδος ἔχουσ' ἀρετή,
οὐδ' οἳ δεινὸν ἔρωτος ἀπεστρέψαντο κυδοιμόν
φαινόμενον, δεινὸν δ' ἦλθον ὑφ' ἡνιόχον.
Οἵη μὲν Σάμιον μανίη κατέδησε Θεανοῦς
Πυθαγόρην, ἑλίκων κομψὰ γεωμετρίης
εὑρόμενον, καὶ κύκλον ὅσον περιβάλλεται αἰθὴρ
βαιῇ ἐνὶ σφαίρῃ πάντ' ἀπομασσόμενον.
Οἵῳ δ' ἐχλίηνεν ὃν ἔξοχον ἔχρη ᾿Απόλλων
ἀνθρώπων εἶναι Σωκράτη ἐν σοφίῃ
Κύπρις μηνίουσα πυρὸς μένει. ᾿Εκ δὲ βαθείης
ψυχῆς κουφοτέρας ἐξεπόνησ' ἀνίας,
οἰκί' ἐς ᾿Ασπασίης πωλεύμενος · οὐδέ τι τέκμαρ
εὗρε, λόγῳ πολλὰς εὑρόμενος διόδους.
῎Ανδρα <δὲ> Κυπρηναῖον ἔσω πόθος ἔσπασεν ᾿Ισθμοῦ,
δεινὸν ὅτ' ᾿Απιδανῆς Λαίδος ἠράσατο
ὀξὺς ᾿Αρίστιππος, πάσας δ' ἠνήνατο λέσχας
φεύγων ουδαμενον ἐξεφόρησε βίωι.
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Traduction française :
[13,71] «Armé seulement de sa lyre, le
tendre fils d'Oagros ramena de l'Hadès la
Thrace Agriopé. Il navigua sur ce fleuve
malfaisant et implacable où Charon traîne
dans sa barque commune les âmes des
morts, dans un marais fait retentir ses
ondes, à travers d'immenses roseaux.
Orphée, parti seul, osa faire retentir sa lyre
près de la vague, ralliant à sa cause des
dieux pourtant fort partagés à son égard,
de même que le Cocyte sans foi, qui
enrageait sur ses rives ; il affronta le
regard fixe du terrible Cerbère, malgré ses
aboiements de feu, malgré son oeil de feu,
un oeil, qui sur cet être tricéphale, faisait
naître chez tous une indicible terreur. Alors,
grâce à son chant, Orphée persuada les
seigneurs puissants de rendre à Agriopé le
souffle de la vie.
Même le fils de la Lune, Musée, maître
du Grâces, se lia à Antiope, non sans lui
avoir accordé des honneurs. On dit qu'à la
lisière d'Éleusis, elle s'adressait aux initiés
d'une voix puissante et sacrée, celle des
oracles mystiques. Elle honorait, suivant
les rites, la Déméter de la plaine de Rarion.
Antiope est aussi renommée jusque dans l'Hadès.
Même le béotien Hésiode, maître de
toutes les sagesses, quitta sa patrie pour
se rendre au village Héliconien des
Ascréens, par amour. Epris de la courtisane
Eoée, servante à Ascra, et dont il eut à
souffrir, il composa en son souvenir les
manuscrits de son Catalogue, qui à chaque
début, mentionne le nom de celle qu'il aima.
Le grand aède, celui que Zeus désigna
comme le plus génial des chantres des
muses, le divin Homère, célébra la pauvre
Ithaque dans ses chants par amour pour la
sage Pénélope. Afin de la retrouver, il
débarqua dans cette petite île au prix de
mille souffrances, et loin de son pays, c'est
là qu'il vanta la race d'Icare, le peuple
d'Amyélas et de Sparte,en se rappelant
sans cesse ses propres infortunes.
Mimnerme, aussi, connut la souffrance,
lui qui inventa les accents langoureux du
pentamètre. Il fut épris de Nanno et, flûte
aux lèvres, malgré son âge, il folâtra
allègrement. Mais il se querella avec le
funeste Hermobios, mais aussi avec
Phéréclès, son ennemi, à qui il adressa de
haineuses chansons, dédiées à Nanno.
Antimaque, saisi d'amour pour Lydé,
une Lydienne, foula, pour la retrouver, le
sol sillonné par les flots du Pactole ; quand
elle mourut, il l'ensevelit, puis la pleura
longtemps, inconsolable. Plus tard,
gagnant la noble Colophon, il jeta sur ses
manuscrits la tristesse de son coeur et put
ainsi apaiser sa douleur.
Le Lesbien Alcée, qui chanta dans de
joyeux banquets au son de sa lyre, tomba
amoureux, tu le sais, de Sappho. Poète et
ami du rossignol, il chagrina le poète de
Téos, tant ses chants étaient magnifiques.
Anacréon à la voix de miel était en effet
l'ami de celle qui surpassait en beauté
toutes les femmes de Lesbos. Le poète,
abandonnant tantôt Samos, et tantôt sa
patrie, nichée sur la colline tapissée de
vignes, allait à Lesbos, où le vin était doux.
Et de là, il admirait Lectos, le promontoire
de Mysie, au-dessus des flots éoliens.
Il y eut aussi l'abeille attique, qui
délaissa Colone aux maintes collines, et qui
chanta dans les choeurs tragiques Bacchos
et sa passion pour Théori et Erigoné, deux
femmes que Zeus offrit comme amantes à
Sophocle dans sa vieillesse.
Je parlerai de ce poète qui se tenait
toujours à l'écart de la passion et qui
poursuivait sans cesse la gent féminine de
ses sarcasmes. Et pourtant, lui aussi, fut
frappé par l'arc tortueux, au point d'être
inconsolable, même pendant la nuit ;que
dis-je ! pétri par un morne ennui, il s'en alla
sur les routes affreuses de Macédoine, se
mit sous la protection d'Archélaos, cela,
jusqu'au jour où le destin fracassa Euripide,
quand il fut victime des chiens cruels
d'Amphibios.
Et ce poète de Cythère, Philoxène, que
les nourrices de Bacchos élevèrent et que
les Muses avaient éduqué pour être le plus
fidèle serviteur de la flûte ; vous savez tous
comment il fut souffrit, et comment il arriva
dans notre cité ; vous avez entendu parler
du chanteur, pour lequel Galatée eut autant
de considération qu'à l'égard d'un mouton.»
Tu connais aussi ce poète, auquel les
descendants d'Eurypylos dressèrent à Cos
une statue en bronze sous un platane, je
veux parler de Philétas, qui chanta son
amour pour l'agile Bittis, un poète habile à
préserver de l'oubli tous les mots, ainsi que
leur prononciation.
Même les mortels qui s'obligent à mener
une vie austère et qui sont en quête de la
sagesse tortueuse, oui, ces gens pleins de
prudence dont l'habileté triomphe dans les
âpres discussions, qu'une vertu implacable
retient, même ceux-là ne sont pas à l'abri
du ravage insensé de l'amour. Qu'il ose se
montrer à eux, et les voilà tous sous
l'emprise de cet aurige redoutable.
Telle était la folie qui pour Théano
enchaînait Pythagore de Samos ; pourtant,
c'était l'homme qui avait découvert les
subtilités de la géométrie, et avait
reproduit sur une petite sphère, le
l'étendue arrondie que l'éther enveloppe.
Avec quelle fougue le feu de Cypris se mit à
consumer Socrate, qu'Apollon avait désigné
comme le plus sage des hommes. Pour
alléger ses souffrances, il fréquenta
souvent la maison d'Aspasie ; mais rien n'y
fit, il ne trouvaaucun remède, lui qui,
pourtant, dissipait bien des problèmes par
la seule force de sa raison.
Même l'homme de Cyrène, le vif Aristippe,
fut victime d'une passion brûlante : en
effet, au-delà de l'Isthme, il tomba
amoureux de Lais d'Apidané, à tel point que
pour elle, il oublia tous ses discours
philosophiques pour mener une vie oisive.»
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