[3,2] Περὶ τίνα ἀσκεῖσθαι δεῖ τὸν προκόψοντα
καὶ ὅτι τῶν κυριωτάτων ἀμελοῦμεν.
Τρεῖς εἰσι τόποι, περὶ οὓς ἀσκηθῆναι δεῖ τὸν ἐσόμενον
καλὸν καὶ ἀγαθόν· ὁ περὶ τὰς ὀρέξεις καὶ τὰς
ἐκκλίσεις, ἵνα μήτ´ ὀρεγόμενος ἀποτυγχάνῃ μήτ´
ἐκκλίνων περιπίπτῃ· ὁ περὶ τὰς ὁρμὰς καὶ ἀφορμὰς καὶ
ἁπλῶς ὁ περὶ τὸ καθῆκον, ἵνα τάξει, ἵνα εὐλογίστως,
ἵνα μὴ ἀμελῶς· τρίτος ἐστὶν ὁ περὶ τὴν ἀνεξαπατησίαν
καὶ ἀνεικαιότητα καὶ ὅλως ὁ περὶ τὰς συγκαταθέσεις.
τούτων κυριώτατος καὶ μάλιστα ἐπείγων ἐστὶν ὁ περὶ
τὰ πάθη· πάθος γὰρ ἄλλως οὐ γίνεται εἰ μὴ ὀρέξεως
ἀποτυγχανούσης ἢ ἐκκλίσεως περιπιπτούσης. οὗτός
ἐστιν ὁ ταραχάς, θορύβους, ἀτυχίας, ὁ δυστυχίας
ἐπιφέρων, ὁ πένθη, οἰμωγάς, φθόνους, ὁ φθονερούς, ὁ
ζηλοτύπους ποιῶν, δι´ ὧν οὐδ´ ἀκοῦσαι λόγου δυνάμεθα.
δεύτερός ἐστιν ὁ περὶ τὸ καθῆκον· οὐ δεῖ γάρ
με εἶναι ἀπαθῆ ὡς ἀνδριάντα, ἀλλὰ τὰς σχέσεις
τηροῦντα τὰς φυσικὰς καὶ ἐπιθέτους ὡς εὐσεβῆ, ὡς υἱόν,
ὡς ἀδελφόν, ὡς πατέρα, ὡς πολίτην.
Τρίτος ἐστὶν ὁ ἤδη τοῖς προκόπτουσιν ἐπιβάλλων, ὁ
περὶ τὴν αὐτῶν τούτων ἀσφάλειαν, ἵνα μηδ´ ἐν ὕπνοις
λάθῃ τις ἀνεξέταστος παρελθοῦσα φαντασία μηδ´ ἐν
οἰνώσει μηδὲ μελαγχολῶντος. (-) Τοῦτο ὑπὲρ ἡμᾶς,
φησίν, ἐστίν. (-) Οἱ δὲ νῦν φιλόσοφοι ἀφέντες τὸν πρῶτον
τόπον καὶ τὸν δεύτερον καταγίνονται περὶ τὸν τρίτον·
μεταπίπτοντας, ἠρωτῆσθαι περαίνοντας, ὑποθετικούς,
ψευδομένους. (-) Δεῖ γάρ, φησίν, καὶ ἐν ταῖς
ὕλαις ταύταις γενόμενον διαφυλάξαι τὸ ἀνεξαπάτητον.
(-) Τίνα; τὸν καλὸν καὶ ἀγαθόν. σοὶ οὖν τοῦτο λείπει;
τὰς ἄλλας ἐκπεπόνηκας; περὶ κερμάτιον ἀνεξαπάτητος
εἶ; ἐὰν ἴδῃς κοράσιον καλόν, ἀντέχεις τῇ φαντασίᾳ; ἂν
ὁ γείτων σου κληρονομήσῃ, οὐ δάκνῃ; νῦν οὐδὲν ἄλλο
σοι λείπει ἢ ἀμεταπτωσία; τάλας, αὐτὰ ταῦτα τρέμων
μανθάνεις καὶ ἀγωνιῶν, μή τίς σου καταφρονήσῃ, καὶ
πυνθανόμενος, μή τίς τι περὶ σοῦ λέγει. κἄν τις ἐλθὼν
εἴπῃ σοι ὅτι ’λόγου γινομένου, τίς ἄριστός ἐστι τῶν
φιλοσόφων, παρών τις ἔλεγεν, ὅτι εἷς φιλόσοφος ὁ
δεῖνα‘, γέγονέ σου τὸ ψυχάριον ἀντὶ δακτυλιαίου δίπηχυ.
ἂν δ´ ἄλλος παρὼν εἴπῃ ’οὐδὲν εἴρηκας, οὐκ
ἔστιν ἄξιον τοῦ δεῖνος ἀκροᾶσθαι· τί γὰρ οἶδεν; τὰς
πρώτας ἀφορμὰς ἔχει, πλέον δ´ οὐδέν‘, ἐξέστηκας,
ὠχρίακας, εὐθὺς κέκραγας ’ἐγὼ αὐτῷ δείξω, τίς εἰμι, ὅτι
μέγας φιλόσοφος‘. βλέπεται ἐξ αὐτῶν τούτων. τί θέλεις ἐξ
ἄλλων δεῖξαι; οὐκ οἶδας, ὅτι Διογένης τῶν σοφιστῶν
τινα οὕτως ἔδειξεν ἐκτείνας τὸν μέσον δάκτυλον, εἶτα
ἐκμανέντος αὐτοῦ ’Οὗτός ἐστιν‘, ἔφη, ’ὁ δεῖνα·
ἔδειξα ὑμῖν αὐτόν‘; ἄνθρωπος γὰρ δακτύλῳ οὐ δείκνυται
ὡς λίθος ἢ ὡς ξύλον, ἀλλ´ ὅταν τις τὰ δόγματα
αὐτοῦ δείξῃ, τότε αὐτὸν ὡς ἄνθρωπον ἔδειξεν.
Βλέπωμεν καὶ σοῦ τὰ δόγματα. μὴ γὰρ οὐ δῆλόν
ἐστιν, ὅτι σὺ τὴν προαίρεσιν τὴν σαυτοῦ ἐν οὐδενὶ
τίθεσαι, ἔξω δὲ βλέπεις εἰς τὰ ἀπροαίρετα, τί ἐρεῖ ὁ
δεῖνα καὶ τίς εἶναι δόξεις, εἰ φιλόλογος, εἰ Χρύσιππον
ἀνεγνωκὼς ἢ Ἀντίπατρον; εἰ μὲν γὰρ καὶ Ἀρχέδημον,
ἀπέχεις ἅπαντα. τί ἔτι ἀγωνιᾷς, μὴ οὐ δείξῃς ἡμῖν, τίς
εἶ; θέλεις σοι εἴπω, τίνα ἡμῖν ἔδειξας; ἄνθρωπον
παριόντα ταπεινόν, μεμψίμοιρον, ὀξύθυμον, δειλόν,
πάντα μεμφόμενον, πᾶσιν ἐγκαλοῦντα, μηδέποτε ἡσυχίαν
ἄγοντα, πέρπερον· ταῦτα ἡμῖν ἔδειξας. ἄπελθε νῦν καὶ
ἀναγίγνωσκε Ἀρχέδημον· εἶτα μῦς ἂν καταπέσῃ καὶ
ψοφήσῃ, ἀπέθανες. τοιοῦτος γάρ σε μένει θάνατος,
οἷον καὶ τὸν - τίνα ποτ´ ἐκεῖνον; - τὸν Κρῖνιν. καὶ
ἐκεῖνος μέγα ἐφρόνει, ὅτι ἐνόει Ἀρχέδημον. τάλας, οὐ
θέλεις ἀφεῖναι ταῦτα τὰ μηδὲν πρὸς σέ; πρέπει ταῦτα
τοῖς δυναμένοις δίχα ταραχῆς αὐτὰ μανθάνειν, οἷς
ἔξεστιν εἰπεῖν ’οὐκ ὀργίζομαι, οὐ λυποῦμαι, οὐ φθονῶ, οὐ
κωλύομαι, οὐκ ἀναγκάζομαι. τί μοι λοιπόν; εὐσχολῶ,
ἡσυχίαν ἄγω. ἴδωμεν, πῶς περὶ τὰς μεταπτώσεις τῶν
λόγων δεῖ ἀναστρέφεσθαι· ἴδωμεν, πῶς ὑπόθεσίν τις
λαβὼν εἰς οὐδὲν ἄτοπον ἀπαχθήσεται‘. ἐκείνων ἐστὶ
ταῦτα. τοῖς εὖ παθοῦσι πρέπει πῦρ καίειν, ἀριστᾶν, ἂν
οὕτως τύχῃ, καὶ ᾄδειν καὶ ὀρχεῖσθαι· βυθιζομένου δὲ
τοῦ πλοίου σύ μοι παρελθὼν ἐπαίρεις τοὺς σιφάρους.
| [3,2] CHAPITRE II : Des choses auxquelles il faut exercer l'élève;
et de notre négligence de ce qu'il y a de plus important.
Il est trois choses qu'il faut apprendre par l'exercice à celui qui doit
devenir un sage : d'abord à désirer et à redouter, pour qu'il ne manque
jamais ce qu'il désire, et ne tombe jamais dans ce qu'il redoute; en
second lieu, à vouloir les choses et à les repousser, ou, plus simplement,
à faire ce qu'il doit, pour qu'il agisse toujours suivant l'ordre et la
raison, et sans négligence; en troisième lieu, à ne jamais se tromper, à
ne jamais juger au hasard, en un mot à bien donner son assentiment. Le
point principal, celui qui presse le plus, est celui qui touche aux
troubles de l'âme; car ces troubles ne se produisent jamais, que parce
qu'on a été frustré dans ses désirs, ou parce qu'on est tombé dans ce
qu'on redoutait. Voilà ce qui engendre en nous les perturbations, les
désordres, l'idée que nous sommes malheureux et misérables, les plaintes,
les gémissements, la haine ; voilà ce qui fait les haineux et les jaloux;
voilà ce qui nous empêche d'écouter les bonnes raisons. En seconde ligne
est le point relatif au devoir. Car nous n'avons pas à être insensibles
comme les statues, mais à remplir nos obligations naturelles et
adventices, soit au nom de la piété, soit comme fils, comme frère, comme
père, comme citoyen.
Le troisième point ne regarde que ceux qui sont déjà bien avancés : il a
pour objet de les rendre infaillibles, en empêchant qu'aucune idée se
glisse en eux à leur insu et sans être examinée, même dans le sommeil,
même dans l'ivresse, même dans les moments d'humeur noire. Ce point-là est
au-dessus de nous. Mais les philosophes de nos jours laissent de côté le
premier et le second point, pour s'occuper uniquement de ce troisième; et
ils sont tout entiers aux arguments captieux, interrogatifs,
hypothétiques, mensongers. Il est vrai, en effet, qu'on doit en pareille
matière aussi, quand elle se rencontre, savoir se préserver de l'erreur;
mais qui doit cela? Le Sage. Toi donc, n'y a-t-il que cela qui te manque?
Es-tu parfait dans tout le reste? Ne faiblis-tu jamais en face d'un écu?
Si tu aperçois une belle fille, sais-tu résister à sa vue? Si ton voisin
fait un héritage, n'en éprouves-tu aucune peine? Rien ne te manque-t-il
aujourd'hui, que d'être inébranlable dans tes opinions? Malheureux que tu
es! C'est en tremblant que tu apprends toutes ces belles choses, en
mourant de peur d'être méprisé, et en t'informant si on ne parle pas de
toi. Si quelqu'un vient te dire : Comme on demandait quel était le plus
grand philosophe, une personne présente a dit : le seul philosophe, c'est
un tel! ta petite âme, qui était de la taille d'un doigt, grandit de deux
coudées. Mais, si quelqu'un de ceux qui étaient là a répondu : Tu parles
en l'air; un tel ne vaut pas la peine qu'on l'entende! Que sait-il, en
effet? Il en est aux premiers éléments, et rien de plus! te voici hors de
toi, sans couleur, et tu t'écries aussitôt : Je lui montrerai qui je suis,
et que je suis un grand philosophe! Cela se voit rien que par là. Quelle
autre démonstration veux-tu en donner? Diogène (ne le sais-tu pas?)
montrait un jour un sophiste, en étendant le doigt du milieu. Celui-ci
s'en fâcha. Voilà ce qu'est un tel dit le philosophe; Je vous l'ai
montré. C'est, qu'en effet, ce n'est pas avec le doigt que se montre un
homme, comme une pierre ou un morceau de bois; mais montrez ses opinions,
et alors en lui vous aurez montré l'homme.
Voyons tes opinions à toi aussi. N'est-il pas évident que tu comptes pour
rien ta faculté de juger et de vouloir, que tes yeux se tournent hors de
toi sur ce qui ne dépend pas de toi, sur ce que dira un tel, sur ce qu'il
pensera de toi? Te trouve-t-il savant? Croit-il que tu as lu Chrysippe et
Antipater? Car s'il va jusqu'à Archédémus, te voilà au comble du bonheur!
Pourquoi meurs-tu encore de peur de ne pas nous montrer ce que tu es?
Veux-tu que je te dise ce que tu nous montres. Tu nous montres devant nous
un homme sans cœur et qui se plaint toujours, un homme toujours en colère,
un lâche, qui blâme tout, qui accuse tout le monde, qui n'est jamais
tranquille, un homme qui n'a rien de solide en lui. Voilà ce que tu nous
as montré. Va-t'en donc lire Archédémus ; puis, si un rat tombe chez toi
et fait du bruit, te voilà mort! Ce qui t'attend, c'est une mort semblable
à celle de … quel est-il?.... à celle de Crinis. Lui aussi était fier,
parce qu'il savait tout Archédémus. Malheureux! ne veux-tu pas renoncer à
toutes ces connaissances, qui ne sont pas faites pour toi? Elles
conviennent à ceux qui peuvent les acquérir, étant déjà au-dessus de tous
les troubles de l'âme; à ceux qui peuvent dire : Je n'ai ni colère, ni
chagrin, ni haine ; il n'y a pour moi, ni entraves, ni contrainte. Que me
reste-t-il à faire? J'ai du loisir, et je suis en repos. Voyons comment on
doit se tirer de la conversion des syllogismes ; comment, après avoir posé
une hypothèse, on évitera de tomber dans l'absurde. Voilà ceux auxquels
ces études conviennent. Quand on a une navigation heureuse, on a le droit
d'allumer du feu, de dîner, et même, à l'occasion, de chanter et de
danser; mais toi, c'est quand le navire est en danger de sombrer, que tu
viens déployer tes plus hautes voiles.
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