[1,10] CHAPITRE X.
§ 1. Οὐκ ἔστι δὲ διαφορὰ τῶν λόγων ἣν λέγουσί τινες, τὸ εἶναι τοὺς μὲν πρὸς τοὔνομα λόγους, ἑτέρους δὲ πρὸς τὴν διάνοιαν· ἄτοπον γὰρ τὸ ὑπολαμβάνειν ἄλλους μὲν εἶναι πρὸς τοὔνομα λόγους, ἑτέρους δὲ πρὸς τὴν διάνοιαν, ἀλλ´ οὐ τοὺς αὐτούς. § 2. Τί γάρ ἐστι τὸ μὴ πρὸς τὴν διάνοιαν ἀλλ´ ἢ ὅταν μὴ χρῆται τῷ ὀνόματι ἐφ´ ᾧ οἰόμενος ἐρωτᾶσθαι ὁ ἐρωτώμενος ἔδωκεν; τὸ δ´ αὐτὸ τοῦτό ἐστι καὶ πρὸς τοὔνομα· τὸ δὲ πρὸς τὴν διάνοιαν, ὅταν ἐφ´ ᾧ ἔδωκεν διανοηθείς. Εἰ δή τινες πλείω σημαίνοντος τοῦ ὀνόματος οἴοιντο ἓν σημαίνειν— καὶ ὁ ἐρωτῶν καὶ ὁ ἐρωτώμενος (οἷον ἴσως τὸ ὂν ἢ τὸ ἓν πολλὰ σημαίνει, ἀλλὰ καὶ ὁ ἀποκρινόμενος καὶ ὁ ἐρωτῶν (Ζήνων) ἓν οἰόμενοι εἶναι εἰρήκασι, καὶ ἔστιν ὁ λόγος ὅτι ἓν πάντα), ἆρ´ οὗτος πρὸς τοὔνομα ἔσται ἢ πρὸς τὴν διάνοιαν τοῦ ἐρωτωμένου διειλεγμένος; εἰ δέ γέ τις πολλὰ οἴεται σημαίνειν, δῆλον ὅτι οὐ πρὸς τὴν διάνοιαν. § 3. Πρῶτον μὲν γὰρ περὶ τοὺς τοιούτους ἐστὶ λόγους τὸ πρὸς τοὔνομα καὶ πρὸς τὴν διάνοιαν ὅσοι πλείω σημαίνουσιν, § 4. εἶτα περὶ ὁντινοῦν ἐστιν· οὐ γὰρ ἐν τῷ λόγῳ ἐστὶ τὸ πρὸς τὴν διάνοιαν εἶναι, ἀλλ´ ἐν τῷ τὸν ἀποκρινόμενον ἔχειν πως πρὸς τὰ δεδομένα. § 5. Εἶτα πρὸς τοὔνομα πάντας ἐνδέχεται αὐτοὺς εἶναι· τὸ γὰρ πρὸς τοὔνομα τὸ μὴ πρὸς τὴν διάνοιαν εἶναί ἐστιν ἐνταῦθα. Εἰ γὰρ μὴ πάντες, ἔσονταί τινες ἕτεροι οὔτε πρὸς τοὔνομα οὔτε πρὸς τὴν διάνοιαν· οἱ δέ φασι πάντας, καὶ διαιροῦνται ἢ πρὸς τοὔνομα ἢ πρὸς τὴν διάνοιαν εἶναι πάντας, ἄλλους δ´ οὔ. Ἀλλὰ μὴν ὅσοι συλλογισμοί εἰσι παρὰ τὸ πλεοναχῶς, τούτων εἰσί τινες οἱ παρὰ τοὔνομα. Ἀτόπως μὲν γὰρ καὶ εἴρηται τὸ παρὰ τοὔνομα φάναι πάντας τοὺς παρὰ τὴν λέξιν· ἀλλ´ οὖν εἰσί τινες παραλογισμοὶ οὐ τῷ τὸν ἀποκρινόμενον πρὸς τούτους ἔχειν πως, ἀλλὰ τῷ τοιονδὶ ἐρώτημα τὸν λόγον αὐτὸν ἔχειν ὃ πλείω σημαίνει.
(171b) § 6. Ὅλως τε ἄτοπον τὸ περὶ ἐλέγχου διαλέγεσθαι ἀλλὰ μὴ πρότερον περὶ συλλογισμοῦ· ὁ γὰρ ἔλεγχος συλλογισμός ἐστιν, ὥστε χρὴ καὶ περὶ συλλογισμοῦ πρότερον ἢ περὶ ψευδοῦς ἐλέγχου· ἔστι γὰρ ὁ τοιοῦτος ἔλεγχος φαινόμενος συλλογισμὸς ἀντιφάσεως. Διὸ ἢ ἐν τῷ συλλογισμῷ ἔσται τὸ αἴτιον ἢ ἐν τῇ ἀντιφάσει (προσκεῖσθαι γὰρ δεῖ τὴν ἀντίφασιν), ὁτὲ δ´ ἐν ἀμφοῖν, ἂν ᾖ φαινόμενος ἔλεγχος. Ἔστι δὲ ὁ μὲν τοῦ "σιγῶντα λέγειν" ἐν τῇ ἀντιφάσει, οὐκ ἐν τῷ συλλογισμῷ, ὁ δὲ "ἃ μὴ ἔχοι τις, δοίη ἄν" ἐν ἀμφοῖν, ὁ δὲ ὅτι ἡ Ὁμήρου ποίησις σχῆμα διὰ τοῦ "κύκλος" ἐν τῷ συλλογισμῷ. Ὁ δ´ ἐν μηδετέρῳ ἀληθὴς συλλογισμός.
§ 7. Ἀλλὰ δή, ὅθεν ὁ λόγος ἦλθε, πότερον οἱ ἐν τοῖς μαθήμασι λόγοι πρὸς τὴν διάνοιάν εἰσιν ἢ οὔ; καὶ εἴ τινι δοκεῖ πολλὰ σημαίνειν τὸ τρίγωνον, καὶ ἔδωκε μὴ ὡς τοῦτο τὸ σχῆμα ἐφ´ οὗ συνεπεράνατο ὅτι δύο ὀρθαί, πότερον πρὸς τὴν διάνοιαν οὗτος διείλεκται τὴν ἐκείνου ἢ οὔ;
§ 8. Ἔτι εἰ πολλὰ μὲν σημαίνει τοὔνομα, ὁ δὲ μὴ νοεῖ μηδ´ οἴεται, πῶς οὗτος οὐ πρὸς τὴν διάνοιαν διείλεκται; ἢ πῶς δεῖ ἐρωτᾶν πλὴν διδόντα διαίρεσιν, εἴ τ´ ἐρωτήσειέ τις εἰ ἔστι σιγῶντα λέγειν ἢ οὔ, ἢ ἔστι μὲν ὡς οὔ, ἔστι δ´ ὡς ναί, εἰ δή τις δοίη μηδαμῶς, ὁ δὲ διαλεχθείη, ἆρ´ οὐ πρὸς τὴν διάνοιαν διείλεκται; καίτοι ὁ λόγος δοκεῖ τῶν παρὰ τὸ ὄνομα εἶναι. Οὐκ ἄρα ἐστὶ γένος τι λόγων τὸ πρὸς τὴν διάνοιαν. § 9. Ἀλλ´ οἱ μὲν πρὸς τοὔνομά εἰσι· καίτοι οὗτοι οὐ πάντες, οὐχ ὅτι οἱ ἔλεγχοι ἀλλ´ οὐδ´ οἱ φαινόμενοι ἔλεγχοι. Εἰσὶ γὰρ καὶ μὴ παρὰ τὴν λέξιν φαινόμενοι ἔλεγχοι, οἷον οἱ παρὰ τὸ συμβεβηκὸς καὶ ἕτεροι.
§ 10. Εἰ δέ τις ἀξιοῖ διαιρεῖν, ὅτι "λέγω δὲ σιγῶντα λέγειν τὰ μὲν ὡδὶ τὰ δ´ ὡδί", ἀλλὰ τοῦτό γ´ ἐστὶ πρῶτον μὲν ἄτοπον, τὸ ἀξιοῦν· ἐνίοτε γὰρ οὐ δοκεῖ τὸ ἐρωτώμενον πολλαχῶς ἔχειν, ἀδύνατον δὲ διαιρεῖν ὃ μὴ οἴεται. Ἔπειτα τὸ διδάσκειν τί ἄλλο ἔσται; φανερὸν γὰρ ποιήσει ὡς ἔχει τῷ μήτ´ ἐσκεμμένῳ μήτ´ εἰδότι μήθ´ ὑπολαμβάνοντι ὅτι ἄλλως λέγεται· ἐπεὶ καὶ ἐν τοῖς διπλοῖς τί κωλύει τοῦτο παθεῖν; "Ἆρα ἴσαι αἱ μονάδες ταῖς δυάσιν ἐν τοῖς τέτταρσιν; εἰσὶ δὲ (δυάδες) αἱ μὲν ὡδὶ ἐνοῦσαι αἱ δὲ ὡδί." Καὶ "Ἆρα τῶν ἐναντίων μία ἐπιστήμη ἢ οὔ; ἔστι δ´ ἐναντία τὰ μὲν γνωστὰ τὰ δ´ ἄγνωστα". Ὥστ´ ἔοικεν ἀγνοεῖν ὁ τοῦτο ἀξιῶν ὅτι ἕτερον (172a) τὸ διδάσκειν τοῦ διαλέγεσθαι, καὶ ὅτι δεῖ τὸν μὲν διδάσκοντα μὴ ἐρωτᾶν ἀλλ´ αὐτὸν δῆλα ποιεῖν, τὸν δ´ ἐρωτᾶν.
| [1,10] CHAPITRE X. {Il n'y a pas, comme on l'a dit souvent, raisonnements de mots, raisonnements de pensée : les uns et les autres se confondent.}
§ 1. Il n'y a pas cette différence entre les raisonnements que l'on prétend parfois y trouver, raisonnements de mots et raisonnements de pensée. Il est absurde de croire que les raisonnements de mots soient autres que les raisonnements de pensée, et que les uns et les autres ne soient pas les mêmes. § 2. Qu'est-ce, en effet, que raisonner contre la pensée, si ce n'est se servir du mot qu'a accordé l'interlocuteur, dans un sens où il n'a pas cru être interrogé? Mais cela même aussi se rapporte au mot. Rester dans la pensée, c'est comprendre la chose dans le sens où l'interlocuteur l'a donnée. Mais si, lorsque le mot a plusieurs sens, on s'imagine qu'il n'en a qu'un seul, aussi bien celui qui interroge que celui qui est interrogé: par exemple, l'autre, l'un, ont plusieurs sens; mais si Zénon qui interroge et son interlocuteur ont supposé dans l'interrogation qu'il n'y avait qu'un sens unique, et que l'on trouve à cette conclusion que tout est un ; si, dis-je quelqu'un agit ainsi, il aura discuté non pas seulement la fin mais aussi la pensée pour l'objet en question. Que, si l'on supposait au contraire que le mot a plusieurs sens, il est clair que ce n'est pas à la pensée que l'argument s'adresse. § 3. En effet, c'est dans les raisonnements qui ont plusieurs sens qu'il faut d'abord chercher cette distinction du mot et de la pensée. § 4. Puis ensuite, il faut voir à qui ils s'adressent; car ce n'est pas tant dans l'expression que consiste le raisonnement relatif à la pensée; que dans la disposition particulière où se trouve l'interlocuteur, relativement aux principes accordés. § 5. Il se peut de plus que tous ces raisonnements de pensée s'adressent aussi au mot, puisqu'ici ne s'adresser qu'au mot, c'est ne point s'adresser à la pensée. En effet, s'ils ne s'y rapportaient pas tous, il y en aurait alors quelques uns qui seraient tout autres et qui ne seraient ni de mot ni de pensée. Mais on prétend que tous les raisonnements sont ainsi, et on les divise tous en raisonnements de mot et raisonnements de pensée, n'en voulant pas reconnaître d'autres. Pourtant, parmi tous les syllogismes qui tiennent aux sens divers des mots, il y en a quelques uns qui ne sont pas relatifs au mot. En effet, c'est à tort qu'on prétend appeler tous les paralogismes d'expression paralogismes de mots. Mais il y a sûrement certains paralogismes qui ont lieu, non pas parce que celui qui répond est à l'égard de la question disposé de telle façon, mais parce que l'argumentation elle-même renferme une question qui peut présenter plusieurs significations.
(171b) § 6. Il est aussi tout à fait absurde de discuter sur la réfutation sans avoir préalablement discuté sur le syllogisme; car la réfutation n'est qu'un syllogisme, de sorte qu'il faut avoir discuté sur le syllogisme avant de passer à la fausse réfutation. En effet, cette réfutation n'est que le syllogisme apparent de la contradiction. Ainsi, la cause de l'erreur est ou dans le syllogisme ou dans la contradiction ; car il faut ajouter aussi la contradiction, et tantôt elle est dans les deux, si c'est une réfutation apparente. Ainsi, clans le cas de ce paralogisme que celui qui se tait parle, l'erreur est dans la contradiction et non dans le syllogisme. Dans cet autre que l'on peut donner ce que l'on n'a point, l'erreur est dans les deux. Dans cet autre enfin, que la poésie d'Homère est une figure parce qu'elle est un cycle, l'erreur est dans le syllogisme. Mais là où l'erreur n'est ni de l'un ni de l'autre côté, le syllogisme est vrai.
§ 7. Mais pour revenir au point d'où la discussion est partie, y a-t-il dans les mathématiques des raisonnements qui s'adressent ou ne s'adressent pas à la pensée? Et s'il paraît à quelqu'un que triangle a plusieurs sens, et si on l'a concédé, sans que ce soit d'ailleurs pour cette figure de laquelle on conclut qu'il a ses angles égaux à deux droits, le raisonnement ainsi obtenu répond-il, ou non, à la pensée de l'interlocuteur?
§ 8. Si le mot a plusieurs sens, et qu'on ne le sache pas, ou qu'on n'y pense pas, comment le raisonnement peut-il ne pas répondre à la pensée? Ou bien comment faut-il poser l'interrogation, si ce n'est de demander de nouveau, après avoir obtenu la division, s'il est possible que celui qui se tait parle, ou si ce n'est pas possible; ou bien si c'est en partie impossible et en partie possible? Si l'interlocuteur ne fait aucune concession et que l'on continue de discuter, doit-on dire pour cela qu'on n'a point argumenté contre sa pensée? Et cependant le raisonnement, dans ce cas, parait un simple raisonnement de mots. Il n'y a donc pas un genre particulier de raisonnements relativement à la pensée. § 9. Il y eu a quelques uns qui ne sont relatifs qu'aux mots; mais l'on ne saurait mettre dans cette classe, je ne dis pas seulement toutes les réfutations, mais encore toutes les réfutations apparentes; car il y a aussi des réfutations apparentes qui ne sont pas relatives à l'expression: par exemple, celles qui sont relatives à l'accident, et bien d'autres.
§ 10. Mais si l'on prétend diviser ainsi : Quand je dis que celui qui se tait parle..., la chose est en partie de cette façon, est en partie d'une autre. La première observation à faire tout d'abord c'est qu'il est absurde de penser ainsi ; car quelquefois la chose mise en questions ne paraît pas avoir plusieurs façons d'être, et il est impossible de diviser ce qu'on ne pense pas comme multiple. De plus, que sera-ce qu'expliciter la chose, si ce n'est faire connaître évidemment ce qu'elle est à l'interlocuteur qui n'a point recherché, qui ne sait si elle peut être autrement, et qui ne le suppose même pas? Et qui empêche même de faire cela pour les choses qui ne sont pas doubles? Les unités sont-elles donc, égales aux dyades dans le nombre quatre? Or, les dyades sont, celles-ci de cette façon, celles-là d'une autre. Y a-t-il ou n'y a-t-il pas une notion unique des contraires? Mais parmi les contraires les uns sont connus, les autres inconnus. Ainsi donc, on paraît ignorer quand on pense cela, (172a) qu'enseigner est tout autre chose que discuter, et qu'il faut que celui qui enseigne n'interroge pas, mais éclaircisse lui-même les choses, tandis que l'autre doit interroger.
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