Texte grec :
[6,1317b] τούτου γὰρ στοχάζεσθαί φασι πᾶσαν δημοκρατίαν:
ἐλευθερίας δὲ ἓν μὲν τὸ ἐν μέρει ἄρχεσθαι καὶ ἄρχειν. καὶ γὰρ τὸ
δίκαιον τὸ δημοτικὸν τὸ ἴσον ἔχειν ἐστὶ κατὰ ἀριθμὸν ἀλλὰ μὴ κατ'
ἀξίαν, τούτου δ' ὄντος τοῦ δικαίου τὸ πλῆθος ἀναγκαῖον εἶναι
κύριον, καὶ ὅ τι ἂν δόξῃ τοῖς πλείοσι, τοῦτ' εἶναι τέλος καὶ τοῦτ' εἶναι
τὸ δίκαιον: φασὶ γὰρ δεῖν ἴσον ἔχειν ἕκαστον τῶν πολιτῶν: ὥστε ἐν
ταῖς δημοκρατίαις συμβαίνει κυριωτέρους εἶναι τοὺς ἀπόρους τῶν
εὐπόρων: πλείους γάρ εἰσι, κύριον δὲ τὸ τοῖς πλείοσι δόξαν. ἓν
μὲν οὖν τῆς ἐλευθερίας σημεῖον τοῦτο, ὃν τίθενται πάντες οἱ
δημοτικοὶ τῆς πολιτείας ὅρον: ἓν δὲ τὸ ζῆν ὡς βούλεταί τις. τοῦτο γὰρ
τῆς ἐλευθερίας ἔργον εἶναί φασιν, εἴπερ τοῦ δουλεύοντος τὸ ζῆν μὴ
ὡς βούλεται. τῆς μὲν οὖν δημοκρατίας ὅρος οὗτος δεύτερος: ἐντεῦθεν
δ' ἐλήλυθε τὸ μὴ ἄρχεσθαι, μάλιστα μὲν ὑπὸ μηθενός, εἰ δὲ μή, κατὰ
μέρος, καὶ συμβάλλεται ταύτῃ πρὸς τὴν ἐλευθερίαν τὴν κατὰ τὸ ἴσον.
τούτων δ' ὑποκειμένων καὶ τοιαύτης οὔσης τῆς ἀρχῆς τὰ τοιαῦτα
δημοτικά: τὸ αἱρεῖσθαι τὰς ἀρχὰς πάντας ἐκ πάντων, τὸ ἄρχειν
πάντας μὲν ἑκάστου ἕκαστον δ' ἐν μέρει πάντων, τὸ κληρωτὰς
εἶναι τὰς ἀρχὰς ἢ πάσας ἢ ὅσαι μὴ ἐμπειρίας δέονται καὶ τέχνης, τὸ
μὴ ἀπὸ τιμήματος μηθενὸς εἶναι τὰς ἀρχὰς ἢ ὅτι μικροτάτου, τὸ μὴ
δὶς τὸν αὐτὸν ἄρχειν μηδεμίαν ἢ ὀλιγάκις ἢ ὀλίγας ἔξω τῶν κατὰ
πόλεμον, τὸ ὀλιγοχρονίους εἶναι τὰς ἀρχὰς ἢ πάσας ἢ ὅσας
ἐνδέχεται, τὸ δικάζειν πάντας καὶ ἐκ πάντων, καὶ περὶ πάντων, ἢ
περὶ τῶν πλείστων καὶ τῶν μεγίστων καὶ τῶν κυριωτάτων, οἷον περὶ
εὐθυνῶν καὶ πολιτείας καὶ τῶν ἰδίων συναλλαγμάτων, τὸ τὴν
ἐκκλησίαν κυρίαν εἶναι πάντων ἢ τῶν μεγίστων, ἀρχὴν δὲ μηδεμίαν
μηθενὸς ἢ ὅτι ὀλιγίστων, ἢ τῶν μεγίστων βουλὴν κυρίαν τῶν δ'
ἀρχῶν δημοτικώτατον βουλή, ὅπου μὴ μισθοῦ εὐπορία πᾶσιν:
ἐνταῦθα γὰρ ἀφαιροῦνται καὶ ταύτης τῆς ἀρχῆς τὴν δύναμιν: εἰς
αὑτὸν γὰρ ἀνάγει τὰς κρίσεις πάσας ὁ δῆμος εὐπορῶν μισθοῦ,
καθάπερ εἴρηται πρότερον ἐν τῇ μεθόδῳ τῇ πρὸ ταύτησ, ἔπειτα
τὸ μισθοφορεῖν μάλιστα μὲν πάντας, ἐκκλησίαν δικαστήρια ἀρχάς, εἰ
δὲ μή, τὰς ἀρχὰς καὶ τὰ δικαστήρια καὶ βουλὴν καὶ τὰς ἐκκλησίας τὰς
κυρίας, ἢ τῶν ἀρχῶν ἃς ἀνάγκη συσσιτεῖν μετ' ἀλλήλων. ἔτι ἐπειδὴ
ὀλιγαρχία καὶ γένει καὶ πλούτῳ καὶ παιδείᾳ ὁρίζεται, τὰ
δημοτικὰ δοκεῖ τἀναντία τούτων εἶναι, ἀγένεια πενία βαναυσία: ἔτι
δὲ τῶν ἀρχῶν τὸ μηδεμίαν ἀίδιον εἶναι,
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Traduction française :
[6,1317b] car la liberté, dit-on, est le but constant de toute démocratie. Le
premier caractère de la liberté, c'est l'alternative du commandement et de
l'obéissance. Dans la démocratie, le droit politique est l'égalité, non pas d'après le
mérite, mais suivant le nombre. Cette base du droit une fois posée, il s'ensuit que
la foule doit être nécessairement souveraine, et que les décisions de la majorité
doivent être la loi dernière, la justice absolue; car on part de ce principe, que tous
les citoyens doivent être égaux. Aussi, dans la démocratie, les pauvres sont-ils
souverains à l'exclusion des riches, parce qu'ils sont les plus nombreux, et que
l'avis de la majorité fait loi. Voilà donc un des caractères distinctifs de la liberté ; et
les partisans de la démocratie ne manquent pas d'en faire une condition
indispensable de l'État.
§ 7. Son second caractère, c'est la faculté laissée à chacun de vivre comme il lui
plaît; c'est là, dit-on, le propre de la liberté, comme c'est le propre de l'esclavage de
n'avoir pas de libre arbitre. Tel est le second caractère de la liberté démocratique. Il
en résulte que, dans la démocratie, le citoyen n'est tenu d'obéir à qui que ce soit;
ou s'il obéit, c'est à la condition de commander à son tour; et voilà comment, dans
ce système, on ajoute encore à la liberté, qui vient de l'égalité.
§ 8. Le pouvoir, dans la démocratie, étant soumis à ces nécessités, voici les seules
combinaisons qu'il peut recevoir. Tous les citoyens doivent être électeurs et
éligibles. Tous doivent commander à chacun, et chacun à tous, alternativement.
Toutes les charges doivent y être données au sort, ou du moins toutes celles qui
n'exigent ni expérience ni talent spécial. Il ne doit y avoir aucune condition de
cens ; ou, s'il y en a, il doit être minime. Nul ne doit exercer deux fois la même
charge, ou du moins fort rarement, et seulement pour les moins importantes,
excepté toutefois les fonctions militaires. Les emplois doivent être de courte durée,
sinon tous, du moins tous ceux qui peuvent être soumis à cette condition. Tous les
citoyens doivent être juges dans toutes les affaires, ou du moins dans presque
toutes, dans les plus intéressantes, les plus graves, telles que les comptes de l'État
et les objets purement politiques, et enfin dans les conventions particulières.
L'assemblée générale doit être souveraine sur toutes les matières, ou du moins sur
les principales, et l'on doit ôter tout pouvoir aux magistratures secondaires, ou ne
leur en laisser que sur des objets insignifiants.
§ 9. Un sénat est une institution très démocratique, là où l'universalité des citoyens
ne peut recevoir du trésor public une indemnité de présence aux assemblées ; mais
là ou le salaire existe, le pouvoir du sénat est bientôt annulé. Le peuple, riche de
son salaire légal, évoque bientôt tout à lui, comme je l'ai dit dans la partie de ce
traité qui précède immédiatement celle-ci. Mais il faut avant tout faire en sorte que
tous les emplois soient rétribués : assemblée générale, tribunaux, magistratures
inférieures; ou du moins, il faut rétribuer ceux des magistrats, des juges, des
sénateurs, des membres de l'assemblée et des fonctionnaires, qui sont tenus de
prendre leurs repas en commun. Si les caractères de l'oligarchie sont la naissance,
la richesse, l'instruction, ceux de la démocratie seront la roture, la pauvreté,
l'exercice d'un métier.
§ 10. Il faut bien se garder de créer aucune fonction à vie ;
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