Texte grec :
[2,1267a] οἱ δὲ χαρίεντες περὶ τῶν τιμῶν, ἐὰν ἴσαι· ὅθεν καὶ
Ἐν δὲ ἰῇ τιμῇ ἠμὲν κακὸς ἠδὲ καὶ ἐσθλός.
Οὐ μόνον δ' οἱ ἄνθρωποι διὰ τἀναγκαῖα ἀδικοῦσιν, ὧν ἄκος εἶναι
νομίζει τὴν ἰσότητα τῆς οὐσίας, ὥστε μὴ λωποδυτεῖν διὰ τὸ ῥιγοῦν ἢ
πεινῆν, ἀλλὰ καὶ ὅπως χαίρωσι καὶ μὴ ἐπιθυμῶσιν· ἐὰν γὰρ μείζω
ἔχωσιν ἐπιθυμίαν τῶν ἀναγκαίων, διὰ τὴν ταύτης ἰατρείαν ἀδικήσουσιν·
οὐ τοίνυν διὰ ταύτην μόνον, ἀλλὰ καὶ ἂν ἐπιθυμοῖεν ἵνα χαίρωσι ταῖς
ἄνευ λυπῶν ἡδοναῖς.
§ 8. Τί οὖν ἄκος τῶν τριῶν τούτων; Τοῖς μὲν οὐσία βραχεῖα καὶ ἐργασία,
τοῖς δὲ σωφροσύνη· τρίτον δ', εἴ τινες βούλοιντο δι' αὑτῶν χαίρειν, οὐκ
ἂν ἐπιζητοῖεν εἰ μὴ παρὰ φιλοσοφίας ἄκος. Αἱ γὰρ ἄλλαι ἀνθρώπων
δέονται· ἐπεὶ ἀδικουσί γε τὰ μέγιστα διὰ τὰς ὑπερβολάς, ἀλλ' οὐ διὰ τὰ
ἀναγκαῖα αοἷον τυραννοῦσιν οὐχ ἵνα μὴ ῥιγῶσιν· διὸ καὶ αἱ τιμαὶ
μεγάλαι, ἂν ἀποκτείνῃ τις οὐ κλέπτην ἀλλὰ τύραννονν· ὥστε πρὸς τὰς
μικρὰς ἀδικίας βοηθητικὸς μόνον ὁ τρόπος τῆς Φαλέου πολιτείας.
§ 9. Ἔτι τὰ πολλὰ βούλεται κατασκευάζειν ἐξ ὧν τὰ πρὸς αὑτοὺς
πολιτεύσονται καλῶς, δεῖ δὲ καὶ πρὸς τοὺς γειτνιῶντας καὶ τοὺς ἔξωθεν
πάντας. Ἀναγκαῖον ἄρα τὴν πολιτείαν συντετάχθαι πρὸς τὴν πολεμικὴν
ἰσχύν, περὶ ἧς ἐκεῖνος οὐδὲν εἴρηκεν. Ὁμοίως δὲ καὶ περὶ τῆς κτήσεως.
Δεῖ γὰρ οὐ μόνον πρὸς τὰς πολιτικὰς χρήσεις ἱκανὴν ὑπάρχειν, ἀλλὰ
καὶ πρὸς τοὺς ἔξωθεν κινδύνους· διόπερ οὔτε τοσοῦτον δεῖ πλῆθος
ὑπάρχειν ὅσου οἱ πλησίον καὶ κρείττους ἐπιθυμήσουσιν, οἱ δὲ ἔχοντες
ἀμύνειν οὐ δυνήσονται τοὺς ἐπιόντας, οὔθ' οὕτως ὀλίγην ὥστε μὴ
δύνασθαι πόλεμον ὑπενεγκεῖν μηδὲ τῶν ἴσων καὶ τῶν ὁμοίων.
§ 10. Ἐκεῖνος μὲν οὖν οὐδὲν διώρικεν, δεῖ δὲ τοῦτο μὴ λανθάνειν, ὅ τι
συμφέρει πλῆθος οὐσίας. Ἴσως οὖν ἄριστος ὅρος τὸ μὴ λυσιτελεῖν τοῖς
κρείττοσι διὰ τὴν ὑπερβολὴν πολεμεῖν, ἀλλ' οὕτως ὡς ἂν καὶ μὴ
ἐχόντων τοσαύτην οὐσίαν. Οἷον Εὔβουλος Αὐτοφραδάτου μέλλοντος
Ἀταρνέα πολιορκεῖν ἐκέλευσεν αὐτόν, σκεψάμενον ἐν πόσῳ χρόνῳ
λήψεται τὸ χωρίον, λογίσασθαι τοῦ χρόνου τούτου τὴν δαπάνην·
ἐθέλειν γὰρ ἔλαττον τούτου λαβὼν ἐκλιπεῖν ἤδη τὸν Ἀταρνέα· ταῦτα δ'
εἰπὼν ἐποίησε τὸν Αὐτοφραδάτην σύννουν γενόμενον παύσασθαι τῆς
πολιορκίας.
§ 11. Ἔστι μὲν οὖν τι τῶν συμφερόντων τὸ τὰς οὐσίας ἴσας εἶναι τοῖς
πολίταις πρὸς τὸ μὴ στασιάζειν πρὸς ἀλλήλους, οὐ μὴν μέγα οὐδὲν ὡς
εἰπεῖν. Καὶ γὰρ ἂν οἱ χαρίεντες ἀγανακτοῖεν ὡς οὐκ ἴσων ὄντες ἄξιοι, διὸ
καὶ φαίνονται πολλάκις ἐπιτιθέμενοι καὶ στασιάζοντες·
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Traduction française :
[2,1267a] et les hommes supérieurs s'indignent de l'égale répartition des honneurs ;
c'est le mot du poète : "Quoi ! le lâche et le brave être égaux en estime"!
C'est que les hommes sont poussés au crime non pas seulement par le besoin du
nécessaire, que Phaléas compte apaiser avec l'égalité des biens, excellent moyen,
selon lui, d'empêcher qu'un homme n'en détrousse un autre pour ne pas mourir de
froid ou de faim ; ils y sont poussés encore par le besoin d'éteindre leurs désirs dans
la jouissance. Si ces désirs sont désordonnés, les hommes auront recours au crime
pour guérir le mal qui les tourmente ; j'ajoute même qu'ils s'y livreront non seulement
par cette raison, mais aussi par le simple motif, si leur caprice les y porte, de n'être
point troublés dans leurs plaisirs.
§ 8. A ces trois maux, quel sera le remède ? D'abord la propriété, quelque
mince qu'elle soit, et l'habitude du travail, puis la tempérance ; et enfin, pour
celui qui veut trouver le bonheur en lui-même, le remède ne sera point à
chercher ailleurs que dans la philosophie ; car les plaisirs autres que les siens
ne peuvent se passer de l'intermédiaire des hommes. C'est le superflu et non
le besoin qui fait commettre les grands crimes. On n'usurpe pas la tyrannie
pour se garantir de l'intempérie de l'air; et par le même motif, les grandes
distinctions sont réservées non pas au meurtrier d'un voleur, mais au
meurtrier d'un tyran. Ainsi l'expédient politique proposé par Phaléas n'offre
de garantie que contre les crimes de peu d'importance.
§ 9. D'autre part, les institutions de Phaléas ne concernent guère que l'ordre et
le bonheur intérieurs de l'État ; il fallait donner aussi un système de relations
avec les peuples voisins et les étrangers. L'État a donc nécessairement besoin
d'une organisation militaire, et Phaléas n'en dit mot. Il a commis un oubli
analogue à l'égard des finances publiques : elles doivent suffire non pas
seulement à satisfaire les besoins intérieurs, mais de plus à écarter les dangers
du dehors. Ainsi, il ne faudrait pas que leur abondance tentât la cupidité de
voisins plus puissants que les possesseurs, trop faibles pour repousser une
attaque, ni que leur exiguïté empêchât de soutenir la guerre même contre un
ennemi égal en force et en nombre.
§ 10. Phaléas a passé ce sujet sous silence ; mais il faut bien se persuader que
l'étendue des ressources est en politique un point important. La véritable
limite, c'est peut-être que le vainqueur ne trouve jamais un dédommagement
de la guerre dans la richesse de sa conquête, et qu'elle ne puisse rendre même
à des ennemis plus pauvres ce qu'elle leur a coûté. Lorsqu'Autophradate vint
mettre le siège devant Atarnée, Eubule lui conseilla de calculer le temps et
l'argent qu'il allait dépenser à la conquête du pays, promettant d'évacuer
Atarnée sur-le-champ pour une indemnité bien moins considérable. Cet
avertissement fit réfléchir Autophradate, qui leva bientôt le siège.
§ 11. L'égalité de fortune entre les citoyens sert bien certainement, je l'avoue, à
prévenir les dissensions civiles. Mais, à vrai dire, le moyen n'est pas infaillible
les hommes supérieurs s'irriteront de n'avoir que la portion commune, et ce
sera souvent une cause de trouble et de révolution.
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