Texte grec :
[2,1261a] Ἀλλὰ πότερον ὅσων ἐνδέχεται κοινωνῆσαι, πάντων βέλτιον
κοινωνεῖν τὴν μέλλουσαν οἰκήσεσθαι πόλιν καλῶς, ἢ τινῶν μὲν τινῶν δ' οὒ
βέλτιον; Ἐνδέχεται γὰρ καὶ τέκνων καὶ γυναικῶν καὶ κτημάτων κοινωνεῖν
τοὺς πολίτας ἀλλήλοις, ὥσπερ ἐν τῇ Πολιτείᾳ τῇ Πλάτωνος. Ἐκεῖ γὰρ ὁ
Σωκράτης φησὶ δεῖν κοινὰ τὰ τέκνα καὶ τὰς γυναῖκας εἶναι καὶ τὰς κτήσεις.
Τοῦτο δὴ πότερον ὡς νῦν οὕτω βέλτιον ἔχειν, ἢ κατὰ τὸν ἐν τῇ Πολιτείᾳ
γεγραμμένον νόμον;
§ 3. Ἔχει δὴ δυσχερείας ἄλλας τε πολλὰς τὸ πάντων εἶναι τὰς γυναῖκας
κοινάς, καὶ δι' ἣν αἰτίαν φησὶ δεῖν νενομοθετῆσθαι τὸν τρόπον τοῦτον ὁ
Σωκράτης, οὐ φαίνεται συμβαῖνον ἐκ τῶν λόγων. Ἔτι δὲ πρός, τὸ τέλος
ὅ φησι τῇ πόλει δεῖν ὑπάρχειν, ὡς μὲν εἴρηται νῦν, ἀδύνατον, πῶς δὲ
δεῖ διελεῖν, οὐδὲν διώρισται. Λέγω δὲ τὸ μίαν εἶναι τὴν πόλιν ὡς ἄριστον
ὂν ὅτι μάλιστα πᾶσαν· λαμβάνει γὰρ ταύτην ὑπόθεσιν ὁ Σωκράτης.
§ 4. Καίτοι φανερόν ἐστιν ὡς προϊοῦσα καὶ γινομένη μία μᾶλλον οὐδὲ
πόλις ἔσται· πλῆθος γάρ τι τὴν φύσιν ἐστὶν ἡ πόλις, γινομένη τε μία
μᾶλλον οἰκία μὲν ἐκ πόλεως ἄνθρωπος δ' ἐξ οἰκίας ἔσται· μᾶλλον γὰρ
μίαν τὴν οἰκίαν τῆς πόλεως φαίημεν ἄν, καὶ τὸν ἕνα τῆς οἰκίας· ὥστ' εἰ
καὶ δυνατός τις εἴη τοῦτο δρᾶν, οὐ ποιητέον· ἀναιρήσει γὰρ τὴν πόλιν.
Οὐ μόνον δ' ἐκ πλειόνων ἀνθρώπων ἐστὶν ἡ πόλις, ἀλλὰ καὶ ἐξ εἴδει
διαφερόντων. Οὐ γὰρ γίνεται πόλις ἐξ ὁμοίων. Ἕτερον γὰρ συμμαχία
καὶ πόλις· τὸ μὲν γὰρ τῷ ποσῷ χρήσιμον, κἂν ᾖ τὸ αὐτὸ τῷ εἴδει
ιβοηθείας γὰρ χάριν ἡ συμμαχία πέφυκενν, ὥσπερ ἂν εἰ σταθμὸς
πλεῖον ἑλκύσειε.
§ 5. Ἐξ ὧν δὲ δεῖ ἓν γενέσθαι εἴδει διαφέρειν (διοίσει δὲ τῷ τοιούτῳ καὶ
πόλις ἔθνους, ὅταν μὴ κατὰ κώμας ὦσι κεχωρισμένοι τὸ πλῆθος, ἀλλ'
οἷον Ἀρκάδες). Διόπερ τὸ ἴσον τὸ ἀντιπεπονθὸς σῴζει τὰς πόλεις,
ὥσπερ ἐν τοῖς Ἠθικοῖς εἴρηται πρότερον· ἐπεὶ καὶ ἐν τοῖς ἐλευθέροις καὶ
ἴσοις ἀνάγκη τοῦτ' εἶναι· ἅμα γὰρ οὐχ οἷόν τε πάντας ἄρχειν, ἀλλ' ἢ κατ'
ἐνιαυτὸν ἢ κατά τινα ἄλλην τάξιν ἢ χρόνου. Καὶ συμβαίνει δὴ τὸν
τρόπον τοῦτον ὥστε πάντας ἄρχειν, ὥσπερ ἂν εἰ μετέβαλλον οἱ σκυτεῖς
καὶ οἱ τέκτονες καὶ μὴ ἀεὶ οἱ αὐτοὶ σκυτοτόμοι καὶ τέκτονες ἦσαν.
§ 6. Ἐπεὶ δὲ βέλτιον οὕτως ἔχει καὶ τὰ περὶ τὴν κοινωνίαν τὴν πολιτικήν,
δῆλον ὡς τοὺς αὐτοὺς ἀεὶ βέλτιον ἄρχειν, εἰ δυνατόν, ἐν οἷς δὲ μὴ
δυνατὸν διὰ τὸ τὴν φύσιν ἴσους εἶναι πάντας,
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Traduction française :
[2,1261a] Je demande si, pour les choses où la communauté est facultative, il est
bon qu'elle s'étende, dans l'État bien organisé que nous cherchons, à tous les
objets, sans exception, ou qu'elle soit restreinte à quelques-uns ?
Ainsi, la communauté peut s'étendre aux enfants,
aux femmes, aux biens, comme Platon le propose dans sa République ; car
Socrate y soutient que les enfants, les femmes et les biens doivent être
communs à tous les citoyens. Je le demande donc : L'état actuel des choses
est-il préférable ? Ou faut-il adopter cette loi de la République de Platon ?
§ 3. La communauté des femmes présente de bien autres embarras que
l'auteur ne semble le croire ; et les motifs allégués par Socrate pour la
légitimer paraissent une conséquence fort peu rigoureuse de sa discussion.
Bien plus, elle est incompatible avec le but même que Platon assigne à tout
État, du moins sous la forme où il la présente ; et quant aux moyens de
résoudre cette contradiction, il s'est abstenu d'en rien dire. Je veux parler de
cette unité parfaite de la cité entière, qui est pour elle le premier des biens ;
car c'est là l'hypothèse de Socrate.
§ 4. Mais pourtant il est bien évident qu'avec cette unité poussée un peu loin,
la cité disparaît tout entière. Naturellement, la cité est fort multiple ; mais si
elle prétend à l'unité, de cité elle devient famille ; de famille, individu ; car la
famille a bien plus d'unité que la cité, et l'individu bien plus encore que la
famille. Ainsi, fût-il possible de réaliser ce système, il faudrait s'en garder,
sous peine d'anéantir la cité.
Mais la cité ne se compose pas seulement d'individus en certain nombre ; elle
se compose encore d'individus spécifiquement différents ; les éléments qui la
forment ne sont point semblables. Elle n'est pas comme une alliance militaire,
qui vaut toujours par le nombre de ses membres, réunis pour se prêter un
mutuel appui, l'espèce des associés fût-elle d'ailleurs parfaitement identique ;
une alliance est comme la balance, où l'emporte toujours le plateau le plus chargé.
§ 5. C'est par ce caractère qu'une simple ville est au-dessus d'une nation
entière, si l'on suppose que les individus qui forment cette nation, quelque
nombreux qu'ils soient, ne sont pas même réunis en bourgades, mais qu'ils
sont tous isolés à la manière des Arcadiens. L'unité ne peut résulter que
d'éléments d'espèce diverse; aussi la réciprocité dans l'égalité est-elle, comme
je l'ai déjà dit dans la Morale, le salut des États ; elle est le rapport nécessaire
d'individus libres et égaux entre eux ; car si tous les citoyens ne peuvent être
au pouvoir à la fois, ils doivent du moins tous y passer, soit d'année en année,
soit dans toute autre période, ou suivant tout autre système, pourvu que tous,
sans exception, y arrivent. C'est ainsi que des ouvriers en cuir ou en bois
pourraient échanger leurs occupations entre eux, pour que de cette façon les
mêmes travaux ne fussent plus faits constamment par les mêmes mains.
§ 6. Toutefois, la fixité actuelle de ces professions est certainement préférable,
et dans l'association politique, la perpétuité du pouvoir ne le serait pas moins,
si elle était possible ; mais là où elle est incompatible avec l'égalité naturelle
de tous les citoyens,
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