Texte grec :
[1,1253a] (1253a) § 5. Φύσει μὲν οὖν διώρισται τὸ θῆλυ καὶ τὸ δοῦλον (οὐθὲν
γὰρ ἡ φύσις ποιεῖ τοιοῦτον οἷον οἱ χαλκοτύποι τὴν Δελφικὴν
μάχαιραν, πενιχρῶς, ἀλλ' ἓν πρὸς ἕν· οὕτω γὰρ ἂν ἀποτελοῖτο
κάλλιστα τῶν ὀργάνων ἕκαστον, μὴ πολλοῖς ἔργοις ἀλλ' ἑνὶ
δουλεῦον)· ἐν δὲ τοῖς βαρβάροις τὸ θῆλυ καὶ τὸ δοῦλον τὴν αὐτὴν
ἔχει τάξιν. Αἴτιον δ' ὅτι τὸ φύσει ἄρχον οὐκ ἔχουσιν, ἀλλὰ γίνεται ἡ
κοινωνία αὐτῶν δούλης καὶ δούλου. Διό φασιν οἱ ποιηταὶ
βαρβάρων δ' Ἕλληνας ἄρχειν εἰκός,
ὡς ταὐτὸ φύσει βάρβαρον καὶ δοῦλον ὄν.
§ 6. Ἐκ μὲν οὖν τούτων τῶν δύο κοινωνιῶν οἰκία πρώτη, καὶ ὀρθῶς
Ἡσίοδος εἶπε ποιήσας
οἶκον μὲν πρώτιστα γυναῖκά τε βοῦν τ' ἀροτῆρα
Ωδ ὁ γὰρ βοῦς ἀντ' οἰκέτου τοῖς πένησίν ἐστιν. Ἡ μὲν οὖν εἰς πᾶσαν
ἡμέραν συνεστηκυῖα κοινωνία κατὰ φύσιν οἶκός ἐστιν, οὓς
Χαρώνδας μὲν καλεῖ ὁμοσιπύους, Ἐπιμενίδης δὲ ὁ Κρὴς ὁμοκάπους.
§ 7. Ἡ δ' ἐκ πλειόνων οἰκιῶν κοινωνία πρώτη χρήσεως ἕνεκεν μὴ
ἐφημέρου κώμη. Μάλιστα δὲ κατὰ φύσιν ἔοικεν ἡ κώμη ἀποικία
οἰκίας εἶναι, οὓς καλοῦσί τινες ὁμογάλακτας, παῖδάς τε καὶ παίδων
παῖδας. Διὸ καὶ τὸ πρῶτον ἐβασιλεύοντο αἱ πόλεις, καὶ νῦν ἔτι τὰ
ἔθνη· ἐκ βασιλευομένων γὰρ συνῆλθον· πᾶσα γὰρ οἰκία
βασιλεύεται ὑπὸ τοῦ πρεσβυτάτου, ὥστε καὶ αἱ ἀποικίαι, διὰ τὴν
συγγένειαν. Καὶ τοῦτ' ἐστὶν ὃ λέγει Ὅμηρος
Θεμιστεύει δὲ ἕκαστος
παίδων ἠδ' ἀλόχων.
Σποράδες γάρ· καὶ οὕτω τὸ ἀρχαῖον ᾤκουν. Καὶ τοὺς θεοὺς δὲ διὰ
τοῦτο πάντες φασὶ βασιλεύεσθαι, ὅτι καὶ αὐτοὶ οἱ μὲν ἔτι καὶ νῦν οἱ
δὲ τὸ ἀρχαῖον ἐβασιλεύοντο, ὥσπερ δὲ καὶ τὰ εἴδη ἑαυτοῖς
ἀφομοιοῦσιν οἱ ἄνθρωποι, οὕτω καὶ τοὺς βίους τῶν θεῶν.
§ 8. Ἡ δ' ἐκ πλειόνων κωμῶν κοινωνία τέλειος πόλις, ἤδη πάσης
ἔχουσα πέρας τῆς αὐταρκείας ὡς ἔπος εἰπεῖν, γινομένη μὲν τοῦ ζῆν
ἕνεκεν, οὖσα δὲ τοῦ εὖ ζῆν. Διὸ πᾶσα πόλις φύσει ἔστιν, εἴπερ καὶ αἱ
πρῶται κοινωνίαι. Τέλος γὰρ αὕτη ἐκείνων, ἡ δὲ φύσις τέλος ἐστίν·
οἷον γὰρ ἕκαστόν ἐστι τῆς γενέσεως τελεσθείσης, ταύτην φαμὲν
τὴν φύσιν εἶναι ἑκάστου, ὥσπερ ἀνθρώπου ἵππου οἰκίας. Ἔτι τὸ οὗ
ἕνεκα καὶ τὸ τέλος βέλτιστον·
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Traduction française :
[1,1253a] § 5. La nature a donc déterminé la condition spéciale de la femme et de l'esclave.
C'est que la nature n'est pas mesquine comme nos ouvriers. Elle ne fait rien qui
ressemble à leurs couteaux de Delphes. Chez elle, un être n'a qu'une destination,
parce que les instruments sont d'autant plus parfaits, qu'ils servent non à
plusieurs usages, mais à un seul. Chez les Barbares, la femme et l'esclave sont des
êtres de même ordre. La raison en est simple : la nature, parmi eux, n'a point fait
d'être pour commander. Entre eux, il n'y a réellement union que d'un esclave et
d'une esclave; et les poètes ne se trompent pas en disant :
"Oui, le Grec au Barbare a droit de commander,
puisque la nature a voulu que Barbare et esclave ce fût tout un".
§ 6. Ces deux premières associations, du maître et de l'esclave, de l'époux et de la
femme, sont les bases de la famille; et Hésiode l'a fort bien dit dans ce vers :
"La maison, puis la femme, et le boeuf laboureur",
car le pauvre n'a pas d'autre esclave que le boeuf. Ainsi donc l'association
naturelle de tous les instants, c'est la famille ; Charondas a pu dire, en parlant de
ses membres, « qu'ils mangeaient à la même table » ; et Epiménide de Crète,
«qu'ils se chauffaient au même foyer ».
§ 7. L'association première de plusieurs familles, mais formée en vue de rapports
qui ne sont plus quotidiens, c'est le village, qu'on pourrait bien justement nommer
une colonie naturelle de la famille ; car les individus qui composent le village ont,
comme s'expriment d'autres auteurs, « sucé le lait de la famille » ; ce sont ses
enfants et « les enfants de ses enfants ». Si les premiers États ont été soumis à des
rois, et si les grandes nations le sont encore aujourd'hui, c'est que ces États
s'étaient formés d'éléments habitués à l'autorité royale, puisque dans la famille le
plus âgé est un véritable roi ; et les colonies de la famille ont filialement suivi
l'exemple qui leur était donné. Homère a donc pu dire :
"Chacun à part gouverne en maître
Ses femmes et ses fils."
Dans l'origine, en effet, toutes les familles isolées se gouvernaient ainsi. De là
encore cette opinion commune qui soumet les dieux à un roi ; car tous les peuples
ont eux-mêmes jadis reconnu ou reconnaissent encore l'autorité royale, et les
hommes n'ont jamais manqué de donner leurs habitudes aux dieux, de même
qu'ils les représentent à leur image.
§ 8. L'association de plusieurs villages forme un État complet, arrivé, l'on peut
dire, à ce point de se suffire absolument à lui-même, né d'abord des besoins de la
vie, et subsistant parce qu'il les satisfait tous. Ainsi l'État vient toujours de la
nature, aussi bien que les premières associations, dont il est la fin dernière ; car la
nature de chaque chose est précisément sa fin ; et ce qu'est chacun des êtres quand
il est parvenu à son entier développement, on dit que c'est là sa nature propre,
qu'il s'agisse d'un homme, d'un cheval, ou d'une famille. On peut ajouter que cette
destination et cette fin des êtres est pour eux le premier des biens ;
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