Texte grec :
[1,1252b] LIVRE I.
(1252b) §1. Ἐπειδὴ πᾶσαν πόλιν ὁρῶμεν κοινωνίαν τινὰ οὖσαν καὶ
πᾶσαν κοινωνίαν ἀγαθοῦ τινος ἕνεκεν συνεστηκυῖαν (τοῦ γὰρ
εἶναι δοκοῦντος ἀγαθοῦ χάριν πάντα πράττουσι πάντες), δῆλον ὡς
πᾶσαι μὲν ἀγαθοῦ τινος στοχάζονται, μάλιστα δὲ καὶ τοῦ
κυριωτάτου πάντων ἡ πασῶν κυριωτάτη καὶ πάσας περιέχουσα τὰς
ἄλλας. Αὕτη δ' ἐστὶν ἡ καλουμένη πόλις καὶ ἡ κοινωνία ἡ πολιτική.
§2. Ὅσοι μὲν οὖν οἴονται πολιτικὸν καὶ βασιλικὸν καὶ οἰκονομικὸν
καὶ δεσποτικὸν εἶναι τὸν αὐτὸν οὐ καλῶς λέγουσιν (πλήθει γὰρ καὶ
ὀλιγότητι νομίζουσι διαφέρειν ἀλλ' οὐκ εἴδει τούτων ἕκαστον, οἷον
ἂν μὲν ὀλίγων, δεσπότην, ἂν δὲ πλειόνων, οἰκονόμον, ἂν δ' ἔτι
πλειόνων, πολιτικὸν ἢ βασιλικόν, ὡς οὐδὲν διαφέρουσαν μεγάλην
οἰκίαν ἢ μικρὰν πόλιν· καὶ πολιτικὸν δὲ καὶ βασιλικόν, ὅταν μὲν
αὐτὸς ἐφεστήκῃ, βασιλικόν, ὅταν δὲ κατὰ τοὺς λόγους τῆς
ἐπιστήμης τῆς τοιαύτης κατὰ μέρος ἄρχων καὶ ἀρχόμενος, πολιτικόν·
§3. ταῦτα δ' οὐκ ἔστιν ἀληθῆ)· δῆλον δ' ἔσται τὸ λεγόμενον
ἐπισκοποῦσι κατὰ τὴν ὑφηγημένην μέθοδον. Ὥσπερ γὰρ ἐν τοῖς
ἄλλοις τὸ σύνθετον μέχρι τῶν ἀσυνθέτων ἀνάγκη διαιρεῖν (ταῦτα
γὰρ ἐλάχιστα μόρια τοῦ παντός), οὕτω καὶ πόλιν ἐξ ὧν σύγκειται
σκοποῦντες ὀψόμεθα καὶ περὶ τούτων μᾶλλον, τί τε διαφέρουσιν
ἀλλήλων καὶ εἴ τι τεχνικὸν ἐνδέχεται λαβεῖν περὶ ἕκαστον τῶν
ῥηθέντων. Εἰ δή τις ἐξ ἀρχῆς τὰ πράγματα φυόμενα βλέψειεν,
ὥσπερ ἐν τοῖς ἄλλοις, καὶ ἐν τούτοις κάλλιστ' ἂν οὕτω θεωρήσειεν.
§4. Ἀνάγκη δὴ πρῶτον συνδυάζεσθαι τοὺς ἄνευ ἀλλήλων μὴ
δυναμένους εἶναι, οἷον θῆλυ μὲν καὶ ἄρρεν τῆς γενέσεως ἕνεκεν
(καὶ τοῦτο οὐκ ἐκ προαιρέσεως, ἀλλ' ὥσπερ καὶ ἐν τοῖς ἄλλοις ζῴοις
καὶ φυτοῖς φυσικὸν τὸ ἐφίεσθαι, οἷον αὐτό, τοιοῦτον καταλιπεῖν
ἕτερον), ἄρχον δὲ καὶ ἀρχόμενον φύσει, διὰ τὴν σωτηρίαν. Τὸ μὲν
γὰρ δυνάμενον τῇ διανοίᾳ προορᾶν ἄρχον φύσει καὶ δεσπόζον
φύσει, τὸ δὲ δυνάμενον τῷ σώματι ταῦτα πονεῖν ἀρχόμενον καὶ
φύσει δοῦλον· διὸ δεσπότῃ καὶ δούλῳ ταὐτὸ συμφέρει.
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Traduction française :
[1,1252b] LIVRE I.
CHAPITRE PREMIER.
§ 1. Tout État est évidemment une association ; et toute association ne se forme
qu'en vue de quelque bien, puisque les hommes, quels qu'ils soient, ne font jamais
rien qu'en vue de ce qui leur paraît être bon. Évidemment toutes les associations
visent à un bien d'une certaine espèce, et le plus important de tous les biens doit
être l'objet de la plus importante des associations, de celle qui renferme toutes les
autres ; et celle-là, on la nomme précisément État et association politique.
§ 2. Des auteurs n'ont donc pas raison d'avancer que les caractères de roi, de
magistrat, de père de famille, et de maître, se confondent. C'est supposer qu'entre
chacun d'eux toute la différence est du plus au moins, sans être spécifique ;
qu'ainsi un petit nombre d'administrés constitueraient le maître ; un nombre plus
grand, le père de famille ; un plus grand encore, le magistrat ou le roi ; c'est
supposer qu'une grande famille est absolument un petit État. Ces auteurs ajoutent,
en ce qui concerne le magistrat et le roi, que le pouvoir de l'un est personnel et
indépendant ; et que l'autre, pour me servir des définitions mêmes de leur
prétendue science, est en partie chef et en partie sujet.
§ 3. Toute cette théorie est fausse ; il suffira, pour s'en convaincre, d'adopter dans
cette étude notre méthode habituelle. Ici, comme partout ailleurs, il convient de
réduire le composé à ses éléments indécomposables, c'est-à-dire, aux parties les
plus petites de l'ensemble. En cherchant ainsi quels sont les éléments constitutifs
de l'État, nous reconnaîtrons mieux en quoi diffèrent ces éléments ; et nous
verrons si l'on peut établir quelques principes scientifiques dans les questions
dont nous venons de parler. Ici, comme partout ailleurs, remonter à l'origine des
choses et en suivre avec soin le développement, est la voie la plus sûre pour bien
observer.
§ 4. D'abord, il y a nécessité dans le rapprochement de deux êtres qui ne peuvent
rien l'un sans l'autre : je veux parler de l'union des sexes pour la reproduction. Et
là rien d'arbitraire ; car chez l'homme, aussi bien que chez les autres animaux et
dans les plantes, c'est un désir naturel que de vouloir laisser après soi un être fait à
son image. C'est la nature qui, par des vues de conservation, a créé certains êtres
pour commander, et d'autres pour obéir. C'est elle qui a voulu que l'être doué de
raison et de prévoyance commandât en maître ; de même encore que la nature a
voulu que l'être capable par ses facultés corporelles d'exécuter des ordres, obéît en
esclave; et c'est par là que l'intérêt du maître et celui de l'esclave s'identifient.
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