Texte grec :
[8,10] CHAPITRE X.
§ 1. Οὐ μὴν ἀλλὰ καὶ ἄλλην ποιησαμένοις ἀρχὴν μᾶλλον ἔσται περὶ τούτων φανερόν. Σκεπτέον γὰρ πότερον ἐνδέχεταί τινα κίνησιν εἶναι συνεχῆ ἢ οὔ, καὶ εἰ ἐνδέχεται, τίς αὕτη, καὶ τίς πρώτη τῶν κινήσεων· δῆλον γὰρ ὡς εἴπερ ἀναγκαῖον μὲν ἀεὶ κίνησιν εἶναι, πρώτη δὲ ἥδε καὶ συνεχής, ὅτι τὸ πρῶτον κινοῦν κινεῖ ταύτην τὴν κίνησιν, ἣν ἀναγκαῖον μίαν καὶ τὴν αὐτὴν εἶναι καὶ συνεχῆ καὶ πρώτην.
§ 2. Τριῶν δ' οὐσῶν κινήσεων, τῆς τε κατὰ μέγεθος καὶ τῆς κατὰ πάθος καὶ τῆς κατὰ τόπον, ἣν καλοῦμεν φοράν, ταύτην ἀναγκαῖον εἶναι πρώτην. Ἀδύνατον γὰρ αὔξησιν εἶναι ἀλλοιώσεως μὴ προϋπαρχούσης· τὸ γὰρ αὐξανόμενον ἔστιν μὲν ὡς ὁμοίῳ αὐξάνεται, ἔστιν δ' ὡς ἀνομοίῳ· τροφὴ γὰρ λέγεται τῷ ἐναντίῳ τὸ ἐναντίον. Προσγίγνεται δὲ πᾶν γιγνόμενον ὅμοιον ὁμοίῳ. Ἀνάγκη οὖν ἀλλοίωσιν εἶναι τὴν εἰς τἀναντία μεταβολήν. Ἀλλὰ μὴν εἴ γε ἀλλοιοῦται, δεῖ τι εἶναι τὸ ἀλλοιοῦν καὶ ποιοῦν ἐκ τοῦ δυνάμει θερμοῦ ἐνεργείᾳ θερμόν. Δῆλον οὖν ὅτι τὸ κινοῦν οὐχ ὁμοίως ἔχει, ἀλλ' ὁτὲ μὲν ἐγγύτερον ὁτὲ δὲ πορρώτερον τοῦ ἀλλοιουμένου ἐστίν. Ταῦτα δ' ἄνευ φορᾶς οὐκ ἐνδέχεται ὑπάρχειν. Εἰ ἄρα ἀνάγκη ἀεὶ κίνησιν εἶναι, ἀνάγκη καὶ φορὰν ἀεὶ εἶναι πρώτην τῶν κινήσεων, καὶ φορᾶς, εἰ ἔστιν ἡ μὲν πρώτη ἡ δ' ὑστέρα, τὴν πρώτην.
§ 3. Ἔτι δὲ πάντων τῶν παθημάτων ἀρχὴ πύκνωσις καὶ μάνωσις· καὶ γὰρ βαρὺ καὶ κοῦφον καὶ μαλακὸν καὶ σκληρὸν καὶ θερμὸν καὶ ψυχρὸν πυκνότητες δοκοῦσιν καὶ ἀραιότητες εἶναί τινες. Πύκνωσις δὲ καὶ μάνωσις σύγκρισις καὶ διάκρισις, καθ' ἃς γένεσις καὶ φθορὰ λέγεται τῶν οὐσιῶν. Συγκρινόμενα δὲ καὶ διακρινόμενα ἀνάγκη κατὰ τόπον μεταβάλλειν. Ἀλλὰ μὴν καὶ τοῦ αὐξανομένου καὶ φθίνοντος μεταβάλλει κατὰ τόπον τὸ μέγεθος.
§ 4. Ἔτι καὶ ἐντεῦθεν ἐπισκοποῦσιν ἔσται φανερὸν ὅτι ἡ φορὰ πρώτη. Τὸ γὰρ πρῶτον, ὥσπερ ἐφ' ἑτέρων, οὕτω καὶ ἐπὶ κινήσεως ἂν λέγοιτο πλεοναχῶς. Λέγεται δὲ πρότερον οὗ τε μὴ ὄντος οὐκ ἔσται τἆλλα, ἐκεῖνο δὲ ἄνευ τῶν ἄλλων, καὶ τὸ τῷ χρόνῳ, καὶ τὸ κατ' οὐσίαν.
§ 5. Ὥστ' ἐπεὶ κίνησιν μὲν ἀναγκαῖον εἶναι συνεχῶς, εἴη δ' ἂν συνεχῶς ἢ συνεχὴς οὖσα ἢ ἐφεξῆς, μᾶλλον δ' ἡ συνεχής, καὶ βέλτιον συνεχῆ ἢ ἐφεξῆς εἶναι, τὸ δὲ βέλτιον ἀεὶ ὑπολαμβάνομεν ἐν τῇ φύσει ὑπάρχειν, ἂν ᾖ δυνατόν, δυνατὸν δὲ συνεχῆ εἶναι (δειχθήσεται δ' ὕστερον· νῦν δὲ τοῦτο ὑποκείσθω), καὶ ταύτην οὐδεμίαν ἄλλην οἷόν τε εἶναι ἀλλ' ἢ φοράν, ἀνάγκη τὴν φορὰν εἶναι πρώτην. Οὐδεμία γὰρ ἀνάγκη οὔτε αὔξεσθαι οὔτε ἀλλοιοῦσθαι τὸ φερόμενον, οὐδὲ δὴ γίγνεσθαι ἢ φθείρεσθαι· τούτων δὲ οὐδεμίαν ἐνδέχεται τῆς συνεχοῦς μὴ οὔσης, ἣν κινεῖ τὸ πρῶτον κινοῦν.
§ 6. Ἔτι χρόνῳ πρώτην· τοῖς γὰρ ἀϊδίοις μόνον ἐνδέχεται κινεῖσθαι ταύτην.
§ 7. Ἀλλ' ἐφ' ἑνὸς μὲν ὁτουοῦν τῶν ἐχόντων γένεσιν τὴν φορὰν ἀναγκαῖον ὑστάτην εἶναι τῶν κινήσεων· μετὰ γὰρ τὸ γενέσθαι πρῶτον ἀλλοίωσις καὶ αὔξησις, φορὰ δ' ἤδη τετελειωμένων κίνησίς ἐστιν.
§ 8. Ἀλλ' ἕτερον ἀνάγκη κινούμενον εἶναι κατὰ φορὰν πρότερον, ὃ καὶ τῆς γενέσεως αἴτιον ἔσται τοῖς γιγνομένοις, οὐ γιγνόμενον, οἷον τὸ γεννῆσαν τοῦ γεννηθέντος, ἐπεὶ δόξειέ γ' ἂν ἡ γένεσις εἶναι πρώτη τῶν κινήσεων διὰ τοῦτο, ὅτι γενέσθαι δεῖ τὸ πρᾶγμα πρῶτον. Τὸ δ' ἐφ' ἑνὸς μὲν ὁτουοῦν τῶν γιγνομένων οὕτως ἔχει, ἀλλ' ἕτερον ἀναγκαῖον πρότερόν τι κινεῖσθαι τῶν γιγνομένων ὂν αὐτὸ καὶ μὴ γιγνόμενον, καὶ τούτου ἕτερον πρότερον.
§ 9. Ἐπεὶ δὲ γένεσιν ἀδύνατον εἶναι πρώτην (πάντα γὰρ ἂν εἴη τὰ κινούμενα φθαρτά), δῆλον ὡς οὐδὲ τῶν ἐφεξῆς κινήσεων οὐδεμία προτέρα· λέγω δ' ἐφεξῆς αὔξησιν, εἶτ' ἀλλοίωσιν καὶ φθίσιν καὶ φθοράν· πᾶσαι γὰρ ὕστεραι γενέσεως, ὥστ' εἰ μηδὲ γένεσις προτέρα φορᾶς, οὐδὲ τῶν ἄλλων οὐδεμία μεταβολῶν.
§ 10. Ὅλως τε φαίνεται τὸ γιγνόμενον ἀτελὲς καὶ ἐπ' ἀρχὴν ἰόν, ὥστε τὸ τῇ γενέσει ὕστερον τῇ φύσει πρότερον εἶναι. Τελευταῖον δὲ φορὰ πᾶσιν ὑπάρχει τοῖς ἐν γενέσει.
§ 11. Διὸ τὰ μὲν ὅλως ἀκίνητα τῶν ζώντων δι' ἔνδειαν {τοῦ ὀργάνου}, οἷον τὰ φυτὰ καὶ πολλὰ γένη τῶν ζῴων, τοῖς δὲ τελειουμένοις ὑπάρχει. Ὥστ' εἰ μᾶλλον ὑπάρχει φορὰ τοῖς μᾶλλον ἀπειληφόσιν τὴν φύσιν, καὶ ἡ κίνησις αὕτη πρώτη τῶν ἄλλων ἂν εἴη κατ' οὐσίαν,
§ 12. διά τε ταῦτα καὶ διότι ἥκιστα τῆς οὐσίας ἐξίσταται τὸ κινούμενον τῶν κινήσεων ἐν τῷ φέρεσθαι· κατὰ μόνην γὰρ οὐδὲν μεταβάλλει τοῦ εἶναι, ὥσπερ ἀλλοιουμένου μὲν τὸ ποιόν, αὐξανομένου δὲ καὶ φθίνοντος τὸ ποσόν.
§ 13. Μάλιστα δὲ δῆλον ὅτι τὸ κινοῦν αὐτὸ αὑτὸ μάλιστα ταύτην κινεῖ κυρίως, τὴν κατὰ τόπον· καίτοι φαμὲν τοῦτο εἶναι τῶν κινουμένων καὶ κινούντων ἀρχὴν καὶ πρῶτον τοῖς κινουμένοις, τὸ αὐτὸ αὑτὸ κινοῦν. Ὅτι μὲν τοίνυν τῶν κινήσεων ἡ φορὰ πρώτη, φανερὸν ἐκ τούτων.
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Traduction française :
[8,10] CHAPITRE X.
§ 1. Il est possible de rendre tout ceci encore plus clair en prenant un
autre point de départ, c'est-à-dire en recherchant s'il peut ou non y avoir
un mouvement continu; et, si ce mouvement peut exister, en recherchant
ce qu'il est, et quel est le premier de tous les mouvements. Il est évident,
puisque le mouvement éternel est nécessaire, que le moteur premier
produit cette espèce de mouvement qui doit être de toute nécessité un,
le même, continu et premier.
§ 2. Parmi les trois espèces de mouvement qui se rapportent, celle-ci à
la grandeur, celle-là à la qualité et l'autre à l'espace, le mouvement dans
l'espace que nous appelons la translation, doit être nécessairement le
premier mouvement. En effet, l'accroissement ne peut avoir lieu si l'on ne
suppose une altération préalable. Ce qui est accru s'accroit en partie par
le semblable, et en partie par le dissemblable. Le contraire, comme on
dit, est l'aliment du contraire; et tout s'adjoint et s'agglomère en devenant
semblable au semblable. Par conséquent, l'altération peut être appelée
le changement dans les contraires. Mais si la chose est altérée, il faut un
altérant qui fasse, par exemple, d'une chose qui n'est chaude qu'en
puissance, une chose qui est chaude en acte et en réalité. Donc
évidemment, le moteur n'est pas toujours ici au même état; mais il est
tantôt plus près et tantôt plus loin de la chose altérée. Or, tout ceci est
impossible sans un déplacement, une translation. Si donc le mouvement
est toujours nécessaire, il faut aussi que la translation soit toujours le
premier des mouvements; et, si dans la translation même on en distingue
d'antérieures et de postérieures, c'est la première de toutes les
translations qui est le premier mouvement.
§ 3. D'un autre côté, le principe de toutes les affections des choses c'est
la condensation et la raréfaction. La pesanteur et la légèreté, le dur et le
mou, la chaleur et le froid ne sont, à ce qu'il semble, que des
modifications qui condensent ou qui raréfient les corps d'une certaine
manière. La condensation et la raréfaction ne sont au fond que la réunion
et la division des éléments, d'après lesquelles on dénomme la génération
ou la destruction des substances. Mais, pour se réunir tout aussi bien
que pour se diviser, il faut également changer de lieu; de même encore
que pour s'accroître et pour dépérir, il faut également aussi que la
grandeur change de lieu dans l'espace.
§ 4. Voici encore une autre manière de se convaincre que la translation
est le premier des mouvements. Le mot de Premier peut, quand il s'agit
du mouvement aussi bien que pour tout le reste, recevoir plusieurs
acceptions. On entend par premier et antérieur ce dont l'existence est
indispensable à l'existence des autres choses, et qui, lui, peut lui-même
exister sans elles. Or cette antériorité peut concerner et le temps et la
substance.
§ 5. Comme il y a nécessité que le mouvement existe continument, c'est
ou le mouvement continu qui existera contingentent, ou c'est le
mouvement successif; mais c'est bien plutôt le mouvement continu; car
le continu est préférable au successif ; et l'on doit supposer que le mieux
existe toujours dans la nature du moment qu'il est possible. Quant à la
possibilité d'un mouvement continu, nous la démontrerons plus loin, et en
attendant nous la supposons. Mais il n'est pas possible qu'un autre
mouvement que la translation soit continu ; et, par conséquent, il est
nécessaire que la translation soit le premier mouvement. En effet, il n'y a
aucune nécessité que le corps transporté s'accroisse ou s'altère; il n'y a
aucune nécessité qu'il naisse ou qu'il périsse, tandis qu'aucun de ces
mouvements n'est possible sans ce mouvement continu que peut seul
produire le premier moteur.
§ 6. On doit ajouter que la translation est chronologiquement le premier
mouvement; car les choses éternelles ne peuvent pas en avoir d'autre.
§ 7. Au contraire, dans toutes les choses qui sont soumises à la
génération, c'est la translation qui est nécessairement la dernier des
mouvements; car, après que les êtres sont nés, le premier mouvement
pour eux c'est l'altération et la croissance, tandis que la translation ne
peut être le mouvement que des êtres qui sont déjà complets et
parachevés.
§ 8. Mais il faut nécessairement qu'il y ait aussi quelque autre chose qui
soit antérieurement mue par translation, une chose qui, sans être
produite elle-même, soit cause de la production pour les choses qui sont
produites : comme, par exemple, l'être qui engendre est cause de l'être
qui est engendré. On pourrait croire, il est vrai, que la génération est le
premier des mouvements, parce qu'il faut tout d'abord que la chose
commence par naître; et de fait il en est bien ainsi pour une quelconque
des choses qui naissent et se produisent, Mais nécessairement il y a
quelque autre chose en mouvement avant les choses qui se produisent,
quelque chose qui existe déjà lui-même, et qui lui-même n'est pas
produit. Puis il faut encore une autre chose antérieure à celle-là.
§ 9. Mais la génération ne pouvant être le premier mouvement,
puisqu'alors tout ce qui est en mouvement serait périssable, il est clair
qu'aucun des mouvements postérieurs à la génération ne peut être
antérieur à la translation, J'entends par mouvements postérieurs
l'accroissement et l'altération, la décroissance et la destruction, tous
mouvements qui ne peuvent venir qu'après la naissance et la génération.
Donc, si la génération n'est pas antérieure à la translation, aucun des
autres changements ne le sera davantage.
§ 10. En général, ce qui devient et se produit semble toujours incomplet,
et semble toujours tendre à son principe. Par conséquent aussi, ce qui
est postérieur par génération paraît antérieur par nature; et c'est la
translation qui est la dernière pour toutes les choses soumises à la
génération.
§ 11. Aussi dans les êtres vivants, en voit-on qui sont absolument
immobiles par défaut d'organes, les plantes, par exemple, et bon nombre
d'animaux. D'autres plus parfaits ont le mouvement de translation. De
telle sorte que, si la translation appartient plus particulièrement aux êtres
qui ont une nature plus complète, cette espèce même de mouvement est
donc par essence le premier de tous les mouvements.
§ 12. Voilà bien ce qui en fait le premier des mouvements. Mais elle l'est
encore par cette raison que dans le mouvement de translation le mobile
sort moins de sa substance que dans tout autre espèce de mouvement.
Il n'y a que ce mouvement où il ne change rien de son être, de même
qu'il change sa qualité dans l'altération, et sa quantité dans la croissance
et le décroissement.
§ 13. Mais voici une nouvelle preuve plus forte que toutes les autres :
c'est que le moteur qui se meut lui-même se donne d'une manière tout à
fait spéciale ce mouvement de translation. Aussi disons-nous que c'est
ce qui se meut soi-même qui est le principe et la cause première du
mouvement, pour tous les mobiles et les moteurs, quels qu'ils soient.
Donc, en résumé, il est évident d'après tout ceci que la translation est le
premier des mouvements.
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