Texte grec :
[4,17] CHAPITRE XVII. καὶ ὥσπερ ἡ κίνησις αἰεὶ ἄλλη καὶ ἄλλη,
καὶ ὁ χρόνος (ὁ δ' ἅμα πᾶς χρόνος ὁ αὐτός· τὸ γὰρ νῦν τὸ αὐτὸ ὅ ποτ' ἦν –
τὸ δ' εἶναι αὐτῷ ἕτερον – τὸ δὲ νῦν τὸν χρόνον ὁρίζει, ᾗ πρότερον καὶ
ὕστερον). τὸ δὲ νῦν ἔστι μὲν ὡς τὸ αὐτό, ἔστι δ' ὡς οὐ τὸ αὐτό· ᾗ μὲν γὰρ
ἐν ἄλλῳ καὶ ἄλλῳ, ἕτερον (τοῦτο δ' ἦν αὐτῷ τὸ νῦν <εἶναι>), ὃ δέ ποτε ὄν
ἐστι τὸ νῦν, τὸ αὐτό. ἀκολουθεῖ γάρ, ὡς ἐλέχθη, τῷ μὲν μεγέθει ἡ κίνησις,
ταύτῃ δ' ὁ χρόνος, ὥς φαμεν· καὶ ὁμοίως δὴ τῇ στιγμῇ τὸ φερόμενον, ᾧ τὴν
κίνησιν γνωρίζομεν καὶ τὸ πρότερον ἐν αὐτῇ καὶ τὸ ὕστερον. τοῦτο δὲ ὃ μέν
ποτε ὂν τὸ αὐτό (ἢ στιγμὴ γὰρ ἢ λίθος ἤ τι ἄλλο τοιοῦτόν ἐστι), τῷ λόγῳ δὲ
ἄλλο, ὥσπερ οἱ σοφισταὶ λαμβάνουσιν ἕτερον τὸ Κορίσκον ἐν Λυκείῳ εἶναι καὶ
τὸ Κορίσκον ἐν ἀγορᾷ. καὶ τοῦτο δὴ τῷ ἄλλοθι καὶ ἄλλοθι εἶναι ἕτερον· τῷ
δὲ φερομένῳ ἀκολουθεῖ τὸ νῦν, ὥσπερ ὁ χρόνος τῇ κινήσει (τῷ γὰρ φερομένῳ
γνωρίζομεν τὸ πρότερον καὶ ὕστερον ἐν κινήσει, ᾗ δ' ἀριθμητὸν τὸ πρότερον
καὶ ὕστερον, τὸ νῦν ἔστιν)· ὥστε καὶ ἐν τούτοις ὃ μέν ποτε ὂν νῦν ἐστι, τὸ
αὐτό (τὸ πρότερον γὰρ καὶ ὕστερόν ἐστι τὸ ἐν κινήσει), τὸ δ' εἶναι ἕτερον
(ᾗ ἀριθμητὸν γὰρ τὸ πρότερον καὶ ὕστερον, τὸ νῦν ἔστιν). καὶ γνώριμον δὲ
μάλιστα τοῦτ' ἔστιν· καὶ γὰρ ἡ κίνησις διὰ τὸ κινούμενον καὶ ἡ φορὰ διὰ τὸ
φερόμενον· τόδε γάρ τι τὸ φερόμενον, ἡ δὲ κίνησις οὔ. ἔστι μὲν οὖν ὡς τὸ
αὐτὸ τὸ νῦν αἰεί, ἔστι δ' ὡς οὐ τὸ αὐτό· καὶ γὰρ τὸ φερόμενον.
φανερὸν δὲ καὶ ὅτι εἴτε χρόνος μὴ εἴη, τὸ νῦν οὐκ ἂν εἴη, εἴτε τὸ νῦν μὴ
εἴη, χρόνος οὐκ ἂν εἴη· ἅμα γὰρ ὥσπερ τὸ φερόμενον καὶ ἡ φορά, οὕτως καὶ ὁ
ἀριθμὸς ὁ τοῦ φερομένου καὶ ὁ τῆς φορᾶς. χρόνος μὲν γὰρ ὁ τῆς φορᾶς
ἀριθμός, τὸ νῦν δὲ ὡς τὸ φερόμενον, οἷον μονὰς ἀριθμοῦ. καὶ συνεχής τε δὴ
ὁ χρόνος τῷ νῦν, καὶ διῄρηται κατὰ τὸ νῦν· ἀκολουθεῖ γὰρ καὶ τοῦτο τῇ φορᾷ
καὶ τῷ φερομένῳ. καὶ γὰρ ἡ κίνησις καὶ ἡ φορὰ μία τῷ φερομένῳ, ὅτι ἕν (καὶ
οὐχ ὅ ποτε ὄν – καὶ γὰρ ἂν διαλίποι – ἀλλὰ τῷ λόγῳ)· καὶ ὁρίζει δὲ τὴν
πρότερον καὶ ὕστερον κίνησιν τοῦτο. ἀκολουθεῖ δὲ καὶ τοῦτό πως τῇ στιγμῇ·
καὶ γὰρ ἡ στιγμὴ καὶ συνέχει τὸ μῆκος καὶ ὁρίζει· ἔστι γὰρ τοῦ μὲν ἀρχὴ
τοῦ δὲ τελευτή. ἀλλ' ὅταν μὲν οὕτω λαμβάνῃ τις ὡς δυσὶ χρώμενος τῇ μιᾷ,
ἀνάγκη ἵστασθαι, εἰ ἔσται ἀρχὴ καὶ τελευτὴ ἡ αὐτὴ στιγμή· τὸ δὲ νῦν διὰ τὸ
κινεῖσθαι τὸ φερόμενον αἰεὶ ἕτερον. ὥσθ' ὁ χρόνος ἀριθμὸς οὐχ ὡς τῆς αὐτῆς
στιγμῆς, ὅτι ἀρχὴ καὶ τελευτή, ἀλλ' ὡς τὰ ἔσχατα τῆς γραμμῆς μᾶλλον – καὶ
οὐχ ὡς τὰ μέρη, διά τε τὸ εἰρημένον (τῇ γὰρ μέσῃ στιγμῇ ὡς δυσὶ χρήσεται,
ὥστε ἠρεμεῖν συμβήσεται), καὶ ἔτι φανερὸν ὅτι οὐδὲν μόριον τὸ νῦν τοῦ
χρόνου, οὐδ' ἡ διαίρεσις τῆς κινήσεως, ὥσπερ οὐδ' ἡ στιγμὴ τῆς γραμμῆς· αἱ
δὲ γραμμαὶ αἱ δύο τῆς μιᾶς μόρια. ᾗ μὲν οὖν πέρας τὸ νῦν, οὐ χρόνος, ἀλλὰ
συμβέβηκεν· ᾗ δ' ἀριθμεῖ, ἀριθμός · τὰ μὲν γὰρ πέρατα ἐκείνου μόνον ἐστὶν
οὗ ἐστιν πέρατα, ὁ δ' ἀριθμὸς ὁ τῶνδε τῶν ἵππων, ἡ δεκάς, καὶ ἄλλοθι.
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Traduction française :
[4,17] CHAPITRE XVII.
§ 1. De même que le mouvement est perpétuellement et
perpétuellement autre, de même le temps l'est ainsi que
lui, bien que le temps dans son ensemble soit
éternellement le même; car l'instant d'à présent est
identiquement le même que celui qui était auparavant;
seulement son être est différent; et c'est l'instant qui
mesure le temps, en tant qu'il est antérieur et postérieur.
§ 2. Ainsi, en un sens, l'instant est le même ; et, en un
autre sens, il n'est pas le même. En effet, il est autre en
tant qu'il est dans un certain temps et dans un autre
temps, et c'était là précisément la condition inévitable de
l'instant. Mais en tant qu'il est ce qu'il était dans un temps
donné, il est identique; car le mouvement, ainsi que je
viens de le dire, suppose toujours la grandeur, et le temps,
je le répète, suppose toujours aussi le mouvement; de
même que le corps qui se meut, le mobile qui nous fait
connaître le temps, et dans le temps l'antérieur et le
postérieur, suppose aussi le point. Or, ce mobile est bien à
un moment donné tout à fait le même, que ce soit d'ailleurs
un point, une pierre ou telle autre chose; mais,
rationnellement, il est différent. Cela, du reste, rappelle
l'assertion des Sophistes qui prétendent que Coriscus dans
le Lycée est autre que Coriscus dans la place publique; et il
faut reconnaître qu'il est autre, en ce sens qu'il est d'abord
dans tel lieu, puis ensuite dans tel lieu différent. Mais
l'instant est corrélatif au corps qui se meut, comme le
temps est corrélatif au mouvement, puisque c'est par le
corps qui se meut que nous percevons l'antérieur et le
postérieur dans le mouvement; et que c'est en tant que
l'antérieur et le postérieur sont susceptibles d'être nombrés
que l'instant existe. C'est là, sans contredit, l'idée la plus
claire que l'on puisse se faire du temps. On perçoit le
mouvement par le corps qui se meut, et le déplacement par
le corps déplacé; car ce corps qui est déplacé est
matériellement quelque chose de réel et de distinct, tandis
que le mouvement lui-même ne l'est pas. Ainsi, ce qu'on
appelle l'instant est en un sens toujours identique et le
même, et, en un autre sens il ne l'est pas; et il en est de
même du corps qui se déplace.
§ 3. Il est clair d'ailleurs que s'il n'y avait pas de temps, il
n'y aurait pas non plus d'instant; et, réciproquement, s'il
n'y avait point d'instant, il n'y aurait pas non plus de
temps. Ils sont tous deux simultanés ; et de même que le
déplacement et le corps déplacé sont simultanés, de même
aussi le nombre du corps déplacé et le nombre du
déplacement sont simultanés également; car le temps est
le nombre du déplacement; et l'instant, ainsi que le corps
déplacé, est en quelque sorte l'unité du nombre.
§ 4. Il faut dire encore que c'est par l'instant que le temps
est continu, et que c'est aussi par l'instant que le temps se
divise. Du reste, cette propriété se retrouve dans le
déplacement et le corps déplacé ; car le mouvement est un,
ainsi que le déplacement, pour le corps déplacé, parce que
ce corps est un et n'est pas tel autre corps quelconque; car
alors il pourrait y avoir une lacune dans le mouvement.
Mais il est autre rationnellement, puisque c'est lui qui fixe
et détermine l'antériorité et la postériorité du mouvement.
§ 5. Cette propriété est aussi à certains égards celle du
point; car le point tout à la fois continue la longueur et la
termine. Il est le commencement de telle longueur et la fin
de telle autre.
§ 6. Mais lorsque l'on prend le point qui est un, de telle
manière qu'on le considère comme s'il était deux, alors il
faut nécessairement un temps d'arrêt, puisque le même
point est à la fois commencement et fin. Quant à l'instant, il
est toujours autre, parce que le corps qui se déplace se
meut d'une manière continue.
§ 7. Ainsi, le temps est un nombre, non comme étant le
nombre d'un seul et même point, parce qu'il serait tout
ensemble commencement et fin, mais bien plutôt comme
étant les extrémités et non pas les parties d'une même
ligne. On vient d'en expliquer la raison : c'est que le milieu
de la ligne peut être considéré comme double; et qu'en ce
point, le corps se trouvera nécessairement en repos. Mais il
est clair en outre que l'instant n'est pas une portion du
temps; pas plus que la division du mouvement n'est une
partie du mouvement; pas plus que les points ne sont une
partie de la ligne, tandis que les lignes, quand elles sont
deux, sont des parties d'une même ligne unique.
§ 8. Ainsi, en tant que l'instant est une limite, il n'est pas
du temps ; et il n'est qu'un simple accident du temps. Mais
en tant qu'il sert à nombrer les choses, il est nombre; car
les limites ne sont absolument qu'à la chose dont elles sont
les limites, tandis que le nombre, par exemple le nombre
dix, qui sert à compter ces dix chevaux qu'on regarde, peut
tout aussi bien se retrouver ailleurs et compter autre chose.
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