Texte grec :
[4,13] CHAPITRE XIII.
Εἰσὶν δέ τινες οἳ διὰ τοῦ μανοῦ καὶ πυκνοῦ οἴονται φανερὸν εἶναι ὅτι ἔστι
κενόν. εἰ μὲν γὰρ μὴ ἔστι μανὸν καὶ πυκνόν, οὐδὲ συνιέναι καὶ πιλεῖσθαι
οἷόν τε· εἰ δὲ τοῦτο μὴ εἴη, ἢ ὅλως κίνησις οὐκ ἔσται, ἢ κυμανεῖ τὸ ὅλον,
ὥσπερ ἔφη Ξοῦθος, ἢ εἰς ἴσον ἀεὶ <δεῖ> μεταβάλλειν ἀέρα καὶ ὕδωρ (λέγω δὲ
οἷον εἰ ἐξ ὕδατος κυάθου γέγονεν ἀήρ, ἅμα ἐξ ἴσου ἀέρος ὕδωρ τοσοῦτον
γεγενῆσθαι), ἢ κενὸν εἶναι ἐξ ἀνάγκης· συμπιλεῖσθαι γὰρ καὶ ἐπεκτείνεσθαι
οὐκ ἐνδέχεται ἄλλως. εἰ μὲν οὖν τὸ μανὸν λέγουσι τὸ πολλὰ κενὰ κεχωρισμένα
ἔχον, φανερὸν ὡς εἰ μηδὲ κενὸν ἐνδέχεται εἶναι χωριστὸν ὥσπερ μηδὲ τόπον
ἔχοντα διάστημα αὑτοῦ, οὐδὲ μανὸν οὕτως· εἰ δὲ μὴ χωριστόν, ἀλλ' ὅμως
ἐνεῖναί τι κενόν, ἧττον μὲν ἀδύνατον, συμβαίνει δὲ πρῶτον μὲν οὐ πάσης
κινήσεως αἴτιον τὸ κενόν, ἀλλὰ τῆς ἄνω (τὸ γὰρ μανὸν κοῦφον, διὸ καὶ τὸ
πῦρ μανὸν εἶναί φασιν), ἔπειτα κινήσεως αἴτιον οὐχ οὕτω τὸ κενὸν ὡς ἐν ᾧ,
ἀλλ' ὥσπερ οἱ ἀσκοὶ τῷ φέρεσθαι αὐτοὶ ἄνω φέρουσι τὸ συνεχές, οὕτω τὸ
κενὸν ἄνω φέρει. καίτοι πῶς οἷόν τε φορὰν εἶναι κενοῦ ἢ τόπον κενοῦ; κενοῦ
γὰρ γίγνεται κενόν, εἰς ὃ φέρεται. ἔτι δὲ πῶς ἐπὶ τοῦ βαρέος ἀποδώσουσιν
τὸ φέρεσθαι κάτω; καὶ δῆλον ὅτι εἰ ὅσῳ ἂν μανότερον καὶ κενώτερον ᾖ ἄνω
οἰσθήσεται, εἰ ὅλως εἴη κενόν, τάχιστ' ἂν φέροιτο. ἴσως δὲ καὶ τοῦτ'
ἀδύνατον κινηθῆναι· λόγος δ' ὁ αὐτός, ὥσπερ ὅτι ἐν τῷ κενῷ ἀκίνητα πάντα,
οὕτω καὶ τὸ κενὸν ὅτι ἀκίνητον· ἀσύμβλητα γὰρ τὰ τάχη.
ἐπεὶ δὲ κενὸν μὲν οὔ φαμεν εἶναι, τὰ ἄλλα δ' ἠπόρηται ἀληθῶς, ὅτι ἢ
κίνησις οὐκ ἔσται, εἰ μὴ ἔσται πύκνωσις καὶ μάνωσις, ἢ κυμανεῖ ὁ οὐρανός,
ἢ αἰεὶ ἴσον ὕδωρ ἐξ ἀέρος ἔσται καὶ ἀὴρ ἐξ ὕδατος (δῆλον γὰρ ὅτι πλείων
ἀὴρ ἐξ ὕδατος γίγνεται· ἀνάγκη τοίνυν, εἰ μὴ ἔστι πίλησις, ἢ ἐξωθούμενον
τὸ ἐχόμενον τὸ ἔσχατον κυμαίνειν ποιεῖν, ἢ ἄλλοθί που ἴσον μεταβάλλειν ἐξ
ἀέρος ὕδωρ, ἵνα ὁ πᾶς ὄγκος τοῦ ὅλου ἴσος ᾖ, ἢ μηδὲν κινεῖσθαι· ἀεὶ γὰρ
μεθισταμένου τοῦτο συμβήσεται, ἂν μὴ κύκλῳ περιίστηται· οὐκ ἀεὶ δ' εἰς τὸ
κύκλῳ ἡ φορά, ἀλλὰ καὶ εἰς εὐθύ)· οἱ μὲν δὴ διὰ ταῦτα κενόν τι φαῖεν ἂν
εἶναι, ἡμεῖς δὲ λέγομεν ἐκ τῶν ὑποκειμένων ὅτι ἔστιν ὕλη μία τῶν ἐναντίων,
θερμοῦ καὶ ψυχροῦ καὶ τῶν ἄλλων τῶν φυσικῶν ἐναντιώσεων, καὶ ἐκ δυνάμει
ὄντος ἐνεργείᾳ ὂν γίγνεται, καὶ οὐ χωριστὴ μὲν ἡ ὕλη, τὸ δ' εἶναι ἕτερον,
καὶ μία τῷ ἀριθμῷ, εἰ ἔτυχε, χροιᾶς καὶ θερμοῦ καὶ ψυχροῦ.
ἔστι δὲ καὶ σώματος ὕλη καὶ μεγάλου καὶ μικροῦ ἡ αὐτή. δῆλον δέ· ὅταν γὰρ
ἐξ ὕδατος ἀὴρ γένηται, ἡ αὐτὴ ὕλη οὐ προσλαβοῦσά τι ἄλλο ἐγένετο, ἀλλ' ὃ
ἦν δυνάμει, ἐνεργείᾳ ἐγένετο, καὶ πάλιν ὕδωρ ἐξ ἀέρος ὡσαύτως, ὁτὲ μὲν εἰς
μέγεθος ἐκ μικρότητος, ὁτὲ δ' εἰς μικρότητα ἐκ μεγέθους. ὁμοίως τοίνυν κἂν
ὁ ἀὴρ πολὺς ὢν ἐν ἐλάττονι γίγνηται ὄγκῳ καὶ ἐξ ἐλάττονος μείζων, ἡ
δυνάμει οὖσα ὕλη γίγνεται ἄμφω. ὥσπερ γὰρ καὶ ἐκ ψυχροῦ θερμὸν καὶ ἐκ
θερμοῦ ψυχρὸν ἡ αὐτή, ὅτι ἦν δυνάμει, οὕτω καὶ ἐκ θερμοῦ μᾶλλον θερμόν,
οὐδενὸς γενομένου ἐν τῇ ὕλῃ θερμοῦ ὃ οὐκ ἦν θερμὸν ὅτε ἧττον ἦν θερμόν,
ὥσπερ γε οὐδ' ἡ τοῦ μείζονος κύκλου περιφέρεια καὶ κυρτότης ἐὰν γίγνηται
ἐλάττονος κύκλου, <ἢ> ἡ αὐτὴ οὖσα ἢ ἄλλη, ἐν οὐθενὶ ἐγγέγονε τὸ κυρτὸν ὃ
ἦν οὐ κυρτὸν ἀλλ' εὐθύ (οὐ γὰρ τῷ διαλείπειν τὸ ἧττον ἢ τὸ μᾶλλον ἔστιν)·
οὐδ' ἔστι τῆς φλογὸς λαβεῖν τι μέγεθος ἐν ᾧ οὐ καὶ θερμότης καὶ λευκότης
ἔνεστιν. οὕτω τοίνυν καὶ ἡ πρότερον θερμότης <πρὸς> τὴν ὕστερον. ὥστε καὶ
τὸ μέγεθος καὶ ἡ μικρότης τοῦ αἰσθητοῦ ὄγκου οὐ προσλαβούσης τι τῆς ὕλης
ἐπεκτείνεται, ἀλλ' ὅτι δυνάμει ἐστὶν ὕλη ἀμφοῖν· ὥστ' ἐστὶ τὸ αὐτὸ πυκνὸν
καὶ μανόν, καὶ μία ὕλη αὐτῶν. ἔστι δὲ τὸ μὲν πυκνὸν βαρύ, τὸ δὲ μανὸν
κοῦφον. {ἔτι ὥσπερ ἡ τοῦ κύκλου περιφέρεια συναγομένη εἰς ἔλαττον οὐκ ἄλλο
τι λαμβάνει τὸ κοῖλον, ἀλλ' ὃ ἦν συνήχθη, καὶ τοῦ πυρὸς ὅ τι ἄν τις λάβῃ
πᾶν ἔσται θερμόν, οὕτω καὶ τὸ πᾶν συναγωγὴ καὶ διαστολὴ τῆς αὐτῆς ὕλης.}
δύο γὰρ ἔστιν ἐφ' ἑκατέρου, τοῦ τε πυκνοῦ καὶ τοῦ μανοῦ· τό τε γὰρ βαρὺ
καὶ τὸ σκληρὸν πυκνὰ δοκεῖ εἶναι, καὶ τἀναντία μανὰ τό τε κοῦφον καὶ τὸ
μαλακόν· διαφωνεῖ δὲ τὸ βαρὺ καὶ τὸ σκληρὸν ἐπὶ μολίβδου καὶ σιδήρου.
ἐκ δὴ τῶν εἰρημένων φανερὸν ὡς οὔτ' ἀποκεκριμένον κενὸν ἔστιν, οὔθ' ἁπλῶς
οὔτ' ἐν τῷ μανῷ, οὔτε δυνάμει, εἰ μή τις βούλεται πάντως καλεῖν κενὸν τὸ
αἴτιον τοῦ φέρεσθαι. οὕτω δ' ἡ τοῦ βαρέος καὶ κούφου ὕλη, ᾗ τοιαύτη, εἴη
ἂν τὸ κενόν· τὸ γὰρ πυκνὸν καὶ τὸ μανὸν κατὰ ταύτην τὴν ἐναντίωσιν φορᾶς
ποιητικά, κατὰ δὲ τὸ σκληρὸν καὶ μαλακὸν πάθους καὶ ἀπαθείας, καὶ οὐ φορᾶς
ἀλλ' ἑτεροιώσεως μᾶλλον. καὶ περὶ μὲν κενοῦ, πῶς ἔστι καὶ πῶς οὐκ ἔστι,
διωρίσθω τὸν τρόπον τοῦτον.
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Traduction française :
[4,13] CHAPITRE XIII.
§ 1. Il y a des philosophes qui ont soutenu que la densité et
la raréfaction des corps prouvent évidemment qu'il y a du
vide : « Selon eux, sans la densité et la raréfaction, il n'est
pas possible que les corps se resserrent et se compriment;
et sans cette faculté, ou le mouvement ne peut plus du tout
avoir lieu, ou l'univers est condamné à une fluctuation
perpétuelle comme le disait Xuthus; ou l'air et l'eau se
changent toujours en même quantité l'une dans l'autre; et
je veux dire par là que, si l'air vient d'une simple coupe
d'eau, cette même quantité d'eau devrait toujours venir
d'une quantité d'air égale ; on bien le vide existe de toute
nécessité, parce qu'autrement il ne serait pas possible que
les corps pussent se condenser et se dilater. »
§ 2. Nous répondons que, si l'on entend par rare ce qui a
beaucoup de vides séparés les uns des autres, il est clair
que, si le vide, ne pouvant pas être séparé des choses pas
plus que l'espace, ne peut avoir une étendue spéciale à lui,
le rare ne peut pas davantage exister de cette façon.
§ 3. Mais si l'on dit que le vide, sans être séparé, n'en est
pas moins dans leur intérieur, cette hypothèse est moins
inacceptable; mais en voici les conséquences. D'abord le
vide n'est plus la cause de toute espèce de mouvement,
mais seulement la cause du mouvement qui se dirige en
haut, puisqu'un corps qui est rare est léger; et c'est ainsi
que ces philosophes disent que le feu est léger.
§ 4. Secondement, le vide ne sera pas cause du
mouvement en ce sens qu'il est le lieu où le mouvement se
passe. Mais de même que les outres gonflés d'air en
s'élevant elles-mêmes en haut y élèvent aussi ce qui tient à
elles, de même le vide aura la propriété de se porter en
haut. Mais pourtant comment est-il possible que le vide ait
une direction, ou que le vide ait un lieu? Car alors il y a
pour le vide un vide où il peut se diriger.
§ 5. Autre objection. Comment les partisans de cette hypothèse
pourront-ils expliquer que le poids se porte en bas?
§ 6. Il est évident que, si le corps monte d'autant plus
vivement en haut qu'il est plus rare et plus vide, il y
montera le plus vite possible s'il est absolument vide. Mais
peut-être est-il impossible que le vide puisse jamais avoir
de mouvement; car le même raisonnement qui prouvait
que tout doit être immobile dans le vide, prouve encore que
le vide lui-même est immobile aussi; et les vitesses y sont
incommensurables.
§ 7. D'ailleurs, tout en niant l'existence du vide, nous n'en
reconnaissons pas moins la vérité des autres explications, à
savoir que, si l'on n'admet pas la condensation et la
raréfaction des corps, le mouvement n'est plus concevable;
ou bien que le ciel est dans une perpétuelle oscillation ; ou
bien encore que toujours une même quantité d'eau viendra
d'une même quantité d'air, ou réciproquement l'air de
l'eau, quoiqu'il soit évident que de l'eau il vient une plus
grande masse d'air. Donc s'il n'y a pas compression dans
les corps, il faut nécessairement ou que le continu, poussé
de proche en proche, communique la fluctuation jusqu'à
l'extrémité; ou bien qu'une égale quantité d'air se change
quelque part ailleurs en eau pour que le volume total de
l'univers entier reste toujours égal; ou enfin il faudra que
rien ne puisse être en mouvement.
§ 8. En effet, la compression aura toujours lieu quand un
corps se déplace, à moins qu'il ne tourne toujours en
cercle; mais le déplacement des corps n'est pas toujours
circulaire ; et c'est aussi en ligne droite qu'il a lieu.
§ 9. Tels sont à peu près les motifs qui ont déterminé
certains philosophes à reconnaître l'existence du vide.
§ 10. Quant à nous, nous disons, d'après les principes
posés par nous, que la matière des contraires est une seule
et même matière, par exemple du chaud et du froid, et de
tous les autres contraires naturels; que de ce qui est en
puissance vient ce qui est en acte; que la matière n'est pas
séparée des qualités, bien que son être soit différent; et
enfin que numériquement elle est une ; par exemple, si l'on
veut, pour la couleur, pour le chaud, le froid, etc.
§ 11. La matière d'un corps reste également la même, que
le corps soit grand ou petit: et la preuve évidente, c'est
que, quand l'eau se change en air, c'est bien la même
matière qui est changée sans avoir reçu rien d'étranger; et
c'est seulement que ce qui était en puissance est arrivé à
l'acte, à la réalité. Il en est tout à fait de même, quand
c'est l'air, au contraire, qui se change en eau ; et tantôt
c'est la petitesse qui passe à la grandeur: et tantôt c'est la
grandeur qui passe à la petitesse. Donc c'est le même
phénomène encore quand l'air en grande masse se réduit à
un moindre volume, ou lorsque de plus petit qu'il était il
devient plus grand. La matière, qui est en puissance,
devient également l'un et l'autre.
§ 12. Car de même que, quand de froid le corps devient
chaud, et que de chaud il devient froid, la matière reste
identique, parce qu'elle était en puissance ; de même aussi,
le corps déjà chaud devient plus chaud, sans que rien dans
la matière devienne chaud qui ne fût pas chaud
auparavant, alors que le corps avait moins de chaleur. De
même encore que, quand la circonférence et la convexité
d'un cercle plus grand devient la circonférence d'un cercle
plus petit, que ce soit d'ailleurs la même circonférence ou
une circonférence différente, aucune partie n'acquiert de
convexité qui, auparavant, aurait été non pas convexe,
mais droite, puisqu'entre le plus et le moins il n'y a pas
d'interruption, pas plus que dans la flamme il ne serait
possible de trouver une portion qui n'eût ni blancheur ni
chaleur; de même, c'est un rapport tout à fait pareil qui
unit la chaleur initiale à la chaleur qui la suit. Par
conséquent aussi, la grandeur et la petitesse d'un volume
perceptible à nos sens se développent, non parce que la
matière reçoit quelque chose d'étranger, mais seulement
parce que la matière est en puissance susceptible des deux
également. Ainsi enfin, c'est le même corps qui est
successivement rare et dense; et la matière est identique
pour ces deux propriétés.
§ 13. Mais le dense est lourd ; et le rare est léger; car ces
deux propriétés appartiennent à l'un et à l'autre, c'est-à-dire
au dense et au rare. Le lourd et le dur font l'effet d'être
denses; les contraires, je veux dire le léger et le mou, font
l'effet d'être rares, quoique le lourd et le dur ne se
correspondent plus également dans le plomb et le fer.
§ 14. De tout ce qui précède, il résulte que le vide n'est
point séparé, qu'il n'existe point absolument, qu'il n'est pas
dans ce qui est rare, et qu'il n'est pas non plus en
puissance, à moins qu'on ne veuille à toute force appeler
vide la cause de la chute des corps. Ce serait alors la
matière du léger et du lourd, en tant que telle, qui serait le
vide; car le dense et le rare, opposés comme ils le sont à ce
point de vue, produisent la chute des graves. En tant que
dur et mou, ils sont causes de la passivité ou de
l'impassibilité des corps; mais ils ne sont pas causes de leur
chute, et ils le seraient plutôt de leur altération.
§ 15. Ici finit ce que nous avions à dire sur le vide pour
expliquer comment il est et comment il n'est pas.
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