Texte grec :
[4,3] CHAPITRE III.
οὐ μὴν ἀλλ' ἔχει γε ἀπορίαν, εἰ ἔστι, τί ἐστι, πότερον ὄγκος τις σώματος ἤ
τις ἑτέρα φύσις· ζητητέον γὰρ τὸ γένος αὐτοῦ πρῶτον. διαστήματα μὲν οὖν
ἔχει τρία, μῆκος καὶ πλάτος καὶ βάθος, οἷς ὁρίζεται σῶμα πᾶν. ἀδύνατον δὲ
σῶμα εἶναι τὸν τόπον· ἐν ταὐτῷ γὰρ ἂν εἴη δύο σώματα. ἔτι εἴπερ ἔστι
σώματος τόπος καὶ χώρα, δῆλον ὅτι καὶ ἐπιφανείας καὶ τῶν λοιπῶν περάτων· ὁ
γὰρ αὐτὸς ἁρμόσει λόγος· ὅπου γὰρ ἦν πρότερον τὰ τοῦ ὕδατος ἐπίπεδα, ἔσται
πάλιν τὰ τοῦ ἀέρος. ἀλλὰ μὴν οὐδεμίαν διαφορὰν ἔχομεν στιγμῆς καὶ τόπου
στιγμῆς, ὥστ' εἰ μηδὲ ταύτης ἕτερόν ἐστιν ὁ τόπος, οὐδὲ τῶν ἄλλων οὐδενός,
οὐδ' ἐστί τι παρ' ἕκαστον τούτων ὁ τόπος. τί γὰρ ἄν ποτε καὶ θείημεν εἶναι
τὸν τόπον; οὔτε γὰρ στοιχεῖον οὔτ' ἐκ στοιχείων οἷόν τε εἶναι τοιαύτην
ἔχοντα φύσιν, οὔτε τῶν σωματικῶν οὔτε τῶν ἀσωμάτων· μέγεθος μὲν γὰρ ἔχει,
σῶμα δ' οὐδέν· ἔστι δὲ τὰ μὲν τῶν αἰσθητῶν στοιχεῖα σώματα, ἐκ δὲ τῶν
νοητῶν οὐδὲν γίγνεται μέγεθος. ἔτι δὲ καὶ τίνος ἄν τις θείη τοῖς οὖσιν
αἴτιον εἶναι τὸν τόπον; οὐδεμία γὰρ αὐτῷ ὑπάρχει αἰτία τῶν τεττάρων· οὔτε
γὰρ ὡς ὕλη τῶν ὄντων (οὐδὲν γὰρ ἐξ αὐτοῦ συνέστηκεν) οὔτε ὡς εἶδος καὶ
λόγος τῶν πραγμάτων οὔθ' ὡς τέλος, οὔτε κινεῖ τὰ ὄντα. ἔτι δὲ καὶ αὐτὸς εἰ
ἔστι τι τῶν ὄντων, ποὺ ἔσται. ἡ γὰρ Ζήνωνος ἀπορία ζητεῖ τινὰ λόγον· εἰ
γὰρ πᾶν τὸ ὂν ἐν τόπῳ, δῆλον ὅτι καὶ τοῦ τόπου τόπος ἔσται, καὶ τοῦτο εἰς
ἄπειρον. ἔτι ὥσπερ ἅπαν σῶμα ἐν τόπῳ, οὕτω καὶ ἐν τόπῳ ἅπαντι σῶμα· πῶς
οὖν ἐροῦμεν περὶ τῶν αὐξανομένων; ἀνάγκη γὰρ ἐκ τούτων συναύξεσθαι αὐτοῖς
τὸν τόπον, εἰ μήτ' ἐλάττων μήτε μείζων ὁ τόπος ἑκάστου. διὰ μὲν οὖν τούτων
οὐ μόνον τί ἐστιν, ἀλλὰ καὶ εἰ ἔστιν, ἀπορεῖν ἀναγκαῖον.
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Traduction française :
[4,3] CHAPITRE III.
§ 1. Une fois fixés sur l'existence de l'espace, il n'en reste
pas moins difficile de savoir ce qu'il est. L'espace est-il la
masse quelconque d'un corps? On est-il quelque nature
différente? Notre première recherche, en effet, doit être de
savoir à quel genre il appartient.
§ 2. L'espace a bien les trois dimensions, longueur, largeur
et profondeur, qui déterminent toute espèce de corps. Mais
il est impossible que l'espace soit un corps; car il y aurait
ainsi deux corps dans un même lieu.
§ 3. D'autre part, le corps devant avoir un lieu et une place,
il est évident aussi que la surface et les autres limites du
corps doivent également en avoir une ; car le même
raisonnement peut s'appliquer à elles, puisque là où il y
avait antérieurement les surfaces de l'eau, il peut y avoir
ensuite les surfaces de l'air, qui en auront pris la place,
Toutefois il n'y a aucune différence appréciable entre le
point et le lieu du point, de telle sorte que, si le lieu du
point n'est pas autre que le point lui-même, le lieu ne
différera non plus dans aucun des autres cas; et l'espace
alors n'est absolument rien en dehors de chacun de ces objets.
§ 4. Qu'est-ce donc que l'espace devra être pour nous et
comment faut-il le considérer? Avec la nature qu'il a, il ne
peut ni être un élément, ni être un composé d'éléments,
soit corporels, soit incorporels. Il a de la grandeur sans
cependant être un corps; or, les éléments des corps
sensibles sont des corps eux-mêmes; et les éléments
purement intelligibles ne forment jamais une grandeur.
§ 5. On demande en outre : De quoi l'espace peut-il être
considéré comme cause pour les êtres? On ne trouve en lui
aucune des quatre causes ; et l'on ne petit le regarder ni
comme la matière des êtres, puisqu'aucun être n'est
composé d'espace, ni comme la forme et la raison des
choses, ni comme leur fin, pas plus qu'il ne peut en être le
moteur.
§ 6. Ajoutez ceci encore : Si l'espace lui-même doit
compter parmi les êtres, où sera-t-il placé? Et alors le
doute de Zénon ne laisse pas que d'exiger quelque
réponse; car si tout être est dans un lieu, il est clair qu'il y
aura un lieu pour le lieu lui-même, et ceci à l'infini.
§ 7. Enfin, si de même que tout corps est dans un lieu qu'il
occupe, il faut aussi que le corps soit dans l'espace tout
entier; comment expliquerons-nous le développement des
corps qui croissent? Car, d'après ces principes, il faut
nécessairement que le lieu qu'ils occupent se développe en
même temps qu'eux, si le lieu de chaque chose ne peut
être, ni plus grand, ni plus petit que la chose même.
§8. Telles sont les questions qu'il faut nécessairement
résoudre pour savoir non pas seulement ce qu'est l'espace,
mais même pour savoir si il est.
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