[4,8] CHAPITRE VIII.
Τὸν αὐτὸν δὲ τρόπον ὑποληπτέον εἶναι τοῦ φυσικοῦ θεωρῆσαι καὶ περὶ κενοῦ,
εἰ ἔστιν ἢ μή, καὶ πῶς ἔστι, καὶ τί ἐστιν, ὥσπερ καὶ περὶ τόπου· καὶ γὰρ
παραπλησίαν ἔχει τήν τε ἀπιστίαν καὶ τὴν πίστιν διὰ τῶν ὑπολαμβανομένων·
οἷον γὰρ τόπον τινὰ καὶ ἀγγεῖον τὸ κενὸν τιθέασιν οἱ λέγοντες, δοκεῖ δὲ
πλῆρες μὲν εἶναι, ὅταν ἔχῃ τὸν ὄγκον οὗ δεκτικόν ἐστιν, ὅταν δὲ στερηθῇ,
κενόν, ὡς τὸ αὐτὸ μὲν ὂν κενὸν καὶ πλῆρες καὶ τόπον, τὸ δ' εἶναι αὐτοῖς οὐ
ταὐτὸ ὄν. ἄρξασθαι δὲ δεῖ τῆς σκέψεως λαβοῦσιν ἅ τε λέγουσιν οἱ φάσκοντες
εἶναι καὶ πάλιν ἃ λέγουσιν οἱ μὴ φάσκοντες, καὶ τρίτον τὰς κοινὰς περὶ
αὐτῶν δόξας. οἱ μὲν οὖν δεικνύναι πειρώμενοι ὅτι οὐκ ἔστιν, οὐχ ὃ
βούλονται λέγειν οἱ ἄνθρωποι κενόν, τοῦτ' ἐξελέγχουσιν, ἀλλ' <ὃ>
ἁμαρτάνοντες λέγουσιν. ὥσπερ Ἀναξαγόρας καὶ οἱ τοῦτον τὸν τρόπον
ἐλέγχοντες. ἐπιδεικνύουσι γὰρ ὅτι ἐστίν τι ὁ ἀήρ, στρεβλοῦντες τοὺς ἀσκοὺς
καὶ δεικνύντες ὡς ἰσχυρὸς ὁ ἀήρ, καὶ ἐναπολαμβάνοντες ἐν ταῖς κλεψύδραις.
οἱ δὲ ἄνθρωποι βούλονται κενὸν εἶναι διάστημα ἐν ᾧ μηδέν ἐστι σῶμα
αἰσθητόν· οἰόμενοι δὲ τὸ ὂν ἅπαν εἶναι σῶμα φασίν, ἐν ᾧ ὅλως μηδέν ἐστι,
τοῦτ' εἶναι κενόν, διὸ τὸ πλῆρες ἀέρος κενὸν εἶναι. οὔκουν τοῦτο δεῖ
δεικνύναι, ὅτι ἐστί τι ὁ ἀήρ, ἀλλ' ὅτι οὐκ ἔστι διάστημα ἕτερον τῶν
σωμάτων, οὔτε χωριστὸν οὔτε ἐνεργείᾳ ὄν, ὃ διαλαμβάνει τὸ πᾶν σῶμα ὥστε
εἶναι μὴ συνεχές, καθάπερ λέγουσιν Δημόκριτος καὶ Λεύκιππος καὶ ἕτεροι
πολλοὶ τῶν φυσιολόγων, ἢ καὶ εἴ τι ἔξω τοῦ παντὸς σώματός ἐστιν ὄντος
συνεχοῦς.
οὗτοι μὲν οὖν οὐ κατὰ θύρας πρὸς τὸ πρόβλημα ἀπαντῶσιν, ἀλλ' οἱ φάσκοντες
εἶναι μᾶλλον. λέγουσιν δ' ἓν μὲν ὅτι κίνησις ἡ κατὰ τόπον οὐκ ἂν εἴη (αὕτη
δ' ἐστὶ φορὰ καὶ αὔξησις)· οὐ γὰρ ἂν δοκεῖν εἶναι κίνησιν, εἰ μὴ εἴη
κενόν· τὸ γὰρ πλῆρες ἀδύνατον εἶναι δέξασθαί τι. εἰ δὲ δέξεται καὶ ἔσται
δύο ἐν ταὐτῷ, ἐνδέχοιτ' ἂν καὶ ὁποσαοῦν εἶναι ἅμα σώματα· τὴν γὰρ
διαφοράν, δι' ἣν οὐκ ἂν εἴη τὸ λεχθέν, οὐκ ἔστιν εἰπεῖν. εἰ δὲ τοῦτο
ἐνδέχεται, καὶ τὸ μικρότατον δέξεται τὸ μέγιστον· πολλὰ γὰρ μικρὰ τὸ μέγα
ἐστίν· ὥστε εἰ πολλὰ ἴσα ἐνδέχεται ἐν ταὐτῷ εἶναι, καὶ πολλὰ ἄνισα.
Μέλισσος μὲν οὖν καὶ δείκνυσιν ὅτι τὸ πᾶν ἀκίνητον ἐκ τούτων· εἰ γὰρ
κινήσεται, ἀνάγκη εἶναι (φησί) κενόν, τὸ δὲ κενὸν οὐ τῶν ὄντων. ἕνα μὲν
οὖν τρόπον ἐκ τούτων δεικνύουσιν ὅτι ἔστιν τι κενόν, ἄλλον δ' ὅτι φαίνεται
ἔνια συνιόντα καὶ πιλούμενα, οἷον καὶ τὸν οἶνόν φασι δέχεσθαι μετὰ τῶν
ἀσκῶν τοὺς πίθους, ὡς εἰς τὰ ἐνόντα κενὰ συνιόντος τοῦ πυκνουμένου
σώματος. ἔτι δὲ καὶ ἡ αὔξησις δοκεῖ πᾶσι γίγνεσθαι διὰ κενοῦ· τὴν μὲν γὰρ
τροφὴν σῶμα εἶναι, δύο δὲ σώματα ἀδύνατον ἅμα εἶναι. μαρτύριον δὲ καὶ τὸ
περὶ τῆς τέφρας ποιοῦνται, ἣ δέχεται ἴσον ὕδωρ ὅσον τὸ ἀγγεῖον τὸ κενόν.
εἶναι δ' ἔφασαν καὶ οἱ Πυθαγόρειοι κενόν, καὶ ἐπεισιέναι αὐτὸ τῷ οὐρανῷ ἐκ
τοῦ ἀπείρου πνεύματος ὡς ἀναπνέοντι καὶ τὸ κενόν, ὃ διορίζει τὰς φύσεις,
ὡς ὄντος τοῦ κενοῦ χωρισμοῦ τινὸς τῶν ἐφεξῆς καὶ {τῆς} διορίσεως· καὶ
τοῦτ' εἶναι πρῶτον ἐν τοῖς ἀριθμοῖς· τὸ γὰρ κενὸν διορίζειν τὴν φύσιν
αὐτῶν. ἐξ ὧν μὲν οὖν οἱ μέν φασιν εἶναι οἱ δ' οὔ φασι, σχεδὸν τοιαῦτα καὶ
τοσαῦτά ἐστιν.
| [4,8] CHAPITRE VIII.
§ 1. Il semble que c'est par la même méthode employée
pour l'espace que le physicien doit étudier le vide, et savoir
si le vide est ou n'est pas, comment il est et ce qu'il est;
car on peut avoir sur le vide à peu près les mêmes doutes
ou les mêmes convictions que sur l'espace, d'après les
systèmes dont il a été l'objet. En effet, ceux qui croient au
vide le représentent en général comme un certain espace et
une sorte de vase et de récipient. On croit qu'il y a du plein
quand ce récipient contient le corps qu'il est susceptible de
recevoir ; et quand il en est privé, il semble qu'il y a du
vide. Donc, on suppose que le vide, le plein et l'espace sont
au fond la même chose, et qu'il n'y a entr'eux qu'une
simple différence de manière d'être.
§ 2. Pour commencer cette recherche, il faut recueillir
d'abord les arguments de ceux qui croient à l'existence du
vide, puis ensuite les arguments de ceux qui nient
l'existence du vide, et, en troisième lieu, les opinions
communément répandues sur ce sujet.
§ 3. Ceux qui s'efforcent de prouver qu'il n'y a point de
vide, ont le tort de ne point attaquer précisément l'idée que
les hommes se font généralement de ce qu'ils appellent le
vide, mais les définitions erronées qu'ils en donnent. C'est
ce que fait Anaxagore et ceux qui l'imitent dans son
procédé de réfutation. Ainsi, ils démontrent fort bien
l'existence de l'air et toute la puissance de l'air, en pressant
des outres d'où ils le font sortir, et en le recevant dans des
clepsydres. Mais l'opinion vulgaire des hommes entend, en
général, par le vide, un intervalle dans lequel il n'y a aucun
corps perceptible aux sens; et comme on croit vulgairement
aussi que tout ce qui existe a un corps, on dit que le vide
est ce dans quoi il n'y a rien. Par suite, le vide n'est que ce
qui est plein d'air. Mais ce dont il s'agit ce n'est pas de
démontrer que l'air est quelque chose; c'est de prouver
qu'il n'existe point d'étendue, d'intervalle différent des
corps, ni séparable d'eux, ni en acte, qui pénètre tout corps
quel qu'il soit, de telle sorte que le corps n'est plus continu,
opinion que soutiennent Démocrite et Leucippe, et tant
d'autres naturalistes; et enfin qu'il peut y avoir encore
quelque chose comme le vide hors du corps entier qui reste
continu, Ainsi, les philosophes dont je parle n'ont pas
même posé le pied sur le seuil de la question.
§ 4. Ceux qui affirment l'existence du vide se sont
rapprochés davantage de la vérité. Un premier point qu'ils
soutiennent, « c'est que sans le vide il n'y a pas de
mouvement possible dans l'espace; et, par le mouvement
dans l'espace, on entend ou le déplacement ou
l'accroissement sur place, puisque le mouvement, s'il n'y
avait a point de vide, ne pourrait avoir lieu. Le plein
évidemment ne peut rien admettre; et s'il admettait
quelque chose et qu'il y eût alors deux corps dans un seul
et même lieu, il n'y aurait pas de raison pour que tous les
corps. quel qu'en fût le nombre, ne pussent s'y trouver en
même temps; car on ne saurait indiquer ici une différence
qui ferait que cette supposition cessât d'être admissible.
Mais si cela est possible, le plus petit pourrait alors recevoir
et contenir le plus grand, puisque la réunion de beaucoup
de petites choses en forme une grande; et, par conséquent,
si plusieurs choses égales peuvent être dans un seul et
même lieu, plusieurs choses inégales pourront y être tout
aussi bien. »
§ 5. C'est même en partant de ces principes que Mélissus
prétend démontrer que l'univers est immobile. « Pour que
l'univers se meuve, dit-il, il faut nécessairement du vide ;
mais le vide ne compte pas parmi les êtres. »
§ 6. Ainsi, à l'aide de ces principes, ces philosophes
démontrent d'une première façon l'existence du vide. Mais
ils la démontrent encore d'une autre manière, en observant
qu'il y a des choses qui semblent se rapprocher et se
contracter. Par exemple, disent-ils, les tonneaux
contiennent le vin avec les outres, comme si le corps se
condensait dans les vides qui se trouvent à son intérieur.
§ 7. Dans un autre ordre de faits, il paraît bien que dans
tous les êtres le développement ne peut se faire qu'à la
condition du vide; car les aliments que les êtres absorbent
sont un corps; et il est impossible que deux corps soient
ensemble dans un seul et même lieu.
§ 8. Enfin, on donne encore pour preuve de l'existence du
vide le phénomène de la cendre, qui reçoit autant d'eau
que peut en contenir le vase où elle est quand il est vide.
§ 9. Les Pythagoriciens aussi soutenaient l'existence du
vide; et selon eux, c'est par l'action du souffle infini, que le
vide entre dans le ciel qui a une sorte de respiration; dans
leurs théories, le vide est ce qui limite les natures, comme
si le vide était une sorte de séparation des corps qui se
suivent, et comme s'il était leur délimitation. À en croire les
Pythagoriciens, le vide se trouve primitivement dans les
nombres; car c'est le vide qui détermine leur nature propre
et abstraite.
§ 10. Tel est à peu près l'ensemble de toutes les idées que
l'on a émises, dans un sens ou dans l'autre, soit pour
affirmer, soit pour nier l'existence du vide.
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