Texte grec :
[2,2] ΚΕΦΑΛΑΙΟΝ Β'.
§ 1. Ἐπεὶ δὲ διώρισται ποσαχῶς ἡ φύσις, μετὰ τοῦτο θεωρητέον τίνι διαφέρει
ὁ μαθηματικὸς τοῦ φυσικοῦ (καὶ γὰρ ἐπίπεδα καὶ στερεὰ ἔχει τὰ φυσικὰ
σώματα καὶ μήκη καὶ στιγμάς, περὶ ὧν σκοπεῖ ὁ μαθηματικός).
§ 2. Ἔτι εἰ ἡ ἀστρολογία ἑτέρα ἢ μέρος τῆς φυσικῆς.
§ 3. Εἰ γὰρ τοῦ φυσικοῦ τὸ τί ἐστιν ἥλιος ἢ σελήνη εἰδέναι, τῶν δὲ
συμβεβηκότων καθ' αὑτὰ μηδέν, ἄτοπον, ἄλλως τε καὶ ὅτι φαίνονται λέγοντες
οἱ περὶ φύσεως καὶ περὶ σχήματος σελήνης καὶ ἡλίου, καὶ δὴ καὶ πότερον
σφαιροειδὴς ἡ γῆ καὶ ὁ κόσμος ἢ οὔ.
§ 4. Περὶ τούτων μὲν οὖν πραγματεύεται καὶ ὁ μαθηματικός, ἀλλ' οὐχ ᾗ
φυσικοῦ σώματος πέρας ἕκαστον· οὐδὲ τὰ συμβεβηκότα θεωρεῖ ᾗ τοιούτοις οὖσι
συμβέβηκεν· διὸ καὶ χωρίζει· χωριστὰ γὰρ τῇ νοήσει κινήσεώς ἐστι, καὶ
οὐδὲν διαφέρει, οὐδὲ γίγνεται ψεῦδος χωριζόντων.
§ 5. Λανθάνουσι δὲ τοῦτο ποιοῦντες καὶ οἱ τὰς ἰδέας λέγοντες· τὰ γὰρ
φυσικὰ χωρίζουσιν ἧττον ὄντα χωριστὰ τῶν μαθηματικῶν.
§ 6. Γίγνοιτο δ' ἂν τοῦτο δῆλον, εἴ τις ἑκατέρων πειρῷτο λέγειν τοὺς
ὅρους, καὶ αὐτῶν καὶ τῶν συμβεβηκότων. Τὸ μὲν γὰρ περιττὸν ἔσται καὶ τὸ
ἄρτιον καὶ τὸ εὐθὺ καὶ τὸ καμπύλον, ἔτι δὲ ἀριθμὸς καὶ γραμμὴ καὶ σχῆμα,
ἄνευ κινήσεως, σὰρξ δὲ καὶ ὀστοῦν καὶ ἄνθρωπος οὐκέτι, ἀλλὰ ταῦτα ὥσπερ
ῥὶς σιμὴ ἀλλ' οὐχ ὡς τὸ καμπύλον λέγεται.
§ 7. Δηλοῖ δὲ καὶ τὰ φυσικώτερα τῶν μαθημάτων, οἷον ὀπτικὴ καὶ ἁρμονικὴ
καὶ ἀστρολογία· ἀνάπαλιν γὰρ τρόπον τιν' ἔχουσιν τῇ γεωμετρίᾳ. Ἡ μὲν γὰρ
γεωμετρία περὶ γραμμῆς φυσικῆς σκοπεῖ, ἀλλ' οὐχ ᾗ φυσική, ἡ δ' ὀπτικὴ
μαθηματικὴν μὲν γραμμήν, ἀλλ' οὐχ ᾗ μαθηματικὴ ἀλλ' ᾗ φυσική.
§ 8. Ἐπεὶ δ' ἡ φύσις διχῶς, τό τε εἶδος καὶ ἡ ὕλη, ὡς ἂν εἰ περὶ σιμότητος
σκοποῖμεν τί ἐστιν, οὕτω θεωρητέον· ὥστ' οὔτ' ἄνευ ὕλης τὰ τοιαῦτα οὔτε
κατὰ τὴν ὕλην.
§ 9. Καὶ γὰρ δὴ καὶ περὶ τούτου ἀπορήσειεν ἄν τις, ἐπεὶ δύο αἱ φύσεις,
περὶ ποτέρας τοῦ φυσικοῦ. Ἢ περὶ τοῦ ἐξ ἀμφοῖν; ἀλλ' εἰ περὶ τοῦ ἐξ
ἀμφοῖν, καὶ περὶ ἑκατέρας. Πότερον οὖν τῆς αὐτῆς ἢ ἄλλης ἑκατέραν
γνωρίζειν;
§ 10. Εἰς μὲν γὰρ τοὺς ἀρχαίους ἀποβλέψαντι δόξειεν ἂν εἶναι τῆς ὕλης (ἐπὶ
μικρὸν γάρ τι μέρος Ἐμπεδοκλῆς καὶ Δημόκριτος τοῦ εἴδους καὶ τοῦ τί ἦν
εἶναι ἥψαντο).
§ 11. Εἰ δὲ ἡ τέχνη μιμεῖται τὴν φύσιν, τῆς δὲ αὐτῆς ἐπιστήμης εἰδέναι τὸ
εἶδος καὶ τὴν ὕλην μέχρι του (οἷον ἰατροῦ ὑγίειαν καὶ χολὴν καὶ φλέγμα, ἐν
οἷς ἡ ὑγίεια, ὁμοίως δὲ καὶ οἰκοδόμου τό τε εἶδος τῆς οἰκίας καὶ τὴν ὕλην,
ὅτι πλίνθοι καὶ ξύλα· ὡσαύτως δὲ καὶ ἐπὶ τῶν ἄλλων), καὶ τῆς φυσικῆς ἂν
εἴη τὸ γνωρίζειν ἀμφοτέρας τὰς φύσεις.
§ 12. Ἔτι τὸ οὗ ἕνεκα καὶ τὸ τέλος τῆς αὐτῆς, καὶ ὅσα τούτων ἕνεκα. Ἡ δὲ
φύσις τέλος καὶ οὗ ἕνεκα (ὧν γὰρ συνεχοῦς τῆς κινήσεως οὔσης ἔστι τι
τέλος, τοῦτο <τὸ> ἔσχατον καὶ τὸ οὗ ἕνεκα· διὸ καὶ ὁ ποιητὴς γελοίως
προήχθη εἰπεῖν
"Ἔχει τελευτήν, ἧσπερ οὕνεκ' ἐγένετο· "
Βούλεται γὰρ οὐ πᾶν εἶναι τὸ ἔσχατον τέλος, ἀλλὰ τὸ βέλτιστον).
§ 13. Ἐπεὶ καὶ ποιοῦσιν αἱ τέχναι τὴν ὕλην αἱ μὲν ἁπλῶς αἱ δὲ εὐεργόν, καὶ
χρώμεθα ὡς ἡμῶν ἕνεκα πάντων ὑπαρχόντων (ἐσμὲν γάρ πως καὶ ἡμεῖς τέλος·
διχῶς γὰρ τὸ οὗ ἕνεκα· εἴρηται δ' ἐν τοῖς περὶ φιλοσοφίας). Δύο δὲ αἱ
ἄρχουσαι τῆς ὕλης καὶ γνωρίζουσαι τέχναι, ἥ τε χρωμένη καὶ τῆς ποιητικῆς ἡ
ἀρχιτεκτονική. Διὸ καὶ ἡ χρωμένη ἀρχιτεκτονική πως, διαφέρει δὲ ᾗ ἡ μὲν
τοῦ εἴδους γνωριστική, ἡ ἀρχιτεκτονική, ἡ δὲ ὡς ποιητική, τῆς ὕλης· ὁ μὲν
γὰρ κυβερνήτης ποῖόν τι τὸ εἶδος τοῦ πηδαλίου γνωρίζει καὶ ἐπιτάττει, ὁ δ'
ἐκ ποίου ξύλου καὶ ποίων κινήσεων ἔσται. Ἐν μὲν οὖν τοῖς κατὰ τέχνην ἡμεῖς
ποιοῦμεν τὴν ὕλην τοῦ ἔργου ἕνεκα, ἐν δὲ τοῖς φυσικοῖς ὑπάρχει οὖσα.
§ 14. Ἔτι τῶν πρός τι ἡ ὕλη· ἄλλῳ γὰρ εἴδει ἄλλη ὕλη.
§ 15. Μέχρι δὴ πόσου τὸν φυσικὸν δεῖ εἰδέναι τὸ εἶδος καὶ τὸ τί ἐστιν; ἢ
ὥσπερ ἰατρὸν νεῦρον ἢ χαλκέα χαλκόν, μέχρι τοῦ τίνος {γὰρ} ἕνεκα ἕκαστον,
καὶ περὶ ταῦτα ἅ ἐστι χωριστὰ μὲν εἴδει, ἐν ὕλῃ δέ; ἄνθρωπος γὰρ ἄνθρωπον
γεννᾷ καὶ ἥλιος. Πῶς δ' ἔχει τὸ χωριστὸν καὶ τί ἐστι, φιλοσοφίας ἔργον
διορίσαι τῆς πρώτης.
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Traduction française :
[2,2] CHAPITRE II.
§ 1. Après avoir parcouru toutes les acceptions du mot de nature,
nous devons dire maintenant en quoi l'étude des mathématiques diffère
de l'étude de la physique ; car les corps de la nature ont des surfaces,
des solidités, des lignes et des points, qui sont les objets particuliers des
recherches du mathématicien.
§ 2. Il faut voir en outre si l'astronomie diffère de la physique, ou si
elle n'en est qu'une branche.
§ 3. Car si c'est au physicien qu'il appartient de savoir ce que sont le
soleil ou la lune dans leur essence, on pourrait trouver étrange qu'il ne lui
appartint pas aussi d'étudier les phénomènes secondaires que ces corps
présentent, surtout quand on voit qu'en général ceux qui s'occupent de
l'étude de la nature traitent aussi de la figure du soleil et de la lune, et
qu'ils recherchent, par exemple, si la terre et le monde sont sphériques
ou ne le sont pas.
§ 4. Le mathématicien, quand il étudie les surfaces, les lignes et les
points, ne s'en occupe pas en tant que ce sont là les limites d'un corps
naturel, et il ne regarde pas davantage aux propriétés qui peuvent
accidentellement leur appartenir en tant que ces propriétés appartiennent
à des êtres réels : aussi il peut abstraire ces notions, que l'entendement,
en effet, sépare sans peine du mouvement ; et cette abstraction, qui
n'amène aucune différence, n'est pas faite pour produire d'erreur.
§ 5. C'est là ce que font précisément aussi ceux qui admettent le
système des Idées, sans d'ailleurs s'en apercevoir ; car ils abstraient les
choses physiques, qui sont bien moins susceptibles d'abstraction que les
choses mathématiques.
§ 6. Ceci devient parfaitement clair, quand on se donne la peine de
comparer de part et d'autre les définitions de ces choses et de leurs
accidents. Ainsi, le pair et l'impair, le droit et le courbé, et d'un autre point
de vue, le nombre, la ligne, la figure, peuvent exister sans le mouvement,
tandis que des choses telles que la chair, les os, l'homme, ne peuvent
pas se concevoir sans mouvement ; et l'on dénomme toutes ces
dernières choses comme on dénomme le nez camard, et non comme on
le fait pour le courbe.
§ 7. C'est bien là encore ce que prouvent les parties des
mathématiques qui se rapprochent le plus de la physique ; l'optique,
l'harmonie et l'astronomie. En un certain sens, elles sont tout à fait
l'inverse de la géométrie. Ainsi, tandis que la géométrie étudie la ligne
qui est bien physique, mais qu'elle ne l'étudie pas telle que cette ligne est
dans la nature, l'optique, au contraire, étudie la ligne mathématique, non
pas en tant que mathématique, mais en tant qu'elle joue un rôle dans la
réalité naturelle.
§ 8. Comme le mot de Nature peut être pris en un double sens, et
qu'il signifie à la fois la forme et la matière, il faut étudier ici ce mot,
comme nous le ferions si nous avions à nous demander ce que c'est que
la qualité de "camus" car les choses de ce genre ne peuvent exister sans
matière, et pourtant elles ne sont pas purement matérielles.
§ 9. Mais du moment qu'on reconnaît deux natures, on peut hésiter
doublement à savoir, d'une part, de laquelle des deux doit s'occuper le
physicien, et d'autre part, s'il ne doit pas s'occuper uniquement de leur
résultat commun. Mais s'il doit étudier ce résultat, ne faut-il pas aussi
qu'il les étudie l'une et l'autre ? Par suite, connaître chacune de ces deux
natures, est-ce le fait d'une même science ou d'une science différente ?
§ 10. Si l'on regarde aux anciens philosophes, on pourrait croire que
l'objet de la physique n'est que d'étudier la matière ; car Démocrite et
Empédocle ont à peine effleuré la question de la forme et de l'essence.
§ 11. Mais s'il est vrai que l'art imite la nature, on peut dire que c'est à
une seule et même science d'étudier jusqu'à un certain point et tout à la
fois la forme et la matière. Si par exemple, c'est au médecin d'étudier la
santé, et de plus la bile et le flegme dans lesquels la santé consiste ; si
de même l'architecte s'occupe tout ensemble de la forme de la maison et
de la matière de la maison, les murailles et les bois, et ainsi de tout le
reste, on en peut conclure que la physique doit étudier les deux natures
à la fois.
§ 12. Ajoutez que c'est à une seule et même science d'étudier et le
pourquoi et la fin des choses, et tous les éléments qui y concourent. Or
la nature est la fin et le pourquoi des choses ; car là où le mouvement
étant continu, il y a une fin au mouvement, cette fin est le dernier terme
et le pourquoi. Aussi l'exclamation du poète est-elle assez ridicule, quand
il dit : "C'est la fin pour laquelle il avait été fait !"
Car, il ne suffit pas qu'un terme soit le dernier pour qu'il soit toujours une
fin véritable, et il n'y a que le bien qui en soit une.
§ 13. Ainsi les arts travaillent la matière ; mais les uns la travaillent
purement et simplement, tandis que les autres la façonnent du mieux
qu'ils peuvent à notre usage ; et nous nous servons des choses comme
si elles n'existaient qu'en vue de nous, puisqu'en effet nous aussi nous
sommes bien une sorte de fin. Car le pourquoi peut s'entendre de deux
façons, ainsi que nous l'avons dit dans nos livres intitulés : "De la
Philosophie". Il y a donc deux espèces d'arts qui commandent à la
matière et qui en jugent, l'un de ces arts étant celui qui emploie les
choses, et l'autre dirigeant comme un habile architecte, l'industrie qui les
façonne. L'art qui emploie les choses joue bien aussi en quelque sorte le
rôle d'architecte dirigeant ; mais il y a cette différence entre les deux arts
que l'un, l'art architectonique, connaît de la forme, tandis que l'autre, qui
façonne les choses, connaît de la matière. Ainsi, le pilote du navire
connaît quelle doit être la forme du gouvernail et la commande, tandis
que le constructeur sait de quel bois le gouvernail doit être fait, et quels
mouvements on en exige. Dans les produits de l'art, c'est nous qui
façonnons la matière en vue de l'œuvre à laquelle nous la destinons;
mais dans les choses de la nature, la matière est toute faite.
§ 14. Enfin, il faut ajouter que la matière n'est qu'une relation,
puisque la matière varie avec la forme et qu'à une autre forme répond
une autre matière.
§ 15. Mais jusqu'à quel point le physicien doit-il étudier la forme et
l'essence des choses ? Doit-il les connaître comme le médecin connaît
ce que c'est que les nerfs, ou le fondeur ce que c'est que l'airain qu'il
fond, c'est-à-dire dans une certaine mesure, chacune de ces choses
servant en effet à une certaine destination ? et doit-il s'occuper des
choses qui, bien que séparables au point de vue de la forme, n'en sont
pas moins toujours dans la matière ? Car l'homme et le soleil engendrent
l'homme. Quant à savoir ce que c'est que le séparable, et quelle est son
essence, c'est une question spécialement réservée à la philosophie première.
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