HODOI ELEKTRONIKAI
Corpora

Aristote, Éthique à Nicomaque, livre VI

λέγεται



Texte grec :

[6,1143] X. Ἔστι δὲ καὶ ἡ σύνεσις καὶ ἡ εὐσυνεσία, (1143a) (1) καθ' ἃς λέγομεν συνετοὺς καὶ εὐσυνέτους, οὔθ' ὅλως τὸ αὐτὸ ἐπιστήμῃ ἢ δόξῃ (πάντες γὰρ ἂν ἦσαν συνετοί) οὔτε τις μία τῶν κατὰ μέρος ἐπιστημῶν, οἷον ἡ ἰατρικὴ περὶ ὑγιεινῶν, ἡ γεωμετρία περὶ μεγέθη· οὔτε γὰρ περὶ τῶν ἀεὶ ὄντων καὶ (5) ἀκινήτων ἡ σύνεσίς ἐστιν οὔτε περὶ τῶν γιγνομένων ὁτουοῦν, ἀλλὰ περὶ ὧν ἀπορήσειεν ἄν τις καὶ βουλεύσαιτο. Διὸ περὶ τὰ αὐτὰ μὲν τῇ φρονήσει ἐστίν, οὐκ ἔστι δὲ τὸ αὐτὸ σύνεσις καὶ φρόνησις. Ἡ μὲν γὰρ φρόνησις ἐπιτακτική ἐστιν· τί γὰρ δεῖ πράττειν ἢ μή, τὸ τέλος αὐτῆς ἐστίν· ἡ δὲ σύνεσις (10) κριτικὴ μόνον. Ταὐτὸ γὰρ σύνεσις καὶ εὐσυνεσία καὶ συνετοὶ καὶ εὐσύνετοι. Ἔστι δ' οὔτε τὸ ἔχειν τὴν φρόνησιν οὔτε τὸ λαμβάνειν ἡ σύνεσις· ἀλλ' ὥσπερ τὸ μανθάνειν λέγεται συνιέναι, ὅταν χρῆται τῇ ἐπιστήμῃ, οὕτως ἐν τῷ χρῆσθαι τῇ δόξῃ ἐπὶ τὸ κρίνειν περὶ τούτων περὶ ὧν ἡ (15) φρόνησίς ἐστιν, ἄλλου λέγοντος, καὶ κρίνειν καλῶς· τὸ γὰρ εὖ τῷ καλῶς τὸ αὐτό. Καὶ ἐντεῦθεν ἐλήλυθε τοὔνομα ἡ σύνεσις, καθ' ἣν εὐσύνετοι, ἐκ τῆς ἐν τῷ μανθάνειν· λέγομεν γὰρ τὸ μανθάνειν συνιέναι πολλάκις. XI. Ἡ δὲ καλουμένη γνώμη, καθ' ἣν συγγνώμονας καὶ (20) ἔχειν φαμὲν γνώμην, ἡ τοῦ ἐπιεικοῦς ἐστὶ κρίσις ὀρθή. Σημεῖον δέ· τὸν γὰρ ἐπιεικῆ μάλιστά φαμεν εἶναι συγγνωμονικόν, καὶ ἐπιεικὲς τὸ ἔχειν περὶ ἔνια συγγνώμην. Ἡ δὲ συγγνώμη γνώμη ἐστὶ κριτικὴ τοῦ ἐπιεικοῦς ὀρθή· ὀρθὴ δ' ἡ τοῦ ἀληθοῦς. (25) Εἰσὶ δὲ πᾶσαι αἱ ἕξεις εὐλόγως εἰς ταὐτὸ τείνουσαι· λέγομεν γὰρ γνώμην καὶ σύνεσιν καὶ φρόνησιν καὶ νοῦν ἐπὶ τοὺς αὐτοὺς ἐπιφέροντες γνώμην ἔχειν καὶ νοῦν ἤδη καὶ φρονίμους καὶ συνετούς. Πᾶσαι γὰρ αἱ δυνάμεις αὗται τῶν ἐσχάτων εἰσὶ καὶ τῶν καθ' ἕκαστον· καὶ ἐν μὲν τῷ (30) κριτικὸς εἶναι περὶ ὧν ὁ φρόνιμος, συνετὸς καὶ εὐγνώμων ἢ συγγνώμων· τὰ γὰρ ἐπιεικῆ κοινὰ τῶν ἀγαθῶν ἁπάντων ἐστὶν ἐν τῷ πρὸς ἄλλον. Ἔστι δὲ τῶν καθ' ἕκαστα καὶ τῶν ἐσχάτων ἅπαντα τὰ πρακτά· καὶ γὰρ τὸν φρόνιμον δεῖ γινώσκειν αὐτά, καὶ ἡ σύνεσις καὶ ἡ γνώμη περὶ τὰ (35) πρακτά, ταῦτα δ' ἔσχατα. Καὶ ὁ νοῦς τῶν ἐσχάτων ἐπ' ἀμφότερα· καὶ γὰρ τῶν πρώτων ὅρων καὶ τῶν ἐσχάτων (1143b) (1) νοῦς ἐστὶ καὶ οὐ λόγος, καὶ ὁ μὲν κατὰ τὰς ἀποδείξεις τῶν ἀκινήτων ὅρων καὶ πρώτων, ὁ δ' ἐν ταῖς πρακτικαῖς τοῦ ἐσχάτου καὶ ἐνδεχομένου καὶ τῆς ἑτέρας προτάσεως· ἀρχαὶ γὰρ τοῦ οὗ ἕνεκα αὗται· ἐκ τῶν καθ' ἕκαστα γὰρ (5) τὰ καθόλου· τούτων οὖν ἔχειν δεῖ αἴσθησιν, αὕτη δ' ἐστὶ νοῦς. Διὸ καὶ φυσικὰ δοκεῖ εἶναι ταῦτα, καὶ φύσει σοφὸς μὲν οὐδείς, γνώμην δ' ἔχειν καὶ σύνεσιν καὶ νοῦν. Σημεῖον δ' ὅτι καὶ ταῖς ἡλικίαις οἰόμεθα ἀκολουθεῖν, καὶ ἥδε ἡ ἡλικία νοῦν ἔχει καὶ γνώμην, ὡς τῆς φύσεως αἰτίας οὔσης. (Διὸ (10) καὶ ἀρχὴ καὶ τέλος νοῦς· ἐκ τούτων γὰρ αἱ ἀποδείξεις καὶ περὶ τούτων.) Ὥστε δεῖ προσέχειν τῶν ἐμπείρων καὶ πρεσβυτέρων ἢ φρονίμων ταῖς ἀναποδείκτοις φάσεσι καὶ δόξαις οὐχ ἧττον τῶν ἀποδείξεων· διὰ γὰρ τὸ ἔχειν ἐκ τῆς ἐμπειρίας ὄμμα ὁρῶσιν ὀρθῶς. Τί μὲν οὖν ἐστὶν ἡ (15) φρόνησις καὶ ἡ σοφία, καὶ περὶ τί ἑκατέρα τυγχάνει οὖσα, καὶ ὅτι ἄλλου τῆς ψυχῆς μορίου ἀρετὴ ἑκατέρα, εἴρηται. XII. Διαπορήσειε δ' ἄν τις περὶ αὐτῶν τί χρήσιμοί εἰσιν. Ἡ μὲν γὰρ σοφία οὐδὲν θεωρήσει ἐξ ὧν ἔσται εὐδαίμων (20) ἄνθρωπος (οὐδεμιᾶς γάρ ἐστι γενέσεως), ἡ δὲ φρόνησις τοῦτο μὲν ἔχει, ἀλλὰ τίνος ἕνεκα δεῖ αὐτῆς; εἴπερ ἡ μὲν φρόνησίς ἐστιν ἡ περὶ τὰ δίκαια καὶ καλὰ καὶ ἀγαθὰ ἀνθρώπῳ, ταῦτα δ' ἐστὶν ἃ τοῦ ἀγαθοῦ ἐστὶν ἀνδρὸς πράττειν, οὐδὲν δὲ πρακτικώτεροι τῷ εἰδέναι αὐτά ἐσμεν, εἴπερ ἕξεις (25) αἱ ἀρεταί εἰσιν, ὥσπερ οὐδὲ τὰ ὑγιεινὰ οὐδὲ τὰ εὐεκτικά, ὅσα μὴ τῷ ποιεῖν ἀλλὰ τῷ ἀπὸ τῆς ἕξεως εἶναι λέγεται· οὐθὲν γὰρ πρακτικώτεροι τῷ ἔχειν τὴν ἰατρικὴν καὶ γυμναστικήν ἐσμεν. Εἰ δὲ μὴ τούτων χάριν φρόνιμον ῥητέον ἀλλὰ τοῦ γίνεσθαι, τοῖς οὖσι σπουδαίοις οὐθὲν ἂν εἴη χρήσιμος· (30) ἔτι δ' οὐδὲ τοῖς μὴ ἔχουσιν· οὐδὲν γὰρ διοίσει αὐτοὺς ἔχειν ἢ ἄλλοις ἔχουσι πείθεσθαι, ἱκανῶς τ' ἔχοι ἂν ἡμῖν ὥσπερ καὶ περὶ τὴν ὑγίειαν· βουλόμενοι γὰρ ὑγιαίνειν ὅμως οὐ μανθάνομεν ἰατρικήν. Πρὸς δὲ τούτοις ἄτοπον ἂν εἶναι δόξειεν, εἰ χείρων τῆς σοφίας οὖσα κυριωτέρα αὐτῆς ἔσται· (35) ἡ γὰρ ποιοῦσα ἄρχει καὶ ἐπιτάττει περὶ ἕκαστον. Περὶ δὴ τούτων λεκτέον· νῦν μὲν γὰρ ἠπόρηται περὶ αὐτῶν μόνον.

Traduction française :

[6,1143] X. Le discernement et le manque de discernement, (1143a) qui nous ont donné occasion d'appeler certaines personnes intelligentes, et d'autres stupides, n'est pas tout-à-fait la même chose que la science, ou l'opinion; car alors tous les hommes seraient intelligents. Ce n'est pas non plus une science à part, comme la médecine (car alors elle s'occuperait de ce qui est bon pour la santé), ou la géométrie, car celle-ci traite de la grandeur. D'ailleurs, le discernement n'est relatif ni aux choses qui sont éternelles et immuables, ni à celles qui sont produites (par la nature) de quelque manière que ce soit; mais il se rapporte à celles qui sont l'objet du doute ou de l'incertitude, et sur lesquelles on est dans le cas de délibérer. Ainsi donc il s'applique aux mêmes objets que la prudence; mais il n'est pas la même chose que la prudence. En effet, celle-ci ordonne et prescrit; sa fin est d'indiquer ce qu'il faut faire ou ne pas faire : la fonction du discernement est uniquement de juger; car discernement, ou intelligence exacte, sont la même chose; et on appelle intelligents, ceux qui ont un bon discernement. Au reste, le discernement ne consiste ni à avoir de la prudence, ni à en acquérir; mais de même qu'on se sert quelquefois du mot apprendre dans le sens de comprendre, lorsqu'il est question d'une science (dont on entend énoncer quelque proposition), ainsi quand on fait usage de ses opinions acquises, pour juger des objets auxquels s'applique la prudence (lorsqu'un autre en parle), et pour en bien juger, (on montre du discernement.) De là est venu le mot grec g-synesis(discernement ou coup-d'oeil), d'où l'on a fait g-eusynetos(intelligent), à cause de l'analogie de signification (entre g-synienai,comprendre, et g-manthanein, apprendre), car apprendre est souvent pris dans le sens de comprendre. XI. Ce qu'on appelle jugement est la faculté qui fait les hommes judicieux et de bon sens, et consiste dans un juste discernement de ce qui est équitable. La preuve, c'est que nous regardons l'homme équitable comme essentiellement indulgent, et nous reconnaissons la juste appréciation des choses à ce caractère d'indulgence. Or, l'indulgence est un jugement exact et juste de ce qui est bien; et ce jugement est juste, quand il est conforme à ce qui est vrai. Au reste, on ne saurait méconnaître, dans toutes ces habitudes ou dispositions, une même tendance; car le jugement est aussi appelé sagacité, prudence, intelligence, puisque l'on attribue l'intelligence aux mêmes personnes en qui l'on reconnaît un jugement sain, et qu'on les appelle des hommes prudents et entendus. C'est qu'en effet, toutes ces qualités s'appliquent ou se rapportent aux choses particulières et aux derniers termes (ou éléments, pour ainsi dire, de la délibération). Aussi le discernement, dans les choses dont juge la prudence, distingue-t-il l'homme intelligent, et judicieux, ou indulgent; car l'équité est le trait caractéristique et commun de tout ce qu'il y a de bon et de bien dans les rapports d'homme à homme. D'un autre côté, tout ce qui peut s'exécuter est du nombre des choses particulières, ou compris dans les derniers termes, et ne doit pas être ignoré de l'homme prudent. Or, la sagacité et le jugement s'appliquent aux choses qui sont à exécuter, et qui sont (comme on vient de le dire) les derniers termes ; mais l'esprit embrasse les deux sortes d'extrêmes, puisque les premiers (les principes, ou maximes générales), et les derniers (ou les résolutions définitives) sont également de son ressort, (1143b) et non pas (également) du ressort du raisonnement ou de la raison. Celle-ci s'occupe des termes immuables et primitifs (ou généraux) dans le procédé de démonstration (qui lui est propre); mais, quand il est question d'agir, c'est l'esprit qui intervient, parce que l'autre extrême, ou ce qu'il y a de contingent, de relatif à l'autre proposition, est de son ressort. Car les propositions elles-mêmes sont les principes des motifs (qui déterminent l'action), puisque le général se tire de la comparaison de tous les cas particuliers. Il faut donc qu'on ait le sentiment de ces cas-là; et l'esprit, ou l'entendement, est ce sentiment lui-même, ou le comprend en soi. Voilà pourquoi le sentiment et l'entendement sont un produit ou une création immédiate de la nature; et sans doute aucun homme n'est sage par nature, mais c'est de la nature qu'on tient le jugement, la sagacité et l'esprit. La preuve de cela, c'est que nous croyons que ces facultés ou propriétés se développent avec l'âge; cet âge (disons-nous) est celui de l'entendement et du bon sens, parce que c'est la nature qui les donne. Il suit de là que l'entendement est le principe et la fin; et ces deux choses sont, en effet, la source et le sujet des démonstrations. C'est pourquoi il faut faire autant d'attention aux assertions et aux opinions des personnes d'âge et d'expérience, même lorsqu'elles ne sont pas démontrée, que si c'étaient des démonstrations ; car le coup d'œil de l'expérience leur découvre les principes. J'ai donc fait voir ce que c'est que la sagesse et la prudence, à quels objets l'une et l'autre s'appliquent, et que chacune d'elles appartient à différentes parties de l'âme. XII. On pourrait demander, au sujet de ces deux facultés, à quoi elles sont utiles ; car les spéculations de la sagesse, par exemple, ne peuvent contribuer en rien (d'une manière directe) au bonheur de l'homme, puisqu'elles ne se rapportent à rien de ce qui peut être créé ou produit. Quant à la prudence, elle a bien cet avantage : mais quel besoin a-t-on d'elle, s'il est vrai qu'elle s'applique à ce qui est juste, beau et avantageux pour l'homme, et que c'est là ce qu'il appartient à l'homme vertueux de mettre en pratique? Car, si les vertus ne sont que des habitudes, nous n'en serons pas plus en état d'agir pour savoir tout cela; c'est comme tout ce qui, en fait de choses utiles à la santé et à la bonne disposition du corps , est reconnu pour dépendre, non pas de l'action, mais d'une disposition, ou manière d'être, particulière : on n'en sera pas plus en état de le produire, quand on posséderait la science de la médecine et celle de la gymnastique. Or, si ce n'est pas la connaissance ou la science qui peuvent faire qu'un homme soit regardé comme prudent, et si l'on ne doit le considérer comme tel que quand il l'est devenu, la prudence ne sera nullement utile à ceux qui sont vertueux. Elle ne servira pas même à ceux qui ne le sont pas : car, l'avoir eux-mêmes, ou se laisser conduire par ceux qui la possèdent , ce sera absolument la même chose; cela nous suffira, comme il nous suffit pour recouvrer la santé, de consulter le médecin, sans apprendre nous-mêmes la médecine. D'ailleurs, il semblerait étrange que cette qualité ou faculté, inférieure à la sagesse, eût cependant l'autorité sur elle; car c'est à la faculté active de commander et de prescrire, dans tous les cas, ce qu'il faut faire. Voilà donc des questions qu'il convient d'examiner maintenant, car jusqu'ici nous ne les avons proposées que comme des doutes.





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Dernière mise à jour : 22/05/2008