HODOI ELEKTRONIKAI
Corpora

Aristote, Éthique à Nicomaque, livre VI

ἔχει



Texte grec :

[6,1141] τὸ μὲν γὰρ ἐπιστητὸν ἀποδεικτόν, (1141a) (1) αἳ δὲ τυγχάνουσιν οὖσαι περὶ τὰ ἐνδεχόμενα ἄλλως ἔχειν. Οὐδὲ δὴ σοφία τούτων ἐστίν· τοῦ γὰρ σοφοῦ περὶ ἐνίων ἔχειν ἀπόδειξίν ἐστιν. Εἰ δὴ οἷς ἀληθεύομεν καὶ μηδέποτε διαψευδόμεθα περὶ τὰ μὴ ἐνδεχόμενα ἢ καὶ ἐνδεχόμενα ἄλλως (5) ἔχειν, ἐπιστήμη καὶ φρόνησίς ἐστι καὶ σοφία καὶ νοῦς, τούτων δὲ τῶν τριῶν μηδὲν ἐνδέχεται εἶναι (λέγω δὲ τρία φρόνησιν ἐπιστήμην σοφίαν), λείπεται νοῦν εἶναι τῶν ἀρχῶν. VII. Τὴν δὲ σοφίαν ἔν τε ταῖς τέχναις τοῖς ἀκριβεστάτοις (10) τὰς τέχνας ἀποδίδομεν, οἷον Φειδίαν λιθουργὸν σοφὸν καὶ Πολύκλειτον ἀνδριαντοποιόν, ἐνταῦθα μὲν οὖν οὐθὲν ἄλλο σημαίνοντες τὴν σοφίαν ἢ ὅτι ἀρετὴ τέχνης ἐστίν· εἶναι δέ τινας σοφοὺς οἰόμεθα ὅλως οὐ κατὰ μέρος οὐδ' ἄλλο τι σοφούς, ὥσπερ Ὅμηρός φησιν ἐν τῷ Μαργίτῃ (15) Tὸν δ' οὔτ' ἂρ σκαπτῆρα θεοὶ θέσαν οὔτ' ἀροτῆρα οὔτ' ἄλλως τι σοφόν. Ὥστε δῆλον ὅτι ἀκριβεστάτη ἂν τῶν ἐπιστημῶν εἴη ἡ σοφία. Δεῖ ἄρα τὸν σοφὸν μὴ μόνον τὰ ἐκ τῶν ἀρχῶν εἰδέναι, ἀλλὰ καὶ περὶ τὰς ἀρχὰς ἀληθεύειν. Ὥστ' εἴη ἂν ἡ σοφία νοῦς καὶ ἐπιστήμη, ὥσπερ κεφαλὴν ἔχουσα ἐπιστήμη (20) τῶν τιμιωτάτων. Ἄτοπον γὰρ εἴ τις τὴν πολιτικὴν ἢ τὴν φρόνησιν σπουδαιοτάτην οἴεται εἶναι, εἰ μὴ τὸ ἄριστον τῶν ἐν τῷ κόσμῳ ἄνθρωπός ἐστιν. Εἰ δὴ ὑγιεινὸν μὲν καὶ ἀγαθὸν ἕτερον ἀνθρώποις καὶ ἰχθύσι, τὸ δὲ λευκὸν καὶ εὐθὺ ταὐτὸν ἀεί, καὶ τὸ σοφὸν ταὐτὸ πάντες ἂν εἴποιεν, φρόνιμον (25) δὲ ἕτερον· τὰ γὰρ περὶ αὑτὸ ἕκαστα τὸ εὖ θεωροῦν φησὶν εἶναι φρόνιμον, καὶ τούτῳ ἐπιτρέψει αὐτά. Διὸ καὶ τῶν θηρίων ἔνια φρόνιμά φασιν εἶναι, ὅσα περὶ τὸν αὑτῶν βίον ἔχοντα φαίνεται δύναμιν προνοητικήν. Φανερὸν δὲ καὶ ὅτι οὐκ ἂν εἴη ἡ σοφία καὶ ἡ πολιτικὴ ἡ αὐτή· εἰ γὰρ (30) τὴν περὶ τὰ ὠφέλιμα τὰ αὑτοῖς ἐροῦσι σοφίαν, πολλαὶ ἔσονται σοφίαι· οὐ γὰρ μία περὶ τὸ ἁπάντων ἀγαθὸν τῶν ζῴων, ἀλλ' ἑτέρα περὶ ἕκαστον, εἰ μὴ καὶ ἰατρικὴ μία περὶ πάντων τῶν ὄντων. Εἰ δ' ὅτι βέλτιστον ἄνθρωπος τῶν ἄλλων ζῴων, οὐδὲν διαφέρει· καὶ γὰρ ἀνθρώπου ἄλλα πολὺ θειότερα τὴν φύσιν, (1141b) (1) οἷον φανερώτατά γε ἐξ ὧν ὁ κόσμος συνέστηκεν. Ἐκ δὴ τῶν εἰρημένων δῆλον ὅτι ἡ σοφία ἐστὶ καὶ ἐπιστήμη καὶ νοῦς τῶν τιμιωτάτων τῇ φύσει. Διὸ Ἀναξαγόραν καὶ Θαλῆν καὶ τοὺς τοιούτους σοφοὺς μὲν φρονίμους (5) δ' οὔ φασιν εἶναι, ὅταν ἴδωσιν ἀγνοοῦντας τὰ συμφέροντα ἑαυτοῖς, καὶ περιττὰ μὲν καὶ θαυμαστὰ καὶ χαλεπὰ καὶ δαιμόνια εἰδέναι αὐτούς φασιν, ἄχρηστα δ', ὅτι οὐ τὰ ἀνθρώπινα ἀγαθὰ ζητοῦσιν. Ἡ δὲ φρόνησις περὶ τὰ ἀνθρώπινα καὶ περὶ ὧν ἔστι βουλεύσασθαι· τοῦ γὰρ φρονίμου (10) μάλιστα τοῦτ' ἔργον εἶναί φαμεν, τὸ εὖ βουλεύεσθαι, βουλεύεται δ' οὐδεὶς περὶ τῶν ἀδυνάτων ἄλλως ἔχειν, οὐδ' ὅσων μὴ τέλος τι ἔστι, καὶ τοῦτο πρακτὸν ἀγαθόν. Ὁ δ' ἁπλῶς εὔβουλος ὁ τοῦ ἀρίστου ἀνθρώπῳ τῶν πρακτῶν στοχαστικὸς κατὰ τὸν λογισμόν. Οὐδ' ἐστὶν ἡ φρόνησις τῶν (15) καθόλου μόνον, ἀλλὰ δεῖ καὶ τὰ καθ' ἕκαστα γνωρίζειν· πρακτικὴ γάρ, ἡ δὲ πρᾶξις περὶ τὰ καθ' ἕκαστα. Διὸ καὶ ἔνιοι οὐκ εἰδότες ἑτέρων εἰδότων πρακτικώτεροι, καὶ ἐν τοῖς ἄλλοις οἱ ἔμπειροι· εἰ γὰρ εἰδείη ὅτι τὰ κοῦφα εὔπεπτα κρέα καὶ ὑγιεινά, ποῖα δὲ κοῦφα ἀγνοοῖ, οὐ ποιήσει ὑγίειαν, (20) ἀλλ' ὁ εἰδὼς ὅτι τὰ ὀρνίθεια (κοῦφα καὶ) ὑγιεινὰ ποιήσει μᾶλλον. Ἡ δὲ φρόνησις πρακτική· ὥστε δεῖ ἄμφω ἔχειν, ἢ ταύτην μᾶλλον. Εἴη δ' ἄν τις καὶ ἐνταῦθα ἀρχιτεκτονική. VIII. Ἔστι δὲ καὶ ἡ πολιτικὴ καὶ ἡ φρόνησις ἡ αὐτὴ μὲν ἕξις, τὸ μέντοι εἶναι οὐ ταὐτὸν αὐταῖς. Τῆς δὲ περὶ (25) πόλιν ἣ μὲν ὡς ἀρχιτεκτονικὴ φρόνησις νομοθετική, ἣ δὲ ὡς τὰ καθ' ἕκαστα τὸ κοινὸν ἔχει ὄνομα, πολιτική· αὕτη δὲ πρακτικὴ καὶ βουλευτική· τὸ γὰρ ψήφισμα πρακτὸν ὡς τὸ ἔσχατον. Διὸ πολιτεύεσθαι τούτους μόνον λέγουσιν· μόνοι γὰρ πράττουσιν οὗτοι ὥσπερ οἱ χειροτέχναι. Δοκεῖ (30) δὲ καὶ φρόνησις μάλιστ' εἶναι ἡ περὶ αὐτὸν καὶ ἕνα· καὶ ἔχει αὕτη τὸ κοινὸν ὄνομα, φρόνησις· ἐκείνων δὲ ἣ μὲν οἰκονομία ἣ δὲ νομοθεσία ἣ δὲ πολιτική, καὶ ταύτης ἣ μὲν βουλευτικὴ ἣ δὲ δικαστική. Εἶδος μὲν οὖν τι ἂν εἴη γνώσεως τὸ αὑτῷ εἰδέναι· ἀλλ' ἔχει διαφορὰν πολλήν·

Traduction française :

[6,1141] En effet, ce qu'on peut savoir peut être démontré; (1141a) mais l'art et la prudence ne se rapportent qu'a ce qui peut être autrement qu'il n'est. La sagesse ne se rapporte pas non plus à ce qui est de ce dernier genre, car il doit y avoir des choses que le sage soit en état de démontrer. Or, si les facultés à l'aide desquelles nous saisissons la vérité, et nous pouvons constamment nous garantir de l'erreur, tant par rapport aux choses qui ne sauraient être autrement, qu'a l'égard de celles qui peuvent être autrement, sont la science, la prudence, la sagesse et l'intelligence; et si, entre ces facultés, il y en a trois, la science, la prudence, et la sagesse, dont aucune ne peut être celle que nous cherchons, il reste donc que c'est l'intelligence à qui appartient la conception des principes. VII. Pour ce qui est de l'habileté, nous l'attribuons surtout à ceux qui pratiquent les arts avec le plus de perfection : c'est ainsi que nous appelons Phidias un habile sculpteur, et Polyclète un statuaire habile; et, dans ce cas, nous ne désignons, par le mot habileté, que la perfection ou le mérite de l'art. Cependant, il y a des hommes que nous regardons comme habiles dans un sens général et absolu, et non pas dans quelque genre en particulier; en un mot, que nous appelons simplement et généralement habiles, comme s'exprime Homère dans le Margitès : « Les dieux n'en avaient fait ni un cultivateur, ni un laboureur, ni un homme habile en quoi que ce soit. » D'où il suit évidemment que l'habileté ou la sagesse (g-sophia) pourrait être regardée comme le plus haut point de précision ou de perfection dans les sciences. Il faut donc que le sage (l'homme habile par excellence), non seulement connaisse les conséquences qui dérivent des principes, mais aussi qu'il sache la vérité des principes. En sorte que la sagesse serait l'intelligence et la science, et que sa partie capitale ou fondamentale serait la connaissance de ce qu'il y a de plus noble et de plus sublime. En effet, il y aurait peu de raison à considérer la politique, ou la prudence, comme la plus importante des sciences, si l'homme n'était pas ce qu'il y a de plus excellent dans l'univers. Si donc ce qui est sain et avantageux pour les hommes diffère de ce qui l'est pour les poissons, tandis que ce qui est blanc ou droit est toujours blanc ou droit, tout le monde conviendra que ce qui est sage est toujours sage, au lieu que ce qui est prudent en de certains cas, ne l'est pas dans d'autres. Car on ne saurait nier que le propre de la prudence ne soit de bien juger de chaque objet par rapport à nous, et l'on accorde volontiers de la confiance aux hommes qui ont cet avantage. Voilà pourquoi l'on attribue la prudence à ceux d'entre les animaux qui manifestent quelque faculté de prévoyance dans tout ce qui intéresse leur vie. Mais il est facile de voir que la sagesse n'est pas la même chose que la politique ; car si l'on veut appeler sagesse le discernement de ce qui nous est utile, il y aura bien des sortes de sagesse. En effet, discerner ce qui est avantageux a tous les animaux, n'est pas le résultat d'une seule et même prudence ou connaissance, mais celui d'un jugement différent pour chaque animal ; autrement, il faudrait dire qu'il n'y a qu'une seule médecine pour tous les êtres animés. Et il ne sert de rien de dire que l'homme est le plus excellent de tous les animaux; car il y a bien d'autres êtres d'une nature plus divine que celle de l'homme : (1141b) tels sont, par exemple, les corps les plus apparents dont le monde est composé. Il suit donc évidemment de tout ce que nous venons de dire, que la sagesse, la science et l'intelligence sont ce qu'il y a naturellement de plus précieux et de plus digne d'admiration. Aussi a-t-on appelé sages un Anaxagoras, un Thalès, et ceux qui leur ressemblent; mais on ne les nommait pas prudents, lorsqu'on les voyait ignorants de tout ce qui leur était utile; et l'on dit qu'ils savaient un grand nombre de choses mystérieuses, merveilleuses, difficiles et divines, mais inutiles, parce qu'ils ne cherchaient pas les biens purement humains. Mais la prudence est relative aux choses humaines, et sur lesquelles il est possible de délibérer; car ce que nous regardons comme la tache de l'homme prudent, c'est de délibérer comme il convient. Or, personne ne délibère sur des choses qui ne sauraient être autrement quelles ne sont, ni sur celles qui ne peuvent avoir un résultat, un but qu'on puisse atteindre et qui soit avantageux. En général, celui qui a le talent des bonnes résolutions est celui qui arrive, par le raisonnement, au résultat le plus avantageux à l'homme dans tout ce qui est exécutable. D'ailleurs, la prudence ne s'applique pas seulement aux choses générales : elle exige aussi une parfaite connaissance des détails ; car c'est une vertu pratique, et la pratique s'applique surtout aux détails. Aussi y a-t-il des gens qui, sans aucunes connaissances, sont plus propres à l'action que d'autres qui sont plus instruits qu'eux; et, parmi les autres hommes, ceux qui ont de l'expérience sont dans le même cas. En effet, on a beau savoir que les viandes légères sont saines et de facile digestion, si l'on ne sait pas quelles sont ces viandes légères, on ne guérira pas un malade; mais celui qui saura que c'est la chair des oiseaux qui est légère et saine, y réussira mieux. Or, la prudence est une qualité éminemment pratique, en sorte qu'il faut posséder les deux parties (connaissance des choses générales, et connaissance des détails), et plus particulièrement la dernière. Il semble donc que ce soit encore ici une sorte d'art architectonique (propre à diriger ceux qui lui sont subordonnés). VIII. La prudence et la politique sont, à vrai dire, une même habitude ou disposition d'esprit; mais elles n'ont pas la même nature ou la même essence. Cependant, à l'égard de la société civile, la prudence qui en dirige les ressorts, comme science principale (architectonique), c'est la législation ; et celle qui préside aux détails de l'administration, conserve le nom commun de politique. Elle est proprement pratique et délibérative ; car un décret s'applique à ce qui doit s'exécuter immédiatement, comme chose définitivement résolue. Voilà pourquoi on dit que ceux qui rendent les décrets sont de fait ceux qui gouvernent; car ce sont eux qui exécutent, comme les ouvriers ou manouvriers. Il semble pourtant que la prudence est communément considérée comme relative à un seul et même individu ; mais ce mot s'étend aussi à l'économie, à la législation, à la politique, laquelle se divise même eu deux espèces, délibérative et judiciaire.





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Dernière mise à jour : 22/05/2008