Texte grec :
[4,1128] (1128a) (1) καὶ οἷα δεῖ λέγειν καὶ ὥς, ὁμοίως δὲ καὶ ἀκούειν.
Διοίσει δὲ καὶ τὸ ἐν τοιούτοις λέγειν ἢ τοιούτων ἀκούειν.
Δῆλον δ᾽ ὡς καὶ περὶ ταῦτ᾽ ἔστιν ὑπερβολή τε
καὶ ἔλλειψις τοῦ μέσου. Οἱ μὲν οὖν τῷ γελοίῳ ὑπερβάλλοντες βωμολόχοι (5)
δοκοῦσιν εἶναι καὶ φορτικοί, γλιχόμενοι πάντως τοῦ γελοίου, καὶ μᾶλλον
στοχαζόμενοι τοῦ γέλωτα ποιῆσαι ἢ τοῦ λέγειν εὐσχήμονα καὶ μὴ λυπεῖν τὸν
σκωπτόμενον· οἱ δὲ μήτ᾽ αὐτοὶ ἂν εἰπόντες μηδὲν γελοῖον τοῖς τε λέγουσι
δυσχεραίνοντες ἄγροικοι καὶ σκληροὶ δοκοῦσιν εἶναι. Οἱ δ᾽ ἐμμελῶς (10)
παίζοντες εὐτράπελοι προσαγορεύονται, οἷον εὔτροποι· τοῦ γὰρ ἤθους αἱ
τοιαῦται δοκοῦσι κινήσεις εἶναι, ὥσπερ δὲ τὰ σώματα ἐκ τῶν κινήσεων
κρίνεται, οὕτω καὶ τὰ ἤθη.
Ἐπιπολάζοντος δὲ τοῦ γελοίου, καὶ τῶν πλείστων χαιρόντων τῇ παιδιᾷ καὶ τῷ
σκώπτειν μᾶλλον ἢ δεῖ, καὶ οἱ βωμολόχοι (15) εὐτράπελοι προσαγορεύονται ὡς
χαρίεντες· ὅτι δὲ διαφέρουσι, καὶ οὐ μικρόν, ἐκ τῶν εἰρημένων δῆλον. Τῇ
μέσῃ δ᾽ ἕξει οἰκεῖον καὶ ἡ ἐπιδεξιότης ἐστίν· τοῦ δ᾽ ἐπιδεξίου ἐστὶ
τοιαῦτα λέγειν καὶ ἀκούειν οἷα τῷ ἐπιεικεῖ καὶ ἐλευθερίῳ ἁρμόττει· ἔστι
γάρ τινα πρέποντα τῷ τοιούτῳ λέγειν ἐν (20) παιδιᾶς μέρει καὶ ἀκούειν, καὶ
ἡ τοῦ ἐλευθερίου παιδιὰ διαφέρει τῆς τοῦ ἀνδραποδώδους, καὶ πεπαιδευμένου
καὶ ἀπαιδεύτου. Ἴδοι δ᾽ ἄν τις καὶ ἐκ τῶν κωμῳδιῶν τῶν παλαιῶν καὶ τῶν
καινῶν· τοῖς μὲν γὰρ ἦν γελοῖον ἡ αἰσχρολογία, τοῖς δὲ μᾶλλον ἡ ὑπόνοια·
διαφέρει δ᾽ οὐ μικρὸν ταῦτα (25) πρὸς εὐσχημοσύνην.
Πότερον οὖν τὸν εὖ σκώπτοντα ὁριστέον τῷ λέγειν μὴ ἀπρεπῆ ἐλευθερίῳ, ἢ τῷ
μὴ λυπεῖν τὸν ἀκούοντα ἢ καὶ τέρπειν; Ἢ καὶ τό γε τοιοῦτον ἀόριστον; Ἄλλο
γὰρ ἄλλῳ μισητόν τε καὶ ἡδύ. Τοιαῦτα δὲ καὶ ἀκούσεται· ἃ γὰρ ὑπομένει
ἀκούων, ταῦτα καὶ ποιεῖν δοκεῖ.
Οὐ δὴ πᾶν ποιήσει· (30) τὸ γὰρ σκῶμμα λοιδόρημά τι ἐστίν, οἱ δὲ νομοθέται
ἔνια λοιδορεῖν κωλύουσιν· ἔδει δ᾽ ἴσως καὶ σκώπτειν. Ὁ δὴ χαρίεις καὶ
ἐλευθέριος οὕτως ἕξει, οἷον νόμος ὢν ἑαυτῷ. Τοιοῦτος μὲν οὖν ὁ μέσος
ἐστίν, εἴτ᾽ ἐπιδέξιος εἴτ᾽ εὐτράπελος λέγεται.
Ὁ δὲ βωμολόχος ἥττων ἐστὶ τοῦ γελοίου, καὶ οὔτε ἑαυτοῦ οὔτε (35) τῶν ἄλλων
ἀπεχόμενος εἰ γέλωτα ποιήσει, καὶ τοιαῦτα λέγων (1128b) (1) ὧν οὐδὲν ἂν
εἴποι ὁ χαρίεις, ἔνια δ᾽ οὐδ᾽ ἂν ἀκούσαι. Ὁ δ᾽ ἄγροικος εἰς τὰς τοιαύτας
ὁμιλίας ἀχρεῖος· οὐθὲν γὰρ συμβαλλόμενος πᾶσι δυσχεραίνει. Δοκεῖ δὲ ἡ
ἀνάπαυσις καὶ ἡ παιδιὰ ἐν τῷ βίῳ εἶναι ἀναγκαῖον.
Τρεῖς οὖν αἱ εἰρημέναι (5) ἐν τῷ βίῳ μεσότητες, εἰσὶ δὲ πᾶσαι περὶ λόγων
τινῶν καὶ πράξεων κοινωνίαν. Διαφέρουσι δ᾽ ὅτι ἣ μὲν περὶ ἀλήθειάν ἐστιν,
αἳ δὲ περὶ τὸ ἡδύ. Τῶν δὲ περὶ τὴν ἡδονὴν ἣ μὲν ἐν ταῖς παιδιαῖς, ἣ δ᾽ ἐν
ταῖς κατὰ τὸν ἄλλον βίον ὁμιλίαις.
XI. (10) περὶ δὲ αἰδοῦς ὥς τινος ἀρετῆς οὐ προσήκει λέγειν· πάθει γὰρ
μᾶλλον ἔοικεν ἢ ἕξει. Ὁρίζεται γοῦν φόβος τις ἀδοξίας, καὶ ἀποτελεῖται τῷ
περὶ τὰ δεινὰ φόβῳ παραπλήσιον· ἐρυθραίνονται γὰρ οἱ αἰσχυνόμενοι, οἱ δὲ
τὸν θάνατον φοβούμενοι ὠχριῶσιν. Σωματικὰ δὴ φαίνεταί πως εἶναι (15)
ἀμφότερα, ὅπερ δοκεῖ πάθους μᾶλλον ἢ ἕξεως εἶναι.
Οὐ πάσῃ δ᾽ ἡλικίᾳ τὸ πάθος ἁρμόζει, ἀλλὰ τῇ νέᾳ. Οἰόμεθα γὰρ δεῖν τοὺς
τηλικούτους αἰδήμονας εἶναι διὰ τὸ πάθει ζῶντας πολλὰ ἁμαρτάνειν, ὑπὸ τῆς
αἰδοῦς δὲ κωλύεσθαι· καὶ ἐπαινοῦμεν τῶν μὲν νέων τοὺς αἰδήμονας,
πρεσβύτερον δ᾽ (20) οὐδεὶς ἂν ἐπαινέσειεν ὅτι αἰσχυντηλός· οὐδὲν γὰρ
οἰόμεθα δεῖν αὐτὸν πράττειν ἐφ᾽ οἷς ἐστὶν αἰσχύνη. Οὐδὲ γὰρ ἐπιεικοῦς
ἐστὶν ἡ αἰσχύνη, εἴπερ γίνεται ἐπὶ τοῖς φαύλοις (οὐ γὰρ πρακτέον τὰ
τοιαῦτα· εἰ δ᾽ ἐστὶ τὰ μὲν κατ᾽ ἀλήθειαν αἰσχρὰ τὰ δὲ κατὰ δόξαν, οὐδὲν
διαφέρει· οὐδέτερα γὰρ πρακτέα, (25) ὥστ᾽ οὐκ αἰσχυντέον)· φαύλου δὲ καὶ
τὸ εἶναι τοιοῦτον οἷον πράττειν τι τῶν αἰσχρῶν.
Τὸ δ᾽ οὕτως ἔχειν ὥστ᾽ εἰ πράξαι τι τῶν τοιούτων αἰσχύνεσθαι, καὶ διὰ
τοῦτ᾽ οἴεσθαι ἐπιεικῆ εἶναι, ἄτοπον· ἐπὶ τοῖς ἑκουσίοις γὰρ ἡ αἰδώς, ἑκὼν
δ᾽ ὁ ἐπιεικὴς οὐδέποτε πράξει τὰ φαῦλα. Εἴη δ᾽ ἂν ἡ αἰδὼς ἐξ (30)
ὑποθέσεως ἐπιεικές· εἰ γὰρ πράξαι, αἰσχύνοιτ᾽ ἄν· οὐκ ἔστι δὲ τοῦτο περὶ
τὰς ἀρετάς. Εἰ δ᾽ ἡ ἀναισχυντία φαῦλον καὶ τὸ μὴ αἰδεῖσθαι τὰ αἰσχρὰ
πράττειν, οὐδὲν μᾶλλον τὸν τὰ τοιαῦτα πράττοντα αἰσχύνεσθαι ἐπιεικές. Οὐκ
ἔστι δ᾽ οὐδ᾽ ἡ ἐγκράτεια ἀρετή, ἀλλά τις μικτή· δειχθήσεται δὲ περὶ (35)
αὐτῆς ἐν τοῖς ὕστερον.
Νῦν δὲ περὶ δικαιοσύνης εἴπωμεν.
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Traduction française :
[4,1128] (1128a) qui consiste à ne dire et à n'entendre que
des choses convenables, et à les dire comme il convient ; et nécessairement aussi
il faudra distinguer ces deux sortes de convenances, relatives, l'une à ce qu'on doit
dire, et l'autre à ce qu'on doit entendre; et par conséquent il y aura aussi, en ce
genre, un excès et un défaut, par rapport au juste milieu. En effet, ceux qui portent
jusqu'à l'excès la manie de plaisanter, sont généralement regardés comme des
bouffons insupportables, qui ne cherchent que les occasions de faire rire les autres,
et qui d'ailleurs ne s'inquiètent guère de dire des choses inconvenantes, ou propres
à affliger celui qui est l'objet de leurs plaisanteries. Et, d'un autre côté, ceux qui ne
savent jamais rien dire de plaisant, et qui s'irritent des moindres railleries, passent
pour des hommes sauvages, et d'une humeur farouche; au lieu qu'on appelle gens
d'un commerce agréable et facile, ceux dont les plaisanteries n'ont jamais rien de
choquant. Car il y a une sorte de souplesse et de flexibilité, qui caractérise les
mœurs, comme il y en a une qui caractérise les mouvements du corps.
Cependant, comme il n'y a rien de si commun que la plaisanterie, et que la
plupart des hommes aiment à railler plus qu'il ne faudrait, il arrive souvent que la
bouffonnerie passe sous le nom d'humeur agréable et gaie, quoiqu'elle en diffère
beaucoup, ainsi qu'on peut le voir par ce que nous venons de dire. Mais c'est dans
un juste milieu en ce genre que consiste proprement le talent de la plaisanterie.
L'homme qui a ce caractère, ne consent à dire ou à entendre que des choses qui
ne sont contraires ni à la décence, ni à l'élévation et à la dignité d'une personne
libre; car il y a en effet des choses qu'une telle personne peut entendre ou dire en
plaisantant, et les railleries d'un homme libre et bien élevé ne ressemblent en
aucune façon à celles d'un homme servile, et sans éducation. C'est ce dont on se
convaincra en comparant l'ancienne comédie avec la nouvelle; car dans l'une
on trouve souvent des plaisanteries exprimées dans un langage obscène; au lieu
que, dans l'autre, les mêmes idées sont plus généralement indiquées par des
allusions fines, ce qui fait assurément une très grande différence, par rapport à la
décence.
Faut-il donc définir la raillerie permise et convenable, en disant qu'elle consiste
à ne dire que ce qui est digne d'un homme libre ; ou à ne pas affliger celui à qui elle
s'adresse, mais au contraire à lui plaire? ou ne vaut-il pas mieux renoncer à définir
ce juste milieu dont nous parlons ? Car les mêmes choses ne sont pas agréables
ou odieuses à tout le monde. Au reste, on entendra sans peine ce qu'on dira sans
scrupule, et même on est porté à croire qu'un homme ne craindra pas de faire ce
qu'il ne craint pas d'entendre dire.
Il ne faut donc pas se permettre de tout dire: car toute raillerie a quelque
chose qui tient de l'outrage; or, il y a des paroles outrageantes, que les législateurs
eux-mêmes ont cru devoir interdire, et peut-être cette interdiction devrait-elle
s'étendre à certaines railleries. L'homme libre, et qui a un sentiment délicat des
convenances, sera donc à lui-même son propre législateur en ce genre. Tel est le
juste milieu dans lequel il devra se tenir, soit qu'on lui donne le nom de facétieux,
ou qu'on l'appelle homme d'une agréable humeur.
Quant au bouffon, il ne sait pas résister au plaisir de la raillerie, et ne
s'épargnera pas plus lui-même qu'il ne ménagera les autres, pourvu qu'il fasse rire,
fût-ce en disant des choses (1128b) que n'oserait jamais dire un homme délicat et
bien élevé, et quelquefois des choses que celui-ci n'entendrait pas sans dégoût.
Mais l'homme d'une humeur austère et farouche, est tout-à-fait étranger au plaisir
d'un pareil commerce; car, ne voulant y contribuer en rien, il se choque et s'irrite de
tout. Il semble pourtant qu'il faut, dans la vie, un peu de relâche et d'amusement.
Il y a donc, dans le commerce du monde et de la société, un milieu, à l'égard
des trois sortes d'habitudes dont nous avons parlé, et qui toutes se rapportent
à des discours et à des actions auxquelles ce commerce peut donner lieu ; mais
elles diffèrent en ce que l'une regarde la vérité, et les deux autres le plaisir ou
l'agrément. Entre ces dernières, l'une est plus particulièrement relative aux
divertissements, et l'autre, aux autres circonstances de la vie sociale.
IX. Pour ce qui regarde la pudeur, on n'en peut guère parler comme d'une
vertu ; car elle semble plutôt être une passion, une affection fugitive, qu'une
habitude morale. Aussi peut-on la définir une sorte de crainte du déshonneur. Et,
en effet, elle a beaucoup de ressemblance avec la crainte que cause un danger
imminent; car ceux qui éprouvent de la honte rougissent, et la crainte de la mort se
manifeste par une pâleur subite. Or, ces deux affections, en quelque sorte
purement corporelles, semblent indiquer un sentiment plutôt qu'une habitude.
Au reste, ce sentiment ne convient pas à tous les âges, mais seulement à la
jeunesse, parce qu'à cette époque de la vie, l'homme étant exposé à faire
beaucoup de fautes, par l'entraînement des passions, on suppose que la pudeur
est un frein propre à le retenir. C'est pourquoi on loue les jeunes gens qui ont de la
pudeur; au lieu que personne ne loue un homme avancé en âge, pour être disposé
à rougir de tout ; car on pense qu'il ne doit rien faire qui puisse lui causer de la
honte, puisque si les mauvaises actions peuvent seules faire naître
ce sentiment, il ne convient pas à un honnête homme de l'éprouver, car il ne doit
rien faire qui puisse y donner lieu. Et peu importe qu'il y ait des choses
véritablement honteuses, et d'autres qui ne le sont que dans l'opinion, car il ne faut
faire ni les unes ni les autres, afin de n'avoir point à rougir de sa conduite.
D'ailleurs, il n'y a qu'un homme vil et méprisable qui puisse commettre des actions
honteuses : or, être capable de commettre de pareilles actions, en rougir, et
s'imaginer qu'à cause de cela on est un homme de bien, c'est une absurdité : car
on ne peut avoir honte que des actions volontaires, et jamais un homme de bien
n'en fera volontairement de mauvaises.
Toutefois, on suppose généralement, ou l'on peut admettre dans certains cas,
que la pudeur est un sentiment estimable ; car s'il arrive à l'honnête homme de faire
quelque action répréhensible, il en éprouvera de la honte ; mais, encore une fois,
ce sentiment n'a rien de commun avec la vertu. Et si l'impudence, qui fait qu'on ne
rougit pas de commettre des actions honteuses, est une chose odieuse et vile ;
rougir de les avoir commises, n'en sera pas plus une chose estimable. De même la
tempérance n'est pas une vertu; c'est une façon
d'agir, ou une disposition, pour ainsi dire, mixte; mais j'aurai occasion d'en traiter
dans la suite. Parlons maintenant de la justice.
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